LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 24 mars 2009), qu'un accident de la circulation s'est produit, en Espagne, impliquant un camion appartenant à la société Transports Bonnet, affrété par la société Transports Graveleau (la société Graveleau), et un véhicule assuré auprès de la société Hilo Direct Seguros Y Reaseguros (la société Hilo) ; que la cargaison a été détruite ; que la société Graveleau et ses assureurs ayant assigné la société Bonnet et son assureur ainsi que la société Hilo en réparation du préjudice subi par les propriétaires de la cargaison, un jugement a condamné la société Hilo à verser une certaine somme à la société Graveleau et à ses assureurs ;
Attendu que la société Graveleau et ses assureurs font grief à l'arrêt d'annuler le jugement et de les renvoyer à mieux se pourvoir, alors, selon le moyen, que la nullité de forme ne peut sanctionner une irrégularité entachant une assignation délivrée à une partie lorsque cette partie a eu connaissance de l'acte litigieux et de la procédure subséquente ; que dans leurs conclusions d'appel, la société Graveleau et ses assureurs avaient clairement fait valoir que la société de droit espagnol Hilo avait eu connaissance certaine de l'assignation litigieuse et du jugement rendu, ce qui résultait de sa déclaration d'appel de cette décision avant même la signification intervenue sept mois plus tard conformément aux dispositions du règlement communautaire 1348/2000 ; qu'en affirmant que l'irrégularité entachant les conditions d'introduction de l'instance, faute de démonstration de la notification régulière de l'assignation à cette société, entraînait la nullité du jugement rendu dans de telles conditions, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était clairement demandé, si la société Hilo n'avait pas eu connaissance de la procédure comme le faisait présumer sa déclaration d'appel du jugement avant même sa signification, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 114, 469 du code de procédure civile et 19 § 1er du règlement communautaire 1348/2000 ;
Mais attendu que le fait que la société Hilo ait fait appel du jugement avant qu'il lui ait été signifié étant insuffisant à prouver que cette société avait eu connaissance de l'assignation en temps utile pour assurer sa défense, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à d'autres recherches, a souverainement jugé que l'irrégularité de l'assignation de la défenderesse lui avait fait grief, en l'empêchant de présenter sa défense devant le premier juge ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Graveleau et les six autres demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Graveleau et des six autres demandeurs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Odent, avocat de la société Graveleau et des six autres demandeurs.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé jugement qui avait condamné la société HILO DIRECT SEGUROS Y REASEGUROS, assureur d'une voiture impliquée dans un accident de la circulation, à payer à la société GRAVELEAU, transporteur de la cargaison détruite dans cet accident, et à ses assureurs la somme totale de 133.459,87 € et d'avoir renvoyé les demanderesses à mieux se pourvoir
AUX MOTIFS QUE l'article 19 du règlement 1348/2000, repris au règlement 1393/2007, intitulé « défendeur non comparant », prévoit encore que «lorsqu'un acte introductif d'instance ou un acte équivalent a dû être transmis dans un autre Etat membre aux fins de signification ou de notification selon les dispositions du présent règlement et que le défendeur ne comparaît pas, le juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu'il n'est pas établi ou bien que l'acte a été signifié ou notifié selon les formes prescrites par la législation de l'Etat membre requis pour la signification ou la notification des actes dressés dans ce pays et qui sont destinés aux personnes se trouvant sur son territoire ou bien que l'acte a été effectivement remis au défendeur ou à sa résidence selon un autre mode prévu par le présent règlement et que, dans chacune de ces éventualités, soit la signification ou la notification, soit la remise a eu lieu en temps utile pour que le défendeur ait pu se défendre » ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que, si les autorités espagnoles compétentes ont été destinataires de l'assignation transmise par la SCP VERBE BLOT CACHET LAURENDEAU, en revanche, il n'est pas établi que le tribunal de grande instance se soit assuré que l'acte avait été remis à son destinataire, puis ait entrepris une quelconque démarche auprès des autorités espagnoles, alors qu'il aurait dû, en raison de la défaillance de la société HILO DIRECT SEGUROS Y REASEGUROS, qui n'avait pas constitué avocat, surseoir à statuer dans les conditions de l'article 19 § 1 du Règlement communautaire 1348/2000 du 29 mai 2000 ; que le jugement rendu dans de telles conditions doit être déclaré nul, l'irrégularité affectant les conditions d'introduction de l'instance faisant manifestement grief à la société défenderesse qui n'en a pas été le destinataire et qui n'a pu présenter aucune défense devant les premiers juges ;
ALORS QUE la nullité de forme ne peut sanctionner une irrégularité entachant une assignation délivrée à une partie lorsque cette partie a euconnaissance de l'acte litigieux et de la procédure subséquente ; que dans leurs conclusions d'appel, la société GRAVELEAU et ses assureurs avaient clairement fait valoir que la société de droit espagnol HILO DIRECT SEGUROS Y REASEGUROS avait eu connaissance certaine de l'assignation litigieuse et du jugement rendu, ce qui résultait de sa déclaration d'appel de cette décision avant même la signification intervenue sept mois plus tard conformément aux dispositions du règlement communautaire 1348/2000 ; qu'en affirmant que l'irrégularité entachant les conditions d'introduction de l'instance, faute de démonstration de la notification régulière de l'assignation à cette société, entraînait la nullité du jugement rendu dans de telles conditions, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était clairement demandé, si la société HILO DIRECT SEGUROS Y REASEGUROS n'avait pas eu connaissance de la procédure comme le faisait présumer sa déclaration d'appel du jugement avant même sa signification, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 114, 469 du code de procédure civile et 19 § let du règlement communautaire 1348/2000.