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14/03/2013 | FRANCE | N°12-11856

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 mars 2013, 12-11856


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant travaillé sur le site d'Andancette, initialement propriété de la société Everite, puis de la société Saint-Gobain Pont-à-Mousson (la société), de 1966 à 1997, Jean-Jacques X... a été atteint d'épaississement pleural, affection reconnue au titre des maladies professionnelles par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche (la caisse) le 2 juillet 2002 ; que le 30 août 2004, il a déclaré une nouvelle affection, un mésothéliome, que la caisse a

prise en charge au titre de la législation professionnelle le 24 octobre 2005...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant travaillé sur le site d'Andancette, initialement propriété de la société Everite, puis de la société Saint-Gobain Pont-à-Mousson (la société), de 1966 à 1997, Jean-Jacques X... a été atteint d'épaississement pleural, affection reconnue au titre des maladies professionnelles par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche (la caisse) le 2 juillet 2002 ; que le 30 août 2004, il a déclaré une nouvelle affection, un mésothéliome, que la caisse a prise en charge au titre de la législation professionnelle le 24 octobre 2005 ; qu'il est décédé des suites de cette maladie le 28 octobre 2007 ; que la caisse ayant pris en charge le décès au titre de la législation professionnelle le 24 janvier 2008, les consorts X... ont engagé, le 6 août 2008, une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur devant une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 431-2, L. 461-1 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par la législation sur les maladies professionnelles se prescrivent par deux ans à compter, soit de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle, soit de la cessation du travail en raison de la maladie constatée, soit de la cessation du paiement des indemnités journalières, soit encore de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ; que la détermination du point de départ de la prescription s'impose, y compris pour l'ouverture, postérieurement au décès de la victime, des droits des ayants droit de celle-ci ;
Attendu que pour dire que la prescription n'est pas acquise, l'arrêt retient que le point de départ du délai de deux ans doit être fixé au 24 janvier 2008, date de notification de la prise en charge du décès par la caisse ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'affection dont est décédé Jean-Jacques X... avait été prise en charge le 24 octobre 2005 au titre de la législation professionnelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare prescrite l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Saint-Gobain PAM
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir « réformé le jugement déféré » et « condamné la société SAINT GOBAIN PAM à payer à la CPAM de l'ARDECHE les sommes allouées en réparation des préjudices personnels à la victime Jean-Jacques X... et à ses ayants droit » ;
AUX MOTIFS QUE « sur la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable. La thèse de l'employeur : en matière de maladie professionnelle susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le point de départ de la prescription se situe à la date à laquelle est intervenue la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du salarié, que l'action en recherche de la faute inexcusable soit initiée par le salarié lui même, par le FIVA subrogé dans ses droits ou par ses ayants droit. Ainsi, la cour de cassation a-t-elle jugé le 29 juin 2004 n°03-10789 que les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par la législation sur les maladies professionnelles se prescrivent par deux ans à compter, (...) de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie; que la détermination du point de départ de la prescription s'impose, y compris pour l'ouverture, postérieurement au décès de la victime, des droits des ayants droit de celle-ci. Le mésothéliome de Monsieur X... ayant été pris en charge le 24 octobre 2005 au titre du tableau 30B des maladies professionnelles, Monsieur X... ou ses ayants-droit disposaient d'un délai expirant le 24 octobre 2007 au plus tard pour initier le recours en faute inexcusable. Ce n'est que le 6 août 2008 que les consorts X... ont saisi la Caisse primaire d'assurance maladie de leur recours contre elle. En écartant cette prescription par une motivation lapidaire, les premiers juges ont manifestement confondu les points de départ du délai en prescription de l'action en faute inexcusable prévue par l'article L. 452-3 du Code de la Sécurité Sociale et celui de l'action en révision prévue à l'alinéa 3 de l'article L. 443-1 du même code. Seule la prescription de la demande en révision commence â courir du jour du décès. Les consorts X... ne peuvent en outre revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998: le mésothéliome de Monsieur X... ayant été médicalement constaté le 16 août 2005, le régime dérogatoire de réouverture des droits pour les maladies ayant fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1" janvier 1947 et le 27 décembre 1998 ne peut être invoqué. La thèse des consorts X... : Le point de départ du délai de prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur d'une victime décédée est la reconnaissance par la paisse du lien entre la maladie professionnelle et le décès ; Monsieur X... étant décédé le 28 octobre 2007, la caisse ayant notifié l'accord de prise dg charge de son décès le 24 janvier 2008, cette date constitue le point de départ du délai de prescription ; en formulant; leur demande le 6 août 2008 en saisissant la caisse d'une demande de conciliation, ils ont agi dans le délai de deux ans ; à titre subsidiaire, ils font valoir les dispositions des articles L.431-2 3° et L. 443-1 alinéa 3 du Code de la Sécurité Sociale en soulignant que la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue le 4 octobre 2004, les conséquences indemnisés par jugement du 27 juin 2005 sur la base d'un taux d'IPP de 5% puis par le FIVA sur la base d'un taux de 100%. Leurs demandes n'ont pour objet que d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice moral consécutif au décès, action qui ne pouvait être intentée qu'à compter de celui-ci. La motivation de la Cour : c'est à la date du 24 janvier 2008 que la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche a notifié la prise en charge du décès de Monsieur X... à sa veuve. Il s'agit là du seul point de départ du délai de prescription de deux années de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable opposable à ses ayants droits. Dès lors que les consorts X... ont saisi la caisse de leur demande en reconnaissance de faute inexcusable le 6 août 2008, la prescription n'est pas acquise » ;
ALORS QU'il résulte de l'article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur se prescrit par deux ans à compter soit de la date à laquelle la caisse a reconnu la nature professionnelle de la maladie soit de la date de la cessation du paiement de l'indemnité journalière ; que la détermination du point de départ de la prescription s'impose, y compris pour l'ouverture, postérieurement au décès de la victime, des droits des ayants droit de celle-ci ; qu'il en résulte que la survenance du décès de la victime et la reconnaissance par la CPAM d'un lien entre ce décès et une maladie antérieurement prise en charge n'ont pas pour effet de faire courir à nouveau le délai de prescription biennale ; qu'au cas présent, la société SAINT GOBAIN PAM exposait que l'action en reconnaissance de faute inexcusable des ayants droits de Monsieur X... introduite devant la CPAM le 6 août 2008, était prescrite dans la mesure où elle avait été exercée plus de deux ans après la décision de prise en charge de la maladie professionnelle intervenue le 24 octobre 2005 ; qu'en estimant néanmoins que la prescription n'était pas acquise au motif que la CPAM de l'ARDECHE avait notifié aux consorts X... la prise en charge du décès de leur auteur le 24 juin 2008, la Cour d'appel a violé les articles L. 431-2 et L. 452-1 du Code de la sécurité sociale ;
AUX MOTIFS QUE « sur l'inopposabilité de la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie professionnelle de Monsieur X.... La thèse de l'employeur : Préalablement à la décision de prise en charge de la maladie en date du 24 octobre 2005, la société SAINT GOBAIN PAM n'a pas eu connaissance de l'ensemble des éléments fondamentaux du dossier, les éléments demandés n'ayant été communiqués par la caisse que le 26 octobre 2005, soit postérieurement à la décision de prise en charge. La communication est en outre incomplète puisque le rapport d'enquête administrative n'y figurait pas. Le délai est encore insuffisant pour estimer que la caisse a rempli ses obligations puisqu'entre le 12 et le 22 octobre 2005, la société n'a disposé que d'un délai effectif de 5 jours utiles pour consulter le dossier et faire valoir ses observations alors que le siège de la société est à NANCY et celui de la caisse à ANNONAY. La thèse de la caisse. Elle a parfaitement respecté la procédure contradictoire lors de l'instruction du dossier en informant la société le 12 octobre 2005 de sa possibilité de consulter le dossier avant la prise de décision à intervenir le 22 octobre 2005. Les pièces lui ont été transmises sur sa demande reçue à la caisse le 24 octobre. La motivation de la Cour. Selon l'article R 441-11 alinéa 1 du calo de la sécurité sociale dans sa rédaction alors applicable. Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves (IF l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droit et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles 4e leur faire grief. Selon l'article R 441-13 alinéa 1 du même code, le dossier constitué par la caisse doit comprendre :1° la déclaration d'accident et l'attestation de salaire ;2° les divers certificats médicaux ;3° les constats faits par la caisse primaire ;4° les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ; 5° les éléments communiqués par la caisse régionale 6° éventuellement, le rapport de l'expert technique .Il résulte des éléments de l'espèce que :- par courrier du mercredi 12 octobre 2005, reçu le vendredi 14 octobre 2005, la caisse a informé la SA PONT A MOUSSON de la fin de la procédure d'information et de sa possibilité de venir consulter le dossier avant la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie à intervenir le 22 octobre 2005 avec mention manuscrite selon laquelle « l'avis médical favorable et les renseignements communiqués par l'employeur sont susceptibles de vous faire grief »- Ce n'est que par courrier du 21 octobre 2005, veille de l'expiration du délai qui lui était imparti que la société a sollicité la communication des pièces du dossier.- La décision de prise en charge est intervenue le 24 octobre 2005.- Par courrier du 26 octobre 2005, la caisse transmettait à la société les pièces administratives du dossier, soit la déclaration de maladie professionnelle, le certificat médical initial, les courriers de l'employeur confirmant l'exposition au risque amiante et l'avis médical du médecin conseil. Il en résulte que la caisse a satisfait à son obligation d'information dès lors d'une part que la société ne peut se prévaloir de l'insuffisance du délai, soit 5 jours utiles, du lundi 17 au vendredi 21 octobre puisqu'elle même a agi tardivement pour ne solliciter communication du dossier que le dernier jour utile, d'autre part que la caisse qui disposait de l'attestation d'exposition établie par la société n'avait pas à diligenter une enquête administrative.La déclaration de prise en charge de la maladie professionnelle sera déclarée opposable à la société » ;
ALORS QU'il résulte de l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, destiné à garantir le caractère contradictoire de la procédure d'instruction, que la CPAM doit, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; que le délai imposé par la Caisse à l'employeur pour venir consulter le dossier dans ses locaux doit dès lors s'avérer suffisant pour venir chercher une copie du dossier, étudier les pièces et formuler d'éventuelles observations quant à l'accomplissement des différentes conditions de prise en charge ; qu'il incombe au juge de rechercher si le délai imparti à l'employeur entre la réception de la lettre de clôture de l'instruction et la date prévisionnelle de prise en charge indiquée par la CPAM présentait un caractère suffisant au regard de cette finalité ; qu'au cas présent, la Cour d'appel a relevé elle-même que le délai imparti à l'employeur pour se déplacer dans les locaux de la CPAM n'était que de cinq jours utiles ; que, pour s'abstenir de rechercher, comme cela lui était demandé, si ce délai était suffisant au regard du respect du caractère contradictoire de l'obligation d'information à la charge de la caisse, la Cour d'appel a retenu que la société SAINT GOBAIN PAM avait sollicité tardivement la communication du dossier et que la CPAM disposait d'une attestation d'exposition établie par l'employeur la dispensant de diligenter une enquête ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs inopérants pour statuer sur le caractère suffisant du délai imparti par la CPAM de l'ARDECHE à l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-11856
Date de la décision : 14/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 08 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 mar. 2013, pourvoi n°12-11856


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Foussard, Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.11856
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