LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 6 décembre 2013) et les productions, que le 23 avril 2004, M. Gérald X... a été blessé dans un accident de la circulation, le cyclomoteur qu'il pilotait étant entré en collision avec un bus scolaire de la société Unn Toc, qui circulait en sens inverse ; que M. Gérald X..., son épouse, Mme Z..., ses parents, M. Simon X... et Mme Marlène Y... (les consorts X...) et ses soeurs, Mmes Valérie et Claire X..., ont assigné la société Groupama et la société caisse régionale d'assurances mutuelle agricole Groupama Antilles en indemnisation de leurs préjudices en présence de la société Adep assurances et de la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes en réparation de leurs préjudices, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en marche normale tout conducteur doit maintenir son véhicule près du bord droit de la chaussée ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'accident s'est produit parce que le conducteur du bus a empiété dans le couloir de circulation de M. Gérald X... et que ce dernier n'a pu éviter la collision ; qu'en jugeant que M. Gérald X... aurait été débiteur de la priorité tandis que l'accident s'est produit dans une courbe, dans son couloir de circulation, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles R. 412-9, R. 412-18 et R. 412-33 du code de la route, ensemble l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°/ que le fait pour un cyclomotoriste de ne pas parvenir à effectuer une manoeuvre d'évitement d'une collision avec un bus arrivant dans son couloir de circulation, à la sortie d'une courbe, sans visibilité, ne constitue pas une faute ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'accident s'est produit parce que le conducteur du bus a empiété dans le couloir de circulation de M. Gérald X... et que ce dernier n'a pu éviter la collision ; qu'en jugeant que M. Gérald X... a commis une faute en ne parvenant pas à éviter la collision, la cour d'appel a violé les articles 1er et 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
3°/ que tout jugement doit comporter des motifs propres à le justifier ; que des motifs hypothétiques ne peuvent justifier une décision ; qu'en jugeant, pour retenir que M. Gérald X... avait commis une faute en lien avec l'accident en circulant avec un véhicule dont les pneus étaient lisses, qu'« il ne peut ¿ pas avoir ignoré l'état visible des pneus », la cour d'appel s'est prononcée par voie de simple affirmation et a entaché sa décision d'un vice de motivation en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que tout jugement doit comporter des motifs propres à le justifier ; que des motifs dubitatifs ne peuvent justifier une décision ; qu'en se fondant, pour retenir que M. Gérald X... aurait circulé avec le scooter pendant quinze minutes avant l'accident et qu'il aurait « nécessairement éprouvé l'absence totale de freins sur la route en descente pour lui et eu conscience de la dangerosité du véhicule, sur une route dont il connaissait la difficulté, étant un riverain » sur le fait que c'est « chez une connaissance du propriétaire du véhicule à Petite France où ce dernier l'avait apporté pour réparation des freins et de la lumière ¿ que M. X... l'aurait enfourché malgré les protestations du propriétaire et serait parti en direction de Bois Soldat », la cour d'appel a adopté une motivation dubitative, et a violé l'article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu qu'ayant retenu, d'une part, que si la route sur laquelle l'accident s'est produit permet à deux véhicules légers de se croiser avec précaution dans les virages, cette manoeuvre devient impossible en présence d'un autocar, son gabarit supposant nécessairement qu'il coupe le virage en mordant sur les deux voies de circulation et, qu'en l'espèce la route était en montée pour le bus, d'autre part que le cyclomoteur piloté par M. Gérald X... était muni de pneus lisses et totalement dépourvu de freins, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée par des motifs dubitatifs ou hypothétiques, a pu décider que ce dernier était débiteur de la priorité et que la collision frontale démontre qu'il n'a pas fait preuve de la maîtrise lui permettant de s'arrêter, caractérisant ainsi sa faute ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Gérald X..., Mme Martine Z..., Mme Marlène Y... et M. Simon X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. Gérald X..., Mmes Z... et Y... et M. Simon X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. Gérald X..., conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, victime d'un accident de la circulation le 23 avril 2004, avait commis des fautes en relation avec les dommages qu'il a subis, excluant l'indemnisation de ceux-ci et de l'AVOIR, en conséquence, débouté de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE il doit être retenu que la description des lieux, résultant des procèsverbaux d'enquête et des déclarations de parties que la route sur laquelle s'est produit l'accident permet à deux véhicules légers de se croiser avec précaution dans les virages. Cette manoeuvre devient impossible en présence d'un autocar son gabarit supposant nécessairement qu'il coupe le virage, en mordant dès lors sur les deux voies de circulation, ce qui implique que le véhicule le plus manoeuvrable se range le temps que le poids lourd le croise sans dommage ;
Dans une telle configuration, assurant dans chaque virage une visibilité nulle ou très limitée, le conducteur du véhicule léger doit faire preuve d'une maitrise lui permettant de s'arrêter à chaque instant, voire de faire marche arrière jusqu'à un point de croisement plus aisé entre les deux véhicules ;
