LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que M. X..., exploitant agricole, a fait l'objet d'un redressement judiciaire simplifié ; que le plan de redressement par voie de continuation dont il a bénéficié a été résolu le 4 août 1992, M. X... étant autorisé à poursuivre son activité jusqu'au 15 février 1993 ; qu'entre temps, il a transmis son cheptel à M. Y... qui souhaitait reprendre l'exploitation mais n'a pas obtenu le transfert des quotas laitiers à son nom ; que M. Z... qui assurait la collecte du lait a cessé de le faire le 3 juin 1992 ; que, par requête du 19 octobre 1992, M. X... a demandé au juge-commissaire de l'autoriser à exiger l'exécution du contrat de collecte de lait par M. Z... ; que par ordonnance du 29 janvier 1993, le juge-commissaire a sursis à statuer jusqu'à ce que le tribunal se fût prononcé sur la requête en extension du redressement judiciaire ouvert à l'encontre de M. X... à M. Y... et en confusion de leur patrimoine ; qu'après la clôture de la liquidation judiciaire de MM. X... et Y... pour insuffisance d'actif, M. X... a recherché la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice "à raison de la décision abusive et infondée du juge-commissaire en date du 29 janvier 1993 ordonnant un sursis à statuer ayant conduit à sa première liquidation judiciaire" ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, 16 décembre 2008) de l'avoir débouté de sa demande ;
Attendu qu'ayant relevé que la nécessité d'éclaircir, préalablement à l'examen de la requête qui était soumise au juge-commissaire, la situation des parties en cause au regard de la réglementation des quotas laitiers, M. X... ayant réalisé son cheptel vif et s'étant substitué, en qualité de producteur laitier, M. Y... à qui M. Z... payait le lait collecté, ressortait de la procédure et des pièces produites, la cour d'appel a pu en déduire que la décision de sursis à statuer ne pouvait constituer une erreur manifeste d'appréciation de nature à constituer une faute lourde ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes formées contre l'Agent judiciaire du Trésor en sa qualité de représentant de l'Etat, en réparation de son préjudice résultant du fonctionnement défectueux du service de la justice ;
AUX MOTIFS QUE M. X... fait valoir que la décision du juge-commissaire de surseoir à statuer sur sa demande tendant à voir ordonner, au besoin sous astreinte, la reprise par M. Z... de la collecte de sa production de lait, constitue une faute lourde dès lors que les motifs retenus, relatifs à la prétendue nécessité d'attendre que le Tribunal de la procédure ait statué sur une requête en extension du redressement judiciaire à M. Y..., sont sans rapport avec la question qui était aux débats et avec l'urgence d'une décision à prendre sur ce point, la collecte du lait étant un élément essentiel de la survie de son exploitation agricole et du respect du plan de redressement dont il bénéficiait ; qu'il en conclut que, sa liquidation judiciaire résultant directement de cette décision du juge-commissaire, il est fondé à demander la réparation du préjudice qu'il a subi en raison de cette erreur manifeste d'appréciation ; qu'il convient cependant de constater que la décision de sursis à statuer invoquée ne peut constituer une erreur manifeste d'appréciation de nature à constituer une faute lourde dès lors que, ainsi que l'a justement énoncé le juge-commissaire, il ressortait de la procédure et des pièces produites la nécessité d'éclaircir, préalablement à l'examen de la requête qui lui était soumise, la situation des parties en cause au regard de la règlementation des quotas laitiers, M. X... ayant notamment, conformément au projet qu'il avait de céder son exploitation agricole à M. Y..., cession qui sera refusée par le Tribunal de la procédure collective par un jugement rendu le 4 novembre 1991, réalisé son cheptel vif et s'étant substitué, en qualité de producteur laitier, M. Y... à qui M. Z... payait, depuis le mois de juillet 1991, le lait collecté ; qu'il en résulte que M. X..., qui n'invoque aucun autre fait traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, est mal fondé en ses prétentions ;
ALORS QUE la responsabilité de l'Etat est engagée en cas de fonctionnement défectueux du service de la justice constitutif d'une faute lourde ; que, pour débouter M. X... de ses demandes, la Cour d'appel a considéré que le juge-commissaire de la procédure collective n'avait pas commis de faute en décidant de surseoir à statuer sur sa demande tendant à voir ordonner la reprise par M. Z... de la collecte de sa production de lait, dans l'attente de la décision à intervenir du Tribunal sur la requête de Me B..., ès qualités, aux fins d'extension de la procédure de redressement judiciaire à un tiers, M. Y... ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et observations desquelles il résultait qu'en raison de l'indépendance totale et entière de ces deux procédures, distinctes et sans influence réciproque, la décision injustifiée de surseoir à statuer caractérisait un dysfonctionnement du service de la justice ayant entraîné la liquidation judiciaire de M. X..., violant ainsi l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire.