LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par jugement du 18 novembre 1992, assorti de l'exécution provisoire et confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 mai 1993, le tribunal de grande instance de Paris a condamné solidairement la société Hauteville diffusion et M. X... à payer à la société Soclaine (la société) la somme de 3 926 883 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 1992 ; que la société a, suivant actes des 2 et 4 décembre 1992, fait pratiquer deux saisies-arrêts sur des parts sociales appartenant à M. X... ; que ce dernier les ayant cédées par acte du 31 mai 1995, M. Y..., avocat, a été constitué séquestre d'une somme de 12 000 000 francs sur le prix de la cession ; que la société a alors fait pratiquer, suivant acte du 4 juillet 1995, une saisie-attribution entre les mains de la Carpa sur le compte de M. Y... pour un montant en principal de 4 223 021, 60 francs, outre une provision pour intérêts à échoir et frais ; que par ordonnance de référé du 16 juillet 1999, M. Y... a été déchargé de sa mission de séquestre conventionnel et le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris désigné comme séquestre judiciaire ; que celui-ci a avisé la société, qui avait actualisé sa créance à hauteur de 6 931 695, 22 francs, qu'il ne détenait qu'une somme de 5 213 632, 71 francs ; que reprochant à M. Y... de s'être fautivement défait d'une partie des fonds séquestrés et de l'avoir ainsi privée du règlement de l'intégralité de sa créance, la société a recherché sa responsabilité ;
Attendu que pour condamner la SCP B...
Y..., prise en la personne de son liquidateur amiable, M. Y..., et M. Y... au paiement d'une certaine somme en réparation de la faute commise par ce dernier, l'arrêt énonce que le décompte de la créance, produit par la société et non critiqué quant au calcul des intérêts effectué sur la seule somme de 3 926 883 francs en principal, établit qu'après versement de la somme restant séquestrée, soit 5 213 632, 71 francs, en exécution d'une décision du juge de l'exécution du 31 mai 2001, la société était encore créancière de M. X... pour la somme de 314 283, 68 euros, cette somme représentant son préjudice en lien avec la faute de M. Y... ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que M. Y..., déchargé de ses fonctions de séquestre conventionnel par ordonnance de référé du 16 juillet 1999, s'était dessaisi, entre les mains du séquestre judiciaire, des fonds qu'il détenait encore, de sorte que, postérieurement à ce dessaisissement, les conséquences dommageables du paiement tardif de la créance étaient sans lien de causalité avec la faute retenue à son encontre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré la SCP B...
Y... recevable en son intervention volontaire, l'arrêt rendu le 4 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la société Soclaine et MM. Z... et A..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société B...
Y... et M. Y...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SCP B...
Y..., prise en la personne de son liquidateur amiable, M. Y..., et M. Y..., à payer à la société Soclaine, assistée de Me Z..., administrateur judiciaire, et ayant pour mandataire judiciaire Me A..., la somme de 314 283, 68 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2006 ;
AUX MOTIFS QUE la société Soclaine, à la suite d'un jugement du Tribunal de commerce de PARIS du 16 juin 1988 arrêtant le plan de cession totale des actifs de la SARL Lola Ascore, a acquis un fonds de commerce qu'elle a donné en location-gérance à la société Hauteville diffusion, M. X..., gérant de cette société, se portant caution des engagements de celle-ci ; que le plan de cession, après de nombreuses procédures, a été confirmé, la Cour d'appel de VERSAILLES, par arrêt du 2 mai 2000, statuant sur renvoi après cassation, ayant déclaré irrecevable le recours en révision du jugement du 16 juin 1988 ; que des loyers dus au titre de la location-gérance étant restés impayés, la société Soclaine a saisi le Tribunal de grande instance de PARIS qui, par jugement du 18 novembre 1992, assorti de l'exécution provisoire, a notamment condamné solidairement la société Hauteville diffusion et M. X... à lui payer la somme de 3 926 883 francs avec intérêts à compter du 26 août 1992 ; que par arrêt du 14 mai 1993 la Cour d'appel de PARIS a, entre autres dispositions, confirmé