LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que par acte notarié du 24 novembre 1988, la société Banque Sovac immobilier, aux droits de laquelle se trouve la société GE Money Bank (la banque), a consenti à M. X... et Mme Y... un prêt de 1 390 000 francs destiné à l'acquisition d'un immeuble, remboursable en 240 mensualités à un taux d'intérêt ajustable ; qu'à compter du 25 mars 1994, un taux fixe a été substitué au taux variable précédemment appliqué, par l'effet du choix de l'emprunteur usant d'une faculté prévue par le contrat ; que des échéances étant ensuite demeurées impayées, la banque a fait délivrer un commandement aux fins de saisie immobilière aux emprunteurs ; que M. X... ayant déposé un dire en sollicitant notamment la déchéance du droit aux intérêts, cette demande a été déclarée prescrite par une décision désormais irrévocable ; que, par acte du 4 décembre 2003, M. X... a assigné la banque en paiement de dommages et intérêts ; que l'arrêt attaqué, après avoir rejeté les fins de non-recevoir tirées de l'autorité de la chose jugée et de la prescription, déboute l'emprunteur de sa demande ;
Attendu que pour juger que, lors de la substitution, prenant effet en mars 1994, d'un taux fixe au taux ajustable, la banque n'avait pas fait peser sur M. X... une dette non conforme aux stipulations contractuelles la cour d'appel a retenu que, si le nouveau tableau d'amortissement établi à cette occasion faisait apparaître un capital restant dû de 1 404 467,98 francs supérieur au capital emprunté de 1 390 000 francs, cet accroissement de la dette procédait de ce que les échéances de remboursement contractuellement plafonnées par application de l'article 4 II-A-2 des conditions générales s'étaient avérées insuffisantes, compte tenu de la hausse du TIOP (taux interbancaire offert à Paris), à assurer le règlement des seuls intérêts du capital ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le plafonnement des échéances initialement fixées, dont il n'était pas contesté qu'elles avaient été régulièrement payées jusqu'au changement de taux, ne pouvait justifier que le capital restant dû soit plus élevé que le montant du capital emprunté, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a écarté les fins de non-recevoir tirées de l'autorité de la chose jugée et de la prescription, l'arrêt rendu le 31 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société GE Money Bank aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GE Money Bank ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de ses demandes
AUX MOTIFS QU' "en revanche Monsieur Gilbert X... demeure recevable à agir à l'encontre de la banque à raison de fautes qui auraient été commises postérieurement au 4 décembre 1993 ; qu'à cet égard, il ne peut être retenu que lors de la substitution d'un taux fixe au taux ajustable à effet du 25 mars 1994, la banque aurait fait peser sur Monsieur Gilbert X... une dette non conforme aux dispositions du contrat ; qu'en effet, si le nouveau tableau d'amortissement établi à cette occasion fait apparaître un capital restant dû de 1.404.467, 98 supérieur au capital initial emprunté de 1.390.000 francs, cet accroissement de la dette procède de ce que les échéances de remboursement étant contractuellement plafonnées par application des conditions générales (article 4 II-A-2), celles-ci se sont avérées insuffisantes, compte tenu de la hausse du TIOP (Taux interbancaire offert à Paris) à assurer le règlement des seuls intérêts du capital ; que d'ailleurs, Monsieur X... qui ne conteste pas avoir reçu à la fin de chaque période de 12 mois, un tableau d'amortissement faisant apparaître, le capital restant dû, a pu se convaincre à cette occasion que les échéances dont le montant demeurait fixe, la variation du taux n'influant que sur la répartition de leur montant en intérêts et capital, ne pouvaient suffire à apurer le capital emprunté, ce qui l'a conduit, au demeurant, à exercer la faculté qui lui était réservée de substituer un taux fixe au taux ajustable en sorte qu'il ne peut reprocher une faute quelconque à la banque tant dans l'application du contrat que dans l'information qui lui a été