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09/07/2013 | FRANCE | N°12-21582

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 juillet 2013, 12-21582


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 avril 2012), qu'en 2002, la société civile immobilière Villa des arts du 20 cité Aubry (SCI Villa des arts), a fait construire un immeuble sous la maîtrise d'oeuvre de la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière (Becri) ; que M. de X... a été désigné en qualité d'expert judiciaire dans le cadre d'un référé préventif ; que la société civile immobilière Le Jardin extraordinaire (SCI Le Jardin) propriétaire voisin, aprÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 avril 2012), qu'en 2002, la société civile immobilière Villa des arts du 20 cité Aubry (SCI Villa des arts), a fait construire un immeuble sous la maîtrise d'oeuvre de la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière (Becri) ; que M. de X... a été désigné en qualité d'expert judiciaire dans le cadre d'un référé préventif ; que la société civile immobilière Le Jardin extraordinaire (SCI Le Jardin) propriétaire voisin, après expertise judiciaire confiée à M. Y..., a assigné le maître de l'ouvrage et l'architecte en indemnisation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Becri fait grief à l'arrêt de déclarer opposable à son égard le rapport d'expertise de M. de X... déposé dans le cadre d'une procédure de référé préventif à laquelle il n'avait pas été partie et de constater que le rapport de M. Y... permettait de déterminer un lien de causalité entre les désordres allégués et le chantier voisin, alors, selon le moyen :
1°/ que, d'une part, une expertise n'est opposable à une personne que si celle-ci a été attraite à la procédure en désignation d'expert et a été présente aux opérations d'expertise en qualité de partie ; qu'en condamnant le maître d'oeuvre sur le fondement des conclusions de l'expert X..., après avoir pourtant relevé que le premier n'avait pas participé aux opérations d'expertise en qualité de partie, ce qui, comme le rappelait l'intéressé, justifiait l'inopposabilité de ladite expertise à son égard, prétexte pris de ce qu'il avait été présent à toutes les réunions organisées par ledit technicien et aurait pu utilement prendre connaissance de son rapport et le discuter, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que, d'autre part, la société Becri soutenait que l'expert Y... n'avait pas pu se prononcer sur l'absence de dommage affectant l'immeuble de la société Le Jardin extraordinaire avant les travaux ordonnés par la SCI Villa des arts, ne s'étant rendu sur les lieux qu'en 2008, une fois les travaux achevés ; qu'elle en déduisait que, pour déterminer l'existence des désordres, il n'avait pu que reprendre les conclusions de l'expert X... dont elle avait invoqué l'inopposabilité à son égard, de sorte que, sur l'existence des désordres, les juges du fond ne pouvaient se fonder sur l'expertise de M. Y... sans reprendre en réalité les conclusions de l'expertise X... inopposable au maître d'oeuvre ; qu'en condamnant l'exposante sur le fondement de l'expertise Y... sans avoir répondu à ce moyen déterminant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Becri avait participé aux opérations d'expertise de M. Y... et que celui-ci avait soumis à la discussion contradictoire des parties les constatations faites par M. de X... avant le début des travaux dans le cadre du référé préventif, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à des conclusions que ces constatations rendaient inopérantes, a retenu à bon droit que le rapport de M. de X... était opposable aux parties à la seconde expertise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'ayant relevé que les désordres causés à la SCI Le Jardin, en raison du mode d'exécution des travaux, étaient en relation directe avec la mission de la société Becri qui, chargée de la maîtrise d'oeuvre d'exécution, connaissait le risque de dégradation de la ruelle par le passage de lourds camions et avait donné son accord pour une solution inefficace de mise en place d'un béton de propreté sur la chaussée, la cour d'appel qui, a retenu, par un motif non critiqué, que cette société avait commis un faute dans l'exercice de sa mission, a pu en déduire, sans méconnaître le principe de la contradiction que la responsabilité in solidum de la société maître d'oeuvre était engagée, à l'égard de la société Le Jardin extraordinaire, sur le fondement des troubles anormaux de voisinage ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière à payer à la société civile immobilière Le Jardin extraordinaire, la somme de 3 000 euros et à la société civile immobilière Villa des arts du 20 cité Aubry, la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société Bureau d'études de coordination et de réalisation immobilière
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré opposable à un maître d'oeuvre (la société BECRI, l'exposante) le rapport d'expertise (de M. de X...) déposé dans le cadre d'une procédure de référé préventif à laquelle il n'avait pas été partie et d'avoir également constaté que le rapport d'un autre technicien (M. Y...) permettait de déterminer un lien de causalité entre les désordres allégués et le chantier voisin ;
AUX MOTIFS QUE M. de X... avait procédé à six réunions sur place, au fur et à mesure de l'avancement du chantier, la première s'étant tenue avant tout commencement des travaux ; que s'il n'avait consigné ses constatations que le 21 avril 2004 à la suite de la cinquième réunion, il avait cependant, lors des réunions précédentes, procédé contradictoirement à des visites des lieux et notamment de l'immeuble et avait pris des photographies ; que c'était donc en connais5 sance de l'état antérieur et objectivement qu'il avait pu analyser la pertinence de la note de M. Z..., architecte de la société LE JARDIN EXTRAORDINAIRE, et procéder, dans sa note du 21 avril 2004, à la comparaison entre l'état d'origine et l'état de l'immeuble tandis que les travaux de l'immeuble de la société VILLA DES ARTS étaient au stade du dernier plancher bas des sous-sols ; que c'était ainsi qu'il avait relevé l'apparition de fissures ou leur aggravation tant en façades qu'à l'intérieur des locaux (boutique et appartement) ainsi que détaillés dans sa note ; que s'il était exact que la société BECRI n'avait pas été partie à la l'expertise de M. de X..., force était cependant de relever, au regard des paraphes des feuilles de présence, qu'elle avait néanmoins assisté à toutes les réunions et que, attraite à l'expertise de M. Y... auquel il avait été demandé de procéder à sa mission après remise notamment du rapport de M. de X..., elle avait pu utilement en prendre connaissance et le discuter ; que, désigné à un moment où la construction de l'immeuble de la société VILLA DES ARTS était terminée, l'expert Y... avait confirmé l'existence des désordres existants et s'était attaché à en déterminer les causes (arrêt attaqué, p. 4, alinéas 8 et 9) ;
ALORS QUE, d'une part, une expertise n'est opposable à une personne que si celle-ci a été attraite à la procédure en désignation d'expert et a été présente aux opérations d'expertise en qualité de partie ; qu'en condamnant le maître d'oeuvre sur le fondement des conclusions de l'expert X..., après avoir pourtant relevé que le premier n'avait pas participé aux opérations d'expertise en qualité de partie, ce qui, comme le rappelait l'intéressé, justifiait l'inopposabilité de ladite expertise à son égard, prétexte pris de ce qu'il avait été présent à toutes les réunions organisées par ledit technicien et aurait pu utilement prendre connaissance de son rapport et le discuter, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, d'autre part, l'exposante soutenait (v. ses conclusions signifiées le 14 juin 2011, p. 9, alinéa 1er, et p. 10, alinéas 2 et 3) que l'expert Y... n'avait pas pu se prononcer sur l'absence de dommage affectant l'immeuble de la société LE JARDIN EXTRAORDINAIRE avant les travaux ordonnés par la société VILLA DES ARTS, ne s'étant rendu sur les lieux qu'en 2008, une fois les travaux achevés ; qu'elle en déduisait que, pour déterminer l'existence des désordres, il n'avait pu que reprendre les conclusions de l'expert X... dont elle avait invoqué l'inopposabilité à son égard, de sorte que, sur l'existence des désordres, les juges du fond ne pouvaient se fonder sur l'expertise de M. Y... sans reprendre en réalité les conclusions de l'expertise X... inopposable au maître d'oeuvre ; qu'en condamnant l'exposante sur le fondement de l'expertise Y... sans avoir répondu à ce moyen déterminant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné un maître d'oeuvre (la société BECRI, l'exposante) in solidum avec le maître de l'ouvrage (la société VILLA DES ARTS) à payer les sommes de 82.026,89 ¿ et de 30.000 ¿ au propriétaire du fonds voisin (la société LE JARDIN EXTRAORDINAIRE) en réparation des dommages nés de troubles anormaux de voisinage ;
AUX MOTIFS QUE l'expert avait attribué les désordres d'un côté à l'excavation importante réalisée à proximité de l'immeuble pour réaliser trois étages de sous-sol, de l'autre à l'utilisation par des engins de chantier de très fort tonnage dans l'étroite ruelle ayant provoqué son affaissement et un mouvement d'ensemble de la partie basse de l'immeuble, et enfin aux phénomènes de vibrations dus aux travaux de battage et d'imprégnation d'eaux par déjointoiement des tuyaux d'assainissement ; que les désordres étaient en partie survenus en raison du mode d'exécution des travaux et étaient donc en lien de cause directe avec la mission de la société BECRI chargée de la maîtrise d'oeuvre d'exécution ; que sa responsabilité était donc engagée à l'égard de la société LE JARDIN EXTRAORDINAIRE, sans qu'il y ait eu lieu de rechercher sa faute, en tant que voisin occasionnel, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage ;

ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le propriétaire du fonds voisin n'avait demandé la condamnation de l'exposante que sur le fondement de la responsabilité pour faute ; que s'il avait formellement invoqué l'article 1382 du code civil et les troubles anormaux de voisinage, il s'était contenté de solliciter la confirmation du jugement entrepris qui avait retenu la faute de l'exposante et écarté l'applicabilité du régime des troubles anormaux de voisinage ; qu'il y avait ajouté des développements suivant lesquels la faute du maître d'oeuvre aurait été établie ; qu'en condamnant néanmoins l'exposante sur le fondement de troubles anormaux de voisinage et en retenant la qualification de voisin occasionnel quand le propriétaire du fonds voisin n'avait pas invoqué une telle qualification, relevant ainsi des moyens d'office sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, seul l'entrepreneur qui a directement exécuté les travaux est responsable de plein droit des troubles anormaux de voisinage, étant alors qualifié de voisin occasionnel, ce qui exclut le maître d'oeuvre qui n'a pas lui-même exécuté les travaux dommageables ; que, pour retenir la responsabilité de l'exposante, maître d'oeuvre d'exécution, l'arrêt attaqué a relevé que les désordres étaient en partie survenus en raison du mode d'exécution des travaux, quand, ainsi que le faisait valoir l'exposante à titre subsidiaire, elle n'était pas l'auteur direct des travaux qui avaient été réalisés par l'entrepreneur de gros oeuvre ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-21582
Date de la décision : 09/07/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 jui. 2013, pourvoi n°12-21582


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.21582
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