le jugement pour ce qui concerne la condamnation de M. X... au paiement de la somme de 3 926 883 francs ; que la société Soclaine a fait pratiquer, les 2 et 4 décembre 1992, des saisies-arrêts à l'encontre de M. X..., sur les parts sociales détenues par celui-ci dans la société Cirtes et la société Radio Holding pour avoir paiement de la somme principale de 3 926 883 francs, de celle de 1 600 000 francs, au titre de dommages et intérêts outre les intérêts et frais ; que par jugement du 4 février 1994, le Tribunal de grande instance de PARIS à validé les saisies-arrêts à hauteur des condamnations contenues dans le jugement du 18 novembre 1992 et l'arrêt du 14 mai 1993 dans les limites des causes de la saisie, ces dispositions étant confirmées par arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 16 août 2001 ; que le 31 mai 1995, M. X... a cédé les parts qu'il détenait dans la société Cirtes à la société Euler investissements mais, ces parts faisant l'objet des saisies-arrêts des 2 et 4 décembre 1992 et une procédure étant en cours à l'encontre de la société Cirtes qui n'avait pas procédé à la déclaration affirmative, aux fins qu'elle soit reconnue débitrice des causes de la saisie, il a été inséré à l'acte de cession, une convention de séquestre, Me Y..., avocat, étant constitué séquestre de deux somme de 6 000 000 francs sur le prix de cette cession ; que le 4 juillet 1995 la société Soclaine a fait pratiquer, au préjudice de M. X..., une saisie attribution entre les mains de la CARPA, sur le compte de Me Y..., pour avoir paiement de la somme en principal de 4 223 021, 60 francs outre une provision pour intérêts à échoir et frais ; que selon un avenant à la convention du 31 mai 1995, en date du 11 décembre 1995, le montant de la deuxième somme séquestrée a été réduit de 2 000 000 francs dont Me Y... se libérait entre les mains de M. X... ; qu'à la suite d'un jugement rendu le 8 juillet 1997 par le Tribunal de commerce de PARIS, la société Euler Investissements a autorisé Me Y... à se libérer de la somme de 5 000 000 francs outre les intérêts au profit de M. X..., sauf les oppositions signifiées, autres que celles de la société Soclaine ; que par ordonnance de référé du 5 juillet 1999, Me Y... a été déchargé de sa mission de séquestre conventionnel et Mme le bâtonnier de l'Ordre des avocats de PARIS désignée aux fins de conserver les sommes subsistantes celle-ci s'élevant à 5 213 632, 71 francs ; que le 27 octobre 1999, la société Soclaine a fait procéder, au préjudice de M. X..., à une nouvelle saisie attribution entre les mains du séquestre judiciaire, pour avoir paiement de la somme de 6 931 695, 22 francs, puis a saisi le Juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de PARIS aux fins d'obtenir le versement entre ses mains, des sommes détenues par le séquestre judiciaire, à hauteur des causes de la saisie attribution ; que par jugement du 31 mai 2001, le Juge de l'exécution, après avoir rappelé que par arrêt du 29 mars 2001, la Cour d'appel de PARIS avait déclaré mal fondée la contestation formée par M. X... à l'encontre de la saisie attribution effectuée le 27 octobre 1999, retenu qu'en raison de l'effet attributif immédiat s'attachant la saisie attribution effectuée le 5 juillet 1995 par la société Soclaine entre les mains de Me Y... en vertu des titres exécutoires détenus à l'encontre de M. X..., la saisissante était devenue, à cette date, seul titulaire de la créance de prix ainsi séquestrés et précisé que la saisie attribution pratiquée le 27 octobre 1999 s'analysait comme une simple réitération de celle précédemment diligentée le 4 juillet 1995, à : dit que la saisie attribution pratiquée le 27 octobre 1999 par la société Soclaine entre les mains du Bâtonnier de l'Ordre des avocats de PARIS au préjudice de M. X... était pleinement efficace et avait entraîné à son profit l'attribution d'une somme de 5 213 632, 71 francs, ordonné en conséquence au Bâtonnier de l'Ordre des avocats de PARIS de remettre à la société Soclaine cette somme de 5 213 632, 71 francs sous réserve toutefois des causes de divers avis à tiers détenteur est saisie attribution ; que c'est dans ces circonstances que la société Soclaine, alléguant ne pas avoir été réglée de l'intégralité de sa créance par la faute de Me Y..., l'a assigné en responsabilité devant le Tribunal de grande instance de PARIS (…) ; que la SCP B...
