LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Marcel X... est décédé le 13 novembre 2000 en laissant pour lui succéder son épouse, Mme Y..., et une fille issue de sa première union, Mme Colette X..., et en l'état d'un testament authentique, de six codicilles olographes et d'un codicille authentique, désignant M. Z... en qualité d'exécuteur testamentaire, instituant comme légataires à titre universel, pour le surplus éventuel de la quotité disponible, Mme Y... à hauteur de 4/ 5e et l'Institut Pasteur, à hauteur de 1/ 5e et concédant divers legs particuliers ; que Mme X... ayant déclaré renoncer à la succession de son père, le fils de celle-ci, M. A...-X..., a déclaré l'accepter ; que M. Z..., ès qualités, a assigné Mme X... pour faire déclarer frauduleuse sa renonciation à la succession de son père ; que Mme Y..., la Fondation Institut Pasteur, M. A...-X... et les légataires particuliers ont été appelés à l'instance ; que certains légataires ont soutenu qu'avant de renoncer à la succession, Mme X... avait fait acte d'héritière ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal formé par M. A...-X... et du pourvoi incident formé par Mme X..., pris en leurs diverses branches, et réunis, ci-après annexés :
Attendu que M. A...-X... et Mme X... font grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 12 mars 2009), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 1ère, 15 mai 2008, bull. n° 140), d'avoir dit que Mme X... a fait acte d'héritière de Marcel X... avant la renonciation du 24 juillet 2001 ;
Attendu, d'abord, que le moyen tiré de l'incompétence des tribunaux de l'ordre judiciaire, présenté pour la première fois devant la Cour de cassation, est irrecevable ;
Attendu, ensuite, qu'étant saisie du seul point de savoir si la lettre adressée au préfet des Yvelines par Mme X..., par l'intermédiaire de son conseil, s'analysait en un acte d'acceptation tacite de la succession du défunt, la cour d'appel n'avait pas à se prononcer sur la procédure administrative d'acceptation du legs consenti à son bénéficiaire ; qu'elle n'avait donc pas à faire application de dispositions étrangères au litige dont elle était saisie ;
Attendu, enfin, qu'ayant relevé qu'en réponse à la lettre du préfet sollicitant son consentement à l'exécution du legs en faveur de l'Institut Pasteur ou ses moyens d'opposition, Mme X... avait déclaré, par l'intermédiaire de son conseil, ne pas avoir l'intention de s'opposer à ce legs et précisé que son règlement n'interviendrait que plus tard, une fois l'actif net de la succession arrêtée, faisant ainsi bien la différence entre la délivrance du legs et son exécution, ce qui confirmait que Mme X... avait parfaitement compris la portée de sa réponse, les juges du second degré ont souverainement estimé qu'il résultait des termes de cette correspondance que Mme X... avait consenti à la délivrance du legs bien que rien ne l'y eût obligé puisqu'elle bénéficiait d'un double délai de trois mois et quarante jours pour faire inventaire et délibérer ; que, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, la cour d'appel, qui en a déduit, à bon droit, que cet acte ne pouvait être accompli qu'en qualité d'héritier, et retenu qu'il supposait l'intention de Mme X... d'accepter la succession, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur les second moyens du pourvoi principal et incident, pris en leurs diverses branches, et réunis, ci-après annexés :
Attendu que M. A...-X... et Mme X... font encore grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit que Mme X... avait fait acte d'héritière de Marcel X... avant sa renonciation du 24 juillet 2001 et dit que cette renonciation était de nul effet ;
Attendu qu'ayant constaté que Mme X... avait donné pour mission à son conseil, qui l'assistait et parlait en son nom depuis l'ouverture des opérations, de répondre au préfet, et relevé qu'elle avait parfaitement compris la portée de la réponse, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le pourvoi provoqué formé par la Fondation Institut Pasteur et la Société protectrice des animaux-SPA :
