LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 mai 2011), qu'après avoir formé, le 30 avril 2010, un recours en annulation contre une sentence arbitrale intermédiaire, rendue en France, le 8 avril précédent, en matière d'arbitrage international, la société Bioalliance Pharma (la société Bioalliance), reprochant au juge de l'exécution d'avoir commis un excès de pouvoir en ordonnant l'exequatur de cette sentence a, le 18 juin 2010, soit le lendemain du prononcé de l'ordonnance d'exequatur, formé un appel-nullité contre celle-ci, tout en concluant ultérieurement, au cours de la procédure en annulation de la sentence, à l'annulation de l'ordonnance d'exequatur sur le fondement du même reproche d'excès de pouvoir ;
Attendu que la société Bioalliance fait grief à l'arrêt de refuser de joindre l'appel-nullité au recours en annulation, de déclarer irrecevable cet appel-nullité et d'allouer différentes sommes aux sociétés défenderesses au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen, qu'une sentence arbitrale frappée de recours ne peut ensuite faire l'objet d'un exequatur, le juge de l'exécution étant alors dessaisi de plein droit par l'effet de l'article 1504 alinéa 2 du code de procédure civile ; que si ce texte prévoit encore que le recours principal en annulation emporte de plein droit, dans les limites de la saisine de la cour, recours contre l'ordonnance du juge de l'exécution, cette disposition réglementaire ne fait nullement obstacle à la formalisation d'un appel-nullité quand l'excès de pouvoir du juge de l'exequatur procède, comme en l'espèce, d'une décision postérieure à l'introduction du recours principal en annulation contre la sentence arbitrale ; qu'en déclarant dès lors irrecevable l'appel-nullité, la cour de Paris a violé le texte susvisé et a privé les parties de leur droit d'accès au juge au regard notamment des articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'après avoir à juste titre rappelé que l'appel-nullité n'est ouvert, à titre exceptionnel, que contre une décision qui n'est susceptible d'aucun autre recours, puis relevé à bon droit que l'ordonnance d'exequatur d'une sentence internationale peut être attaquée par la voie du recours exercé contre cette sentence, ce dont il résulte que la partie qui reproche au juge de l'exécution d'avoir commis un excès de pouvoir, en ordonnant l'exequatur de la sentence malgré son dessaisissement du fait du recours en annulation préalablement formé contre celle-ci, est en mesure de s'en prévaloir et d'en tirer toutes les conséquences utiles au cours de la procédure en annulation de la sentence, la cour d'appel en a exactement déduit que la voie de l'appel-nullité n'était pas ouverte contre l'ordonnance d'exequatur d'une sentence internationale, partant que l'action de la société Bioalliance était irrecevable; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bioalliance Pharma aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux sociétés Spepharm Holding BV et Spebio BV la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils pour la société Bioalliance Pharma
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, qui a refusé de joindre l'appel-nullité avec le recours en annulation, d'avoir déclaré irrecevable l'appel-nullité formé par Bioalliance contre l'ordonnance accordant l'exécution de la sentence arbitrale parallèlement attaquée devant elle et d'avoir alloué aux sociétés défenderesses différentes sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs qu'aux termes de l'article 1504 alinéa 2 du code de procédure civile, l'ordonnance qui accorde l'exécution d'une sentence rendue en France en matière d'arbitrage international «n'est susceptible d'aucun recours. Toutefois le recours en annulation emporte de plein droit, dans les limites de la saisine, recours contre l'ordonnance du juge de l'exécution ou dessaisissement de ce juge» ; que l'appel-nullité n'est ouvert, à titre exceptionnel, que contre une décision qui n'est susceptible d'aucun autre recours ; que l'ordonnance d'exequatur d'une sentence arbitrale qui peut être attaquée par la voie de recours exercée contre la sentence n'est pas sujette à l'appel-nullité ; qu'il convient de déclarer irrecevable l'action de Bioalliance ;
Alors qu'une sentence arbitrale frappée de recours ne peut ensuite faire l'objet d'un exequatur, le juge de l'exécution étant alors dessaisi de plein droit par l'effet de l'article 1504 al. 2 du code de procédure civile ; que si ce texte prévoit encore que le recours principal en annulation emporte de plein droit, dans les limites de la saisine de la cour, recours contre l'ordonnance du juge de l'exécution, cette disposition réglementaire ne fait nullement obstacle à la formalisation d'un appel-nullité quand l'excès de pouvoir du juge de l'exequatur procède, comme en l'espèce, d'une décision postérieure à l'introduction du recours principal en annulation contre la sentence arbitrale ; qu'en déclarant dès lors irrecevable l'appel-nullité, la cour de Paris a violé le texte susvisé et a privé les parties de leur droit d'accès au juge au regard notamment des articles 6 et 13 de la convention européenne des droits de l'homme.