Pourvoi n° K 14-14.256
LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes dont le siège est 3-5 avenue Durante, 06046 Nice cedex 1, représentée par le directeur général des finances publiques, domicilié 86-92 allée de Bercy, télédoc 946, 75574 Paris cedex 12,
contre l'arrêt rendu le 9 janvier 2014 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre B), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Micheline X..., domiciliée...,
..., 75015 Paris,
2°/ à M. Gilbert Y..., domicilié...,
..., 75016 Paris,
3°/ à M. Armand Z..., domicilié...,
4°/ à M. Jacques A..., domicilié...,
...,..., 75116 Paris,
5°/ à Mme Reine Y..., épouse G..., domiciliée..., 75015 Paris,
6°/ à Mme Stella Y..., épouse B..., domiciliée
..., 75014 Paris,
7°/ à M. Elie C..., domicilié...,..., 75014 Paris,
8°/ à M. Robert C..., domicilié..., 92160 Antony,
9°/ à M. Georges C..., domicilié...,
10°/ à Mme Danielle D..., épouse E..., domiciliée...,
11°/ à Mme Elisabeth D..., domiciliée...,
12°/ à Mme Colette D..., épouse F..., domiciliée ...
34280 La Grande-Motte,
13°/ à M. Thierry D..., domicilié...,
défendeurs à la cassation ;
La direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes, représentée par le directeur général des finances publiques, s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre A) en date du 3 mai 2011 ;
Cet arrêt a été cassé le 9 octobre 2012 par la chambre commerciale de la Cour de cassation ;
La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée, qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 9 janvier 2014 (1re chambre B) ;
Un pourvoi ayant été formé contre cet arrêt, la chambre commerciale a, par arrêt du 10 février 2015, décidé le renvoi de l'affaire devant l'assemblée plénière ;
La demanderesse invoque, devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;
Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes, représentée par le directeur général des finances publiques ;
Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Delaporte, Briard et Trichet ;
Le rapport écrit de Mme Dagneaux, conseiller, et l'avis écrit de M. Le Mesle, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 18 septembre 2015, où étaient présents : M. Louvel, premier président, Mme Flise, MM. Guérin, Frouin, Mme Mouillard, M. Chauvin, présidents, Mme Bignon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Mas, Mme Riffault-Silk, MM. Chollet, Prétot, Pers, Truchot, Grass, Mmes Olivier, Chaubon, Reygner, M. Vigneau, conseillers, M. Le Mesle, premier avocat général, Mme Marcadeux, directeur de greffe ;
Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, assistée de M. Michon, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, de la SCP Delaporte, Briard et Trichet, l'avis de M. Le Mesle, premier avocat général, auquel, parmi les parties invitées à le faire, la SCP Delaporte, Briard et Trichet a répliqué, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 janvier 2014), rendu sur renvoi après cassation (Com., 9 octobre 2012, pourvoi n° 11-22. 023), que Jean D..., de nationalité marocaine, demeurant à Monaco, est décédé en France le 27 avril 2000, en laissant pour lui succéder un frère, une soeur et onze neveux et nièces venant par représentation de leurs parents ; qu'à la suite de la déclaration de succession déposée en France par les héritiers, l'administration fiscale leur a adressé une proposition de rectification en intégrant à l'actif successoral taxable en France des parts d'une société de droit monégasque, la société Cogest, propriétaire d'immeubles situés en France ; que les héritiers de Jean D... ont assigné le directeur des services fiscaux pour contester l'imposition en France de ces parts et obtenir la restitution de la somme versée à ce titre ;
Attendu que le directeur général des finances publiques fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen, qu'en application de l'article 2 de la Convention signée le 1er avril 1950 entre la France et la Principauté de Monaco, les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux États contractants sont soumis aux droits de mutation dans l'État où ils sont situés ; que par un échange de lettres du 16 juillet 1979 entre les gouvernements français et monégasque, il a été précisé que les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance entraient également dans le champ d'application de la Convention précitée ; qu'en toute hypothèse, en cas de difficulté, la nature immobilière d'un bien ou d'un droit doit être résolue en se référant à la législation de l'État dans lequel ce bien est situé ; qu'en décidant que l'échange de lettres précité restreignait la portée de l'article 2 de la Convention franco-monégasque et qu'en conséquence seuls les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions ou parts sociales de sociétés de construction ou d'attribution pouvaient être taxés en France aux droits de mutation, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a violé les stipulations de la Convention entre la France et la Principauté de Monaco du 1er avril 1950, précisées par un échange de lettres entre les deux gouvernements du 16 juillet 1979 ;
