LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... ont vécu en concubinage pendant plusieurs années ; qu'après leur séparation, celle-ci a, le 27 décembre 2005, assigné celui-là, notamment, en paiement d'une indemnité d'enrichissement sans cause du fait de sa contribution financière à l'acquisition d'un bateau dénommé " Le Bacchus ", dont M. X... serait seul propriétaire ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Attendu que cette branche ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1371 du code civil ;
Attendu que, pour fixer à la somme de 53 670, 56 euros le montant de l'indemnité due par M. X... à Mme Y..., sur le fondement de l'enrichissement sans cause, l'arrêt, par motifs adoptés, retient que cette dernière s'est appauvrie de cette somme, réglée sur ses propres deniers, pour contribuer au financement de l'achat du navire " Le Bacchus ", propriété exclusive de M. X... et participer ainsi au règlement d'une dette personnelle de ce dernier ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher quelle était, au jour de l'introduction de l'instance, la valeur du bateau " Le Bacchus ", constitutif de l'enrichissement de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement entrepris, il a fixé à la somme de 53 670, 56 euros le montant de l'indemnité due par M. X... à Mme Y... pour l'acquisition du bateau " Le Bacchus ", l'arrêt rendu le 1er juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné, au titre de l'enrichissement sans cause, Monsieur André X... à payer à Madame Y... les sommes de 53. 600, 56 €, 1. 858, 20 €, 1. 020, 50 €, 9. 146, 94 € et 2. 667, 86 €,
AUX MOTIFS QUE " Mme Y... a d'abord recherché la propriété du navire BACCHUS ; qu'en cause d'appel, elle ne conteste plus que M. X... soit propriétaire du bateau, mais agit sur le fondement de l'enrichissement sans cause ; que sur le principe même de l'action, il peut difficilement être contesté que les sommes payées par Mme Y... et ayant contribué à l'achat du bateau ont enrichi M. X... dès lors que sa qualité de propriétaire n'est plus contestée ; qu'il est essentiel de relever que toute l'argumentation en défense de M. X... revient à solliciter, y compris par voie d'expertise, un compte entre les parties, et non pas à contester l'absence de cause invoquée par Mme Y... ; qu'ainsi, il n'est nullement invoqué que Mme Y... ait agi dans une intention libérale à l'égard de son concubin à l'époque, ni que l'enrichissement consécutif à la propriété du navire trouverait sa cause dans le paiement (allégué) par M. X... de tout ou partie du remboursement du prêt afférent à la maison de BOURG DE PEAGE qui appartient en propre à Mme Y... et où résidait le couple ; qu'ainsi, et dès lors qu'aucune cause n'est alléguée qui viendrait ôter tout fondement à l'action principale, la Cour a pour mission première d'évaluer dans quelle proportion Mme Y... a participé à l'achat du bateau qui ne lui appartient pas, le reste de sa mission consistant à évaluer la recevabilité et l'utilité d'une demande d'expertise qui sous-tend en réalité une demande reconventionnelle de M. X... de compte entre les parties, ce dernier estimant être créancier de Mme Y... au titre notamment d'un emprunt immobilier en date de 1992 ; Sur l'enrichissement résultant de l'achat de BACCHUS, que les sommes figurant au crédit d'un compte joint sont propriété indivise des co-titulaires ; que M. X... se borne à affirmer qu'il alimentait seul le compte joint, que Mme Y... n'avait pas d'emploi ou en tout cas des revenus restreints ; que M. X..., à l'appui de son argumentation, fait état de 7 150 € dont il a crédité le compte joint sur la période allant du 18112/ 02 au 13112/ 03, alors même que le BACCHUS a été acquis en avril 2002, au moyen d'un prêt souscrit le 8 avril 2002, et d'une reprise du bateau SAGA 27 pour 22 865 € dans des conditions qui seront examinées infra ; qu'il n'est pas contesté que 22 mensualités du prêt ont été honorées, à partir du compte joint des deux concubins, jusqu'à la vente du bien de Mme Y... sur lequel hypothèque avait été prise par la banque, qui a été purgée par le notaire au profit de la banque le 6/ 02/ 04 pour un montant de 39 841, 85 € (chèque de la caisse des dépôts versé au dossier) ; que de même n'est pas autrement discuté ou commenté le virement en faveur de Z... (22/ 03/ 02) depuis le compte joint pour un montant de 18 294 € provenant du remboursement anticipé partiel d'un contrat Optilion ; qu'ainsi, et dès lors que Mme Y... indique elle aussi sans être démentie avoir alimenté le compte joint (virement permanent mensuel de 327 €, 20 000 F le 16/ 10/ 00- pièce n " 37), les apports qui ont pu être opérés par M. X... sur le compte joint ne sont pas susceptibles de contrebattre le caractère indivis des fonds de ce compte qui appartiennent aux co-titulaires, a fortiori s'agissant des montants de 39. 841, 85 € (purge de l'hypothèque de Bourg de Péage) et de 18 294 € (contrat Optilion) dont la démonstration n'est absolument pas rapportée (ni même tentée) qu'ils aient pu appartenir en propre à M. X... ; qu'en dernier lieu, M. X... affirme que la somme de 39841, 85 € provient de son compte C. L n° 4779 U et produit un relevé bancaire en ce sens en date du 27/ 02/ 04 qui, en réalité, ne fait état que d'un prélèvement du 9/ 02/ 04, contrepassé le 11/ 02 par une opération de remise de chèque pour le même montant ; qu'ainsi, M. X... succombe à rapporter la preuve d'un paiement personnel de 39 841, 85 € ayant servi à acquérir le bateau, l'attestation d'un sieur A... sur la réalité d'un accident dont il a été victime ne suppléant nullement cette obligation qui lui incombe ; qu'enfin, M. X... invoque le règlement par un assureur d'un sinistre résultant d'un accident dont il a été victime, mais ne soumet à la Cour aucun élément justificatif ; qu'il serait absolument extraordinaire que le règlement de l'assureur soit égal, au centime d'euro près à la somme revenant au Crédit Lyonnais prêteur après purge de l'hypothèque ; que M. X... ne commente ni ne conteste à cet égard les courriers exhaustifs, précis et concordants du notaire B... qui ne laissent subsister aucune ambigüité sur le paiement du banquier à partir des sommes provenant de la vente du bien propre appartenant à Mme Y... (cf. pièce 23 : relevé de compte du notaire en date du 25/ 04/ 05) ; que le jugement de premier ressort ne peut donc qu'être confirmé, dès lors que la demande d'expertise, à la supposer recevable, n'est pas fondée et a fortiori susceptible de suspendre l'obtention du titre recherché par Mme Y... " (arrêt, p. 4 à 6),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE " Sur le fondement de l'article 1371 du code civil, il est admis que celui qui démontre qu'il s'est appauvri en procurant corrélativement à autrui un enrichissement sans cause légitime, peut agir pour solliciter de celui qui s'est enrichi, une indemnisation correspondant à la perte subie par son patrimoine, à 1 : 3 date où l'appauvrissement a été consommé. En l'espèce il est établi, et au demeurant non contesté par Monsieur Michel X... que Madame Mireille Y... a contribué au financement du prix d'acquisition du navire " LE BACCHUS " dont il est l'unique propriétaire. Il résulte des relevés du compte joint que Madame Mireille Y... et Monsieur Michel X... avaient ouvert dans les livres du Crédit Lyonnais pendant la période de leur concubinage d'une part, que l'acompte du prix de vente du bateau d'un montant de 18 294 euros a été prélevé le 29 mars 2004 sur ce compte joint, et d'autre part que les échéances mensuelle d'un montant de 425, 61 euros du crédit de 42685 euros qu'ils avaient contracté solidairement le 8 avril 2002 ont été prélevées sur ce même compte joint entre le 12 mai 2002 et le 12 février 2004 inclus, soit une somme complémentaire de 9463, 42 euros à laquelle Madame Mireille Y... a également contribué par moitié. Il est en outre prouvé par la copie de la lettre-chèque adressée par le Notaire devant lequel Madame Mireille Y... a passé la vente de son bien immobilier de BOURG DE PEAGE le 6 février 2004, que la somme de 39 84. 1, 85 euros a été prélevée au profit du CREDIT LYONNAIS qui en a attesté le 12 mai 2004, sur le prix de vente de ce bien propre afin de solder le prêt affecté spécialement à l'acquisition du navire " BACCHUS " qu'elle avait souscrit solidairement avec Monsieur Michel X..., et obtenir ainsi mainlevée de'l'hypothèque qui grevait son bien immobilier, à titre de garantie du prêt dont s'agit. Ces éléments démontrent incontestablement que Madame Mireille Y... a contribué au financement du prix d'achat du bateau de Monsieur Michel X..., en premier lieu, à concurrence des sommes de 9147 euros et de 4681. 71 euros, qui représentent la moitié des sommes réglées à partir du compte courant, et en second lieu à concurrence de la somme de 39841, 86 euros. S'agissant par contre des frais, droits, timbres, émoluments du notaire et coût des formalités auprès de la conservation des hypothèques qui ont été réglés par Madame Mireille Y... à concurrence de 1208, 20 euros Madame Mireille Y... est défaillante dans la démonstration qui lui incombe de la corrélation directe qui doit nécessairement exister entre son appauvrissement et l'enrichissement de Monsieur Michel X... pour lui permettre de fonder son action en indemnisation, à défaut de démontrer qu'il s'agissait de frais indispensables à l'acquisition du navire " BACCHUS ", alors même que chacun d'eux avait déjà accepté dès le 22 mars 2002, l'offre de prêt que leur avait proposée la banque le 20 mars 2002, à concurrence d'un même montant de 42 685 euros, aux mêmes conditions que celles stipulées dans l'acte notarié ultérieur, mais sans demande de garantie hypothécaire. Dans ces conditions la somme de 1208, 20 € ne peut être incluse dans l'indemnité destinée à compenser l'appauvrissement subi par Madame Mireille Y... qui doit être en corrélation directe avec l'enrichissement dont a bénéficié Monsieur Michel X.... S'agissant par ailleurs de l'apport d'un montant de 22. 