LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que la propriété des époux X... était séparée de la zone alluvionnaire revendiquée par un fossé, longeant le chemin communal et prolongeant leur bief bâti, qui s'est créé naturellement au fur et à mesure de l'atterrissement du Tarn sur cette rive pour permettre l'écoulement naturel des eaux, et relevé à bon droit que les époux X... n'étaient pas propriétaires dudit fossé dès lors que celui-ci n'avait pas été créé artificiellement par la main de l'homme, la cour d'appel, répondant aux conclusions dont elle était saisie, en a exactement déduit que les époux X... ne pouvaient revendiquer la propriété de la zone alluvionnaire dont ils n'étaient pas riverains ;
D'où il suit que le moye n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils pour M. et Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. et Mme X... tendant à être reconnus propriétaires de l'accroissement formé sur la rive du Tarn au droit du béal longeant leurs parcelles cadastrées commune d'Ispagnac section B n° 1467 et section B n° 1468, ainsi que le long de la parcelle voisine B n° 1469, par application des dispositions combinées des articles 546 et 556 du code civil, et en tant que de besoin des articles 2262 et 2229 du même code, et d'AVOIR dit et jugé que la commune d'Ispagnac était propriétaire de l'accroissement formé sur la rive du Tarn au droit du chemin rural longeant les parcelles 1467 et 1468 de la section B. du cadastre de la commune,
AUX MOTIFS QU'"il appartient à la commune d'ISPAGNAC qui revendique la propriété de la zone alluvionnaire d'établir qu'elle est propriétaire riveraine ; que le rapport d'expertise de M. Y..., qui a effectué un travail complet, sérieux et documenté, comportant des photographies et des plans particulièrement précis et explicites, démontre que c'est le chemin communal, appartenant à la commune, qui est limitrophe de la rivière le Tarn ; que la propriété X... n'est pas riveraine de la rivière, étant précisément séparée d'elle par ce chemin communal ; que les appelants se prévalent de l'existence d'un fossé longeant le chemin communal et le séparant de la zone alluvionnaire, fossé constituant un bief qui bénéficie, selon eux, directement et exclusivement à leur fonds en permettant l'écoulement des eaux du moulin ; qu'il convient de rappeler que la propriété des époux X... comporte un moulin ancien auquel est attachée une prise d'eau fondée en droit et dont les eaux moulinées s'écoulent jusqu'au Tarn par deux canaux d'écoulement souterrains dont les sorties sont situées sur le côté Sud du chemin (côté le TARN) et qui à l'origine se déversaient directement dans le Tarn ; qu'actuellement, l'écoulement des eaux se fait dans le fossé à ciel ouvert séparant le chemin communal de la zone alluvionnaire litigieuse ; qu'il est parfaitement démontré par le rapport de l'expert judiciaire que ce fossé s'est créé naturellement, l'eau ayant fait son chemin au fur et à mesure des atterrissements du Tarn sur cette rive ; qu'ainsi, le lien entre le fonds X... et le Tarn n'est fait que par l'eau courante qui n'est pas susceptible de propriété ; que les époux X... ne sont pas fondés à se prévaloir de l'application des dispositions de l'article 546 du Code civil et à se prétendre propriétaires dudit fossé, dès lors que ce fossé n'a pas été creusé artificiellement par la main de l'homme pour l'exploitation du moulin, mais qu'il s'est créé naturellement ; qu'en outre, le passage créé en 1979 par les époux X..., correspond à une simple commodité ; qu'il n'est démontré l'existence d'aucun autre aménagement susceptible de constituer un acte de possession ; que l'entretien de la zone alluvionnaire, d 'ailleurs depuis une date non formellement déterminée, n'est même pas établi ; que les époux X... ne caractérisent pas une possession continue, non équivoque et à titre de propriétaire de nature à leur conférer la propriété de la zone alluvionnaire par usucapion, d'autant que les courriers adressés par la commune dès le 12 juillet 2004 sont contraires à l'existence d'une possession paisible ; que c'est donc par une exacte analyse en fait et en droit que le premier juge a considéré que la commune d'ISPAGNAC était propriétaire riveraine et donc propriétaire de la zone alluvionnaire ; qu'en l'état du rapport parfaitement circonstancié, comme il a été indiqué plus haut, de M. Y..., l'expertise sollicitée à titre subsidiaire par les appelants n'apparaît pas justifiée ; que le jugement déféré doit être confirmé ; qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de faire procéder, au besoin, à l'établissement d'un document modificatif du parcellaire cadastral par tel géomètre-expert de son choix aux fins de