Mais attendu que l'arrêt rappelle qu'en vertu de la hiérarchie des normes, il convient de se référer, d'abord, aux conventions internationales ; qu'après avoir retenu à bon droit que les parts de la société monégasque constituaient des biens incorporels de nature mobilière et qu'au regard de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950, la société Cogest relevait de l'article 6, qui vise les actions ou parts sociales, et prévoit que, si le de cujus était domicilié, au moment de son décès, dans l'un des deux Etats, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet Etat, et non de l'article 2, qui concerne les immeubles et droits immobiliers, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite des motifs surabondants relatifs à l'échange de lettres invoqué par le moyen, que l'imposition des parts sociales transmises par le décès de leur titulaire résidant à Monaco relevait de cet Etat et non de la France ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du directeur général des finances publiques ; le condamne à payer aux consorts D... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé le deux octobre deux mille quinze par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Moyen annexé au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes
Le moyen unique de cassation reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement de première instance qui avait décidé que la législation française était inapplicable à la succession de Jean D... en raison de la suprématie du droit conventionnel international et qu'en conséquence les parts de la SCP Cogest, société de droit monégasque à prépondérance immobilière détenant un ensemble de biens immobiliers en France, devaient être taxées conformément à l'article 6 de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Les héritiers de feu Jean D... sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit au titre des biens reçus par voie de succession de leur auteur.
Le de cujus, Jean D... était de nationalité marocaine, résidant à Monaco.
Il convient, en vertu de la hiérarchie des normes, de se référer d'abord aux conventions internationales.
Par application de l'article 5 de la Convention franco-marocaine du 29 mai 1970, les ressortissants de l'un des États contractants ne peuvent être soumis à une imposition autre ou plus lourde que celle à laquelle seraient assujettis les nationaux de l'autre État dans la même situation.
En conséquence la succession de feu Jean D..., de nationalité marocaine, domicilié fiscalement à Monaco, revenant à des héritiers français demeurant en France, ne peut être traitée, pour ce qui concerne les héritiers, différemment de celle d'un Français domicilié à Monaco.
Dès lors il convient de se référer à la convention fiscale en ce domaine entre la France et la Principauté de Monaco.
La Convention franco-monégasque applicable est la Convention du 1er avril 1950 tendant à éviter les doubles impositions et à codifier les règles d'assistance en matière successorale.
L'article 2 a trait aux biens immeubles. Il dispose : 1. les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux États contractants ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État où ils sont situés, 2. la question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'État dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé.
L'article 3 a trait aux biens meubles corporels autres que ceux visés aux articles 4, 5 et 6 et aux billets de banques et autres espèces monétaires.
L'article 4 a trait aux bateaux et aéronefs.
L'article 5 a trait aux biens meubles corporels ou incorporels investis dans une entreprise.
L'article 6 a trait aux actions et parts sociales. Il précise : les actions ou parts sociales, fonds d'État, obligations, créances chirographaires ou hypothécaires et tous autres biens laissés par un des ressortissants de l'un des deux États auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5 seront soumis aux dispositions suivantes :
- si le de cujus était domicilié au moment de son décès dans l'un des deux États, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet État,
- si le de cujus n'avait pas son domicile dans l'un des deux États, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État dont le de cujus était ressortissant au moment de son décès ; s'il était, au moment de son décès, ressortissant des deux États, chaque cas d'espèce fera l'objet de conventions particulières entre les administrations française et monégasque.
Les biens sont donc répartis en :- article 2 immeubles,- article 4 bateaux et aéronefs,- article 5 biens investis dans une entreprise,- article 3 biens meubles corporels autres que ceux visés aux articles 4, 5 et 6,- article 6 : actions et parts sociales et biens autres.
Les parties font aussi référence à un échange de lettres en date du 16 juillet 1979 entre les deux États. Cet échange de lettres a trait à l'interprétation donnée par les deux États à l'article deux paragraphe deux de la Convention du 1er avril 1950 pour éviter les doubles impositions. Les gouvernements des deux pays ont décidé que les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribués aux associés en propriété ou en jouissance ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État où ils sont situés.
