LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1176 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 10 mai 2012), que la société Marignan résidences, propriétaire d'un terrain à Saint-Etienne, a obtenu un permis de construire l'autorisant à réaliser un ensemble immobilier et a proposé à la société Bâtir et loger de lui céder des droits à construire sur l'un des bâtiments ; qu'une promesse de vente a été signée par les parties les 11 et 18 janvier 2008, la réitération étant fixée au plus tard le 15 mars 2008 ; que l'acte prévoyait plusieurs conditions suspensives devant être réalisées au plus tard le 5 mars 2008 ; qu'ayant constaté que les travaux mis à la charge de la société Marignan résidences n'avaient fait l'objet d'aucun commencement d'exécution, la société Bâtir et loger l'a assignée en résolution de la promesse synallagmatique de vente ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient notamment que si la société Marignan résidences soutient qu'elle n'avait pas les 5 mars 2008 et 15 mars 2008 de titre définitif de propriété des parcelles de terrain assiettes de la copropriété au sens de la première condition suspensive, l'acte du 16 novembre 2007 de vente de certaines parcelles par la commune de Saint-Etienne ne comportait pas de clause résolutoire en sa faveur dans la mesure où la condition résolutoire était stipulée au bénéfice des vendeurs originaires des parcelles polluées pour le cas où le coût de la dépollution dépasserait la somme globale de 917 000 euros et qu'elle n'établit pas que cette clause résolutoire ait été mise en oeuvre par les bénéficiaires contractuels prévus dans l'acte du 16 novembre 2007, alors que le rapport de l'expert prévu à l'acte a été déposé et transmis le 16 février 2008 et que le délai de quinze jours stipulé pour agir en résolution a expiré le 6 mars 2008, soit avant la date de la réitération de la promesse liant les deux sociétés en litige ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la défaillance de la condition suspensive à la date fixée pour sa réalisation entraîne la caducité de la vente, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Bâtir et loger aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour la société Marignan résidences
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résolution de la promesse synallagmatique de vente aux torts exclusifs de la société Marignan Résidences et de l'avoir condamnée à payer à la société Bâtir et Loger les sommes de 39.742 euros au titre de l'acompte sur le compromis de vente, 31.150,77 euros au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre, 195,89 euros au titre du constat d'huissier, 721,31 euros au titre des frais de publicité, 100.000 euros au titre de la perte de chance de réaliser un bénéfice et 30.000 euros en réparation d'une atteinte à l'image commerciale ;
AUX MOTIFS QUE la promesse synallagmatique signée le 18 janvier 2008, dont l'original n'est pas accompagné d'annexes signées par les parties, comporte six conditions suspensives qui doivent être réalisées au plus tard le 5 mars 2008 ; que la première de ces conditions est la production d'un titre de propriété définitif du vendeur assurant une propriété incommutable des parcelles assiette de la copropriété ; que si la société Marignan Résidences soutient qu'elle n'avait pas le 5 mars 2008 de titre définitif de propriété de ces parcelles au sens de la première condition suspensive, l'acte du 16 novembre 2007 de vente de certaines parcelles par la commune de Saint-Etienne stipulait une condition résolutoire au bénéfice des vendeurs originaires des parcelles polluées pour le cas où le coût de la dépollution dépasserait la somme globale de 917.000 euros ; que la société Marignan Résidences n'établit pas que cette clause résolutoire ait été mise en oeuvre par les bénéficiaires, alors que le rapport d'expertise prévu à l'acte a été déposé et transmis le 16 février 2008 au notaire Peysson et que le délai de quinze jours stipulé pour agir en résolution a expiré le 6 mars 2008, soit avant la réitération de la promesse liant les deux sociétés en litige ; que la condition tenant au transfert du permis de construire a bien été exécutée ; que les quatre autres conditions ne font l'objet d'aucune discussion quant à leur réalisation ; que la société Marignan Résidences ne prouve pas qu'elle a fait des actes positifs en vue de l'obtention des documents attestant de la réalisation de ces quatre conditions de sorte qu'il en résulte qu'elle en a empêché l'accomplissement par sa défaillance ; que s'il est vrai qu'aucun calendrier de travaux opérationnel et prévisionnel n'était annexé à la promesse de vente et si ce document a été échangé le 26 novembre 2008 8 sans être signé par la société Marignan Résidences, il résulte des pièces produites par la société Bâtir et Loger que la société Marignan Résidences ne pouvait ignorer qu'elle devait réaliser des travaux qui aurait dû être énoncés dans la notice descriptive VRD, que cette société avait bien connaissance et conscience que la construction du bâtiment D cédé l'obligeait à exécuter ses engagements avant le 5 mars 2008 et au plus tard le 15 mars 2008 ; qu'elle ne peut utilement soutenir qu'elle n'avait pas d'obligation parce qu'elle n'avait pas signé le calendrier prévisionnel, alors que la société Bâtir et Loger l'invitait à participer à l'ouverture des plis dans le cadre de l'appel d'offre publié le 12 octobre 2007 et alors que le transfert du permis de construire était mis en place d'un commun accord ; qu'en conséquence, la résolution de la promesse, qui n'a pas été exécutée par la faute de la société Marignan Résidences, qui n'a pas rempli ses engagements contractuels et a empêché les conditions suspensives de se réaliser, doit être prononcée aux torts exclusifs de cette dernière ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'ensemble des conditions suspensives a été réalisé ; que la défaillance de la société Marignan Résidences dans la réitération de la vente a empêché la société Bâtir et Loger d'exécuter les travaux dans les délais prévus ;
1°/ ALORS QUE lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixe, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé ; que la société Marignan Résidences a acquis des terrains pollués, sous condition résolutoire de ce que le coût de la dépollution, à la charge des vendeurs, n'excède pas le prix de vente ; qu'elle a ensuite promis de céder une partie des droits à construire sur ces terrains à la société Loger et Bâtir, sous la condition suspensive d'avoir obtenu un titre de propriété définitif au plus tard le 5 mars 2008 ; que la cour d'appel a constaté que le délai imparti pour exercer la faculté de résolution de la vente a « expiré le 6 mars 2008 » ; qu'il en résulte que la vente des terrains sous condition résolutoire n'était pas devenue définitive le 5 mars 2008 ; que dès lors, la condition suspensive affectant la promesse de cession des droits à construire devait être considérée comme défaillie, rendant cet acte caduc ; qu'en décidant néanmoins que la société Marignan Résidences n'était pas fondée à invoquer la défaillance de cette condition et que la promesse devait être résolue aux torts exclusifs de cette société, la cour d'appel a violé l'article 1176 du code civil ;
2°/ ALORS QUE le juge doit analyser, au moins sommairement, les éléments de preuve sur lesquels il fonde sa décision ; qu'en affirmant qu'il résultait des pièces produites par la société Bâtir et Loger que la société Marignan Résidences savait que la construction du bâtiment D cédé l'obligeait à exécuter ses engagements avant le 5 mars 2008 et au plus tard le 15 mars 2008, sans viser ni analyser les pièces sur lesquelles elle se fondait pour considérer que la société Marignan Résidences s'était engagée à respecter ce délai pour réaliser les travaux d'aménagement mis à sa charge, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.