LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société X...- Y...- Z... de ce qu'elle reprend l'instance en qualité d'administrateur de la société Soleil d'Est ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 juillet 2013), que la société Soleil d'Est (la société) exploite un restaurant de cuisine gastronomique à Paris ; que la société Paris côté Seine développement (la société PCSD), aux droits de laquelle se trouve la société CP prog holding, propriétaire d'une tour située en face de ce restaurant, a fait procéder sur celle-ci d'août 2005 à mars 2007 à d'importants travaux immobiliers consistant en la création de plusieurs centaines de logement et en a confié la réalisation notamment à la société Spie SCGPM ; que soutenant avoir été victime de troubles anormaux de voisinage et avoir en conséquence subi du fait des travaux une baisse de son chiffre d'affaires et la perte de son étoile au guide Michelin, la société a fait assigner celles-ci ainsi que d'autres sociétés intervenantes sur le chantier et leur assureur respectif en réparation de son préjudice financier ; qu'elle a été placée en redressement judiciaire par un jugement d'un tribunal de commerce du 27 mars 2014 qui a désigné Mme Z... en qualité d'administrateur pour l'assister ; que l'administratrice est intervenue volontairement à l'instance pour la reprendre et la poursuivre ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de condamner in solidum les sociétés Spie et SCGPM ainsi que la société PCSD à lui payer la somme de 69 647 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que pour apprécier l'impact des travaux, effectués entre 2005 et 2007, sur l'activité du restaurant, la cour d'appel a relevé que « la période d'activité à prendre en compte a été marquée par le décès de son chef, M. A..., en 2003 » ; qu'en se fondant, pour apprécier la conséquence des travaux sur l'activité du restaurant, sur une circonstance survenue antérieurement et qui était étrangère aux nuisances litigieuses, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ que la relation de cause à effet entre deux évènements peut résulter, en l'absence de toute autre cause possible, de leur concomitance ; que pour retenir que la perte de l'étoile au Michelin, constatée lors de la parution de l'édition 2008, n'était pas en relation avec les troubles majeurs causés par les travaux, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que la seule concomitance ne suffisait pas à établir le lien de causalité ; que ce faisant, elle n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, dont il résultait que les travaux avaient considérablement affecté le fonctionnement de l'établissement de 2005 à 2007, ce dont il résultait nécessairement que les travaux, quand bien même ils n'en seraient pas la cause exclusive, avaient au moins participé à la dépréciation du restaurant et à la perte de l'étoile ; qu'elle a ainsi violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que sous le couvert des griefs non fondés de violation de l'article 1382 du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par les juges du fond du montant du préjudice financier subi par la société ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SELARL X...- Y...- Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société X...- Y...- Z..., agissant en qualité d'administrateur de la société Soleil d'Est.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum les sociétés SPIE SCGPM et PARIS COTE SEINE DEVELOPPEMENT au paiement de la somme de 69. 647 euros à la société SOLEIL D'EST à titre de dommages et intérêts
AUX MOTIFS QUE la SARL SOLEIL D'EST divise son calcul d'indemnisation en deux périodes :- du mois d'août 2005 au mois de mars 2007 : 420. 000 euros-conséquence postérieure de la perte de l'étoile : 1. 260. 000 euros ; que les documents qu'elle verse aux débats font apparaître que le chiffre d'affaires du restaurant a diminué régulièrement, de 1. 163. 354 euros à 573. 423 euros, entre l'année 2000 et l'année 2005, particulièrement en 2004 et 2005, pour remonter à 604. 387 euros en 2006, et retomber à 469. 177 euros au cours de l'exercice 2007, baisse qui s'est poursuivie en 2008 et 2009, période au cours de laquelle le chiffre d'affaires a atteint 364. 077 euros puis 353. 154 euros ; que la fin du chantier est en outre marquée par une baisse notable d'activité à partir du mois d'avril 2007 et une reprise au cours du deuxième semestre ; que la période d'activité du restaurant prise en compte a été marquée par le décès de son chef, Monsieur A... en 2003, et par la perte d'une étoile au guide Michelin 2007 ; que nombre de journalistes et de professionnels ont tenté de secourir la SARL SOLEIL D'EST par des publications et pétitions, témoignant de la réalité du préjudice que lui ont causé les nuisances créées par les travaux ; que cependant, la SARL SOLEIL D'EST ne demandant ni indemnisation de l'atteinte à son image ni de la perte de chance de redresser sa situation, l'indemnisation ne peut être fondée que sur les éléments de comptabilité qu'elle a fournis ; que la baisse de chiffre d'affaires entre 2006 et 2007 est à l'origine d'une augmentation du déficit préexistant, mais les documents comptables versés au dossier n'établissent pas qu'il ait atteint 210. 000 euros par année de travaux, comme le revendique la SARL SOLEIL D'EST pour solliciter une indemnisation de 420. 000 euros ; que comme le retient à juste titre le tribunal, la concomitance entre la fin du chantier et la perte l'étoile ne suffit pas à démontrer le lien de causalité certain et direct entre les deux évènements ; que de même, aucun lien de causalité n'étant démontré entre la perte de l'étoile et la baisse d'activité, constante depuis l'année 2000 à l'exception de l'année 2006, activité qui était en outre déficitaire depuis plusieurs années, lorsque l'étoile a été perdue, la SARL SOLEIL D'EST ne justifie pas avoir subi un préjudice financier directement consécutif à cette perte ; que l'indemnisation ne peut être calculée sur la base de la baisse de chiffre d'affaires, comme le fait la SARL SOLEIL D'EST mais exclusivement sur l'augmentation de son déficit dont le déficit de 35. 369 euros entre 2005 et 2006 et de 34. 278 euros entre 2006 et 2007 ; que le préjudice global atteint par conséquent 69. 647 euros,
1) ALORS QUE pour apprécier l'impact des travaux, effectués entre 2005 et 2007, sur l'activité du restaurant, la cour d'appel a relevé que « la période d'activité à prendre en compte a été marquée par le décès de son chef, Monsieur A..., en 2003 » ; qu'en se fondant, pour apprécier la conséquence des travaux sur l'activité du restaurant, sur une circonstance survenue antérieurement et qui était étrangère aux nuisances litigieuses, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
2) ALORS QUE la relation de cause à effet entre deux évènements peut résulter, en l'absence de toute autre cause possible, de leur concomitance ; que pour retenir que la perte de l'étoile au Michelin, constatée lors de la parution de l'édition 2008, n'était pas en relation avec les troubles majeurs causés par les travaux, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que la seule concomitance ne suffisait pas à établir le lien de causalité ; que ce faisant, elle n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, dont il résultait que les travaux avaient considérablement affecté le fonctionnement de l'établissement de 2005 à 2007, ce dont il résultait nécessairement que les travaux, quand bien même ils n'en seraient pas la cause exclusive, avaient au moins participé à la dépréciation du restaurant et à la perte de l'étoile ; qu'elle a ainsi violé l'article 1382 du code civil.