LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 février 2009), que Mme X..., associée à proportion de moitié du capital social dans les sociétés civiles immobilières Rokhe et Rockhe B (les SCI) dont M. Y..., son mari, était gérant et porteur de l'autre moitié des parts, a cédé les siennes à Mme A...-B..., sa mère ; qu'après le décès de Mme X..., M. Y... a assigné, en présence de l'administrateur ad hoc de leur fils mineur, Mme A...-B... en annulation de ces cessions pour défaut d'agrément de la gérance ou de la collectivité des associés ;
Attendu que M. Y... et les SCI font grief à l'arrêt de rejeter cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 13, alinéa 2, des statuts de la société civile immobilière dénommée SCI Rokhe il était stipulé " Les parts sont librement cessibles entre associés. Elles peuvent être cédées à des tiers étrangers à la société qu'avec le consentement de la gérance " ; qu'il résultait de ces stipulations dénuées de toute équivoque qu'exceptée la cession de parts entre associés, toute autre cession était subordonnée au consentement de la gérance ; qu'en énonçant que " les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe de l'article 1861 du code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants ", la cour d'appel a dénaturé l'article 13 des statuts de la SCI Rokhe et a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'aux termes de l'article 13 des statuts de la société civile immobilière dénommée SCI Rokhe B il était stipulé : " Les parts sont librement cessibles entre associés " ; qu'il était ajouté aux termes de l'article 14, alinéa premier, de ces mêmes statuts que " toutes autres cessions n'interviennent (sic) qu'avec l'agrément de la collectivité des associés, donné par décision de nature extraordinaire " ; qu'il résultait de ces stipulations dénuées de toute équivoque qu'exceptées les cessions de parts entre associés, librement cessibles ou transmissibles, " toutes autres cessions " étaient subordonnées à la procédure d'agrément préalable ; qu'en énonçant que " les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe de l'article 1861 du code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants ", la cour d'appel a dénaturé les articles 13 et 14 des statuts de la SCI Rokhe B et a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant, sauf disposition contraire des statuts ; que ces dispositions contraires n'étant soumises à aucun formalisme, l'exigence d'un agrément en cas de cessions de parts consenties à des ascendants ou descendants du cédant peut résulter d'une clause générale des statuts soumettant à agrément toutes cessions de parts autres que les cessions entre associés ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'aux termes des statuts de la société civile immobilière Rokhe, les parts étaient librement cessibles entre associés mais qu'elles ne pouvaient être cédées " à des tiers étrangers à la société " qu'avec le consentement de la gérance ; qu'en énonçant néanmoins que la cession de parts sociales conclue le 15 mars 2004 entre Mme Jasmine X... et Mme Khédidia A..., veuve B..., mère de la cédante, n'était subordonnée à aucun agrément alors même que la stipulation précitée constituait la disposition contraire visée à l'article 1861, alinéa 2, du code civil, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;
4°/ que ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant, sauf dispositions contraires des statuts ; que ces dispositions contraires n'étant soumises à aucun formalisme, l'exigence d'un agrément en cas de cessions de parts consenties à des ascendants ou descendants du cédant peut résulter d'une clause générale des statuts soumettant à agrément toutes cessions de parts autres que les cessions entre associés ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'aux termes des statuts de la SCI Rokhe B, les parts étaient librement cessibles entre associés, mais que " toutes autres cessions " étaient subordonnées à " l'agrément de la collectivité des associés " ; qu'en énonçant néanmoins que la cession de parts sociales conclue le 18 mars 2004 entre Mme Jasmine X... et Mme Khédidja A..., veuve B..., mère de la cédante, n'était subordonnée à aucun agrément alors même que la stipulation précitée constituait la disposition contraire visée à l'article 1861, alinéa 2, du code civil, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;
