LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que la réception des travaux de construction commandés par la société Letierce avait été prononcée fin 1986, que la société Letierce avait assigné en référé, notamment les sociétés Socotec et ITA assurées auprès de la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) ; qu'une ordonnance désignant un expert avait été rendue le 2 février 1987 et que la SMABTP n'avait été assignée par la société Letierce qu'en 2005, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que la SMABTP avait accepté de couvrir la responsabilité décennale de ses assurés après la fin des opération d'expertise et qui, du fait de ces constatations, n'était pas tenue de rechercher si cet assureur était encore soumis au recours de ses assurés lors de l'assignation, délivrée en 2005 plus de dix ans après la réception, a retenu à bon droit, qu'à défaut d'acte interruptif de la prescription, l'action engagée par la société Letierce à l'encontre de la SMABTP était tardive ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, par un motif non critiqué, que la responsabilité de la société Stolz assurée auprès de la société UAP devenue Axa, ne pouvait être recherchée que sur le fondement des articles 1792 et suivant du code civil, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que les polices souscrites par la société Stolz avaient pour objet de satisfaire à l'obligation d'assurance prévue par l'article L. 241-1 du code des assurances, a retenu sans dénaturation que ni la police dite « TRC » ni la police responsabilité civile n'avait vocation à satisfaire à l'obligation d'assurance des constructeurs et que les demandes formées à l'encontre de la société Axa ne pouvaient être accueillies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Letierce et fils aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Letierce et fils à payer la somme globale de 2 500 euros à la société Axa France IARD et à la société Stolz, la somme de 2 500 euros à la SMABTP, la somme de 1 500 euros à la société SGS Holding France, la somme de 1 500 euros à la société Allianz ; rejette la demande de la société Letierce et fils et de la société Axa France entreprises ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Letierce et fils.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement ayant déclaré prescrite l'action exercée par la SNC LETIERCE contre la SMABTP ;
AUX MOTIFS QUE la SNC a assigné la SMABTP, assureur de ITA INGENIERIE et de SOCOTEC le 7 mars 2005, soit plusieurs années après que la prescription décennale soit acquise ; que la SNC soutient que son assignation est quand même efficace car d'une part, l'action introduite à temps contre l'assuré permet d'agir contre l'assureur tan qu'il est lui-même exposé au recours de son assuré et, d'autre part, que la SMABTP a constamment assisté son assuré lors de l'ensemble des opérations d'expertise et n'a jamais justifié avoir dénié sa garantie ; que par dérogation aux principes généraux de l'assurance, le maître de l'ouvrage doit agir à l'encontre de l'assureur responsabilité décennale des constructeurs dans les dix années de la réception à peine de prescription ; que la SNC est donc prescrite dans son action à l'encontre de la SMABTP ;
1°) ALORS QUE l'action directe de la victime contre l'assureur de responsabilité, qui trouve son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice, se prescrit par le même délai que son action contre le responsable et peut être exercée contre l'assureur, au-delà de ce délai tant que celui-ci reste exposé au recours de son assuré ; qu'ainsi, le délai de l'action en responsabilité décennale peut, le cas échéant, être prolongé de deux ans en application de la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances ; qu'en conséquence, en affirmant que le maître de l'ouvrage doit agir dans le délai de dix ans à compter de la réception à peine de prescription, la cour d'appel a violé l'article L. 124-3 du code des assurances, ensemble l'article L. 114-1 du même code ;
2°) ALORS QUE la SNC LETIERCE avait expressément invoqué, dans ses conclusions d'appel (signifiées le 25 avril 2012 p. 11) le moyen tiré de la renonciation de la SMABTP à invoquer la non-garantie de son assurée, la société ITA, en faisant valoir que l'assureur avait « constamment assisté son assuré lors de l'ensemble des opérations d'expertise » et n'a « jamais justifié avoir dénié sa garantie à son assuré » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire de conclusions, la cour d'appel a en toute hypothèse violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SNC LETIERCE de ses demandes à l'encontre d'AXA Assurances ;
AUX MOTIFS QUE l'UAP aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui AXA avait émis deux polices au bénéfice de la société STOLZ : une police TRC concernant les dommages matériels à l'ouvrage pendant les travaux et ceux qui seraient imputables à la maintenance ; une police assurance responsabilité civile qui couvre les dommages causés aux tiers du chef des travaux exécutés et exclut les conséquences de l'application à l'assuré des dispositions prévues aux articles 1792 à 1792-6 du code civil ; que la SNC LETIERCE n'a pas consacré de développement particulier au fondement de la responsabilité de STOLZ ; qu'on peut considérer, comme elle semble le faire, que le tétrapode dont la chute est à l'origine du sinistre constitue un ouvrage immobilier en raison de son ancrage dans le sol ou, à tout le moins, de la quasi-impossibilité de le déplacer ; que dès lors, sa chute rentre effectivement dans les prévisions de l'article 1792 visé avec les articles 1792-5, 1796, 2270, 2278 et 1134 dans le dispositif des conclusions ; que la responsabilité des constructeurs étant exclusive de la responsabilité de droit commun, la cour constate que la responsabilité de STOLZ ne peut être mise en oeuvre que sur le fondement de 1792 du code civil ; qu'en conséquence, le sinistre n'est couvert par aucune des deux polices citées qui n'ont pas vocation à satisfaire à l'obligation d'assurance des constructeurs ;
1°) ALORS QUE la police responsabilité civile souscrite par la société STOLZ auprès de l'UAP couvrait les dommages causés aux tiers, y compris les clients du fait de l'exercice de ses activités ; que de même, la police TRC garantissait l'assuré (la société STOLZ) pour la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers et aux clients, y compris après la livraison et la réception des travaux ; qu'en énonçant dès lors que la police TRC couvrait les dommages matériels à l'ouvrage pendant les travaux et que la police assurance responsabilité civile couvrait les dommages causés aux tiers, la cour d'appel a dénaturé les contrats d'assurance et a violé l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE la SNC LETIERCE avait expressément fait valoir que sont prohibées et, partant, réputées non écrites les clauses ayant pour effet d'exclure la responsabilité prévue aux articles 1792 et suivants du code civil ; qu'en conséquence, en se bornant à affirmer que « le sinistre n'est couvert par aucune des deux polices ¿ qui n'ont pas vocation à satisfaire à l'obligation d'assurance des constructeurs » sans répondre au chef péremptoire de conclusions de la SNC LETIERCE, la cour d'appel a en toute hypothèse violé l'article 455 du code de procédure civile.