LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire et 79, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que le juge de l'exécution est compétent pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée et du second que lorsqu'une cour d'appel infirme du chef de la compétence, elle statue sur le fond du litige si la décision est susceptible d'appel dans l'ensemble de ses dispositions et si elle est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'un précédent arrêt irrévocable, après avoir ordonné la mainlevée immédiate des saisies-attributions à exécution successive pratiquées, en vertu d'actes de prêt notariés, au préjudice de la société civile immobilière Tristan (la société Tristan), par les sociétés Soderag et Sodega, a condamné la Société financière Antilles Guyane département Sodega (la Sofiag), aux droits de Soderag et Sodega, à payer à la société Tristan une certaine somme à titre de dommages-intérêts ; qu'un juge de l'exécution, saisi par la Sofiag se prévalant d'une exception de compensation, a dit que la créance de la société Tristan sur la Sofiag ne pouvait en l'état donner lieu à mesure d'exécution forcée ;
Attendu que, pour débouter la Sofiag de ses demandes, l'arrêt retient que le juge de l'exécution, en statuant en l'absence de toute mesure d'exécution forcée, a excédé ses pouvoirs et que, la juridiction d'appel ayant les mêmes pouvoirs, il n'y avait pas lieu de se prononcer sur le droit pour la société Tristan d'exécuter l'arrêt rendu à son profit ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le juge de l'exécution n'était pas compétent pour statuer sur la demande et qu'elle devait dès lors se prononcer sur le fond du litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne la société Tristan aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Tristan à payer à la société Antilles Guyane département Sodega la somme de 3 000 euros ;Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la Société financière Antilles Guyane.Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SOFIAG de toutes ses demandes ;AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît des difficultés et contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée des titres exécutoires ; en l'espèce, par assignation du août 2009, la SOFIAG avait saisi le juge de l'exécution de FORT-DE-FRANCE en lui demandant de déclarer son action recevable sur le fondement précité, en vue de faire jouer la compensation légale entre créances réciproques, dire que la créance de 30.000 euros de la SCI TRISTAN se trouve éteinte, et fixer le nouveau solde de la créance de la SOFIAG ; dans sa motivation, l'acte de saisine du premier juge par la SOFIAG a indiqué : "alerté de la volonté de la SCI TRISTAN de faire exécuter de manière forcée l'arrêt de la cour d'appel, la SOFIAG est contrainte d'agir" ; la simple mise en demeure avant poursuites, telle le courrier de l'huissier de la SCI TRISTAN du 3 août 2009 invoqué par la SOFIAG, préalable à la délivrance d'un commandement de payer ou d'un acte de saisie, ne peut être qualifiée d'acte d'exécution forcée susceptible de justifier la compétence du juge de l'exécution ; le premier juge, en statuant comme il l'a fait, a excédé ses pouvoirs ; le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions et la SOFIAG déboutée de ses demandes ; pour le même motif, la cour statuant présentement avec les mêmes pouvoirs que le juge de l'exécution, il n'y a pas lieu de se prononcer sur le droit pour la SCI TRISTAN d'exécuter l'arrêt du 13 mars 2009 par toutes voies de droit ; 1°) ALORS QUE le juge de l'exécution qui statue sur une demande malgré l'absence d'acte d'exécution forcée ne commet pas un excès de pouvoir ; qu'en retenant, en l'espèce, pour infirmer le jugement entrepris, que le juge de l'exécution avait excédé ses pouvoirs en jugeant, en l'absence de tout acte d'exécution forcée, que la SCI TRISTAN ne pouvait obtenir l'exécution forcée de la condamnation prononcée à son profit par l'arrêt du 13 mars 2009, quand il était seulement incompétent pour en connaître, la Cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire ;2°) ALORS QUE la Cour d'appel, saisie d'un appel dirigé contre un jugement du juge de l'exécution incompétent pour connaître de la demande en l'absence de tout acte d'exécution forcée, doit statuer sur le fond lorsqu'elle est juridiction d'appel relativement à la juridiction compétente ou renvoyer l'affaire devant la Cour d'appel qui est juridiction d'appel relativement à la juridiction qui eût été compétente en première instance ; qu'en jugeant, pour débouter la SOFIAG de ses demandes, qu'il n'y avait pas lieu de se prononcer sur le droit pour la SCI TRISTAN d'exécuter l'arrêt du 13 novembre 2009 par toutes voies de droit, au seul motif, erroné, qu'elle statuait avec les mêmes pouvoirs que le juge de l'exécution, sans se prononcer elle-même sur la prétention de la SOFIAG tendant à faire constater la compensation de sa dette résultant de cette décision avec sa propre créance sur la SCI TRISTAN ou à renvoyer à la juridiction d'appel qu'elle estimait compétente, la Cour d'appel a violé l'article 79 du Code de procédure civile.