LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Joseph X... a souscrit auprès de la société Axa France IARD (l'assureur), une police d'assurance multirisques habitation concernant un immeuble lui appartenant qui a été endommagé à la suite d'une tempête survenue le 27 décembre 1999 ; qu'après déclaration du sinistre, à l'issue de l'examen des désordres par les experts de chacune des parties, un procès-verbal d'expertise a été signé le 21 juin 2001 fixant le montant total de l'indemnité ; que M. Joseph X... a signé ensuite un accord de règlement le même jour portant sur la somme de 168 072, 91 euros ; que l'assureur, après avoir procédé à divers règlements pour un total de 149 880, 51 euros, ayant refusé de verser le solde de 18 192, 40 euros au motif que M. Joseph X... n'avait pas justifié avoir réalisé l'intégralité des travaux de reprise tels que contradictoirement chiffrés, celui-ci l'a assigné en paiement de cette somme ; que son fils, devenu donataire en nue propriété de l'immeuble concerné, est intervenu volontairement dans la procédure ;
Attendu que la première branche du moyen unique du pourvoi principal et les deuxième et troisième branches du moyen unique du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur la deuxième branche du moyen unique du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'en limitant l'indemnisation aux montants retenus en 2001, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'y avait pas lieu d'appliquer la stipulation des conditions générales de la police d'assurance selon laquelle une indemnité complémentaire, dans la limite de 25 % du montant de la valeur de reconstruction, serait réglée dans le cas où l'indemnité versée au fur et à mesure des travaux sur justification des frais engagés était insuffisante, et si les travaux n'avaient pu être réalisés que plusieurs années après l'évaluation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur la troisième branche du moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour ne condamner l'assureur qu'au paiement de la somme de 3 048, 98 euros, l'arrêt énonce que M. X... peut prétendre au remboursement des dépenses exposées pour un montant de 4 919, 19 euros ; qu'il ne justifie pas d'autres travaux au titre des postes retenus par le procès-verbal d'accord ; que le total des travaux exposés pour la reconstruction de l'immeuble sinistré s'est élevé à 134 721, 20 euros ; qu'il convient d'y ajouter le poste complément embellissements pour la somme de 3 048, 98 euros ; que M. X... a perçu 116 944, 94 euros au titre des provisions versées ; qu'il lui reste dû, conformément à l'accord sur le montant des dommages, la somme de 20 825, 24 euros ; que l'assureur sera condamné à lui verser la somme de 3 048, 98 euros (20 825, 25-17 117, 26 euros) avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'il restait dû à M. Joseph X..., conformément à l'accord sur le montant des dommages, la somme de 20 825, 24 euros, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé ainsi le texte susvisé ;
Et sur la quatrième branche du moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 1153 du code civil ;
Attendu qu'en condamnant l'assureur à payer à M. Joseph X... la somme de 3 048, 98 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de sa décision, quand la créance, objet de la condamnation, résultait d'un contrat de sorte qu'elle portait intérêts dès la sommation de payer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen unique du pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Axa à payer à M. Joseph X... la somme de 3 048, 98 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, l'arrêt rendu le 22 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD, la condamne à payer aux consorts X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour les consorts X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué de n'avoir condamné la société Axa à régler à M. Joseph X... que la somme de 3. 048, 98 ¿, outre intérêts légaux à compter de l'arrêt, et d'avoir ainsi débouté M. Joseph X... de sa demande de condamnation au paiement du solde de l'indemnité contractuelle restant due, soit le montant en principal, sauf à parfaire, de 18. 192, 39 ¿ ;
Aux motifs que « à la suite du sinistre tempête du 27 décembre 1999, un rapport d'expertise a été diligenté par la compagnie Axa, M. X... étant représenté par le cabinet Luc Expert ; qu'à l'issue de cette expertise, un procès-verbal a été signé le 21 juin 2001 entre les experts, avec estimation des dommages poste par poste pour un total général de 1. 102. 486 F soit 168. 073, 16 ¿ ; que M. X... ne peut valablement soutenir que ce procès-verbal ne lui est pas opposable puisqu'il était représenté par M. Olivier Y... du cabinet Luc Expert, son mandataire ; qu'il résulte tant de l'expertise que du procès-verbal d'accord entre les parties que l'indemnité différée doit être versée au fur et à mesure des travaux, sur justificatifs, poste par poste ; que le décompte des pertes, poste par poste, a été arrêté comme il suit : * couverture-zinguerie : 665. 404 F, avec mise aux normes des crochets de sécurité : 86. 473 F, soit 114. 622, 91 ¿, * vitrerie et vitraux : 65. 970 F soit 10. 040, 75 ¿, * platerie : 65. 863 F soit 10. 058, 28 ¿, * peinture : 79. 832 F soit 12. 170, 31 ¿, * menuiserie : 5. 275 F soit 804, 17 ¿, * façade : 33. 633 F soit 5. 127, 32 ¿, * mobilier : 3. 500 F soit 533, 57 ¿ ; que M. X... produit les factures suivantes : * couverture-zinguerie :- facture SARL Campet 24 juin 2002 : 8. 168, 38 ¿,- facture SARL Campet en juillet 2002 : 7. 932, 79 ¿,- facture SARL BGB : 161. 204, 07 ¿, soit un total de : 167. 305, 24 ¿ ; que M. X... ne peut prétendre qu'à la somme de 114. 622, 91 ¿ arrêtée lors de l'expertise amiable ; que s'agissant des * cheminées : factures Screg :-28 avril 2006 (2 cheminées) : 19. 158, 80 ¿,-12 mai 2006 (1 cheminée) : 13. 029, 25 ¿,-12 juin 2006 (1 cheminée) : 14. 325, 50 ¿ ; que la réfection des cheminées a été incluse dans la couverture zinguerie lors de l'expertise ; que s'agissant de la * plâtrerie : factures Popovitch des 9 mai, 22 mai et 1er juin 2006 : 10. 234, 50 ¿ ; que M. X... ne peut prétendre qu'à la somme de 10. 058, 28 ¿ ; que s'agissant de la * miroiterie : factures Soler et Fenêtrier : 5. 138, 35 ¿ ; que M. X... peut prétendre au remboursement des dépenses exposées soit 5. 138, 35 ¿ ; que s'agissant de la * peinture et papier peint :- facture SAS GP du 14 juin 2006 : 4. 511, 40 ¿,- facture Decorstaff du 29 mai 2006 : 407, 79 ¿ ; que M. X... peut prétendre au remboursement des dépenses exposées pour 4. 919, 19 ¿ ; qu'il ne justifie pas d'autres travaux au titre des postes retenus par le procès-verbal d'accord ; que le total des travaux exposés pour la reconstruction de l'immeuble sinistré s'est élevé à 134. 721, 20 ¿ ; qu'il convient d'y ajouter le poste complément embellissements pour 3. 048, 98 ¿ (20. 000 F) ; que M. X... a perçu 116. 944, 94 ¿ au titre des provisions versées ; qu'il lui reste dû, conformément à l'accord sur le montant des dommages, la somme de 20. 825, 24 ¿ ; que la compagnie d'assurances Axa sera condamnée à lui verser la somme de 3. 048, 98 ¿ (20. 825, 25-17. 117, 26 ¿) avec intérêts au taux légal à compter de ce jour » ;
Alors, d'une part, que le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est porté dans son mandat ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater l'existence d'un mandat dont il résulterait que M. X... avait confié à l'expert désigné chargé « de procéder à la reconnaissance et à l'estimation des dommages causés par un sinistre survenu le 28 décembre 1999 », le pouvoir de répartir poste par poste le montant de l'indemnisation de ces dommages, tandis que le seul accord de règlement signé par M. X... portait sur une somme globale d'indemnité sans que son paiement ne soit divisé par postes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1989 du code civil et L. 121-17 du code des assurances ;
Alors, d'autre part, qu'en limitant l'indemnisation aux montants retenus en 2001, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., M. Jean-Marie X..., p. 5, § 7), s'il n'y avait pas lieu d'appliquer la stipulation des conditions générales de la police d'assurance selon laquelle « une indemnité complémentaire dans la limite de 25 % du montant de la valeur de reconstruction » serait réglée dans le cas où l'indemnité versée au fur et à mesure des travaux sur justification des frais engagés était insuffisante, en raison du fait que les travaux n'avaient pu être réalisés que plusieurs années après l'évaluation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Alors, de troisième part, qu'à supposer même que le versement des indemnités ait dû se faire poste par poste, la cour d'appel a constaté qu'en vertu de ce calcul, il restait dû à M. Joseph X..., « conformément à l'accord sur le montant des dommages, la somme de 20. 825, 24 ¿ » ; qu'en condamnant néanmoins la compagnie Axa à ne payer à M. Joseph X... que la somme de 3. 048, 98 ¿, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que la créance de M. X... était supérieure à ce montant ; qu'elle a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, en tout état de cause, que la créance d'une somme d'argent dont le principe et le montant résultent de la loi ou du contrat et non de l'appréciation du juge porte intérêts dès la sommation de payer, peu important que le juge saisi de la contestation évalue finalement la créance à une somme différente de celle qui était réclamée par le créancier ou proposée par le débiteur ; qu'en condamnant la compagnie Axa à payer à M. Joseph X... la somme de 3. 048, 98 ¿ avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, quand la créance, objet de la condamnation, résultait du contrat d'assurance habitation multirisques souscrit par M. X... auprès de la compagnie Axa, de sorte qu'elle portait intérêts dès la sommation de payer, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour la société Axa France IARD
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé le jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINT-GAUDENS du 8 septembre 2009 et, statuant à nouveau, D'AVOIR condamné la SA AXA FRANCE IARD à régler à Monsieur Joseph X... la somme de 3. 048, 98 ¿ avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE le décompte des pertes, poste par poste, a été arrêté comme il suit :
couverture-zinguerie : 665. 404 francs avec mise aux normes des crochets de sécurité : 86. 473 francs, soit 114. 622, 91 euros * vitrerie et vitraux : 65. 978 francs soit 10. 040, 75 euros * plâtrerie : 65. 863 francs soit 12. 170, 31 euros * menuiserie : 5. 275 francs soit 804, 17 euros * façade : 33. 633 francs soit 5. 127, 32 euros ;
Monsieur X... produit les factures suivantes :
* couverture-zinguerie :
- facture SARL Campet 24 juin 2002 : 8. 168, 38 euros-facture SARL Campet 11 juillet 2002 : 7. 932, 79 euros-facture SARL BGB : 161. 204, 07 euros TOTAL : 167. 305, 24 euros
Monsieur X... ne peut prétendre qu'à la somme de 114. 622, 91 euros arrêtée lors de l'expertise amiable ;
* cheminée : factures SCREG
-28 avril 2006 (2 cheminées) : 19. 158, 80 euros-12 mai 2006 (1 cheminée) : 13. 029, 25 euros-12 juin 2006 (1 cheminée) : 4. 325, 50 euros
La réfection des cheminées a été incluse dans la couverture-zinguerie lors de l'expertise,
* plâtrerie : facture POPOVICH des 9 mai, 22 mai et 1er juin 2006 :
10. 234, 50 euros,
Monsieur X... ne peut prétendre qu'à la somme de 10. 058, 28 euros,
* miroiterie : facture SOLER et FENETRIER : 5. 138, 35 euros,
Monsieur X... peut prétendre au remboursement des dépenses exposées soit 5. 138, 35 euros,
* peinture et papiers peints :
- facture SSGP du 14 juin 2006 : 4. 511, 40 euros,- facture Decor Staff du 29 mai 2006 : 407, 79 euros
Monsieur X... peut prétendre au remboursement des dépenses exposées pour 4. 919, 19 euros,
qu'il ne justifie pas d'autres travaux au titre des postes retenus par le procès-verbal d'accord ; que le total des travaux exposés pour la reconstruction de l'immeuble sinistré s'est élevé à 134. 721, 20 euros ; qu'il convient d'y ajouter le poste complément embellissements pour 3. 048, 98 euros (20. 000 francs) que Monsieur X... a perçu 116. 944, 94 euros au titre des provisions versées ; qu'il lui reste dû la somme de 20. 825, 24 euros ; que la compagnie d'assurance AXA sera condamnée à lui verser la somme de 3. 048, 98 euros (20. 825, 25-17. 117, 26 euros) avec intérêt au taux légal à compter de ce jour ;
ALORS D'UNE PART QUE toutes les parties au litige reconnaissaient que la société AXA FRANCE IARD avait effectué des règlements à hauteur de 149. 880, 52 ¿ (concl. Joseph X..., p. 11 et dispositif p. 12 ; concl. AXA, p. 3, al. 1er ; concl. intervention Jean Marie X..., dispositif p. 6), d'où il suit qu'en affirmant que « Monsieur X... a perçu 116. 944, 94 euros au titre des provisions versées » (arrêt, p. 5, al. 4), la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QU'aucune des parties ne demandait à la Cour de procéder à un nouveau compte entre les parties ; que Monsieur Joseph X... faisait valoir en substance qu'il avait droit à une indemnité globale de 168. 061, 89 ¿ et qu'il justifiait avoir fait des travaux relevant de cette indemnité à hauteur de 234. 110, 83 ¿, de sorte qu'il était en droit d'obtenir la somme de 18. 192, 39 ¿ en l'état des paiements effectués par la société AXA FRANCE IARD à concurrence de 149. 880, 52 ¿ ; que la société AXA FRANCE IARD, concluant à la confirmation du jugement, demandait à la Cour de juger que Monsieur X... ne justifiait pas que les travaux pour lesquels il demandait le remboursement à l'assureur correspondaient à ceux prévus au procès-verbal d'expertise qui définissait les obligations des parties ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a de nouveau modifié les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QU'en procédant à un nouveau compte entre les parties sur des bases qui n'étaient pas discutées par elles, la Cour d'appel a soulevé d'office un moyen mélangé de fait et de droit en violation des articles 16 du Code de procédure civile et 6. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.