LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que la copropriété était constituée de deux lots, que le règlement de copropriété stipulait qu'il n'existait qu'un compteur général d'eau situé dans les parties privatives du lot n° 2 dont le propriétaire devrait laisser le libre accès et que la répartition des frais de consommation d'eau se ferait entre les propriétaires tant que des branchements séparés n'auraient pas été installés, et que le règlement de copropriété était clair et ne nécessitait pas d'interprétation, et relevé que lorsque la société AP Design, locataire du local commercial composant le lot n° 1 appartenant à la société Cuwarole, s'était installée dans les lieux Mme X..., propriétaire du lot n° 2, avait procédé à la coupure de l'alimentation en eau de l'ensemble de la copropriété, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, et qui s'est placée au jour où elle statuait pour apprécier la réalité du trouble allégué, a pu en déduire que l'attitude de Mme X... était constitutive d'un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser et a pu retenir que la provision susceptible d'être allouée n'avait d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et la condamne à payer à Société Cuwarole la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils pour Mme X....
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé l'ordonnance entreprise qui a ordonné à Madame X... de rétablir l'alimentation en eau de la copropriété, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures à compter de la signification de l'ordonnance, lui a interdit de procéder à l'interruption de l'alimentation en eau de la copropriété, lui a enjoint de faire rétablir la facturation par VEOLIA au nom de la copropriété et l'a condamnée à verser à la SC1 CUWAROLE les sommes de 381'45 euros à titre provisionnel, correspondant au coût de la sommation interpellative, et de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, D'AVOIR condamné Madame X... à payer à la SC1 CUWAROLE une indemnité complémentaire de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et D'AVOIR rejeté toutes autres prétentions des parties ;
AUX MOTIFS QUE, considérant qu'aux termes de l'article 809 alinéa le' du Code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que le dommage imminent s'entend du « dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer » et le trouble manifestement illicite résulte de « toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit » ; qu'en l'espèce le règlement de copropriété dont les termes ont été précédemment rappelés est clair et précis et ne nécessite aucune interprétation, que l'appelante ne conteste pas avoir privé de toute alimentation en eau le locataire du lot no 2, qu'à l'évidence ces agissements perturbent gravement l'exploitation du fonds de commerce de ce dernier et lui causent un important préjudice ; que l'attitude de l'appelante, dont il est de plus démontré qu'elle a de nouveau procédé à la coupure de l'alimentation en eau du lot de copropriété voisin le 8 juin dernier, est constitutive d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser, que c'est donc à juste titre que l'ordonnance a enjoint à Madame X... de rétablir l'alimentation en eau et lui a fait interdiction de procéder à l'interruption de celle-ci ; que l'argumentation de l'appelante quant à l'absence de démarche de l'intimée à l'égard de la société VEOLIA est inopérante dès lors qu'il est démontré que cette dernière a entrepris vainement des démarches pour parvenir à la pose de compteurs séparés ; que de même l'appelante ne peut efficacement se prévaloir de ce qu'elle a été contrainte par le passé d'acquitter la somme de 960 € ensuite de la liquidation judiciaire de la précédente locataire pour justifier de son attitude abusive et ce alors même qu'elle ne se prévaut d'aucune vaine réclamation auprès des organes à la procédure collective, alors que l'intimée justifie lui avoir proposé de procéder au règlement de cette somme lorsqu'elle en a été informée ; que la mesure d'astreinte prononcée à l'appui de l'injonction faite à l'appelante de procéder au rétablissement de l'eau est justifiée dans son principe et en son montant compte tenu de la persistance de l'appelante dans son attitude, étant relevé qu'elle ne justifie nullement que la société VEOLIA en soit à l'initiative ; que, considérant que la juridiction des référés peut, dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, que le montant de la provision susceptible d'être ainsi allouée n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée ; que la SC1 CUWAROLE justifie avoir exposé la somme de 381'45 euros au titre de la sommation interpellative qu'elle a fait délivrer à Madame X... pour faire rétablir l'eau après mises en demeure infructueuses, que l'appelante qui ne conteste pas la réalité des frais ainsi exposés de son fait a été, à juste titre, condamnée en paiement d'une provision en remboursement de ceux-ci ; que, considérant que les demandes formées par Madame X... au titre de l'exécution de l'ordonnance querellée et dont il est établi qu'elles ont été présentées devant le juge de l'exécution doivent être écartées comme étant irrecevables ; que dans ces conditions, la décision déférée doit être confirmée en toutes ses dispositions ;
1. ALORS Qu'il incombe au juge des référés de se prononcer sur l'existence et la portée des règles de droit dont il est soutenu que leur méconnaissance causerait un trouble manifestement illicite ; que, pour statuer sur le prétendu caractère manifestement illicite du comportement de Madame X..., allégué par la SC1 CUWAROLE, la Cour d'appel s'est prononcée exclusivement au regard du règlement de copropriété, sans tenir compte de l'ensemble des relations contractuelles existant entre les propriétaires des deux lots, tel qu'il résultait notamment d'un accord verbal par lequel le propriétaire du lot no 1 a accepté de prendre à sa charge les frais minimes de consommation d'eau de Madame X... (lot no 2)' entachant son arrét d'un défaut de base légale au regard de l'article 809 alinéa le' du Code de procédure civile ;
2. ALORS QUE, pour apprécier l'absence ou l'existence d'un trouble manifestement illicite, le juge des référés doit, tant en première instance qu'en appel, se placer à la date à laquelle il prononce sa décision ; que, toutefois, lorsqu'il statue en tant que juge d'appel et qu'il constate, au jour de son arrêt, la disparition du trouble manifestement illicite ayant donné lieu au prononcé de mesures conservatoires ou de remise en état en première instance, il doit ensuite déterminer si la demande était justifiée lorsque le premier juge a statué ; qu'en ne précisant pas à quelle date elle se plaçait pour affirmer l'existence d'un trouble manifestement illicite, c'est-à-dire, soit à la date à laquelle elle statuait, soit à celle de l'ordonnance de référé, la Cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article 809 alinéa le' du Code de procédure civile ;
3. ALORS QUE de simples affirmations ne sauraient satisfaire aux exigences de motivation des jugements ; qu'en affirmant, sans viser aucun élément de preuve à l'appui de l'assertion selon laquelle « à l'évidence ces agissements perturbent gravement l'exploitation du fonds de commerce du locataire du lot no l et lui causent un important préjudice » (arrêt p. 5 5 3), la Cour d'appel a violé 1 'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en confirmant la condamnation de Madame X... au paiement d'une provision d'un montant de 381,45 euros à la SC1 CUWAROLE en remboursement de ses frais de sommation interpellative, alors que Madame X... faisait justement valoir, dans ses conclusions d'appel, que l'ensemble conventionnel, constitué par le règlement de copropriété modifié par un accord verbal conclu avec le propriétaire du lot de copropriété no 1, devait être interprété par le juge des référés, ce qui était de nature à faire naître une contestation sérieuse et à priver ce juge du pouvoir de condamner Madame X... au versement d'une provision, la Cour d'appel a violé l'article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile.