LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches, réunies :
Vu les articles 284 et 724 du code de procédure civile ;
Attendu que la procédure spéciale prévue par ces textes s'applique aux contestations relatives à la rémunération des techniciens désignés par le juge, en celles comprises la répartition de leur charge entre les parties ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'à l'occasion d'un litige ayant opposé Charles X... et la Société générale, M. Y..., expert, a formé un recours contre une décision d'un juge taxateur ayant fixé sa rémunération à une certaine somme en en répartissant la charge entre les deux parties, Charles X... et la Société générale, au prorata des sommes consignées ;
Attendu que pour déclarer irrecevable le recours de M. Y..., l'ordonnance énonce que l'expert ne conteste pas le montant de sa rémunération mais seulement la répartition de la charge des sommes fixées ; qu'aux termes des articles 695 et 696 du code de procédure civile cette répartition définitive incombe au juge qui statue sur les dépens de l'instance ; que le pouvoir du premier président statuant en application de l'article 724 du même code est limité à l'examen des contestations portant sur la rémunération des techniciens ;
Qu'en statuant ainsi, le premier président, qui a méconnu ses pouvoirs, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 19 novembre 2012, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la Société générale aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable le recours formé par Monsieur Y... contre le chef de dispositif de l'ordonnance ayant fixé la rémunération de l'expert par lequel le Juge taxateur avait ordonné que le solde de la rémunération de l'expert lui serait versé par les parties au litige principal au prorata des sommes antérieurement consignées par elles ;
AUX MOTIFS QUE l'expert ne conteste pas le montant de sa rémunération mais seulement la répartition de la charge des sommes fixées ; qu'aux termes des articles 695 et 696 du Code de procédure civile, cette répartition définitive incombe au juge qui statue sur les dépens de l'instance ; que le pouvoir du Premier président statuant en application de l'article 724 du même Code est limité à l'examen des contestations portant sur la rémunération des techniciens ;
1°) ALORS QUE l'ordonnance fixant la rémunération de l'expert peut être frappée de recours devant le Premier président de la Cour d'appel en ce qu'elle met le versement du solde de la rémunération de l'expert à la charge d'une partie déterminée ; qu'en retenant, en l'espèce, pour déclarer irrecevable le recours de l'expert, que ce recours est limité à l'examen des contestations portant sur la rémunération des techniciens, quand l'expert contestait l'ordonnance ayant fixé sa rémunération en ce qu'elle avait mis le versement du solde de sa rémunération à la charge d'une partie insolvable, le Premier président de la Cour d'appel a violé l'article 724 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'auteur d'un recours formé contre une décision est libre de n'en critiquer que certains chefs de dispositif ; qu'en subordonnant, en l'espèce, la recevabilité du recours formé contre une ordonnance fixant la rémunération de l'expert à la condition qu'il soit dirigé contre l'intégralité des chefs de dispositif de celle-ci, quand l'expert était libre de limiter son recours au seul chef de dispositif ayant mis le versement du solde de sa rémunération à la charge d'une partie déterminée, le Premier président de la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile, ensemble l'article 724 du même Code ;
3°) ALORS QUE si la charge définitive des dépens est arrêtée par le juge connaissant du fond de l'affaire, la détermination de la charge provisoire des frais d'expertise relève de l'office du juge fixant la rémunération de l'expert ; qu'en retenant, en l'espèce, pour déclarer irrecevable le recours formé par l'expert, que la répartition définitive des frais d'expertise incombait au juge qui statuerait sur les dépens de l'instance, quand il était saisi d'un recours lui demandant d'en modifier la répartition provisoire entre les parties au litige principal, le Premier président de la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé les articles 284 et 724 du Code de procédure civile, ensemble les articles 695 et 696 du même Code ;
4°) ALORS QUE si la décision du Juge taxateur mettant le paiement du solde de la rémunération de l'expert à la charge d'une partie déterminée est provisoire entre les parties au litige principal jusqu'à ce qu'il soit statué sur les dépens, elle est définitive à l'égard de l'expert dont le débiteur de sa rémunération est définitivement constitué ; qu'en retenant, en l'espèce, que la répartition définitive du paiement des frais d'expertise incombait au juge statuant sur les dépens de l'instance, quand cette répartition provisoire entre les parties mais définitive à l'égard de l'expert relevait de l'office du juge fixant la rémunération de l'expert, le Premier président de la Cour d'appel a violé les articles 284 et 724 du Code de procédure civile.