La survenue de l'accident par collision frontale démontre qu'en l'espèce tel n'a pas été le cas de M. X... qui conduisait le cyclomoteur. Il doit être précisé que l'accident s'est produit de jour, et que la route est en montée pour l'autocar, conférant à celui-ci un double caractère prioritaire. S'il ne peut être déduit du seul taux d'alcoolémie sans autre élément factuel, que l'imprégnation alcoolique de la victime ait diminué ses réflexes, il est au contraire établi et non contesté que le véhicule qu'il pilotait était muni de pneus lisses et totalement dépourvu de freins, ce qui explique l'absence de trace de freinage constatée sur les lieux avant le choc et la violence de ce dernier ;
Ce véhicule n'étant pas à lui, il ne peut cependant avoir ignoré l'état visible des pneus, et s'il met en doute la fiabilité des déclarations du propriétaire qui pourrait être tenté de se dédouaner en affirmant qu'il avait parfaitement connaissance de la défaillance des freins il doit être néanmoins retenu que le propriétaire venait d'acquérir l'engin en l'état pour 150 euros et l'avait conduit ce jour-là chez une connaissance à Petite France pour réparation des freins et de la lumière. C'est à cet endroit que M. X... l'aurait enfourché malgré les protestations du propriétaire et serait parti en direction de Bois Soldat, sans casque. L'accident s'étant produit 15 minutes plus tard, le pilote a nécessairement éprouvé l'absence totale de freins sur la route en descente pour lui et eu conscience de la dangerosité du véhicule, sur une route dont il connait la difficulté, étant un riverain ;
Le chauffeur du bus indique qu'il se souvient avoir vu le conducteur de la moto se coucher avant de la percuter, ce qui est parfaitement compatible avec la trace de ripage d'une chaussure en caoutchouc de 4 m de long avant le point de choc et avec la tentative désespérée d'arrêt d'un cyclomoteur sans frein ;
Dans ces conditions, il est certain que ces différentes fautes de conduite et d'imprudence sont à l'origine de l'accident, et en lien direct avec l'amputation de la jambe gauche, la moto couchée dans le sens du virage pour le motard, soit sur la droite, s'étant encastrée sous la route avant gauche du car. Par ailleurs, le traumatisme crânien grave, l'hématome intracrânien et l'hémorragie méningée sont nécessairement en lien direct avec l'absence de port de casque qui est attestée par le témoin l'ayant vu partir avec la moto ;
Cet ensemble de fautes conjuguées de la victime conductrice en lien avec l'accident et les conséquences dommageables de celui-ci doit conduire à exclure l'indemnisation, en application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 dont les premiers juges ont fait une exacte application ;
1°) ALORS QU'en marche normale tout conducteur doit maintenir son véhicule près du bord droit de la chaussée ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'accident s'est produit parce que le conducteur du bus a empiété dans le couloir de circulation de M. X... et que ce dernier n'a pu éviter la collision ; qu'en jugeant que M. X... aurait été débiteur de la priorité tandis que l'accident s'est produit dans une courbe, dans son couloir de circulation, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles R. 412-9, R. 412-18 et R. 412-33 du Code de la route, ensemble l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°) ALORS QUE le fait pour un cyclomotoriste de ne pas parvenir à effectuer une manoeuvre d'évitement d'une collision avec un bus arrivant dans son couloir de circulation, à la sortie d'une courbe, sans visibilité, ne constitue pas une faute ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'accident s'est produit parce que le conducteur du bus a empiété dans le couloir de circulation de M. X... et que ce dernier n'a pu éviter la collision ; qu'en jugeant que M. X... a commis une faute en ne parvenant pas à éviter la collision, la Cour d'appel a violé les articles 1er et 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
3°) ALORS QUE tout jugement doit comporter des motifs propres à le justifier ; que des motifs hypothétiques ne peuvent justifier une décision ; qu'en jugeant, pour retenir que M. X... avait commis une faute en lien avec l'accident en circulant avec un véhicule dont les pneus étaient lisses, qu'« il ne peut ¿ pas avoir ignoré l'état visible des pneus » (arrêt p. 5, al. 1er), la Cour d'appel s'est prononcé par voie de simple affirmation et a entaché sa décision d'un vice de motivation en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE tout jugement doit comporter des motifs propres à le justifier ; que des motifs dubitatifs ne peuvent justifier une décision ; qu'en se fondant, pour retenir que M. X... aurait circulé avec le scooter pendant 15 minutes avant l'accident et qu'il aurait « nécessairement éprouvé l'absence totale de freins sur la route en descente pour lui et eu conscience de la dangerosité du véhicule, sur une route dont il connaissait la difficulté, étant un riverain » (arrêt p. 5, al. 2) sur le fait que c'est « chez une connaissance du propriétaire du véhicule à Petite France où ce dernier l'avait apporté pour réparation des freins et de la lumière ¿ que M. X... l'aurait enfourché malgré les protestations du propriétaire et serait parti en direction de Bois Soldat » (arrêt p. 5, al. 2, souligné par nous), la Cour d'appel a adopté une motivation dubitative, et a violé l'article 455 du Code de procédure civile.