Cet échange de lettres fait dépendre du régime des immeubles ces parts sociales de société d'attribution.
Le litige concerne des parts de la société civile particulière Cogest, dont le siège est à Monaco.
Le capital social était divisé en 1640 parts. Avec 682 parts, Jean D... possédait 41, 58 % du capital social de cette société.
Son frère Armand D... détenait 211 parts, 6 en pleine propriété et 205 en indivision avec la succession de Patrick D.... Sa soeur Nelly D... épouse Y... détenait 240 parts, 114 en pleine propriété et 126 en nue-propriété, l'usufruit étant détenu par ses enfants. Le capital social appartenait pour plus de la moitié à la famille D....
Cette société détient, en tout cas détenait à la date du décès de Jean D... un ensemble d'immeubles en France, des immeubles d'habitation et dépendances à Paris en région parisienne, dans le département des Hauts-de-Seine, celui des Yvelines et celui du Val-de-Marne, et des bureaux également à Paris et en région parisienne.
La société Cogest est une société civile particulière de droit monégasque répondant aux articles 1679 et suivants du code civil monégasque.
Les statuts de la société Cogest définissent son objet social en son article premier.
Cet article 1er dispose : « il est formé entre les soussignés une société particulière ayant pour objet l'étude de tous problèmes économiques, financiers, mobiliers et immobiliers, la réalisation de tous projets par voie de négociations, participations, concessions, l'achat, la vente de tous titres, valeurs, obligations, la gestion du portefeuille ainsi constitué, le dépôt en compte courant et le placement à titre de prêt, avec ou sans garantie hypothécaire de toutes sommes, l'acquisition de tous biens meubles et immeubles sans aucune restriction, location non meublée de locaux d'habitation, de bureaux et d'immeubles à usage industriel et commercial non équipés des moyens d'exploitation, gestion du patrimoine immobilier, et généralement toutes opérations se rapportant directement ou indirectement à l'objet social ».
Aucune disposition particulière des éléments d'actif de la société n'est prévue en cas de dissolution et liquidation de la société. L'article 1710 du code civil monégasque renvoie aux règles générales de partage successoral lors de la liquidation de la société.
L'actif immobilier n'est pas réparti entre les associés.
Cette société n'est pas une société d'attribution concernée par cet échange de lettres.
Vue au travers du prisme des règles des articles 750 ter et 990D du code général des impôts français la société Cogest est une société à prépondérance immobilière.
Mais au regard de la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950, cette société relève de l'article 6 de la convention et non de son article 2.
Cet article 6 vise spécifiquement les parts sociales. Il n'est pas nécessaire de se référer à l'article 2 paragraphe 2 pour les qualifier, alors que cet article six est spécial et spécifique pour les parts sociales et que les gouvernements des deux États ont effectué une interprétation officielle de cet article par un échange de lettres. Il n'appartient pas à la cour d'appel d'en donner une interprétation différente de celle que les deux gouvernements ont convenu d'y donner.
En raison de la prééminence de la Convention franco-monégasque sur les textes du code général des impôts français, c'est l'article 6 de la Convention franco-monégasque qui s'applique.
En conséquence, s'agissant de parts sociales d'une société qui n'est pas une société d'attribution et appartenant à un de cujus domicilié fiscalement à Monaco lors de son décès, la fiscalité relative à leur mutation par décès relève de la Principauté de Monaco et non de la France ».
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « c'est à tort que l'administration se réfère à cet égard à un échange de lettres du 16 juillet 1979 entre les autorités des deux États aux termes desquelles les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur indivision (sic) par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État où ils sont situés.
La société Cogest, en effet, ne relève aucunement du type de société visé par l'échange de lettres du 16 juillet 1979. Les sociétés visées sont les sociétés dites de copropriété régies par les articles L. 212-1 à L. 212-13 et R. 212-1 R. 212-16 du code de la construction et de l'habitation, issus du titre II de la loi 71-579 du 16 juillet 1971 et du décret 72-1236 du 29 décembre 1972 et par l'article 1655 ter du code général des impôts. Il s'agit de sociétés très particulières dont les parts donnent vocation à la jouissance où à l'attribution de lots définis de la copropriété de l'immeuble.
Or, si les associés de la société Cogest ont vocation à une partie indivise de l'actif social en cas de liquidation, les parts qu'ils possèdent ne leur donnent droit à aucun bien particulier dans l'actif social.
