LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1165 du code civil ;
Attendu que par acte du 14 mai 1990 a été constitué entre Mme Anna X... veuve Y..., M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... un groupement foncier agricole dénommé Groupement foncier agricole du Plan (GFA du Plan) auquel les consorts Y... ont apporté divers biens immobiliers ; qu'aux termes d'un second acte du même jour, le GFA du Plan a donné ces biens à bail rural à long terme à M. Jean-Michel Y... ; que Mme X... est décédée le 7 juillet 1996 en laissant pour lui succéder ses deux enfants, M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... ; que pour mettre fin à différentes procédures qui les opposaient, M. Francis Y..., sa fille Mme Nathalie Y..., M. Jean-Michel Y..., et ses deux fils, M. Frédéric Y... et M. Christophe Y... ont conclu le 30 juin 2004 un protocole transactionnel prévoyant l'attribution à M. Francis Y..., d'une part, et à M. Jean-Michel Y..., d'autre part, des biens dont il avait été fait apport au GFA du Plan, ainsi que d'autres biens dont ils étaient propriétaires indivis, et le versement par M. Jean-Michel Y..., d'une soulte pour tenir compte de la différence de valeur des lots ; que le notaire chargé de réaliser les formalités rendues nécessaires par le protocole a préparé un procès-verbal d'assemblée générale décidant de la liquidation du groupement foncier ainsi qu'un projet d'acte de liquidation et partage des biens en dépendant qui n'ont cependant pas été régularisés par les consorts Y... ; que M. Francis Y... et Mme Nathalie Y... ont soutenu que le protocole d'accord du 30 juin 2004 devait s'interpréter comme un acte de partage, la volonté des parties étant d'attribuer à chacune d'elles des lots libres de toute occupation, et que sa réalisation emportait de plein droit la liquidation du GFA du Plan et la fin du bail à ferme du 14 mai 1990 ; que M. Jean-Michel Y... les a assignés pour faire déclarer que le protocole transactionnel emportait de plein droit liquidation du GFA du Plan et la fin du bail à ferme consenti le 14 mai 1990 ;
Attendu que pour faire droit à cette demande l'arrêt infirmatif attaqué énonce d'abord que le « protocole de transaction» du 30 juin 2004 avait incontestablement pour but de partager entre M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... les biens qui avaient constitué le patrimoine de leurs parents, qu'ils aient été ou non apportés au GFA du Plan et que le GFA du Plan ayant pour objet la propriété, la jouissance et l'administration des biens qui lui avaient été apportés, le partage de ces biens entre M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... impliquait sa disparition ; qu'ensuite le partage des biens envisagé par l'acte du 30 juin 2004 devait être égalitaire, s'agissant d'un partage de biens successoraux sur lesquels M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... avaient des droits identiques, qu'il avait été prévu dans cet acte, pour assurer cette égalité, le paiement par M. Jean-Michel Y... d'une soulte, fixée très précisément à 60 980 euros, et qu'il ressort du projet de liquidation et de partage des biens du GFA du Plan établi par M. Z..., notaire, que les lots avaient été déterminés, s'agissant des biens du GFA du Plan, en tenant compte de leur valeur en pleine propriété ; que l'arrêt énonce ensuite que le maintien du bail rural du 14 mai 1990 entraînerait une importante dépréciation des biens attribués à M. Francis Y..., et qu'il s'ensuit que les parties ayant voulu procéder à un partage égalitaire, le «protocole de transaction» du 30 juin 2004 emporte nécessairement la fin du bail à ferme du 14 mai 1990 ;
Qu'en jugeant que cette transaction emportait nécessairement la fin du bail rural conclu entre le GFA du Plan et M. Jean-Michel Y... ainsi que la liquidation du GFA du Plan qui n'était pas partie à la transaction conclue entre les consorts Y... lesquels avaient renoncé au bénéfice du jugement du 23 mars 2000 du tribunal de grande instance de Draguignan ayant prononcé la dissolution de ce groupement, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. Francis Y... et Mme Nathalie Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour MM. Jean-Michel, Frédéric et Christophe Y....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le « protocole de transaction » du 30 juin 2004 emportait la liquidation du Groupement Foncier Agricole du PLAN et la fin du bail rural du 14 mai 1990 ;
AUX MOTIFS QUE suivant acte du 14 mai 1990, il a été constitué entre Mme Anna X... veuve Y..., M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... un groupement foncier agricole dénommé GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN auquel les consorts Y... ont apporté divers biens immobiliers; qu'aux termes d'un autre acte du 14 mai 1990, le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN a donné à titre de bail rural à long terme ces biens à M. Jean-Michel Y... ; que Mme X... est décédée le 7 juillet 1996 en laissant pour lui succéder ses deux enfants, M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... ; que pour mettre fin à différentes procédures qui les opposaient, M. Francis Y..., Mlle Nathalie Y..., M. Jean-Michel Y..., M. Frédéric Y... et M. Christophe Y... ont conclu le 30 juin 2004 un protocole transactionnel prévoyant l'attribution à M. Francis Y..., d'une part, et à M. Jean-Michel Y..., d'autre part, des biens dont il avait été fait apport au GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN, ainsi que d'autres biens dont ils étaient propriétaires indivis, et le versement par M. Jean-Michel Y..., d'une soulte pour tenir compte de la différence des lots, et prévoyant que Me Z..., notaire, serait chargé de réaliser les formalités rendues nécessaires par ce protocole ; que Me Z... a préparé un procès-verbal d'assemblée générale décidant de la liquidation du groupement foncier ainsi qu'un projet d'acte de liquidation et partage des biens en dépendant qui n'ont cependant pas été régularisés par les consorts Y... ; que M. Francis Y... et Mlle Nathalie Y... soutiennent que le protocole d'accord du 30 juin 2004 doit s'interpréter comme un acte de partage, la volonté des parties étant d'attribuer à chacune d'elles des lots libres de toute occupation, et que sa réalisation emportait de plein droit la liquidation du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN et la fin du bail à ferme du 14 mai 1990 ; que le « protocole de transaction» du 30 juin 2004 avait incontestablement pour but de partager entre M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... les biens qu'avaient constitué le patrimoine de leurs parents, qu'ils aient été ou non apporté au GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN ; que le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN ayant pour objet la propriété, la jouissance et l'administration des biens qui lui avaient été apportés, le partage de ces biens entre M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... impliquait sa disparition ; que le partage des biens envisagé par l'acte du 30 juin 2004 devait être égalitaire, s'agissant d'un partage de biens successoraux sur lesquels M. Jean-Michel Y... et M. Francis Y... avaient des droits identiques ; qu'il avait été prévu dans cet acte, pour assurer cette égalité, le paiement par M. Jean-Michel Y... d'une soulte, fixée très précisément à 60.980 Euros ; qu'il ressort du projet de liquidation et de partage des biens du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN établi par Me Z..., que les lots avaient été déterminés, s'agissant des biens du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU PLAN, en tenant compte de leur valeur en pleine propriété ; que le maintien du bail rural du 14 mai 1990 entraînerait une importante dépréciation des biens attribués à M. Francis Y... ; qu'il s'ensuit que les parties ayant voulu procéder à un partage égalitaire, le «protocole de transaction » du 30 juin 2004 emporte nécessairement la fin du bail à ferme du 14 mai 1990 ; que M. Jean-Michel Y..., M. Fréderic Y... et M. Christophe Y..., qui succombent au principal, ne peuvent prétendre à des dommages et intérêts et doivent supporter les dépens ;
1) ALORS, D'UNE PART, QUE les transactions se renferment dans leur objet et la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ; qu'en jugeant que la transaction conclue le 30 juin 2004 entre les consorts Y... « emporte nécessairement la fin du bail à ferme du 14 mai 1990», sans constater que cette transaction comportait une clause par laquelle Monsieur Jean-Michel Y... renonçait au bénéfice du bail rural qui lui avait été consenti par le GFA du PLAN, la Cour d'appel a violé les articles 2048 et 2049 du Code civil ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QU'une renonciation à un droit ne se présume pas et doit résulter d'une volonté non équivoque ; qu'en s'en déterminant par les motifs susvisés, impropres à caractériser une renonciation de Monsieur Jean-Michel Y... au bénéfice du bail rural qui lui avait été consenti par le GFA du PLAN, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
3) ALORS, EN OUTRE, QUE les transactions ont, entre les parties, autorité de la chose jugée en dernier ressort ; qu'en l'espèce, le jugement, dont les exposants demandaient la confirmation et s'étaient ainsi appropriés les motifs, s'était fondé sur l'autorité de la chose jugée attachée à la clause de la transaction par laquelle les parties avaient renoncé au bénéfice du jugement du 23 mars 2000 du Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN ayant prononcé la dissolution du GFA du PLAN ; qu'en déclarant néanmoins que la transaction emportait la liquidation de ce groupement, sans réfuter sur ce point les motifs du jugement qu'elle infirmait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS, ENFIN, QUE les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le GFA du PLAN n'était pas partie à la transaction conclue entre les consorts Y... ; qu'en jugeant néanmoins que cette transaction emportait nécessairement la fin du bail rural conclu entre le GFA du PLAN et Monsieur Jean-Michel Y..., la Cour d'appel a violé l'article 1165 du Code civil.