Attendu que la Fondation Institut Pasteur et la Société protectrice des animaux demandent la cassation de l'arrêt en ce qu'il a dit que Mme X... n'a pas renoncé frauduleusement à la succession de Marcel X... et en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes de ce chef, pour le cas où il viendrait à être annulé sur les pourvois formés par M. A...-X... et Mme X... ;
Attendu que, par suite du rejet des pourvois formés par M. A...-X... et Mme X..., le pourvoi éventuel de la Fondation Institut Pasteur et de la SPA est devenu sans objet ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. A...-X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Colette X... a fait acte d'héritière de Marcel X... avant la renonciation du 24 juillet 2001 ;
AUX MOTIFS QUE la réponse faite le 15 janvier 2001 par Me B..., conseil de Colette X... à la lettre du 29 décembre 2000 du Préfet des Yvelines qui sollicitait, conformément à l'article 2 du décret du 1er février 1896, son consentement à l'exécution du testament, notamment en faveur de l'Institut Pasteur ou ses moyens d'opposition, est ainsi rédigée : « Nous vous informons que notre cliente n'a pas l'intention de s'opposer au legs en faveur de l'Institut Pasteur. Bien entendu, en ce qui concerne le règlement proprement (dit), il convient nécessairement d'attendre que l'actif net de la succession soit arrêté ».
Il ressort clairement de cette lettre que Colette X... n'entend pas s'opposer à la délivrance du legs, ce qui signifie qu'elle l'accepte ;
Elle exprime ainsi une position qui n'appartient qu'à l'héritier acceptant, alors que rien ne l'y obligeait. En effet, elle bénéficiait d'un double délai de trois mois et quarante jours pour faire inventaire et délibérer, la demande préfectorale ayant été présentée un mois et demi seulement après le décès de Marcel X... ;
En donnant son consentement, comme le Préfet le lui demandait pour respecter les dispositions spécifiques à la délivrance d'un legs au profit d'établissements publics ou reconnus publics, Colette X... a fait un acte qui, s'il ne consiste pas en la délivrance proprement dite du legs, en est le préalable essentiel et indispensable et suffit à lui seul à la manifestation sans ambigüité de sa volonté de se comporter comme héritière réservataire ayant accepté purement et simplement la succession de son père, seule cette qualité lui conférant le pouvoir de donner un tel consentement. En précisant, dans le courrier litigieux, que le règlement n'interviendrait que plus tard, une fois l'actif net de la succession arrêté, le conseil de Colette X... faisait bien la différence entre la délivrance du legs et son exécution, ce qui confirme que sa cliente avait parfaitement compris la portée de sa réponse ;
Il est indifférent que l'autorisation préfectorale d'accepter un legs laisse subsister la faculté de contester la validité du testament, puisqu'il s'agit en l'espèce d'analyser si Colette X... a fait un acte manifestant son intention d'accepter, que seul un héritier acceptant pouvait faire, et non de s'assurer de la validité des dispositions testamentaires ;
C'est en vain que Colette X... et Laurent A...-X... soutiennent que Me B... n'avait pas reçu mandat pour accepter la succession de Marcel X... car s'il n'avait effectivement pas reçu mandat express de ce chef, il avait en revanche incontestablement été missionné pour répondre au Préfet des Yvelines, puisque la lettre préfectorale lui a été remise par sa cliente à cette fin et qu'il l'assistait depuis le début des opérations et parlait en son nom, comme le démontrent les nombreuses lettres échangées tant avec le notaire qu'avec l'exécuteur testamentaire ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'échange de lettres entre le Préfet du Département des Yvelines et Monsieur B..., conseil de Madame Colette X..., était un élément de l'instruction administrative en vue de la délivrance de l'autorisation d'accepter le legs en faveur de l'Institut Pasteur ; que l'interprétation et l'appréciation de la portée de ces lettres, non détachables de l'acte administratif d'autorisation, étaient de la seule compétence de la juridiction administrative, si bien qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il résulte des articles 1 et 2 du décret du 1er février 1896 relatif à la procédure à suivre en matière de legs concernant les établissements publics ou reconnus d'utilité publique et les