LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 24 février 2011), que M. et Mme X..., acquéreurs d'un appartement en l'état futur d'achèvement, livré le 29 septembre 1995 et réceptionné le 20 décembre 1995, après avoir obtenu en 1997 la désignation par le juge des référés d'un expert, ont assigné, le 4 mai 2005, en réparation de divers désordres, leur vendeur au droit duquel se trouve la société Compagnie immobilière Hermès ; que la cour d'appel les a notamment déboutés de leur demande en réparation des désordres affectant les volets roulants, la ventilation mécanique contrôlée et a rejeté leur demande de dommages-intérêts supplémentaires pour trouble de jouissance et pour préjudice moral ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel ayant retenu par un motif non contesté que les volets roulants étaient un élément d'équipement dissociable et relevé par motif adopté qu'aucune impropriété de l'ouvrage n'était justifiée, a pu décider que la réparation des désordres affectant les volets roulants installés au moment de la construction relevaient de la garantie biennale exclusive de toute autre action et que M. et Mme X... étaient irrecevables à agir comme forclos ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter M. et Mme X... de leur demande de reprise du système de ventilation mécanique contrôlée, la cour d'appel énonce que la production aux débats par les époux X... d'un rapport d'expertise non judiciaire daté du 27 avril 2010 s'avère inopérante alors qu'à trois reprises, le 29 novembre 1999, le 24 avril 2001 et dans ses conclusions, l'expert judiciaire avait fermement invité ceux-ci à lui fournir des éléments techniques de nature à justifier leurs dires, lui-même ;
Qu'en statuant ainsi sans examiner le rapport d'expertise amiable dont la communication régulière et la discussion contradictoire n'étaient pas contestées, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième et le quatrième moyens, réunis :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence de la partie du dispositif critiqué par le moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. et Mme X... de leur demande concernant la ventilation mécanique contrôlée, l'arrêt rendu le 24 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la société Compagnie immobilière Hermès aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Compagnie immobilière Hermès, la condamne à verser à M. et Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. et Mme X... du chef de leur demande concernant la VMC ;
AUX MOTIFS QUE les moyens des époux X... afférents à la VMC doivent en revanche être écartés de sorte que le jugement sera confirmé de ce chef ; que le premier juge s'est exactement déterminé en soulignant que malgré la durée des opérations d'expertise judiciaire la réalité de l'allégation de ce désordre n'avait pas été constatée ; que la production aux débats par les époux X... d'un rapport d'expertise non judiciaire daté du 27 avril 2010 s'avère inopérante alors qu'à trois reprises le 29 novembre 1999, le 24 avril 2001 et dans ses conclusions, l'expert judiciaire avait fermement invité ceux-ci à lui fournir des éléments techniques de nature à justifier leurs dires, lui-même n'ayant rien pu remarquer - et observant exactement que l'expertise n'avait pas pour objet de suppléer la carence des parties - mais qu'ils s'étaient abstenus de déférer à cette demande ;
1) ALORS QUE le juge ne peut refuser d'examiner une pièce dont la communication régulière et la discussion contradictoire ne sont pas contestée ; que rien n'interdit aux parties, après le dépôt du rapport de l'expert judiciaire, de produire aux débats d'autres éléments de preuve ; qu'un rapport d'expertise amiable constitue un mode de preuve recevable dès lors qu'il a été soumis à la discussion contradictoire des parties ; qu'en déclarant inopérant le rapport de l'expert M. Y..., régulièrement versé aux débats devant la Cour, sollicité après le prononcé du jugement, et en refusant ainsi de prendre en considération ce rapport, au motif inopérant que des éléments techniques n'auraient pas été fournis en réponse aux demandes de l'expert judiciaire, la Cour d'appel a violé les articles 9 et 16 du Code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2) ALORS QUE le juge ne peut écarter les prétentions d'une partie sans examiner l'ensemble des éléments de preuve fournis par cette partie ; qu'en l'espèce, en écartant la demande des consorts X... au titre des désordres affectant la VMC, sans à aucun moment examiner ni analyser le rapport d'expertise amiable régulièrement produit aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties, la cour d'appel a violé les articles 455 code de procédure civile et 1353 du code civil ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté comme prescrite la demande de M. et Mme X... en tant qu'elle concerne les éléments d'équipements dissociables (interrupteur du séjour, lames des volets, caissons des volets, contacteur extérieur du volet roulant, portes intérieures) ;
AUX MOTIFS QUE pour reprendre leur réclamation afférente aux volets roulants, que le tribunal a rejeté comme irrecevable pour cause de forclusion tirée de l'acquisition du délai biennal de la garantie de bon fonctionnement, les époux X... ne font pas grief au premier juge d'avoir retenu qu'il s'agissait d'éléments d'équipement, mais ils soutiennent que du fait que les caissons inclus dans les cloisons se trouvent inaccessibles depuis l'intérieur, ils sont indissociablement du bâtiment de sorte qu'ils ressortissent de la garantie décennale et que partant leur action à ce titre est recevable et bien fondée ; que toutefois sauf à en compléter les motifs, il apparaît que la confirmation du jugement s'impose de ce chef ; qu'en effet il résulte des constats de l'expert judiciaire, comme de ceux du cabinet
Y...
intervenu à la demande des époux X... que pour atteindre le caisson du volet de la salle de bains il faut démolir partiellement la cloison, mais cette dernière ne constitue pas aux sens de l'article 1792-2 du Code civil un ouvrage de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert ; que partant c'est bien exclusivement de la garantie légale biennale dont relèvent les volets et leurs caissons, de sorte que par suite du principe du non-cumul des garanties légales et contractuelles, les époux X... se trouvent aussi irrecevables à invoquer, en vertu de l'article 1147 du Code civil, la théorie des vices intermédiaires ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les éléments d'équipements dissociables sont soumis à un régime dualiste, ils relèvent de la garantie de bon fonctionnement lorsqu'ils sont installés lors de la construction de l'ouvrage… ; qu'il n'est justifié d'aucune impropriété de destination de l'ouvrage ; …que peuvent s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière des ouvrages de viabilité, d'ossature, de clos ou de couvert les éléments suivants : interrupteur du séjour, lames des volets, caisson des volets, contacteur extérieur du volet roulant, portes intérieures ;
ALORS QUE relève de la garantie décennale les désordres affectant un élément d'équipement, qu'il soit ou non dissociable, et qui rendent l'immeuble impropres à sa destination ; qu'en l'espèce, en écartant la demande des exposants comme ne relevait pas de la garantie décennale et étant partant prescrite, au motif, à lui seul inopérant, que les éléments d'équipement constitués par les volets roulants et leurs caissons étaient dissociables de l'ouvrage, sans rechercher comme elle y était explicitement invitée par les consorts X..., si les désordres affectant les volets roulants, qui empêchaient la lumière d'entrer, ne rendaient pas l'immeuble impropre à sa destination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les consorts X... du surplus de leur demande de réparation pour troubles de jouissance ;
AUX MOTIF QUE l'issue du litige fait ressortir que le tribunal a complètement réparé le trouble de jouissance subi par les époux X..., de sorte que de ce chef le jugement sera confirmé ;
ALORS QU'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef du premier et/ou du deuxième moyen de cassation entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif attaqué par le troisième moyen qui est dans leur dépendance nécessaire.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les consorts X... de leur demande au titre du préjudice moral ;
AUX MOTIF QUE faute d'établir avoir supporté un préjudice moral distinct du trouble de jouissance leur demande sera rejetée ;
ALORS QU'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef du premier et/ou du deuxième moyen de cassation entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif attaqué par le quatrième moyen qui est dans leur dépendance nécessaire.