LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 860, alinéa 1er, du code civil, ensemble les articles 617 et 483 du même code ;
Attendu qu'Hermant X... est décédé le 4 août 2005 en laissant pour lui succéder ses deux enfants Roger et Evelyne épouse Y... ; que, par acte notarié du 21 décembre 2004, il avait fait donation à son fils, Roger, de la nue-propriété d'une maison sise à Sains-les-Marquion, s'en réservant l'usufruit ; que, par acte du 11 janvier 2007, Mme Y... a fait assigner son frère en liquidation de la succession ;
Attendu que l'arrêt retient que M. Roger X... doit rapport à la succession de son père de la valeur de la nue-propriété de l'immeuble qu'il a reçue de ce dernier le 21 décembre 2004 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en cas de donation en nue-propriété avec, comme en l'espèce, réserve d'usufruit au profit du donateur, la valeur à prendre en compte est celle de la pleine propriété du bien, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. Roger X... devait rapport à la succession de Hermant X... de la valeur de la nue-propriété de l'immeuble sis ... à Saint-Les-Marquion qu'il a reçue le 21 décembre 2004, la valeur au jour du partage de la pleine propriété de cet immeuble devant être retenue pour 85 000,00 euros, l'arrêt rendu le 29 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que M. Roger X... devait rapport à la succession de Hermant X... de la valeur de la nue-propriété de l'immeuble sis 1 petite rue à Saint-les-Marquion (62) qu'il avait reçue le 21 décembre 2004, la valeur au jour du partage devant être retenue pour 85.000 €,
Aux motifs que « selon acte authentique du 21 décembre 2004, Hermant X... a fait donation à Roger X... de la nue-propriété de l'immeuble en cause (maison et jardin), la valeur de l'immeuble ayant été estimée en pleine propriété à 61.730 € ; (…) les éléments contenus au dossier (dont courriers échangés entre les parties ou entre les notaires, évaluations croisées) mettent la cour en mesure d'évaluer l'immeuble au jour le plus proche du partage, au chiffre de 85.000 € (compte tenu notamment de ce que l'immeuble a été reçu par Roger X... officiellement libre d'occupation mais en réalité occupé par Mme Gabrielle Z...). Roger X... doit rapport à la succession de la valeur de la seule nue-propriété qu'il a reçue, le notaire liquidateur devant calculer cette valeur en fonction de l'âge de Hermant X... au moment de la donation (à titre d'information, il sera rappelé que les parties à l'acte du 21 décembre 2004 ont évalué l'usufruit de Hermant X... à 3/10èmes de la valeur en pleine propriété) »,
Alors, d'une part, qu'en cas de donation en nue-propriété avec réserve d'usufruit au profit du donateur, la valeur à prendre en compte pour le rapport est celle de la pleine propriété du bien ; qu'en l'espèce, il est constant que Hermant X... avait fait donation de la nue-propriété de sa maison de Saint-les-Maquions à son fils Roger X..., en se réservant l'usufruit ; qu'après l'extinction de l'usufruit au décès du donateur, M. Roger X... s'est trouvé investi de la pleine propriété de l'immeuble ; qu'il devait dès rapporter à la succession de la valeur de la pleine propriété de l'immeuble, et non seulement de la nue-propriété ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 617, 843 et 860 du code civil.
Alors, d'autre part, que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ; qu'en fixant la valeur de l'immeuble donné à M. Roger X..., au jour le plus proche du partage, à 85.000 € pour tenir compte de son occupation par Mme Gabrielle Z..., dernière compagne de Hermant X..., sans rechercher si la maison était déjà occupée par Mme Z... au jour de la donation, ni déterminer la valeur du bien à l'époque du partage en fonction de son état au jour de la donation, la Cour d'appel a violé l'article 860 du code civil.