LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui a analysé sans les dénaturer les lettres échangées entre les parties, a retenu souverainement qu'aucun accord n'était intervenu entre elles sur une résiliation amiable ;
Et attendu, d'autre part, que la troisième branche du moyen critique un motif surabondant du jugement confirmé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que M. X... n'avait fait que provisoirement transiter le cheptel dans un autre lieu, qu'il justifiait détenir quarante-neuf bêtes au 14 février 2011, soit bien plus que vingt-sept bêtes composant le cheptel vif et qu'un procès-verbal de constat d'huissier de justice du 19 juillet 2010 mentionnait dans la grange dépendant de l'exploitation louée, la présence de quarante-trois bottes de paille et retenu souverainement que les bailleurs ne rapportaient pas la preuve du préjudice prétendument subi du fait de l'absence temporaire du cheptel et qu'ils n'établissaient pas que M. X... aurait sous-loué ou cédé sans leur autorisation les biens donnés à bail, la cour d'appel, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu, sans dénaturation et répondant aux conclusions prétendument délaissées, débouter les consorts Y... de leur demande de résiliation du bail aux torts de leur locataire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour les consorts Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts Y... de leurs demandes en résiliation du bail, en expulsion et en paiement subséquentes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, par courrier du 14 avril 2010, M. Jean-Paul X... a fait part à ses bailleurs de ce qu'il envisageait de cesser son activité d'exploitant agricole à partir du 10 mai 2010, pour être embauché en qualité de salarié dans une entreprise de la région, et a proposé la reprise du bail par des tiers, M. et Mme François Z..., tout en indiquant souhaiter acquérir le cheptel évalué à une somme de 18 980 €, à moins que les bailleurs ne préfèrent le faire estimer eux-mêmes ou en reprendre possession ; par courrier à réponse du 26 avril 2010, M. Jean-Marc Y..., qui n'excluait pas la possibilité d'une résiliation amiable, estimait néanmoins que la date de cessation de son activité choisie par le preneur ne lui permettait pas de préparer sereinement l'avenir de l'exploitation, et lui demandait de « tenir ses engagements contractuels » jusqu'aux alentours du 5 juillet 2010 ; qu'une discussion s'est ensuite instaurée sur le choix du repreneur éventuel et que le projet de résiliation du bail ne s'est pas concrétisé, aucun accord n'étant finalement intervenu entre les parties, ainsi que l'a constaté à juste titre le tribunal paritaire des baux ruraux dont la décision sera confirmée en conséquence ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, selon l'article 1134 du code civil, alinéa 2, les conventions légalement formées ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise ; qu'en l'espèce, si effectivement M. X... a fait part aux bailleurs de son projet de cesser l'exploitation par lettre du 14 avril 2010, il ressort des courriers échangés entre les parties, soit ceux de Jean-Marc Y... en date du 26 avril 2010 et du 25 octobre 2010, de Laurence Y... du 5 août 2010 et du 8 septembre 2010, et de M. et Mme X... du 5 octobre 2010, que, d'une part, ce projet est resté à l'état de pourparlers et que les parties ne se sont pas mises d'accord sur une date de résiliation et que, d'autre part, Marie-Louise Y..., coïndivisaire bailleresse, n'a pas donné expressément son accord à ladite résiliation ;
1°) ALORS QUE dans son courrier en date du 14 avril 2010 régulièrement versé aux débats, M. X... énonçait « je vous confirme ma décision de cesser d'exploiter votre bien à partir du 10 mai 2010 », ce qui constituait une manifestation ferme et définitive de sa volonté ; que dès lors, en relevant, pour considérer qu'aucune résiliation amiable n'était intervenue, que M. X... avait seulement fait part ce que qu'il « envisageait de cesser son activité d'exploitant agricole » dans sa lettre du 14 avril 2010, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en méconnaissance de l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE la résiliation amiable d'un bail rural n'est soumise à aucune forme ; que les consorts Y... faisaient valoir, dans leurs dernières conclusions d'appel (p. 6-8), que si les modalités de la résiliation du bail rural consenti à M. X... demeuraient en discussion, le principe en était acquis à la suite de l'échange des courriers des 14 et 26 avril 2010 et de la réalisation de l'inventaire devant témoins, de telle sorte qu'il ne pouvait être ultérieurement remis en cause, peu important que M. X... ait refusé de réitérer la résiliation par acte authentique ; qu'en excluant toute résiliation amiable au motif que la date exacte de la résiliation et le choix du repreneur avaient fait l'objet de discussions, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il n'existait pas, néanmoins, un accord ferme sur le principe même de la résiliation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE la conclusion ou la résiliation du bail portant sur un bien indivis par une partie seulement des indivisaires n'est pas nulle, mais seulement inopposable aux autres indivisaires ; qu'en retenant, pour considérer que le bail n'avait pu être amiablement résilié à l'issu de l'échange des courriers des 14 et 26 avril 2010, que Mme Marie-Louise Y... n'avait pas expressément donné son accord à ladite résiliation, circonstance qui n'était pourtant pas de nature à remettre en cause la validité de la résiliation à l'égard de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 815-3 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts Y... de leurs demandes en résiliation du bail, en expulsion et en paiement subséquentes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. Jean-Paul X..., qui avait envisagé de mettre fin au bail rural conclu avec les consorts Y..., pour se consacrer à l'exercice d'un emploi de salarié agricole dans une ferme dépendant de la commune d'Aurillac, a démissionné de cet emploi le 1er janvier 2011, que le 1er août 2011 les bailleurs ont fait procéder à l'établissement par la SCI