LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause la commune de Saint-Bon-Tarentaise ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 9 décembre 2010), que les époux X... et la SCI L'Isard (la SCI) sont propriétaires de chalets voisins situés dans un lotissement faisant l'objet d'un cahier des charges approuvé par arrêté préfectoral ; que la SCI a, par acte du 19 novembre 2003, assigné les époux X... aux fins de démolition de leur chalet pour non-conformité aux règles d'urbanisme et condamnation à lui verser diverses sommes ; que, reconventionnellement, les époux X..., ont sollicité, au titre de la violation des prescriptions du cahier des charges du lotissement, la condamnation, sous astreinte, de la SCI à procéder à la dépose, d'une part, du toit en tôle et à son remplacement par un toit en lauzes ou ardoises et, d'autre part, de la ligne aérienne traversant son lot ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que le chalet d'Izard existait déjà en 1955 et souverainement retenu qu'il résultait du devis du 2 juin 1980 et de la facture du 30 novembre 1982 que les travaux réalisés en toiture, qui étaient précédé de la "vérification de la toiture existante et remise en place d'une tôle", ne comprenaient aucune destruction, la pose des chevrons se faisant "sur champ, sur couverture existante", la cour d'appel, qui en a déduit, par des motifs non critiqués, que la couverture initiale en tôle était toujours en place, a exactement retenu que l'action en démolition de la toiture initiale était prescrite, et a pu en déduire que la démolition de la sur-toiture serait sans effet sur le respect du cahier des charges et que la demande en démolition de cette sur-toiture pour un remplacement par une toiture en lauzes ou ardoises ne pouvait être accueillie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 2262 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu que pour rejeter l'action en dépose de la ligne aérienne, l'arrêt retient que le fait qu'un boîtier plastique plutôt récent ait été mis en place sur le poteau ne suffit pas à écarter la prescription tirée de l'ancienneté de la construction, les photographies du constat du 16 mai 2007 montrant en ce qui concerne les fils, une installation ancienne ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser le point de départ du délai de prescription, à savoir la date de l'installation de la ligne litigieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute les époux X... de leur demande en dépose de la ligne aérienne traversant le lot de la SCI L'Izard, l'arrêt rendu le 9 décembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;
Condamne la société L'Isard aux dépens :
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour les époux X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la SCI L'Isard à procéder au remplacement de la toiture en tôle de son chalet par une toiture en lauzes ou en ardoises ;
Aux motifs qu'« il résulte du titre de propriété de la SCI L'Isard et de celui de son auteur que le chalet l'Isard correspondant au n°175 du plan d'aménagement de la station de sports d'hiver et estivale de là Vallée de Saint Bon existait déjà en 1955 ; que ce chalet a une toiture en bac acier non conforme à l'article 10 du cahier des charges du lotissement créé par le département de la Savoie dans le cadre de l'aménagement des Trois Vallées, lequel stipule que les couvertures seront réalisées, à l'exclusion de tous autres matériaux, en lauzes ou en ardoises ; que la demande en démolition de la toiture a été formée au cours de la présente procédure introduite en 2003, soit plus de 30 ans après la construction du chalet l'Isard ; qu'en 1980, des travaux ont été réalisés en toiture ; qu'il résulte du devis descriptif de l'entreprise Chapuis en date du 2 juin 1980 que les travaux consistaient en la "construction d'une nouvelle toiture sur celle existante pour former une nouvelle ventilation" ; que le détail des travaux envisagés ne comprend aucune destruction, étant même précisé que la pose des chevrons se fera "sur champ, sur couverture existante" ; qu'au vu de la facture en date du 30 novembre 1982, ce sont bien ces travaux qui ont été exécutés avec au préalable "vérification de la toiture existante et remise en place d'une tôle" ; que la couverture initiale en tôle est donc toujours en place ; que l'action pour la voir être démolie est largement prescrite ; qu'il n'y a donc pas lieu d'ordonner la démolition de la sur-toiture puisqu'une telle disposition serait sans effet sur le respect du cahier des charges compte tenu de la présence de la toiture initiale » (arrêt, p. 6-7) ;
Alors, d'une part, que les époux X... demandaient la mise en conformité de la toiture du chalet de la SCI L'Isard avec le cahier des charges du lotissement et la confirmation du jugement qui avait ordonné le remplacement de la toiture en tôle par une toiture en lauze ou en ardoises ; qu'en considérant que l'action tendait exclusivement à la démolition de la toiture initiale et qu'elle ne concernait pas la sur6 toiture, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Alors, d'autre part, que la prescription de l'action tendant à la mise en conformité d'un lotissement avec le cahier des charges qui le régit court à compter de la contravention à ses stipulations ; que l'arrêt attaqué énonce que l'article 10 du cahier des charges du lotissement, au respect duquel est soumis la SCI L'Isard, stipule que les couvertures doivent être réalisées, à l'exclusion de tous autres matériaux, en lauzes ou en ardoises ; qu'il ajoute que des travaux réalisés en 1980 ont conduit à la pose sur la toiture initiale d'une sur-toiture en tôle qui n'est pas conforme à l'article 10 du cahier des charges ; qu'en faisant courir le point de départ de la prescription de l'action tendant à la mise en conformité de la toiture existante avec le cahier des charges litigieux au jour de la réalisation de la couverture initiale, cependant que le point de départ de la prescription de l'action tendant à la mise en conformité de la sur-toiture existante n'avait commencé à courir qu'en 1980, la cour d'appel a violé l'article 1143, ensemble l'article 2262 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la SCI L'Isard à procéder à la dépose de la ligne aérienne traversant son lot ;
Aux motifs que « le fait qu'un boîtier plastique plutôt récent ait été mis en place sur le poteau ne suffit pas à écarter la prescription tirée de l'ancienneté de la construction, les photographies du constat du 16 mai 2007 montrant en ce qui concerne le fil, une installation ancienne » (arrêt, p. 7) ;
Alors que la prescription de l'action tendant à la mise en conformité d'un lotissement avec le cahier des charges qui le régit court à compter de la contravention à ses stipulations ; que les époux X... demandaient la mise en conformité de la ligne téléphonique aérienne existante avec l'article 8 du cahier des charges du lotissement prohibant les lignes aériennes et la confirmation du jugement qui avait ordonné la dépose de la ligne aérienne traversant son lot ; qu'en opposant à cette action la prescription trentenaire, sans préciser à quelle date la ligne aérienne établie en contravention avec l'article 8 du cahier des charges avait été mise en place, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2262 du code civil.