associations religieuses autorisées, que le Préfet est tenu d'interpeller tous les héritiers connus au degré successible, afin de les inviter à prendre connaissance du testament, à donner leur consentement à son exécution ou à produire leurs moyens d'opposition, si bien qu'en retenant que la réponse à cette interpellation constituait un acte que seul un héritier acceptant pouvait faire, la Cour d'appel a méconnu les textes précités et l'article 910 du Code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE selon l'article 1 du décret du 1er février 1896 relatif à la procédure à suivre en matière de legs concernant les établissements publics ou reconnus d'utilité publique et les associations religieuses autorisées, le notaire dépositaire d'un testament contenant des libéralités en faveur de l'Etat, des départements, des communes, des établissements publics ou reconnus d'utilité publique et des associations religieuses autorisées, est tenu, aussitôt après l'ouverture du testament, d'adresser au préfet du département du lieu de l'ouverture de la succession, la copie intégrale des dispositions faites au profit de chacun de ces établissements et un état des héritiers dont l'existence lui aura été révélée, avec leur noms, prénoms, professions, degrés de parenté et adresses, et que, selon l'article 2 du même décret, dans la huitaine, le préfet requiert le maire du lieu de l'ouverture de la succession de lui transmettre, dans le plus bref délai, un état contenant les indications relatives aux héritiers connus et énoncées par l'article précédent ; que le préfet, dès qu'il a reçu ce dernier état, invite les personnes qui lui sont signalées comme héritiers, soit par le notaire, soit par le maire, à prendre connaissance du testament, à donner leur consentement à son exécution ou à produire leurs moyens d'opposition, le tout dans un délai d'un mois ; qu'il résulte de ces dispositions que la procédure administrative de l'autorisation est indépendante des règles civiles et que, notamment, le délai prévu par l'article 795 ancien du Code civil n'est pas opposable à l'autorité administrative, si bien qu'en statuant comme elle l'a fait la Cour d'appel a violé les textes précités ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE l'autorisation administrative d'accepter une libéralité en faveur d'un établissement d'utilité publique ne peut porter atteinte aux droits des tiers et, notamment, au droit des héritiers de refuser la délivrance du legs ou de contester la validité ou l'efficacité du testament, si bien qu'en retenant qu'en ne s'opposant pas à l'octroi par l'autorité administrative de l'autorisation d'accepter la libéralité, Colette X... n'entendait pas s'opposer à la délivrance du legs, ce qui signifie qu'elle l'acceptait, la Cour d'appel a violé l'article 910 du Code civil et l'article 7 de l'ordonnance du 2 avril 1817 ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QUE l'autorisation administrative d'accepter un legs à un établissement d'utilité publique ne confère au légataire aucun droit envers les héritiers qui conservent la faculté de refuser la délivrance et le paiement du legs ; que la déclaration de non opposition à l'autorisation administrative d'accepter ne constitue pas un acte sur un bien dépendant de la succession, si bien qu'en retenant que la réponse à l'interpellation de l'administration était un acte que seul un héritier acceptant purement et simplement la succession pouvait accomplir, la Cour d'appel a violé l'article 910 du Code civil et l'article 7 de l'ordonnance du 2 avril 1817 ;
ET ALORS QUE Monsieur A...-X... faisait valoir, dans ses écritures, que la lettre adressée par le Préfet des Yvelines à Madame Colette X... rappelait que le seul moyen d'opposition admissible était l'indigence pécuniaire prouvée, d'où il résulte qu'en déclarant ne pas s'opposer à l'autorisation administrative, le successible interrogé ne faisait que prendre parti sur sa situation pécuniaire personnelle, si bien qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la Fondation Institut Pasteur et la Société protectrice des animaux
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que Colette X... n'a pas renoncé frauduleusement à la succession de Marcel X... et débouté les intimés de leurs demandes de ce chef ;
