LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 771, 775 et 916 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte notarié du 23 novembre 2007, la société Banque patrimoine et immobilier (la banque) a consenti à M. et Mme X... un prêt immobilier ; que, suite à la défaillance des emprunteurs, la banque a prononcé la déchéance du terme, avant d'assigner ceux-ci en paiement du solde du prêt ; que la cour d'appel a accueilli cette demande, après que le conseiller de la mise en état eut, par ordonnance du 4 octobre 2012, rejeté la demande de sursis à statuer des époux X... ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de sursis à statuer renouvelée au fond par les époux X..., l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions des articles 73, 771 et 916 du code de procédure civile que le conseiller de la mise en état est seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation de la juridiction, pour statuer sur une demande de sursis à statuer, qui constitue une exception de procédure, et que la partie qui a été déboutée de la demande de sursis à statuer qu'elle avait formée devant ce magistrat et qui n'a pas déféré cette ordonnance devant la cour d'appel dans les quinze jours de sa date est irrecevable à former une nouvelle fois une telle demande devant la cour d'appel statuant au fond ;
Qu'en se prononçant ainsi, alors que n'ayant pas statué sur une exception de procédure mettant fin à l'instance et n'ayant dès lors pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, l'ordonnance du conseiller de la mise en état ne pouvait faire l'objet d'un déféré et pouvait être remise en cause au fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Banque patrimoine et immobilier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Banque patrimoine et immobilier, condamne celle-ci à payer la somme globale de 3 000 euros aux époux X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par Monsieur X... et Madame Y... ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions combinées des articles 73, 771 et 916 du Code de procédure civile que le magistrat de la mise en état est seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation de la juridiction, pour statuer sur une demande de sursis à statuer, qui constitue une exception de procédure, et que la partie qui a été déboutée de la demande de sursis à statuer qu'elle avait formée devant le magistrat de la mise en état et qui n'a pas déféré cette ordonnance devant la cour dans les 15 jours de sa date est irrecevable à former devant la cour, statuant au fond, une nouvelle fois, une telle demande ;
ALORS QUE c'est seulement lorsque, en statuant sur une exception de procédure, l'ordonnance du conseiller de la mise en état met fin à l'instance que cette ordonnance a, au principal, l'autorité de la chose jugée et peut être déférée à la cour d'appel ; que Monsieur X... et Madame Y... étaient donc parfaitement recevables à soumettre à nouveau à la cour la demande de sursis à statuer qu'ils avaient précédemment soumise au magistrat chargé de la mise en état, et dont l'ordonnance de rejet n'était pas susceptible de déférer pas plus qu'elle n'était dotée de l'autorité de la chose jugée ; qu'en décidant le contraire, la cour viole, par fausse interprétation, les articles 771 et 916 du Code de procédure, ensemble, par refus d'application, l'article 775 du même Code et méconnaît, ce faisant, son office de juge au regard de l'article 12 du Code de procédure civile, violé.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... et Madame Y... au paiement de la somme principale de 156.996,01 euros, outre au paiement de la somme additionnelle de 10.989,72 euros au titre de l'indemnité contractuelle de 7 % ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de prêt prévoit en page 5 que les frais d'actes et de garanties « peuvent être évalués à 1,60 % du montant du crédit » et que leur montant sera précisé par le notaire auquel ils seront réglés ; que cette clause répond aux exigences de l'article L. 312-8 4° du Code de la consommation ;
ALORS QUE l'offre de crédit immobilier doit mentionner le coût des sûretés réelles ou personnelles, sauf lorsque le montant de ces charges ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion du contrat ; qu'en considérant qu'était conforme aux exigences légales la clause de l'offre de crédit immobilier se bornant à énoncer que les frais d'acte et de garantie « peuvent être évalués à 1,60 % du montant du crédit. Le montant sera indiqué par votre notaire auquel vous les réglerez directement », sans constater que la banque avait rapporté la preuve, qui lui incombait, que le montant desdits frais ne pouvait être connu avec précision avant la conclusion définitive du contrat, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 312-8 4° et L. 312-33 du Code de la consommation.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Benoît X... et Madame Isabelle Y... de leur demande tendant à la condamnation de la Banque Patrimoine et Immobilier (BPI) à leur payer la somme de 156.996,01 euros à titre de dommages et intérêts et à la compensation de ladite somme avec celles qu'ils étaient susceptibles de devoir à la banque ;
AUX MOTIFS QU'il est manifeste qu'aucun intermédiaire, et notamment pas la société Apollonia, n'apparaît dans les actes de prêt qui ont été passés ; que la consultation versée aux débats par la BPI fait apparaître qu'une convention a été conclue entre la société Apollonia et la BPI, le 5 mai 2004, intitulée « convention de mandat » ; que s'il y est prévu que le mandataire Apollonia s'engage à promouvoir auprès de sa clientèle les crédits immobiliers de la banque, il est expressément indiqué que les demandes de crédit devront être signées par les emprunteurs et que la banque reste seule juge de ses décisions en matière d'octroi de crédits ; que cette seule stipulation est exclusive de la notion de mandat qui suppose qu'une personne charge une autre d'accomplir pour son compte un acte juridique ; qu'en l'espèce, il est manifeste que la société Apollonia n'était pas chargée de représenter la banque pour l'accomplissement d'un ou plusieurs actes juridiques, mais simplement d'effectuer des actes de nature matérielle (démarches, collecte de documents, transmission à la banque ¿) qui excluent la représentation ; qu'elle agissait dans le cadre des dispositions de l'article L. 519-1 du Code monétaire et financier qui prévoit l'intermédiation en opérations de banque, précision étant apportée qu'en dépit de son intitulé, le contrat limitait son intervention à la présentation de la clientèle pour la conclusion éventuelle d'opérations de banque ; qu'il est constant que Monsieur et Madame X... n'ont eu de contact qu'avec la société Apollonia, qui ne les a pas démarchés au sens de l'article L. 341-1 du Code monétaire et financier qui implique la conclusion d'un contrat entre le démarcheur ou son commettant et un client, mais leur a fait signer autant de demandes de prêts que de lots de copropriété à financer ; qu'en l'espèce, Monsieur et Madame X... ont souscrit cinq prêts auprès de cinq banques différentes pour financier leurs cinq investissements ; que selon l'expression utilisée dans la consultation produite par Monsieur et Madame X..., les demandes de prêt étaient « cloisonnées », c'est-à-dire que chaque banque ignorait les engagements souscrits concomitamment auprès des autres établissements de crédit et ignorait même que le crédit immobilier s'inscrivait dans un contexte de défiscalisation reposant sur le statut de loueur en meublé ; que ce point n'est pas critiqué par Monsieur et Madame X..., qui ne prétendent pas avoir fait état auprès de la BPI des autres crédits qui étaient simultanément en cours d'étude auprès d'autres établissements bancaires ; que n'est pas remis en cause le fait que la banque disposait au moment de l'octroi du prêt, de la fiche de réservation signée, du contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement signé, de la demande de prêt immobilier dûment signée, incluant la fiche de renseignements bancaires des époux, des pièces justificatives relatives aux ressources, au patrimoine ainsi qu'aux charges de Monsieur X... et Madame Y..., des éléments d'état civil et de leur situation de famille ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que les éléments sur la situation financière des époux X... aient été falsifiés et présentaient des anomalies évidentes pour un professionnel de la distribution du crédit de sorte que la BPI n'avait à opérer aucune investigation pour en vérifier l'exactitude ; que compte tenu du principe de non-immixtion, la banque n'avait pas non plus à s'interroger sur l'opportunité du projet qu'elle finançait et de l'état d'endettement des époux X... ; que pris isolément, le crédit d'un montant de 155.767 ¿, destiné à l'achat d'un T2, n'était pas disproportionné par rapport aux facultés financières des époux X... ; que le prêt n'étant pas excessif au regard de la capacité financière des époux X... et du risque de l'endettement né de son octroi, la BPI n'était tenue à aucun devoir de mise en garde à leur égard ; qu'en outre, compte tenu des dissimulations effectuées, qui empêchaient la banque de détecter les irrégularités, les époux X... sont mal fondés à invoquer la défaillance de la BPI en ce qui concerne son obligation de conseil ou de mise en garde ; qu'en définitive, aucune faute ne peut être reprochée à la BPI ; que Monsieur et Madame X... seront donc déboutés de leurs demandes indemnitaires et de leur demande de désignation d'un expert ;
ALORS QU'en affirmant, pour exonérer la banque de toute responsabilité au titre de son obligation de mise en garde contre le risque d'un endettement excessif, « que n'est pas remis en cause le fait que la banque disposait au moment de l'octroi du prêt (¿) de la demande de prêt immobilier dûment signée, incluant la fiche de renseignements bancaires des époux, des pièces justificatives relatives aux ressources, au patrimoine ainsi qu'aux charges de Monsieur X... et Madame Y... (¿) », cependant que, dans leurs dernières conclusions d'appel (cf. lesdites écritures, p.11, § II, A.1), les époux X... avaient précisément reproché à la BPI de n'avoir pas versé aux débats le dossier de prêt contenant l'état de leurs revenus et de leurs charges, et souligné que cette absence de justification des diligences accomplies par la banque s'expliquait par le fait qu'elle n'avait en réalité procédé à aucune vérification préalable de la situation des emprunteurs, au mépris de ce que postulait son obligation de mise en garde, la cour méconnaît les termes du litige dont elle était saisie, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile et du principe dispositif.