LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1er de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et à la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale (la Convention) ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que par acte d'huissier de justice du 18 août 2009, la société Comtesse du Barry (la société) a transmis au procureur général de la République et canton de Genève la copie certifiée conforme d'un jugement réputé contradictoire condamnant M. X...au paiement d'une certaine somme, afin que ce jugement lui soit signifié selon les modalités de la Convention ; que par lettre du 10 décembre 2009, l'autorité helvétique a indiqué à l'huissier de justice que le jugement n'avait pu être remis à M. X..., au motif qu'il avait quitté le territoire suisse ; que la société ayant engagé une procédure de saisie-immobilière à l'encontre de M. X..., celui-ci, ainsi que son épouse, ont notamment soulevé la caducité du jugement servant de fondement aux poursuites ;
Attendu que pour accueillir cette demande et prononcer la nullité du commandement et de la procédure subséquente, l'arrêt retient que l'acte a été retourné non exécuté à l'huissier de justice français, que si l'enquête jointe à la transmission indiquait que M. X...avait quitté le territoire suisse pour la France en juin 2009, ce renseignement était cependant inexact, ce dernier justifiant de son nouveau domicile à Genève, qu'aucune démarche n'avait été effectuée par l'huissier de justice à la suite de ce retour et qu'aucun procès-verbal de recherche n'avait été dressé, de sorte que le jugement n'avait jamais été notifié à M. X...;
Qu'en statuant ainsi, alors que la signification du jugement avait été faite, conformément aux dispositions de la Convention, au dernier domicile connu de M. X..., qui indiquait lui-même dans ses écritures que cette adresse était encore la sienne au moment de la tentative de remise de l'acte, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. et Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Comtesse du Barry la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils pour la société La Comtesse du Barry
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR constaté la caducité du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains le 18 juin 2009, prononcé la nullité du commandement de payer du 30 septembre 2010 et de la procédure subséquente et débouté les époux X...de leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE le jugement du 18 juin 2009, réputé contradictoire, a été rendu à l'encontre de Gérard X...demeurant ...à Douvaine (Haute-Savoie) ; qu'il faisait suite à une assignation du 16 février 2009 dont il n'est pas contesté qu'elle ait été faite à cette adresse ; que, le 12 mars 2009, la SCP A...adressait à Gérard X...copie d'une dénonciation d'inscription hypothécaire provisoire à la demande de la société Comtesse du Barry à l'adresse suivante : ...Carouge Suisse ; que le 18 août 2009, la SCP A...transmettait au parquet général de Genève transmission du jugement du 18 juin 2009 à fin de signification ; que par courrier du 10 décembre 2009, le procureur général de Genève retournait non exécuté l'acte à la SCP A...; que l'enquête jointe à cette transmission indiquait « après vérifications et contact avec le propriétaire du bâtiment, sis ... à Carouge, il s'avère que sieur X...a quitté le territoire Suisse pour la France, en juin 2009 » ; que ce renseignement se révèle inexact puisque Gérard X...justifie d'un changement d'adresse en date du 7 mai 2010, son nouveau domicile étant désormais fixé ...à Genève ; que cette adresse est d'ailleurs reprise dans une attestation délivrée par la République et Canton de Genève le 22 mars 2011 ; qu'en tout état de cause, aucune démarche n'a été effectuée par l'huissier à la suite de ce retour, notamment à Douvaine, domicile attribué au défendeur par le jugement litigieux et aucun procès-verbal de recherche n'a été dressé, si bien que le jugement du 18 juin 2009 n'a jamais été notifié à l'appelant ; que dans la mesure où la société Comtesse du Barry ne justifie pas d'une notification dans le délai de six mois, ce jugement est devenu non avenu en application des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile ; qu'elle ne dispose donc pas de titre pour exécuter une saisie immobilière ; qu'en l'absence de titre, le commandement de payer valant saisie immobilière, délivré le 30 septembre 2010 est nul, ainsi que la procédure subséquente (arrêt, pp. 4-5) ;
ALORS QUE la signification d'un jugement, faite à la dernière adresse connue du destinataire, située en Suisse, selon les modalités de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965, est régulière, sans qu'il y ait lieu de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, quand bien même l'acte n'aurait pu être remis au destinataire par l'autorité helvétique compétente en raison d'un changement d'adresse ; que l'arrêt ayant constaté que le dernier domicile connu de Gérard X...était sis ..., Carouge, en Suisse, et la signification opérée par les autorités helvétiques étant ainsi la seule démarche requise par la Convention de La Haye, la cour d'appel, en exigeant que l'huissier de justice accomplisse en outre des recherches complémentaires et dresse, en dernier recours, un procès-verbal de recherches infructueuses, a violé les articles 1er et 5 de la convention susvisée ;
ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU'en reprochant à l'huissier de justice de n'avoir pas accompli des recherches complémentaires et dressé, en dernier recours, un procès-verbal de recherches infructueuses, sans cependant rechercher si les conclusions d'appel, sur ce point convergentes, des parties, ne désignaient pas l'adresse du ..., Carouge, en Suisse comme le dernier domicile connu de Gérard X..., et si la signification opérée par les autorités helvétiques n'était ainsi pas la seule démarche requise par la Convention de La Haye, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.