AUX MOTIFS QUE « bien que la renonciation à la succession ait été jugée comme sans effet, les parties ont un intérêt au moins moral à faire statuer sur l'existence d'une fraude ou d'un abus de droit ; que les libéralités consenties à l'héritier s'imputent normalement sur la réserve mais en cas de renonciation à la succession elles sont déduites de la quotité disponible et deviennent alors seulement réductibles si leur montant excède la quotité disponible de sorte que si elles l'absorbent intégralement, alors que la succession se trouve dévolue au degré subséquent en application de l'article 786 du code, les dispositions testamentaires ne peuvent être exécutées ; que les légataires soutiennent que la fraude résulte de l'emploi de la renonciation aux seules fins d'anéantir les dispositions du testament sans procurer d'avantages à Colette X... dans la seule intention de porter préjudice aux légataires ; que selon l'article 775 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, nul n'est tenu d'accepter une succession qui lui est échue ; que l'héritier seul décide d'accepter ou de refuser la succession sans avoir à justifier son choix. Ce droit connaît pour seule limite la fraude ainsi définie par M. C... dans son Essai d'une théorie générale de la fraude en droit français : « iI y a fraude chaque fois que le sujet de droit parvient à se soustraire à l'exécution d'une règle obligatoire par l'emploi à dessein d'un moyen efficace qui rend le résultat inattaquable sur le terrain du droit positif » ; que pour qualifier la fraude, trois éléments doivent être réunis : une règle obligatoire, l'intention de l'éluder et l'emploi à cette fin d'un moyen adéquat ; que si le testateur a le droit de tester pour faire respecter ses dernières volontés, l'héritier a le droit d'accepter ou non la succession et le seul fait que la renonciation de l'héritier à la succession ait pour conséquence de priver le testament de tout effet ne suffit pas à établir l'existence d'une fraude ; qu'en l'espèce, Colette X... a reçu d'importantes donations dont elle devait le rapport à la succession ; que par ailleurs, lors de l'établissement de la déclaration de succession, il était invoqué par Eliane Y... l'existence de donations déguisées ou indirectes consenties à Colette X... par son père, dont le montant avait été chiffré et apparaissait dans la déclaration de succession, et à propos desquelles l'intimée invoquait l'existence d'un recel ; qu'en renonçant à la succession Colette X... n'avait pas à rapporter les dons consentis ; que par ailleurs, il ressort de deux courriers adressés par maître D... au conseil de Colette X... le 19 avril 2001 puis le 8 juin 2001, soit antérieurement à la renonciation, que les libéralités reçues par cette dernière excédaient sa réserve héréditaire et qu'en l'état de ses calculs, elle n'avait plus aucun droit à faire valoir dans la succession de son père ; qu'elle n'a appris que bien plus tard, après le dépôt du rapport d'expertise en 2005, qu'elle n'a pas été remplie de l'intégralité de ses droits, et par l'arrêt du 15 juin 2006 que la preuve du don manuel n'était pas rapportée ; qu'il apparaît ainsi, qu'à l'époque de la renonciation, Colette X... pouvait légitimement penser qu'elle avait été remplie de ses droits d'héritière réservataire par les libéralités, qu'elle se trouvait exposée au paiement de droits au titre d'un don manuel même si elle le contestait, que compte tenu du climat conflictuel dans lequel se déroulaient les opérations de compte liquidation partage, elle avait intérêt à renoncer à la succession ; que le seul fait que l'exercice de la faculté légale de renonciation ait eu pour conséquence de faire échec aux dispositions testamentaires ou, à tout le moins d'en limiter les effets, ne suffit pas à caractériser l'existence d'une fraude dès lors que Colette X..., qui n'était tenue à aucune obligation envers les légataires, trouvait intérêt à renoncer ; que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a retenu le caractère frauduleux de la renonciation ; que c'est par une exacte appréciation des faits de la cause que les premiers juges ont rejeté la demande au titre de l'abus de droit. En effet, aucune pièce du dossier ne vient établir que la renonciation, jugée non frauduleuse, a été dictée par l'intention de nuire aux légataires laquelle ne peut se déduire ni du conflit ayant opposé Laurent A...-X... à son grand-père ni de l'amertume que peut ressentir Colette X... après avoir pris connaissance des dispositions testamentaires de son père, très favorables à sa seconde épouse » ;