C'est à tort également que l'administration prétend fondée (sic) sa position sur l'article 2 de la Convention franco-monégasque de 1950, texte qui dispose :
" 1 ¿ Les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux États contractants ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État où ils sont situés.
2 ¿ La question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'État dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé ".
A juste titre, en effet, les héritiers demandeurs rappellent que les parts d'une société civile immobilière monégasque, comme d'ailleurs d'une société civile de gestion française, sont des biens incorporels de nature mobilière, comme d'ailleurs tous droits sociaux composant le capital des sociétés.
Ceux en litige sont donc situés à Monaco.
En matière de biens meubles, la Convention franco-monégasque du 1er avril 1950 vise :
- les biens meubles corporels non investis dans une entreprise commerciale, industrielle ou autre article 3- les navires et les aéronefs article 4- les biens mobiliers investis dans une entreprise article 5- et les autres biens article 6
Ne concernent pas le cas d'espèce les trois premiers types de biens : en effet, d'une part, les parts sociales sont des meubles incorporels et non corporels, d'autre part, les parts de la SCP Cogest ne sont nullement investies dans une quelconque entreprise et enfin lesdites parts ne sont ni un navire ni un aéronef.
Reste le cas prévu à l'article 6, texte qui expose :
" Les actions ou parts sociales, fonds d'État, obligations, créances chirographaires ou hypothécaires et tous autres biens laissés par un ressortissant de l'un des deux États auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5 seront soumis aux dispositions suivantes :
a) si le de cujus était domicilié au moment de son décès dans l'un des deux États, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet État,
b) si le de cujus n'avait pas son domicile dans l'un des deux États, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État dont le de cujus était ressortissant au moment de son décès ; s'il était, au moment de son décès, ressortissant des deux États, chaque cas d'espèce fera l'objet de conventions particulières entre les administrations française et monégasque ".
Mais, précisément, puisque Jean D... était domicilié à Monaco au moment de son décès, les parts de la société Cogest ne pouvaient donc (sic) assujetties aux droits de mutation que la dans Principauté de Monaco.
Ces parts étant de nature mobilière et non immobilière c'est, dès lors, à tort que l'administration excipe de l'article 2 précité ; en effet, la Convention ne vise pas les droits représentant indirectement des biens immobiliers ou des droits immobiliers situés dans un État.
Pour retenir cette analyse, la Convention qui est de stricte interprétation, aurait dû le prévoir, comme l'ont fait d'autres conventions.
Ainsi, l'article 5 de la Convention franco-italienne du 20 décembre 1990 sur les successions, prévoit, par exemple, en son paragraphe 3 que " l'expression " biens immobiliers " comprend aussi, à l'égard de la France, les actions ou parts d'une personne morale dont l'actif est principalement constitué d'immeubles situés en France ou de droits y afférents. Pour l'application de cette disposition, ne sont pas pris en considération les biens immobiliers affectés par cette personne morale à sa propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale ".
Il n'apparaît donc pas possible d'apprécier la nature des biens en faisant abstraction de la société.
Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes, considérant que la société Cogest est une société dont l'actif est principalement constitué d'immeubles situés en France, en a conclu que les parts de cette société sont imposables en France.
Les 682 parts de la société Cogest ne pouvaient donc pas entrer dans l'assiette taxable aux droits de succession en France ».
ALORS QU'en application de l'article 2 de la Convention signée le 1er avril 1950 entre la France et la Principauté de Monaco, les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux États contractants sont soumis aux droits de mutation dans l'État où ils sont situés ; que par un échange de lettres du 16 juillet 1979 entre les gouvernements français et monégasque, il a été précisé que les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance entraient également dans le champ d'application de la Convention précitée ; qu'en toute hypothèse, en cas de difficulté, la nature immobilière d'un bien ou d'un droit doit être résolue en se référant à la législation de l'État dans lequel ce bien est situé ; qu'en décidant que l'échange de lettres précité restreignait la portée de l'article 2 de la Convention franco-monégasque et qu'en conséquence seuls les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions ou parts sociales de sociétés de construction ou d'attribution pouvaient être taxés en France aux droits de mutation, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a violé les stipulations de la Convention entre la France et la Principauté de Monaco du 1er avril 1950, précisées par un échange de lettres entre les deux gouvernements du 16 juillet 1979.