865 €, correspondant au prix de la vente du navire " Liberty " qu'avait réalisée1'entreprise " Constance BOAT " qui l'avait en dépôt vente avec mandat d'affecter le prix à l'acquisition du nouveau bateau, il ne peut être inclus dans la contribution apportée par Madame Mireille Y... au financement du navire " BACCHUS ", dès lors qu'il résulte expressément du courrier daté du 22 juin 2004 qu'avait adressé ce mandataire à Madame Mireille Y..., que l'acte de francisation du navire était établi au seul nom de ce dernier qui en était " l'unique propriétaire comme étant détenteur de 100 % des parts et qu'aucune preuve contraire de cette propriété exclusive de ce navire n'est rapportée par la demanderesse. De la même façon, Madame Mireille Y... ne peut, au titre d'un enrichissement sans cause de Monsieur Michel X..., prétendre au versement d'une indemnisation à concurrence d'une somme de 1065 euros, qu'elle indique correspondre au paiement par ses deniers de la prime d'assurance du " BACCHUS ", sur la base d'une simple photocopie d'un chèque de ce montant qu'elle a établi le 29 janvier 2003 à l'ordre d'Assurances et finances sélection MARSEILLE ", alors qu'elle ne démontre aucunement l'affectation de cette somme, et qu'elle ne rapporte donc pas la preuve qu'il existerait un lien de causalité entre ce règlement et un enrichissement corrélatif dont Monsieur Michel X... aurait bénéficié sans cause légitime. Madame Mireille Y... s'est donc appauvrie d'une somme totale de 521 670, 56 euros réglée sur ses propres deniers, pour contribuer au financement du prix d'achat du navire LE " BACCHUS " propriété exclusive de Monsieur Michel X... et participer ainsi au règlement d'une dette personnelle de ce dernier. Monsieur Michel X... ne démontrant pas que la participation de Madame Mireille Y... au financement du prix d'achat de son navire qui lui a procuré un enrichissement corrélatif, ait eu une contrepartie quelconque, il sera fait droit è la demande d'indemnisation que formule Madame Mireille Y... sur le fondement de l'enrichissement sans cause. Monsieur Michel X... sera condamné à payer à Madame Mireille Y... une indemnité d'un montant de 53670, 56 euros, avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement en application de l'article 1153-1 du code civil, s'agissant d'intérêts moratoires produits par une indemnité fixée par décision de justice " (jugement, p. 8 et 9),
1°) ALORS QUE l'action de in rem verso ne tend à procurer à la personne appauvrie qu'une indemnité égale à la moins élevée des deux sommes représentatives, l'une de l'enrichissement, qui doit être apprécié au jour où l'action est intentée, l'autre de l'appauvrissement ;
Qu'en l'espèce, pour condamner Monsieur André X... à payer la somme de 53. 670, 56 € au titre d'un prétendu enrichissement sans cause, les juges du fond ont simplement relevé que Madame Y... s'est appauvrie d'une somme de 53. 670, 56 € réglée sur ses propres deniers pour contribuer au financement du prix d'acquisition du bateau « Le Bacchus » dont Monsieur X... est l'unique propriétaire et participer ainsi au règlement d'une dette personnelle de ce dernier ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher le montant de l'enrichissement de Monsieur X... au jour où l'action avait été intentée par Madame Y..., la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1371 du code civil ;
2°) ALORS QUE l'action de in rem verso, admise dans le cas où le patrimoine d'une personne se trouve, sans cause légitime, enrichi au détriment de celui d'une autre personne, ne peut trouver son application lorsque celle-ci a agi dans son intérêt et à ses risques et périls ;
Qu'en l'espèce, dans ses écritures d'appel, Monsieur André X... faisait valoir, que sa concubine, Madame Y..., ne travaillait pas et ne disposait d'aucun revenu propre ; qu'elle ne pouvait donc faire personnellement face aux charges de la vie courante, réalisant ainsi une économie substantielle, justifiant ainsi un intérêt personnel au maintien de ses relations de concubinage et au versement des sommes qu'elle prétend avoir effectuées ;
Qu'en condamnant néanmoins Monsieur André X... à payer une somme au titre d'un prétendu enrichissement sans cause, alors que Madame Y... avait agi dans son intérêt propre et à ses risques et périls, la Cour d'appel a violé l'article 1371 du code civil.