1°) ALORS QU'est obligatoire, pour l'héritier acceptant, le respect des dispositions testamentaires et notamment la délivrance des legs prévue par le testateur dans les limites de la quotité disponible ; qu'en estimant que l'héritier qui renonce ne contourne aucune règle obligatoire, alors que cette renonciation a précisément pour effet de le soustraire à l'obligation de délivrance du legs, la Cour d'appel a violé les articles 895 et 1017 du Code civil ;
2°) ALORS QUE caractérise la fraude l'utilisation d'une norme ou d'un mécanisme juridique dans le but de contourner l'application d'une autre norme contraignante sans que le résultat ainsi atteint ne soit juridiquement contestable ; qu'en se bornant à relever, pour dire la renonciation de Madame Colette X... à la succession de Maurice X... non frauduleuse, qu'elle trouvait intérêt à renoncer à cette succession, ce dont il résulte seulement que la renonciation, c'est-à-dire le mécanisme utilisé, n'était pas juridiquement contestable, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
3°) ALORS QUE caractérise la fraude l'utilisation d'une règle de droit dans l'unique dessein de faire échec à l'application d'une autre règle ou d'un acte obligatoire ; que le mobile poursuivi suffit ainsi à caractériser la fraude ; qu'en se bornant à relever, pour écarter le caractère frauduleux de la renonciation de Madame Colette X..., qu'elle avait intérêt à renoncer à la succession de Monsieur Marcel X..., sans même rechercher si son intention n'avait pas exclusivement été de faire échec aux dispositions testamentaires et de favoriser son fils pourtant déshérité par son grand père, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit.
Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Madame Colette X... fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'elle avait fait acte d'héritière de Marcel X... avant la renonciation du 24 juillet 2001 et dit que cette renonciation était de nul effet,
AUX MOTIFS QUE « la réponse faite le 15 janvier 2001 par maître B..., conseil de Colette X... à la lettre du 29 décembre 2000 du préfet des Yvelines qui sollicitait conformément à l'article 2 du décret du 1er février 1896, son consentement à l'exécution du testament notamment en faveur de l'Institut Pasteur ou ses moyens d'opposition est ainsi rédigée : « nous vous informons que notre cliente n'a pas l'intention de s'opposer au legs en faveur de l'Institut Pasteur. Bien entendu en ce qui concerne le règlement proprement (dit) il convient nécessairement d'attendre que l'actif net de la succession soit arrêté » ; qu'il ressort clairement de cette lettre que Colette X... n'entend pas s'opposer à la délivrance du legs ce qui signifie qu'elle l'accepte ; qu'elle exprime ainsi une position qui n'appartient qu'à l'héritier acceptant alors que rien ne l'y obligeait ; qu'en effet, elle bénéficiait d'un double délai de trois mois et quarante jours pour faire inventaire et délibérer, la demande préfectorale ayant été présentée un mois et demi seulement après le décès de Marcel X... ; qu'en donnant son consentement, comme le préfet le lui demandait pour respecter les dispositions spécifiques à la délivrance d'un legs au profit d'établissements publics ou reconnus d'utilité publique, Colette X... a fait un acte qui, s'il ne consiste pas en la délivrance proprement dite du legs en est le préalable essentiel et indispensable et suffit à lui seul à la manifestation sans ambiguïté de sa volonté de se comporter comme héritière réservataire ayant accepté purement et simplement la succession de son père, seule cette qualité lui conférant le pouvoir de donner un tel consentement ; qu'en précisant dans le courrier litigieux que le règlement n'interviendrait que plus tard une fois l'actif net de la succession arrêté, le conseil de Colette X... faisant bien la différence entre la délivrance du legs et son exécution ce qui