LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 18 juin 2013), que l'office public de l'habitat du département du Rhône (l'employeur) a déclaré, le 5 avril 2010, à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône (la caisse), un accident concernant l'un de ses salariés, M. X... ; qu'il a émis des réserves dans un courrier du 7 avril 2010 ; que la caisse ayant pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle sans procéder à une instruction préalable, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de lui déclarer opposable la décision de la caisse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est inopposable à l'employeur une décision de prise en charge dont il n'avait pas connaissance au moment de la formulation des réserves ; qu'en constatant que l'employeur avait émis des réserves réceptionnées le jour même où la décision de prise en charge par la caisse était intervenue, et donc à un moment où l'employeur n'avait pas connaissance de cette décision, pour néanmoins considérer que la décision de prise en charge de l'accident du travail était opposable à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles R. 441-10 et R. 441-11 du Code de la sécurité sociale ;
2°/ que la réserve motivée s'entend d'une contestation de l'employeur visant à émettre des doutes sur le fait que l'accident ait eu lieu au temps ou au lieu du travail ou à établir que l'accident a une cause totalement étrangère au travail ; que la caisse est alors tenue de diligenter une enquête, sans que l'employeur ait à démontrer en quoi les circonstances de temps et de lieu mentionnées à la déclaration sont inexactes et à faire état des éléments lui permettant d'adopter ce parti ; qu'en l'espèce, l'OPAC a émis des réserves sur le caractère professionnel de l'accident en se fondant sur une absence de témoin ; qu'en refusant d'y voir une réserve motivée, bien que portant « sur une possible fraude susceptible d'avoir été commise par le salarié », eu égard à l'absence d'autres éléments apportés par l'employeur invoquant une cause étrangère à l'origine de l'accident, et en dispensant la caisse de toute enquête, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les réserves émises par l'employeur avaient été réceptionnées par la caisse le jour même de la décision de prise en charge, ce dont il résultait que l'organisme social n'en avait pas eu connaissance antérieurement, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elles n'étaient pas recevables, de sorte que la prise en charge litigieuse était opposable à l'employeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'office public de l'habitat du département du Rhône aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'office public de l'habitat du département du Rhône et le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône la somme de 850 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'office public de l'habitat du département du Rhône
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR débouté l'OPAC du RHONE de l'ensemble de ses demandes et d'AVOIR confirmé la décision de la Commission de recours amiable du 16 décembre 2011 ;
AUX MOTIFS QUE seules les réserves adressées par l'employeur à la CPAM doivent être prises en compte pour apprécier si celle-ci, en application de l'article R411-11 du code de la sécurité sociale, se devait d'adresser un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de procéder à une enquête auprès des intéressés ; que les réserves formulées par l'employeur sont les suivantes : « En effet, Monsieur X... aurait glissé à 7 h 15 en sortant de son véhicule, étant précisé que le 5 janvier 2010 la prise de service débutait à sept heures. Or la matérialité de l'accident doit être prouvée et ne peut être démontrée par les seules affirmations de la victime. En l'absence de témoin, il n'est pas possible de déterminer le moment précis de la chute c'est-à-dire avant ou après la prise de fonction et donc hors lien contractuel » ; que d'une part, les réserves émises par l'employeur ont été réceptionnées le jour même où la décision de prise en charge par la CPAM est intervenue ; qu'aucun élément n'établit que les réserves émises par l'employeur l'aient été avant toute prise de décision de prise en charge ou non par la CPAM ; qu'elles ne sont pas recevables ; que d'autre part, même à admettre que les réserves émises par l'employeur, l'aient été avant toute décision de prise en charge par la CPAM, les réserves de l'employeur, au sens de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale, rendant obligatoire la mise en mouvement d'une mesure d'instruction, doivent être motivées et porter sur des faits précis concernant les circonstances de temps et de lieu ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail de nature à mettre en doute le lien entre l'accident et le travail ; que les réserves émises par l'employeur sont générales, concernant l'absence de témoin, une information tardive, et une éventuelle possibilité que l'accident soit survenu en amont ou aval de la prise de poste ; qu'elles ne peuvent être considérées comme des réserves motivées au sens de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale, s'agissant de réserves éventuelles portant sur une possible fraude susceptible d'avoir été commise par le salarié, sans aucune évocation notamment d'un impossible rattachement de la lésion avec l'activité habituelle exercée par le salarié, ne pouvant entrainer pour la CPAM une obligation de recourir à des actes d'instruction avant toute prise de décision ; que le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef ; que la décision entreprise qui a déclaré opposable à l'OPAC du Rhône la décision de prise en charge de l'accident du travail dont Monsieur X... a été victime le 5 janvier 2010 n'encourt aucune critique et doit être confirmée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES que les réserves motivées visées par l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale, s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur, et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; que dans cette hypothèse, la Caisse procède à une enquête auprès des intéressés ou envoie au salarié et à l'employeur un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ; qu'en l'espèce, après avoir adressé, le 5 janvier 2010, la déclaration du travail relative à l'accident du même jour allégué par Monsieur X..., l'OPAC du Rhône a envoyé à la Caisse le 7 janvier 2010 un courrier et a émis des réserves dans les termes suivants : « Monsieur X... aurait glissé à 7 h 15 en sortant de son véhicule, étant précisé que le 5 janvier 2010 la prise de service débutait à sept heures. Or la matérialité de l'accident doit être prouvée et ne peut être démontrée par les seules affirmations de la victime. En l'absence de témoin, il n'est pas possible de déterminer le moment précis de la chute c'est-à-dire avant ou après la prise de fonction et donc hors lien contractuel. Telles sont les réserves que l'OPAC entend formuler à ce stade de la procédure » ; qu'au travers de ces réserves, l'employeur ne remet pas en question la réalité de la chute, ni la présence de Monsieur X... sur son lieu de travail au moment de l'accident allégué, la survenance de l'accident juste avant la prise de poste alors que l'intéressé arrivait sur son lieu de travail pouvant en tout état de cause être considéré comme un accident de trajet et relevant donc de la législation professionnelle ; que de même l'employeur ne conteste pas davantage les circonstances de l'apparition de la lésion alléguée par la salariée telle que mentionnée sur la déclaration d'accident du travail, mais se contente de faire état de l'hypothèse selon laquelle l'accident ne se serait pas produit en cours d'exécution de la mission ; que ces réserves qui ne reposent donc que sur une simple hypothèse de l'employeur ne constituent pas des réserves motivées ; que la CPAM du Rhône pouvait donc, comme elle l'a fait, prendre en charge d'emblée l'accident, sans être obligée d'assurer l'information de l'employeur prévue par l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale ; que la décision de prise en charge, par la Caisse, de l'accident dont Monsieur X... a été victime le 5 janvier 2010 sera donc déclarée opposable à l'OPAC du Rhône ;
1) ALORS QU'est inopposable à l'employeur une décision de prise en charge dont il n'avait pas connaissance au moment de la formulation des réserves ; qu'en constatant que l'employeur avait émis des réserves réceptionnées le jour même où la décision de prise en charge par la Caisse était intervenue, et donc à un moment où l'employeur n'avait pas connaissance de cette décision, pour néanmoins considérer que la décision de prise en charge de l'accident du travail était opposable à l'employeur, la Cour d'appel a violé les articles R 441-10 et R 441-11 du Code de la sécurité sociale ;
2) ALORS QUE la réserve motivée s'entend d'une contestation de l'employeur visant à émettre des doutes sur le fait que l'accident ait eu lieu au temps ou au lieu du travail ou à établir que l'accident a une cause totalement étrangère au travail ; que la Caisse est alors tenue de diligenter une enquête, sans que l'employeur ait à démontrer en quoi les circonstances de temps et de lieu mentionnées à la déclaration sont inexactes et à faire état des éléments lui permettant d'adopter ce parti ; qu'en l'espèce, l'OPAC a émis des réserves sur le caractère professionnel de l'accident en se fondant sur une absence de témoin ; qu'en refusant d'y voir une réserve motivée, bien que portant « sur une possible fraude susceptible d'avoir été commise par le salarié » (Arrêt, p. 5), eu égard à l'absence d'autres éléments apportés par l'employeur invoquant une cause étrangère à l'origine de l'accident, et en dispensant la caisse de toute enquête, la Cour d'appel a violé l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale.