LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1341 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en référé, que la société Campinoise et Ferrand (la société) a assigné M. et Mme X... en paiement d'une provision en règlement d'une facture du 7 mars 2011 relative au remplacement d'une chaudière dans leur maison ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt énonce que la société ne produit aucun devis ni commande, mais qu'une relation contractuelle peut être nouée verbalement, notamment lorsque les parties « ont de bonnes relations », que la facture litigieuse, qui a pour objet le « remplacement de chaudière + préparateur ECS », décrit de manière précise un ensemble de matériels et prestations pour le montant réclamé, que les attestations produites par la société pour apporter la preuve de la réalisation de la prestation en cause, de l'existence de bonnes relations entre les parties et de l'usage, entre personnes d'origine portugaise, de travailler « sur la parole donnée », ne sont pas arguées de faux, et que, les époux X... ne produisant aucune pièce, leur contestation ne paraît pas sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'établissement d'un contrat relatif à des obligations d'une valeur supérieure à 1 500 euros est soumis au régime de la preuve littérale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Campinoise et Ferrand aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné les époux X... à payer à la société CAMPINOISE et FERRAND une provision d'un montant de 13. 583, 13 ¿, avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2012 ;
AUX MOTIFS QUE « selon l'article 809, al. 2 du Code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ; que si la société CAMPINOISE et FERRAND ne produit aucun devis ni commande, et s'il est vrai qu'un contrat suppose l'accord des contractants sur la chose ou la prestation et le prix s'y rapportant, une relation contractuelle peut être nouée verbalement ; que tel est le cas lorsque, comme il est soutenu en l'espèce par l'appelante qui n'est pas contredite sur ce point, les parties « ont de bonnes relations » ; que la facture litigieuse du 7 mars 2011, qui a pour objet le « remplacement de chaudière + préparateur ECS », décrite de manière précise un ensemble de matériels et prestations (fourniture et pose d'une chaudière DE DIETRICH MCA 65 Isystem et autres) pour un montant total de 13. 583, 13 ¿ TTC ; que les affirmations de la société CAMPINOISE et FERRAND selon lesquelles elle a sollicité l'entreprise CLIMATIKA pour effectuer le raccordement de la chaudière au domicile de Monsieur et Madame X... sont corroborées par la facture émise par la société CLIMATIKA sur la société CAMPINOISE et FERRAND, d'un montant de 5. 274, 36 ¿ TTC, datée du 8 mars 2011, indiquant comme lieu de l'intervention « ... », soit l'adresse des époux X..., et désignant la prestation effectuée comme étant le « raccordement d'une chaudière de votre fourniture y compris la reprise des départs chauffage et eau chaude sanitaire ainsi que le tubage de la cheminée et tous travaux ayant permis la mise en service de l'installation » ; que l'appelante verse, en outre, aux débats, une attestation du gérant de la société CLIMATIKA, M. Alfredo PEREIRA, selon laquelle « l'ensemble du matériel fourni y compris la chaudière et accessoires nous ont été livrés par la société SCB (ce qui correspond à la Société Campinoise du Bâtiment) 3, rue Maximilien 94 350 VILLIERS SUR MARNE (adresse de l'appelante) ; les relations entre M. Z... et M. A... étaient des plus amicales. La réception du chantier s'est passée sans aucune réserve » ; que cette attestation n'est pas arguée de faux ; que ne le sont pas plus celles de Monsieur Antonio B... et de Madame Maria Helena X..., qui attestent également de la réalité des prestations et soulignent les bonnes relations entre les parties ainsi que l'usage, entre commerçants d'origine portugaise, de travailler « sur la parole donnée » ; que Monsieur et Madame X... ne produisent pas la moindre pièce ; qu'indiquant, notamment, avoir entamé un certain nombre de travaux dans leur habitation, ils n'en apportent aucune justification, et ne précisent pas si ces travaux portaient sur leur chaudière et par quelle entreprise ils les ont, le cas échéant, fait effectuer ; qu'en outre, les intimés ne justifient pas avoir protesté à réception de la facture litigieuse du 7 mars 2011, d'un montant de plus de 13. 500 ¿, pour des prestations, selon eux, inexistantes ; que pas davantage ils n'ont réagi aux mises en demeure qui leur ont été adressées par lettres recommandées du 21 septembre 2011 (non réclamée), du 31 octobre 2011, du 22 novembre 2011 et du 19 décembre 2011 ; qu'en conséquence, leur contestation n'apparaît pas sérieuse ; que l'ordonnance entreprise sera confirmée et Monsieur et Madame X... condamnés à payer, à titre provisionnel, la somme de 13. 583, 13 ¿ avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2012, date de présentation de la première mise en demeure (arrêt, pages 3 et 4) » ;
ALORS 1°) QU'aux termes de l'article 1341 du Code civil et des articles 56 et 59 du décret n° 2004-836 du 20 août 2004, la preuve de l'existence d'un contrat ne peut être rapportée que par écrit lorsque celui-ci porte sur une somme supérieure à 1. 500 ¿ ; qu'en estimant au contraire qu'une relation contractuelle peut être nouée verbalement lorsque les parties ont de bonnes relations, pour en déduire qu'en dépit de l'absence de devis ni de commande signés par les intimés, la preuve de l'existence du contrat litigieux résulte suffisamment d'autres éléments et notamment de témoignages, et qu'ainsi la contestation des intimés, en ce qu'ils s'opposent au paiement de la facture de la société CAMPINOISE et FERRAND de 13. 583, 13 ¿ TTC, n'est pas sérieuse, de sorte que cette dernière est bien fondée à obtenir de ce chef le paiement d'une provision du même montant, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;
ALORS 2°) QUE dans ses conclusions d'appel, la société CAMPINOISE et FERRAND ne s'est prévalue des « bonnes relations » existant prétendument entre elle-même et les intimés qu'à seule fin de justifier le caractère amiable de ses relances concernant le paiement de sa facture, sans aucunement déduire de ces bonnes relations l'impossibilité morale dans laquelle elle se serait trouvée, au sens de l'article 1348 du Code civil, de se procurer une preuve littérale du contrat litigieux ; que, dès lors, en se déterminant par la circonstance qu'une relation contractuelle peut être nouée verbalement lorsque les parties, « ainsi qu'il est soutenu en l'espèce par l'appelante qui n'est pas contredite sur ce point » ont de bonnes relations, pour en déduire qu'en dépit de l'absence de devis ni de commande signés par les intimés, la preuve de l'existence du contrat litigieux résulte suffisamment d'autres éléments et notamment de témoignages, et qu'ainsi la contestation des intimés, en ce qu'ils s'opposent au paiement de la facture de la société CAMPINOISE et FERRAND de 13. 583, 13 ¿ TTC, n'est pas sérieuse, de sorte que cette dernière est bien fondée à obtenir de ce chef le paiement d'une provision du même montant, la Cour d'appel, qui dénature les écritures des parties, a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS 3°) QU'en relevant d'office le moyen tiré de ce qu'une relation contractuelle peut être nouée verbalement lorsque les parties, ont de bonnes relations, pour en déduire qu'en dépit de l'absence de devis ni de commande signés par les intimés, la preuve de l'existence du contrat litigieux résulte suffisamment d'autres éléments et notamment de témoignages, et qu'ainsi la contestation des intimés, en ce qu'ils s'opposent au paiement de la facture de la société CAMPINOISE et FERRAND de 13. 583, 13 ¿ TTC, n'est pas sérieuse, de sorte que cette dernière est bien fondée à obtenir de ce chef le paiement d'une provision du même montant, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la Cour d'appel, qui méconnaît le principe de la contradiction, a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS 4°), SUBSIDIAIREMENT, QUE pour estimer que la contestation, par les exposants, de leur obligation à régler la facture litigieuse, n'était pas sérieuse, la Cour d'appel s'est bornée à relever d'une part que la facture établie par la société appelante décrit de manière précise un ensemble de matériels et de prestations, d'autre part qu'il résulte d'une attestation et de la facture émise par la société CLIMATIKA qu'une chaudière a été installée par cette dernière au domicile des époux X... ; qu'en l'état de ces seules énonciations qui, loin de démontrer que les exposants auraient consenti à la conclusion du contrat litigieux de fourniture d'une chaudière, se bornent à établir l'existence d'une prestation accomplie par l'appelante, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 809 al. 2 du Code de procédure civile.