confirme que sa cliente avait parfaitement compris la portée de sa réponse ; qu'il est indifférent que l'autorisation préfectorale d'accepter un legs laisse subsister la faculté de contester la validité du testament puisqu'il s'agit en l'espèce d'analyser si Colette X... a fait un acte manifestant son intention d'accepter que seul un héritier acceptant pouvait faire et non de s'assurer de la validité des dispositions testamentaires », ALORS QUE la volonté de l'héritier d'accepter purement et simplement la succession doit être certaine ; que tel n'est pas le cas lorsque l'acte accompli a été passé dans l'intérêt de la succession et donc dans celui des créanciers successoraux et des légataires ; que l'absence d'opposition de l'héritier notifiée au préfet est accompli dans l'intérêt des légataires ; qu'en considérant cependant que l'héritier avait, en ne s'opposant pas au legs, manifesté de manière non ambiguë son intention d'accepter purement et simplement la succession, la cour d'appel a violé l'article 778 du code civil,
ALORS QUE l'autorisation administrative d'accepter le legs n'emporte pas reconnaissance des droits du légataire à l'égard des héritiers mais permet seulement à l'établissement bénéficiaire de demander la délivrance aux héritiers, lesquels conservent toute faculté de la refuser ; que dans ces conditions, en indiquant au préfet qu'il n'entend pas s'opposer au legs, l'héritier n'effectue aucun acte d'immixtion dans l'hérédité ni aucun acte de disposition des biens héréditaires et ne demande aucunement le partage ; qu'en considérant cependant que seul un héritier acceptant pouvait agir ainsi, la cour d'appel a violé ensemble l'article 910 du code civil et les articles 1er et 2 du décret du 1er février 1896,
ALORS QUE l'opposition ou la non-opposition d'un héritier à l'autorisation administrative ne commande pas la décision de cette dernière qui conserve toute l'attitude d'accorder ou de refuser l'autorisation ; qu'en considérant que l'accord de l'héritier était un préalable essentiel et indispensable à la délivrance du legs proprement dite, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1er et 2 du décret du 1er février 1896 et 910 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Madame Colette X... fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'elle avait fait acte d'héritière de Marcel X... avant la renonciation du 24 juillet 2001 et dit que cette renonciation était de nul effet,
AUX MOTIFS QU'« c'est en vain que Colette X... et Laurent A...-X... soutiennent que maître B... n'avait pas reçu mandat pour accepter la succession de Marcel X... car s'il n'avait effectivement pas reçu mandat exprès de ce chef, il avait en revanche incontestablement été missionné pour répondre au préfet des Yvelines puisque la lettre préfectorale lui a été remise par sa cliente à cette fin et qu'il l'assistait depuis le début des opérations et parlait en son nom comme le démontrent les nombreuses lettres échangées tant avec le notaire qu'avec l'exécuteur testamentaire »,
ALORS QUE l'acceptation pure et simple d'une succession est un acte volontaire et personnel de l'héritier ; que la désignation d'une personne comme héritier est sans effet lorsqu'elle émane d'un tiers intervenant sans mandat exprès ; que l'avocat doit, en conséquence, disposer d'un pouvoir exprès pour accepter au nom et pour le compte de son client une succession ; qu'il résulte des propres constatations de la cour d'appel que Maître B... n'avait effectivement pas reçu mandat exprès pour accepter la succession ; qu'en considérant que la lettre de Maître B... du 15 janvier 2001 valait acceptation pure et simple de la succession par Madame Colette X... comme elle a fait, la cour d'appel a violé ensemble les articles 778, 1988 et 1998 du code civil,
ALORS QU'en retenant que Maître B... avait incontestablement été missionné pour répondre au préfet des Yvelines puisque la lettre préfectorale lui avait été remise par sa cliente à cette fin et qu'il l'assistait depuis le début des opérations et parlait en son nom, éléments impropres à caractériser l'existence d'un mandat exprès d'accepter la succession, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ainsi violé les articles 778, 1988 et 1998 du code civil.