LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 30 mars 2010, RG 08/04859), que M. X... et la société Leca, copropriétaires, ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de la résidence Club Engaly I (le syndicat) en annulation de trois décisions de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 septembre 2006 ayant notamment décidé la suppression de la clause de para-hôtellerie de l'immeuble et mandaté le syndic pour faire modifier le règlement de copropriété en conséquence ;
Vu l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble son article 42 ;
Attendu que l'assemblée générale peut prendre, à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix, les décisions concernant la modification du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l'usage et l'administration des parties communes ;
Attendu que, pour débouter M. X... et la société Leca de leur demande, l'arrêt relève que l'article 9 du règlement de copropriété rappelle la liberté de jouissance des copropriétaires de leurs lots par la location sous condition de respecter le règlement de copropriété ainsi que la destination de l'immeuble telle que définie à l'article 6 prévoyant la destination de l'immeuble à l'usage d'habitation avec possibilité d'offrir les logements à la location commerciale en renvoyant au chapitre II comprenant l'article 7, seule disposition à faire référence aux règles de la para-hôtellerie et que cette dernière n'est plus pratiquée dans l'immeuble depuis 1985 et retient qu'il s'agissait par la décision, non pas de modifier la destination de l'immeuble, mais de constater une modification de cette destination intervenue depuis plus de dix ans de sorte que M. X... et la société Leca sont sans droit pour exiger de la copropriété le respect de la destination initiale de l'immeuble en raison de la prescription décennale prévue à l'article 42, alinéa 1er, de la loi du 10 juillet 1965 et donc pour imposer un vote contraire à celui visant à adapter le règlement de copropriété à la nouvelle réalité créatrice de droits ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le règlement de copropriété ne peut être modifié en ses stipulations relatives à la destination de l'immeuble que par une décision de l'assemblée générale des copropriétaires prise à l'unanimité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence club Engaly I aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence club Engaly I ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour M. X... et la société Leca
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé par moyens propres ou adoptés le jugement du Tribunal de Grande Instance de TARBES du 20 novembre 2008 en ce qu'il a débouté Monsieur X... et la SCI LECA de leurs demandes d'annulation de la résolutions n°10.
AUX MOTIFS QU'« il convient de rappeler que la résolution n°10répondant à différentes mises en demeure notifiées par la SCI LECA visant à faire respecter la destination para hôtelière de l'immeuble, a constaté l'inapplication de la clause de para hôtellerie au regard du classement administratif ainsi que sa caducité au vu de l'article 9 du règlement de copropriété et a décidé de sa suppression mandatant le syndic pour « faire suivre jusqu'en Mairie la validité de cette présente résolution et de faire modifier le règlement en conséquence » ;
Qu'en l'espèce, l'article 9 du règlement de copropriété établi. le 17 décembre 1979 rappelle la liberté de jouissance de chaque copropriétaire de ses lots par la location sous condition de respecter « les conditions du règlement ainsi que la destination de l'immeuble telle que définie à l'article 6 prévoyant la destination de l'immeuble à l'usage d'habitation avec possibilité d'offrir les logements à la location commerciale en renvoyant au chapitre II comprenant l'article 7, seule disposition à faire référence aux règles de la para hôtellerie ;
Qu'il est constant que cette restriction à la faculté de louer avait été édictée en contemplation d'un bail à construction signé entre la SCI qui avait construit l'immeuble et la commune d'Aragnouet sur un terrain situé en zone d'aménagement concerté créée pour l'aménagement de la station de Piau Engaly ; qu'il ne peut être sérieusement contesté que la para hôtellerie a cessé d'être pratiquée dans cette résidence depuis 1985 étant relevé qu'il n'est justifié d'aucune organisation conforme aux prescriptions réglementaires pour la gestion para hôtelière pour tout ou partie des lots de la résidence et qu'il n'est fourni par les appelants aucun contrat postérieur à cette date pour justifier d'une telle gestion ; que le tribunal a tiré de cette constatation la nécessité de mettre en conformité le règlement avec la réalité et a validé la résolution qui a officialisé ce changement de destination en estimant que seule la commune d'Aragnouet aurait pu se prévaloir de la violation de la destination para hôtelière ;
Qu'il est certain qu'un changement de destination de l'immeuble relève d'une décision à l'unanimité des copropriétaires prévue à l'article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 à savoir de tous les membres de la copropriété et non seulement des copropriétaires présents à l'assemblée générale ;
Que toutefois, il s'agit en l'espèce par la décision querellée non de modifier la destination de l'immeuble mais de constater une modification de cette destination intervenue depuis plus de dix ans même pour les propres lots des appelants de telle sorte que ces derniers qui sont bien recevables à contester la résolution n°10 pour avoir engagé leur action dans les deux mois de la notification du procès-verbal de l'assemblée générale qui l'a votée, étaient en revanche sans droit pour exiger de la copropriété le respect de la destination initiale de l'immeuble en raison de la prescription décennale prévue à l'article 42 alinéa 1 er de la loi du 10 juillet 1965 et donc pour imposer un vote contraire à celui visant à adapter le règlement de copropriété à la nouvelle réalité créatrice de droits ;
Qu'en effet, une telle opposition aurait été dans ces circonstances constitutives d'un abus de minorité rendant Monsieur X... et la SCI LECA mal fondés à contester cette résolution ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer, par motifs propres ou adoptés, le jugement du Tribunal de Grande Instance de TARBES du 20 novembre 2008 dans toute ses dispositions en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tiré de la nullité de l'assemblée générale du 09 septembre 2006, recevable l'action en annulation de la résolution n°10 et l'a débouté au fond de cette demande » (arrêt p. 4 alinéas 9 et 10 et p. 5 alinéas 1 à 5).
ALORS QUE la destination de l'immeuble prévue par le règlement de copropriété ne peut être modifiée que par décision de l'assemblée générale prise à l'unanimité des copropriétaires ; que le règlement de copropriété établi le 17 décembre 1979 stipulait la destination para hôtelière de l'immeuble ; que par sa résolution n°10, l'assemblée générale a constaté l'inapplication de la clause de parahôtellerie ; que pour débouter Monsieur X... et la SCI LECA de leur demande d'annulation de cette résolution qui, modifiant la destination de l'immeuble, ne pouvait être prise qu'à l'unanimité des copropriétaires, la Cour d'appel a considéré que la parahôtellerie ayant cessé en 1985 et que la décision querellée ayant pour objet de constater une modification de la destination qui est intervenue depuis plus de dix ans, ils étaient sans droit pour exiger de la copropriété le respect de la destination initiale de l'immeuble en raison de la prescription décennale prévue à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ; qu'en statuant ainsi quand la destination de l'immeuble prévue par le règlement de copropriété ne pouvait être modifiée que par décision de l'assemblée générale prise à l'unanimité des copropriétaires et sans constater l'existence d'une telle décision en 1985 pour faire cesser la destination para-hôtelière de l'immeuble, la Cour d'appel a violé les articles 26 et 42 de la loi du 10 juillet 1965.