LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 670--1 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, ensemble l'article 680 du même code et l'article 41 de la délibération n° 284 du Congrès de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances du 24 février 1988 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le tribunal de première instance de Nouméa a autorisé la saisie des rémunérations de Mme X... entre les mains de la société Billez et associés (la société), à la requête de Mme Y..., sur le fondement d'un jugement qui avait constaté la résiliation d'un bail d'habitation et condamné Mme X... au paiement de loyers et de frais ; que, par une ordonnance de contrainte du 17 janvier 2008, le tribunal a déclaré la société personnellement débitrice des retenues qui auraient dû être opérées et l'a condamné à verser au greffe la somme de 1 090 476 francs CFP, en application de l'article 41 de la délibération n° 284 du 24 février 1988 du Congrès de la Nouvelle-Calédonie ; que l'ordonnance a été notifiée à la société par le greffe, par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception qui n'a pas été réclamée ; qu'à la demande de Mme Y..., l'ordonnance a été signifiée à la société le 3 mars 2008, puis, à nouveau, le 23 avril 2008, par un acte "annulant et remplaçant l'acte délivré le 3 mars 2008" ; qu'entre-temps, la société a, le 14 avril 2008, formé opposition à l'ordonnance de contrainte ;
Attendu que, pour déclarer l'opposition irrecevable et débouter en conséquence la société de ses demandes, l'arrêt retient que le greffe a notifié l'ordonnance de contrainte par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 17 janvier 2008, que cette notification portait les mentions du délai et des modalités du recours ouvert et que cette lettre n'a pas été réclamée par le destinataire, qui a reçu deux avis de mise à disposition le 3 janvier et le 14 janvier 2008 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de notification de l'ordonnance de contrainte n'avait pas été remise à son destinataire et qu'il ressort de l'arrêt que la signification du 3 mars 2008 ne portait aucune mention du délai de recours, ce dont il résultait que ce délai n'avait pu commencer à courir qu'à compter de la seconde signification faite le 23 avril 2008, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 août 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Billez et associés.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'opposition formée par la société Billez et Associés à l'encontre de l'ordonnance de contrainte datée du 17 janvier 2008 et D'AVOIR en conséquence débouté la société et Associés Billez de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE l'ordonnance de contrainte a été notifiée par le greffe le 17 janvier 2008 au tiers saisi par iettre recommandée avec accusé de réception, qui n'a pas été réclamée; qu'à la requête de Laure Y..., cette ordonnance était notifiée par acte d'huissier le 23 avril 2008, en « remplacement» de l'acte délivré le 3 mars 2008 qui ne portait aucune mention du délai de recours (... ); que par requête déposée au greffe des saisies-arrêts le 28 avril 2008, la SARL Billez et Associés concluait à ce que soit rapportée l'ordonnance du 17 janvier 2008 au motif que Djamila X... n'était plus salariée dans son entreprise le 11 août 2007 ; que l'article 41 de la délibération n° 284 du 24 février 1988 énonce que « lorsque le tiers saisi n'a pas effectué son versement à l'époque fixée ci-dessus, il peut y être contraint en vertu d'une ordonnance qui est rendue d'office par le juge compétent et dans laquelle le montant de la somme versée est énoncé. Cette ordonnance peut être sollicitée par les parlies (. ..) » et « est notifiée par le greffier sous pli recommandé dans les trois jours de sa date. Le tiers saisi dispose de 15jours à pertir de cette notification pour former l'opposition au moyen d'une déclaration au greffe (. ..) L'ordonnance du juge compétent non frappé d'opposition dans le délai de 15 jours devient définitive» ; que le greffe, par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 janvier 2008, a notifié cette ordonnance à la SARL Billez et associés ; que la copie de cette lettre versée aux débats porte les mentions : « à compter de la présente notification, vous disposez d'un délai de 15 jours pour former opposition à cette décision par requête remise ou adressée au secrétariat greffe. A défaut d'opposition dans le délai imperti, cette décision deviendra définitive et aura force exécutoire»; que la lettre recommandée n'a pas été réclamée par le destinataire, qui a reçu deux avis de mise à disposition le 3 janvier et le 14 janvier 2008 ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a relevé que l'opposition formée par le tiers saisi le 14 avril 2008 était irrecevable ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le 3 mars 2008 Maître Z... a notifié à la SARL Billez et Associés l'ordonnance de contrainte qui condamnait la société à verser au greffe des saisies-arrêts la somme de 1 090 476 Francs Cfp. ; que l'article 41 de la délibération du 24 février 1988 précise que lorsque le tiers saisi n'a pas effectué son versement à l'époque fixée, il peut y être contraint en vertu d'une ordonnance qui est rendue d'office par le Juge compétent et dans laquelle le montant de la somme à verser est énoncé; que le tiers saisi dispose de 15 jours à compter de cette notification pour former opposition au moyen d'une déclaration au Greffe; qu'il est statué sur cette opposition conformément aux règles de compétence et de procédure prévues dans les articles 405 et 408 ; que l'ordonnance du juge non frappée d'opposition dans le délai de 15 jours devient définitive; qu'elle est exécutée à requête du débiteur saisi ou du créancier le plus diligent sur l'expédition délivrée par le Greffier et revêtue de la formule exécutoire; que l'opposition de la SARL Billez a été évoquée à l'audience du 19 mai 2008 ; que la dite société n'était pas présente ni représentée et n'a versé aucun élément à l'appui de ses prétentions ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que l'ordonnance de contrainte a été délivrée à l'employeur par acte d'huissier du 23 avril 2008 à 10 h 50 ; que l'opposition a été formée par courrier déposé au greffe des saisies-arrêts le 14 avril 2008, c'est-à-dire au-delà des 15 jours prévus par les textes et alors que le titre exécutoire avait été délivré par le greffe à la créancière ;
ALORS, d'une part, QU'en cas de retour au secrétariat de la juridiction de la juridiction d'une lettre de notification non réclamée par son destinataire, le délai de recours ne peut courir qu'à compter de la signification de la décision par acte d'huissier de justice à la diligence de la partie intéressée ; que pour déclarer irrecevable comme tardive l'opposition formée le 14 avril 2008 par la société Billez et Associés, l'arrêt attaqué a retenu que l'ordonnance de contrainte avait été notifiée par le greffe par une lettre AR datée du 17 janvier 2008 qui mentionnait que le délai de recours était de quinze jours à compter de la notification; qu'en statuant ainsi tout en constatant que la lettre AR portant notification de l'ordonnance de contrainte à la SARL Billez et Associés n'avait pas été réclamée par la destinataire, ce dont il résultait que la notification effectuée par le greffe n'avait pas fait courir le délai de recours, la Cour d'appel a violé l'article 670-1 du Code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie;
ALORS, d'autre part, QU'en déclarant irrecevable comme tardive l'opposition formée le 14 avril 2008 tout en constatant que postérieurement à la notification par le greffe de l'ordonnance de contrainte par une lettre AR non réclamée par la société Billez et Associés, Madame Laure Y... avait fait procéder à la notification par un acte d'huissier daté du 23 avril 2008, en « remplacement » de l'acte délivré le 3 mars 2008 qui ne portait aucune mention du délai de recours (arrêt p. 2, 5ème au 7ème §), ce dont il résultait que le délai de recours n'avait commencé à courir qu'à compter de cette seconde signification, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article 670-1 du Code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie;
ALORS, à tout le moins, QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'appel de la SARL Billez et Associés (p.2, 4 premiers §) qui soutenait que Madame Y... avait fait procéder à la signification de l'ordonnance de contrainte le 23 avril 2008 par un acte d'huissier qui a « annulé et remplacé l'acte délivré le 3 mars 2008 » de sorte que l'opposition enregistrée au greffe le 28 avril suivant avait valablement été formée pendant le délai de recours et était donc recevable, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile de Nouvelle Calédonie.