LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 16 et 446-1 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 331-9-2 II, du code de la consommation ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'une commission de surendettement des particuliers ayant déclaré recevable la demande de Mme X... aux fins de traitement de sa situation de surendettement, la société Volkswagen Bank (la banque) a formé un recours contre cette décision ;
Attendu que, pour faire droit au recours de la banque et déclarer irrecevable la demande de Mme X..., le jugement relève que le demandeur à la contestation n'a ni comparu ni été représenté tout en maintenant son recours et retient l'absence de bonne foi de Mme X... ;
Qu'en statuant ainsi, sans s'assurer que les observations écrites de la banque, prises en compte, au soutien de son recours aux termes desquelles elle indiquait que Mme X... avait délibérément omis de communiquer l'intégralité de ses remboursements, avaient été portées à la connaissance de celle-ci, le juge du tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 juin 2013, entre les parties, par le juge du tribunal d'instance du Mans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le juge du tribunal d'instance de Laval ;
Condamne la société Volkswagen Bank aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Volkswagen Bank à verser à Me Carbonnier la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief au jugement infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré Madame Sarah X... irrecevable en sa demande tendant à bénéficier des dispositions légales concernant le traitement du surendettement des particuliers,
AUX MOTIFS QUE "la bonne de foi en matière de surendettement se distingue de la bonne foi dans l'exécution d'un contrat particulier. Autrement dit, le juge du surendettement ne peut s'attacher aux manquements éventuellement commis par le débiteur dans l'exécution d'un contrat particulier, mais doit au contraire se prêter à une analyse d'ensemble de la situation du débiteur pour déterminer si celui-ci a été ou non de bonne foi dans le processus ayant abouti à son surendettement.En l'espèce il est fait grief à Mme X... d'avoir volontairement participé à son endettement en souscrivant dès 2006 des prêts successifs importants dont les mensualités de remboursement dépassaient largement les revenus déclarés.Il y a lieu de constater que la débitrice a souscrit en 2010 et 2011 deux prêts importants respectivement de 44.400¿ et 15.400¿ qui représentaient un total de mensualités contractuelles de 3.235,96 euros alors qu'elle devait déjà acquitter des mensualités contractuelles correspondant à des prêts antérieurs, pour un montant total de 3 037,15 euros, étant précisé que ses ressources déclarées étaient de 2 404 ¿ .Ce recours irresponsable, systématique et massif aux crédits dépassant de manière importante les capacités de remboursement, provoquant de manière volontaire l'aggravation de l'endettement compte tenu des salaires déclarés, caractérisent l'absence de bonne foi de la débitrice.I1 y a lieu ensuite de relever que la débitrice a allégué à l'audience des changements dans sa situation financière sans apporter cependant aucun justificatif et en invoquant des éléments quelque peu confus" (jugement, p. 3),
1°) ALORS QU'en cours d'instance, toute partie peut exposer ses moyens par lettre adressée au juge à condition de justifier que l'adversaire en a eu connaissance avant l'audience par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Que la société Volkswagen Bank avait formé un recours à l'encontre de la décision de la commission de surendettement des particuliers ayant déclaré recevable la demande de Madame Sarah X... aux fins de traitement de sa situation de surendettement ; que bien que régulièrement convoquée à l'audience du 7 mai 2013, la société Volkswagen Bank n'a pas comparu et n'était pas représentée « tout en maintenant son recours », ce qui démontre qu'elle a adressé au juge du tribunal d'instance des conclusions écrites au soutien de son recours ; qu'en l'état des mentions du jugement, il n'apparaît pas que ces conclusions écrites aient été adressées à Madame X..., débitrice, avant l'audience ;
Qu'en décidant cependant de déclarer la demande de Madame Sarah X... irrecevable sans s'assurer que les observations écrites de la société Volkswagen Bank, qu'il avait prises en compte, avaient été portées à la connaissance de Madame X... avant l'audience, le tribunal d'instance a violé l'article R. 331-9-2 II du code de la consommation ensemble les articles 16 et 446-1 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la mauvaise foi résulte de la conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers ;
Qu'en estimant que « ce recours irresponsable, systématique et massif aux crédits dépassant de manière importante les capacités de remboursement, provoquant de manière volontaire l'aggravation de l'endettement compte tenu des salaires déclarés, caractérisent l'absence de bonne foi de la débitrice », le tribunal d'instance s'est déterminé par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 330-1 du code de la consommation.