Chassaint-Massoube d'un constat d'huissier dont ils se prévalent au soutien de leur demande de résiliation judiciaire, qui, selon eux, démontrerait l'état d'abandon de l'exploitation, la présence d'animaux n'appartenant pas au preneur, la sous-location, ainsi que le déplacement du cheptel de l'exploitation à une distance de 70 km et la perte du fumier ; mais attendu que si l'huissier présent sur les lieux a bien constaté la présence de deux chevaux, étrangers au cheptel de M. Jean-Paul X... qui ne comprenait que des bovins, cette présence, dont M. X... soutient qu'elle concerne des animaux appartenant à son frère, ne peut sérieusement laisser conclure à une sous-location ; que, de plus, l'huissier n'a constaté aucune dégradation autre que le bris peu significatif d'une pierre composant la dalle de couverture de la fosse à purin ; que les terres, dont le mode d'exploitation est laissé à la liberté du preneur, n'apparaissent pas à l'abandon, dès lors que la quasi-totalité de la propriété a été pacagée et que l'huissier a relevé la présence de 63 bottes de foin dans la grange ; que M. Jean-Paul X... a justifié en outre de l'achat de matériel pour l'entretien des biens donnés à bail et de foin pour nourrir le cheptel ; que s'il n'est pas possible de savoir s'il a procédé, ainsi qu'il l'affirme, à l'épandage du fumier en février 2011, il justifie en tout état de cause avoir été à même de nourrir les animaux et d'entretenir la propriété nonobstant le déplacement provisoire du cheptel à 70 km des lieux loués, susceptible de constituer le seul grief énoncé à son encontre, sans qu'il puisse constituer une cause de résiliation du bail au sens de l'article L. 411-31 du code rural dans la mesure où le fait de faire transiter provisoirement le cheptel dans un autre lieu n'a pas causé de préjudice pour les bailleurs, qui ne rapportent la preuve ni d'un dol ni d'un détournement ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE il est relevé que les bailleurs ne peuvent fait grief à M. Y... (sic) de s'être maintenu dans les lieux puisque la résiliation amiable du bail dont ils se prévalent n'a pas été retenue ; par ailleurs, il est constaté que les consorts Y... ne versent aux débats aucun élément permettant de conclure que M. X... aurait sous-loué ou cédé sans leur autorisation les biens donnés à bail à son frère Vincent X... ; la résiliation ne peut donc être encourue de ce chef ; s'agissant du grief de l'absence d'exploitation du bien ou du manque d'entretien des terres, il est relevé que le procès-verbal de constat d'huissier de justice du 19 juillet 2010 a été établi hors la présence du preneur ; en tout état de cause, ce procès-verbal est vivement contesté par M. X..., lequel affirme avoir vidé et épandu les fosses à purin en février 2011 ; ce dernier fait également valoir que, si la dalle en béton des fosses à purin se trouve être en mauvais état, il s'agit d'un défaut de fabrication et de construction de ladite fosse, à la charge des bailleurs ; il ressort également des constatations de l'huissier de justice que la quasi-totalité de l'exploitation a été pacagée ; dès lors, les bailleurs ne peuvent reprocher à M. X... de ne pas avoir fauché les prés, un fermier restant libre sur ce point de son mode d'exploitation ; en outre, ledit procès-verbal précise que M. Y... a relevé la présence de 63 bottes de foin dans la grange ; de plus M. X... prouve, par la production de factures avoir acheté du matériel pour l'entretien des biens donnés à bail, ainsi que du foin pour nourrir le cheptel ; il ressort également du courrier de M. X... et de l'attestation de la SCEA La Cere que le défendeur a démissionné de son emploi de salarié le 1er janvier 2011 ; enfin l'éloignement géographique du preneur n'est pas une cause de résiliation au sens de l'article L. 411-31 du code rural dans la mesure où il est constaté que l'éloignement ne l'a pas empêché d'entretenir l'exploitation prise à bail ;
1°) ALORS QUE le bail stipulait que tous les fumiers produits dans la ferme devaient être employés exclusivement sur l'exploitation, de telle sorte que le déplacement du troupeau, même provisoire qui étaient de nature à faire perdre une partie du fumier, portait nécessairement atteinte à la bonne exploitation du fonds ; qu'en affirmant que le déplacement du troupeau à plus de 70 km n'avait causé aucun préjudice aux consorts Y..., dans la mesure où il était temporaire, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il n'avait pas néanmoins fait perdre au fonds une partie du fumier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1766 du code civil, ensemble l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
2°) ALORS QUE les consorts Y... faisaient également valoir, dans leurs dernières conclusions d'appel (p. 9-10), d'une part, qu'il résultait du constat d'huissier réalisé le 1er août 2011 qu'étaient présents sur le fonds donné à bail, non seulement des chevaux, dont M. X... reconnaissait qu'ils appartenaient à son frère, M. Vincent X..., mais également des bovins ne lui appartenant pas et dont il convenait de rechercher le propriétaire et, d'autre part, que dans la mesure où le preneur occupait un emploi salarié à temps plein à plus de 70 km de l'exploitation, M. Vincent X... était chargé de faner la propriété, circonstances de nature à établir l'existence d'une sous-location officieuse au profit de ce dernier ; qu'en se bornant à énoncer, pour exclure toute sous location, que la présence de deux chevaux étrangers au cheptel qui ne comportait que des bovins ne pouvait sérieusement laisser conclure à une sous-location, sans répondre au moyen précité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'à aucun moment, dans son procès-verbal de constat du 1er août 2011, régulièrement versé aux débats, Me A...n'a constaté la présence de 63 bottes de foins dans la grange de l'exploitation ; qu'en affirmant, pour considérer que M. X... avait été en mesure de continuer à exploiter normalement le fonds donné à bail, que l'huissier présent le 1er août 2011 avait relevé la présence de 63 bottes de foins dans la grange, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce procès-verbal, et ainsi violé l'article 1134 du code civil.