Mais attendu qu'interprétant les statuts des SCI, la cour d'appel a souverainement retenu, sans dénaturation, que les cessions consenties par Mme X... à Mme A...-B..., sa mère, n'étaient pas soumises à agrément ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour M. Y... et les sociétés Rokhe et Rokhe B
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Jean-Marie Y... de sa demande aux fins de voir annuler la cession de parts sociales de la S. C. I. Rokhe conclue le 15 mars 2004 entre Mme Jasmine B...épouse Y... et Mme Khedidja A..., veuve B..., Aux motifs que l'article 1861 du code civil pose deux principes selon lesquels les parts sociales ne peuvent être cédées qu'avec l'agrément de tous les associés, sauf la faculté pour les statuts d'y déroger suivant certaines modalités définies à l'alinéa 2 et les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant ne sont pas soumises à agrément, faculté étant néanmoins donnée d'y déroger dans les statuts par une disposition contraire ; que Mme B...fait, à raison, valoir qu'en présence d'un principe général posé par la loi, dont l'objet (et la vocation, voulue par le législateur) est de faciliter la transmission de parts de SCI entre ascendants et descendants, toute stipulation statutaire contraire doit être expresse, claire et dépourvue d'équivoque ; qu'au cas d'espèce, en prévoyant tout au plus, après avoir posé le principe de la libre cessibilité des parts sociales entre associés, et par dérogation à celui-ci, pour l'une (la S. C. I. Rokhe) que toutes cessions « à des tiers étrangers à la société » étaient soumises au consentement de la gérance, pour l'autre (la S. C. I. Rokhe B) que « toutes autres cessions » nécessitaient l'agrément de la collectivité des associés, les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe sus énoncé de l'article 1861 du Code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants ; que le tribunal a donc à tort considéré que les cessions litigieuses étaient soumises à agrément et doit être, par suite, réformé de ce chef ; que la cour ajoute que l'absence de justification par Mme B..., dans le cadre de cette instance, du paiement intégral du prix de cession n'affecte pas la validité de la cession à l'égard des tiers, étant rappelé que, contrairement à ce qui est soutenu par M. Y..., les deux cessions lui ont été bien signifiées par huissier le 5 avril 2004, et que l'absence éventuelle de publication des cessions (que Mme B...prétend avoir effectuées sans toutefois en justifier) n'affecte pas la validité des cessions et n'a d'effet que sur leur opposabilité, en sorte que ce défaut de publication ne peut servir de fondement à une demande d'annulation ;
Alors, d'une part, qu'au termes de l'article 13, alinéa 2, des statuts de la société civile immobilière dénommée S. C. I. Rokhe il était stipulé : « Les parts sont librement cessibles entre associés. Elles peuvent être cédées à des tiers étrangers à la société qu'avec le consentement de la gérance » ; qu'il résultait de ces stipulations dénuées de toute équivoque qu'exceptée la cession de parts entre associés, toute autre cession était subordonnée au consentement de la gérance ; qu'en énonçant que « les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe de l'article 1861 du code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants », la cour d'appel a dénaturé l'article 13 des statuts de la S. C. I. Rokhe et a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, d'autre part, que ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant, sauf disposition contraire des statuts ; que ces dispositions contraires n'étant soumises à aucune formalisme, l'exigence d'un agrément en cas de cessions de parts consenties à des ascendants ou descendants du cédant peut résulter d'une clause générale des statuts soumettant à agrément toutes cessions de parts autres que les cessions entre associés ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'aux termes des statuts de la société civile immobilière Rokhe, les parts étaient librement cessibles entre associés mais qu'elles ne pouvaient être cédées « à des tiers étrangers à la société » qu'avec le consentement de la gérance ; qu'en énonçant néanmoins que la cession de parts sociales conclue le 15 mars 2004 entre Mme Jasmine Y...-B...et Mme Khédidja A..., veuve B..., mère de la cédante, n'était subordonnée à aucun agrément alors même que la stipulation précitée constituait la disposition contraire visée à l'article 1861 alinéa 2 du code civil, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Jean-Marie Y... de sa demande aux fins de voir annuler la cession de parts sociales de la S. C. I. Rokhe B conclue le 18 mars 2004 entre Mme Jasmine B...