rectification du cadastre" (arrêt, p. 5 et 6),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE "Aux termes de l'article 556 du code civil, les atterrissements et accroissements apportés par le fleuve bénéficient au propriétaire riverain. En l'espèce, il ressort clairement du rapport d'expertise qu'au droit de la bande de terre litigieuse le fleuve est bordé par un chemin communal. Au contraire, les époux X... ne justifient aucun titre à se dire propriétaires du fossé dont l'expert indique qu'il s'est créé sur la berge de la rivière au fur et à mesure des attérissements du Tarn. Seule la commune est donc en droit de se dire riveraine au sens de l'article 556 du code civil. Il sera donc dit et jugé que la commune est bien propriétaire de l'attérissement litigieux. Il n'appartient pas à la juridiction judiciaire d'ordonner la modification du cadastre qui est un document administratif" (jugement, p. 3),
1°/ ALORS QUE la propriété d'une chose immobilière donne droit d'accession sur tout ce qu'elle produit, et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement ; que le propriétaire d'un moulin est réputé être le propriétaire du bief qui y amène l'eau et du canal de fuite par lequel elle s'écoule ;
Qu'il résulte des constatations des juges du fond que «la propriété des époux X... comporte un moulin ancien auquel est attachée une prise d'eau fondée en droit et dont les eaux moulinées s'écoulent jusqu'au Tarn par deux canaux d'écoulement souterrains dont les sorties sont situées sur le côté Sud du chemin (côté Tarn) et qui à l'origine se déversaient directement dans le Tarn» ; qu'au fil du temps, une zone d'alluvionnement s'est créée sur cette rive du Tarn ; que les canaux de fuite se sont donc prolongés, l'écoulement des eaux par gravité vers le Tarn se faisant dans un canal unique à ciel ouvert, régulièrement entretenu par M. et Mme X... ; qu'il s'ensuivait que le canal de fuite dans la zone alluvionnaire était bien leur propriété ;
Qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 546 du code civil, ensemble l'article 556 de ce même code ;
2°/ ALORS, subsidiairement, QUE l'alluvion, constituée par les atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière, profite au propriétaire riverain ; que la propriété d'une chose immobilière donne droit d'accession sur tout ce qu'elle produit, et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement ; que le propriétaire d'un moulin est réputé être le propriétaire du bief qui y amène l'eau et du canal de fuite par lequel elle s'écoule ;
Que, dans leurs écritures d'appel (p. 5), Monsieur et Madame X... faisaient valoir que «Les éléments bâtis du canal de fuite sont par hypothèse plus proches de l'alluvion formée sur le Tarn que ne l'est le chemin communal qu'ils traversent, puisqu'ils ont précisément vocation à conduire jusqu'à la rivière les eaux du canal de fuite. Ce qui est conforté par les constatations de l'expert :
Cf. rapport d'expertise, page 5 : "Nous avons constaté que ce chemin était traversé par deux canaux souterrains, dont les sorties sont situées sur le coté Sud de ce chemin (côté le Tarn)"» ; qu'il s'ensuivait que, sans même prendre en considération la prolongation du bief dans la zone alluvionnaire, la propriété de Monsieur et Madame X... s'étendait au-delà du chemin communal ;
Qu'en se contentant d'affirmer que «la propriété X... n'est pas riveraine de la rivière, étant précisément séparée d'elle par ce chemin communal», sans rechercher si les éléments bâtis du canal de fuite n'étaient pas situés plus près du Tarn que le chemin communal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 556 et 546 du code civil ;
3°/ ALORS QUE le juge doit, à peine de nullité de la décision qu'il prononce, répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont soumis par les parties ;
Que, dans leurs écritures d'appel (p. 5), M. et Mme X... faisaient valoir que «Les éléments bâtis du canal de fuite sont par hypothèse plus proches de l'alluvion formée sur le Tarn que ne l'est le chemin communal qu'ils traversent, puisqu'ils ont précisément vocation à conduire jusqu'à la rivière les eaux du canal de fuite. Ce qui est conforté par les constatations de l'expert :
Cf. rapport d'expertise, page 5 : "Nous avons constaté que ce chemin était traversé par deux canaux souterrains, dont les sorties sont situées sur le coté Sud de ce chemin (côté le Tarn)"» ; qu'il s'ensuivait que, sans même prendre en considération la prolongation du bief dans la zone alluvionnaire, la propriété de M. et Mme X... s'étendait au-delà du chemin communal ;
Qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire des conclusions d'appel de M. et Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.