Y... et M. Y... ne contestent plus qu'une faute a été commise lors du déblocage des fonds dont M. Y... avait été déclaré séquestre, l'accord de la société Soclaine n'ayant pas été requis (…) ; que la société Soclaine, Me Z... ès qualités et Me A... ès qualités se prévalent de l'absence de recouvrement de la créance de la société Soclaine à l'encontre du seul M. X... et n'invoquent aucune décision de condamnation au préjudice de la société Cirtes pour défaut de déclaration affirmative ; qu'il y a lieu de rappeler ici que par l'arrêt précédemment cité du 14 mai 1993, M. X... a été condamné à payer à la société Soclaine la somme de 3 926 883 francs outre les intérêts légaux au taux légal à compter du 26 août 1992 ; que le décompte de la créance produit par la société Soclaine (pièce n° 29) et non critiqué quant au calcul des intérêts effectués sur la seule somme de 3 926 883 francs en principal (soit 598 649, 45 euros), M. X... n'ayant pas été condamné au paiement d'une indemnité d'occupation, établit qu'après versement de la somme restant séquestrée, soit 5 213 632, 71 francs (794 813, 18 euros), en exécution de la décision du Juge de l'exécution du 31 mai 2001 à laquelle M. Y... était parti et qui n'a pas été contestée, la société Soclaine était encore créancière de M. X... pour la somme de 314 283, 68 euros, ladite somme représentant son préjudice en lien avec la faute de M. Y... ;
1°) ALORS QUE le préjudice subi par le créancier en conséquence du versement à un tiers d'une partie des fonds sur lesquels il avait pratiqué une saisie-attribution, consiste dans la fraction des fonds conservés par la saisie qu'il n'a pas perçus ; qu'en retenant que le préjudice subi par la société Soclaine en conséquence du déblocage, sans son accord, d'une partie des fonds détenus par M. Y..., sur lesquels elle avait pratiqué une saisie-attribution, consistait dans la totalité de la somme dont elle était encore créancière après versement entre ses mains des fonds demeurant disponibles, et non dans la différence entre le montant des sommes conservées par la saisie-attribution, qu'elle aurait dû obtenir en exécution de cette saisie, et le montant des sommes effectivement perçues, la Cour d'appel, qui n'a pas replacé la créancière dans la situation qui aurait été la sienne en l'absence du fait prétendument dommageable, a violé l'article 1382 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'auteur d'une faute n'est responsable que du préjudice que cette faute a directement causé ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'en exécution d'une ordonnance de référé du 16 juillet 1999, M. Y... avait versé l'intégralité des fonds qu'il détenait encore au séquestre judiciaire, entre les mains duquel la société Soclaine avait pratiqué une saisie-attribution le 27 octobre 1999, en sorte que, postérieurement à ce dessaisissement, les conséquences du paiement tardif de la créance était sans lien de causalité direct avec sa faute, consistant dans le fait de s'être dessaisi prématurément d'une partie des sommes qu'il avait détenues ; qu'en condamnant néanmoins M. Y... et la SCP B...
Y... à payer à la société Soclaine la totalité des sommes dont elle était encore créancière après que ces fonds lui ont été versés en 2001, en ce compris les intérêts qui auraient couru après le versement des fonds au séquestre judiciaire, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.