délivrée. Enfin, Monsieur Gilbert X... reproche à la banque un manquement à son obligation d'information et de conseil quant aux modalités de mise en oeuvre de la garantie chômage prévue par le contrat d'assurance groupe pour s'être abstenue de lui adresser des lettres de relance ensuite sa déclaration de sinistre effectuée au mois de novembre 1995 et de l'alerter sur le risque de prescription biennale qu'il ignorait et qui lui a été opposée le 19 janvier 1999. Mais attendu qu'il résulte des termes mêmes du courrier recommandé adressé à l'assureur par Monsieur Gilbert X... le 6 janvier 1999 que celui-ci a choisi délibérément de laisser sans suite la demande de la banque formulée le 15 novembre 1995 tendant à obtenir les pièces nécessaires à l'instruction de son dossier, celui-ci déclarant expressément 'je n'ai pas activé l'assurance de mon dossier auparavant ne voulant pas en faire usage prématurément" ; que par ailleurs, si le souscripteur d'une assurance groupe est tenu d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'éteint pas avec la remise de la notice de l'assurance, il ne peut lui être imposé, en cas de déclaration de sinistre, de rappeler à l'assuré, l'effet susceptible de découler de son inaction en regard de la prescription biennale applicable aux actions dérivant du contrat d'assurance ; qu'en tout état de cause, à supposer même que le souscripteur soit obligé à un tel avertissement, cette omission n'a pu emporter aucun effet, en l'espèce, dès lors que nonobstant la position adoptée par la Compagnie d'assurance, il est constant que faute pour la police de rappeler les dispositions de la loi concernant les actions dérivant du contrat d'assurance, ce que la Compagnie ne conteste pas en se bornant dans son courrier du 10 novembre à invoquer "la notoriété publique" du délai de prescription, sans fait aucune référence à une stipulation contractuelle, ce délai était inopposable à Monsieur Gilbert X... ; que le jugement déféré doit être infirmé, Monsieur Gilbert X... devant être débouté de ses demandes".
ALORS D'UNE PART QU'aux termes de l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce la convention de prêt prévoit un apurement du prêt en 240 mensualités et que les échéances comprendraient "les sommes nécessaires au remboursement du capital et au paiement des intérêts du contrat" ; de sorte que la Cour d'appel qui décide que la banque n'a pas fait peser sur l'emprunteur une dette non conforme aux stipulations contractuelles en établissant un tableau d'amortissement suite à la fixation du taux en 1994 indiquant que l'emprunteur serait débiteur de 1.405.467,98 francs, soit une somme supérieure au capital initialement emprunté et alors que l'emprunteur avait déjà réglé fin 1993, 975.000 francs de mensualités, méconnaît la convention des parties et viole par refus d'application l'article 1134 du Code civil.
ALORS D'AUTRE PART QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur profane tout au long de leurs relations contractuelles ; de sorte que la Cour d'appel qui retient que par l'envoi tous les 12 mois d'un tableau d'amortissement à un emprunteur profane, la banque avait satisfait à son obligation de mise en garde relativement au fait que contrairement aux stipulations contractuelles, les échéances ne comprenaient pas les sommes nécessaires au remboursement du capital et au paiement des intérêts mais servaient seulement au remboursement des intérêts, a violé par refus d'application les articles 1134 et 1147 du Code civil.
ALORS ENFIN QUE la banque, souscripteur du contrat d'assurance de groupe auquel a adhéré par son intermédiaire un emprunteur, est tenue envers lui d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achève pas avec la remise de la notice et s'étend à la phase d'instruction du sinistre ; de sorte que la Cour d'appel qui retient qu'il ne peut être imposé à une banque souscripteur d'une assurance de groupe, en cas de déclaration de sinistre, de rappeler à l'assuré, l'effet susceptible de découler de son inaction en regard de la prescription biennale applicable aux actions dérivant du contrat d'assurance, a violé par refus d'application l'article 1147 du Code civil.