épouse Y... et Mme A..., veuve B..., Aux motifs que l'article 1861 du code civil pose deux principes selon lesquels les parts sociales ne peuvent être cédées qu'avec l'agrément de tous les associés, sauf la faculté pour les statuts d'y déroger suivant certaines modalités définies à l'alinéa 2 et les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant ne sont pas soumises à agrément, faculté étant néanmoins donnée d'y déroger dans les statuts par une disposition contraire ; que Mme B...fait, à raison, valoir qu'en présence d'un principe général posé par la loi, dont l'objet (et la vocation, voulue par le législateur) est de faciliter la transmission de parts de SCI entre ascendants et descendants, toute stipulation statutaire contraire doit être expresse, claire et dépourvue d'équivoque ; qu'au cas d'espèce, en prévoyant tout au plus, après avoir posé le principe de la libre cessibilité des parts sociales entre associés, et par dérogation à celui-ci, pour l'une (la S. C. I. Rokhe) que toutes cessions « à des tiers étrangers à la société » étaient soumises au consentement de la gérance, pour l'autre (la S. C. I. Rokhe B) que « toutes autres cessions » nécessitaient l'agrément de la collectivité des associés, les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe sus énoncé de l'article 1861 du Code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants ; que le tribunal a donc à tort considéré que les cessions litigieuses étaient soumises à agrément et doit être, par suite, réformé de ce chef ; que la cour ajoute que l'absence de justification par Mme B..., dans le cadre de cette instance, du paiement intégral du prix de cession n'affecte pas la validité de la cession à l'égard des tiers, étant rappelé que, contrairement à ce qui est soutenu par M. Y..., les deux cessions lui ont été bien signifiées par huissier le 5 avril 2004, et que l'absence éventuelle de publication des cessions (que Mme B...prétend avoir effectuées sans toutefois en justifier) n'affecte pas la validité des cessions et n'a d'effet que sur leur opposabilité, en sorte que ce défaut de publication ne peut servir de fondement à une demande d'annulation ;
Alors, d'une part, qu'au termes de l'article 13 des statuts de la société civile immobilière dénommée S. C. I. Rokhe B il était stipulé : « Les parts sont librement cessibles ou transmissibles entre associés » ; qu'il était ajouté aux termes de l'article 14, alinéa premier, de ces mêmes statuts que « toutes autres cessions n'interviennent (sic) qu'avec l'agrément de la collectivité des associés, donné par décision de nature extraordinaire » ; qu'il résultait de ces stipulations dénuées de toute équivoque qu'exceptées les cessions de parts entre associés, librement cessibles ou transmissibles, « toutes autres cessions » étaient subordonnées à la procédure d'agrément préalable ; qu'en énonçant que « les statuts ne stipulent aucune dérogation expresse et non équivoque au principe de l'article 1861 du code civil relatif aux cessions entre ascendants et descendants » la cour d'appel a dénaturé les articles 13 et 14 des statuts de la S. C. I. Rokhe B et a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, d'autre part, que ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant, sauf dispositions contraires des statuts ; que ces dispositions contraires n'étant soumises à aucun formalisme, l'exigence d'un agrément en cas de cessions de parts consenties à des ascendants ou descendants du cédant peut résulter d'une clause générale des statuts soumettant à agrément toutes cessions de parts autres que les cessions entre associés ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'aux termes des statuts de la S. C. I. Rokhe B, les parts étaient librement cessibles entre associés, mais que « toutes autres cessions » étaient subordonnées à « l'agrément de la collectivité des associés » ; qu'en énonçant néanmoins que la cession de parts conclue le 18 mars 2004 entre Mme Jasmine Y...-B...et Mme Khédidia A..., veuve B..., mère de la cédante, n'était subordonnée à aucun agrément alors même que la stipulation précitée constituait la disposition contraire visée à l'article 1861, alinéa 2, du code civil, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé.