LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 5 novembre 2013), que la société Condilys a consenti fin juillet 2006 à la société Trans Val de Lys, pour un certain loyer, un droit de jouissance limité dans le temps sur une partie du site dont elle était locataire commerciale ; qu'aucune convention écrite n'a été établie ; que la société Trans Val de Lys a réglé les loyers jusqu'à son départ des lieux le 31 mai 2009 ; que soutenant que la convention initiale était devenue un bail commercial, la société Condilys l'a assignée en paiement des loyers échus du 1er juin 2009 jusqu'au terme de ce bail commercial ; que la cour d'appel l'a déboutée de toutes ses demandes ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés non critiqués, que la convention d'occupation précaire conclue entre les parties n'avait pu nover en bail commercial, dès lors que les conditions de la précarité n'avaient jamais disparu et que la date arrêtée par les parties pour la libération des lieux avait été respectée et souverainement, par motifs propres, que les constructions mises en place sur le site par la société Trans Val de Lys étaient dépourvues des caractères de fixité et de solidité qu'exige l'article L. 145-1, I, du code de commerce dans l'une ou l'autre des hypothèses qu'il mentionne, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes et qui en a déduit à bon droit que la demande de paiement de la société Condilys n'était pas fondée, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Condilys aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société Condilys.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société CONDILYS de sa demande tendant à faire juger que les parties étaient liées par un bail commercial et à condamner la société TRANS VAL DE LYS et la société GROUPE KEOLIS au paiement des loyers du 1er juin 2009 jusqu'à la fin du bail ;
AUX MOTIFS QUE « conformément à l'article L. 145-1, I, 1° (sic, faut-il lire : L. 145-1, I, 2° ?), du code de commerce, le statut des baux commerciaux s'applique aux immeubles bâtis, à l'exclusion des terrains nus qui ne peuvent être soumis à ce statut que si y ont été édifiées des constructions qui ne soient ni sommaires, ni provisoires, ni aisément démontables, qui présentent les critères de fixité et de solidité, qui aient une destination commerciale, industrielle ou artisanale et qui aient été élevées ou exploitées avec le consentement du propriétaire ; qu'en l'espèce, aux termes de la lettre de CONDILYS à KEOLIS du 28 juillet 2006, la mise à disposition porte sur un terrain nu à usage de parking, avec sa citerne GO ; que, par lettre en date du 21 avril 2008 à TRANS VAL DE LYS, CONDILYS a indiqué que l'autorisation avait été donnée pour l'implantation de trois bungalows, le stationnement de trente véhicules poids lourds type autocars et le stationnement de trente véhicules légers de catégorie B ; que, par procès-verbal dressé le 6 mai 2009, Maître Bernard X..., huissier de justice à Armentières, a constaté la présence de deux bungalows sur la pelouse ; que les bungalows en cause, de type Algeco, étaient des constructions légères, en préfabriqué, provisoires, posées sur la pelouse du site et dépourvues de toute fondation ou d'ancrage au sol ; que si TRANS VAL DE LYS a mis en oeuvre une alimentation en électricité et en eau de ces bungalows, les réseaux correspondants étaient hors sol et ne constituaient pas un ancrage au terrain ; que le caractère démontable et provisoire de ces constructions est d'autant moins contestable que CONDILYS a, par son courrier du 21 avril 2008, demandé qu'à son départ TRANS VAL DE LYS remette les lieux dans l'état où ils se trouvaient avant son arrivée, prescription que l'occupante a respectée en démontant les bungalows ; que les constructions en cause ne constituant pas des locaux au sens de l'article L. 145-1, I, 1°, du code de commerce, le site mis à la disposition de KEOLIS et de TRANS VAL DE LYS ne peut relever du statut des baux commerciaux ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit que la location du site d'Esquinghem Lys ne relevait pas de ce statut ; que dès lors qu'il n'est pas discuté que TRANS VAL DE LYS avait quitté les lieux au 1er août 2009, la décision sera confirmée sur le rejet de la demande de CONDILYS relative au paiement de loyers jusqu'à la fin du bail ; »
ALORS, D'UNE PART, QUE le statut des baux commerciaux s'applique, selon l'article L. 145-1, I du code de commerce, d'une part, aux « baux des locaux » visés en son 1° et, d'autre part, aux « baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées-soit avant, soit après le bail-des constructions » au sens de son 2° ; qu'en affirmant que « les constructions en cause ne constituant pas des locaux au sens de l'article L. 145-1, I, 1°, du code de commerce, le site mis à la disposition de KEOLIS et de TRANS VAL DE LYS ne peut relever du statut des baux commerciaux », la Cour d'appel a opéré une confusion entre les deux hypothèses et, par suite, a violé l'article L. 145-1, I, 1° du code de commerce par fausse application ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la délivrance d'un permis de construire un bungalow est de nature à établir son caractère de « construction » au sens de l'article L. 145-1, I, 2° du code de commerce ; qu'en l'espèce, la société CONDILYS faisait valoir dans ses conclusions d'appel que les bungalows qu'elle avait autorisé la société TRANS VAL DE LYS à édifier en vue d'abriter le personnel nécessaire à l'exercice de son activité, nécessitaient la délivrance d'un permis de construire en raison de leur importance (« plus de 20 m ² » chacun) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce point, ainsi qu'elle y était invitée par la société CONDILYS dans ses conclusions d'appel, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-1, I, 2° du code de commerce.