La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/02/2016 | FRANCE | N°14-25087

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 février 2016, 14-25087


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-15 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 juillet 2014), qu'à compter du 1er octobre 2001, l'OPAC du Grand Lyon, devenu l'établissement public industriel et commercial Grand Lyon habitat, a donné à bail un local commercial à la société Marie ; que la locataire, souhaitant réaliser des travaux, a sollicité l'autorisation du bailleur qui a subordonné son autorisation à l'acceptation par la locataire d'une augmentation du loyer sur

laquelle les parties n'ont pas trouvé un accord ; qu'après une sommation ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-15 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 juillet 2014), qu'à compter du 1er octobre 2001, l'OPAC du Grand Lyon, devenu l'établissement public industriel et commercial Grand Lyon habitat, a donné à bail un local commercial à la société Marie ; que la locataire, souhaitant réaliser des travaux, a sollicité l'autorisation du bailleur qui a subordonné son autorisation à l'acceptation par la locataire d'une augmentation du loyer sur laquelle les parties n'ont pas trouvé un accord ; qu'après une sommation de remettre les lieux en leur état d'origine, le bailleur a délivré un commandement visant la clause résolutoire au motif que les travaux avaient été réalisés sans son accord ; que, dans le mois de la délivrance du commandement, la société locataire en a sollicité l'annulation ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient qu'il ne peut être fait grief à l'OPAC du Grand Lyon d'avoir fait délivrer le commandement visant la clause résolutoire de mauvaise foi et d'avoir commis un abus de droit, alors que l'OPAC a toujours subordonné son autorisation à l'augmentation de loyer refusée par le preneur, qu'il l'a rappelé à différentes reprises à ce dernier, qu'il a fait précéder la délivrance du commandement d'une sommation de remettre les lieux en l'état et de lettres reprenant la même demande, ces diligences étant restées sans effet et que l'EURL Marie ne peut sérieusement soutenir que l'OPAC a usé de manoeuvres en sollicitant la résiliation du bail pour un problème mineur afin de récupérer le local sans indemnité d'éviction, alors qu'elle a réalisé des travaux conséquents sans autorisation du bailleur ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la subordination de l'accord du bailleur pour la réalisation de travaux à une augmentation de loyer n'avait pas pour effet d'éluder les dispositions d'ordre public relatives au renouvellement du bail commercial et à la fixation du prix du loyer renouvelé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne l'établissement Grand Lyon habitat aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'établissement Grand Lyon habitat et le condamne à verser la somme de 3 000 euros à la société Marie ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Marie.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré valable le commandement du 9 août 2010 délivré par l'OPAC du Grand Lyon à l'EURL Marie, et d'avoir en conséquence constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail,
AUX MOTIFS PROPRES QUE le commandement que l'OPAC du Grand Lyon a fait délivrer à l'Eurl Marie le 09 août 2010 fait référence à l'article 8 du bail qui prévoit que le preneur s'interdit d'apporter des modifications dans les lieux loués sans une autorisation écrite du bailleur, ainsi qu'à l'article 22 qui comporte une clause résolutoire en cas d'inexécution des conditions du bail ; qu'il vise un procès-verbal de constat établi le 27 octobre 2008 faisant apparaître l'exécution par le preneur de travaux d'extension du local commercial sur le passage sous arcades de l'immeuble avec apposition de baies vitrées en façade de l'immeuble ; que l'EURL Marie admet qu'elle a procédé aux travaux critiqués au cours de l'année 2008, mais soutient que ceux-ci ont été autorisés par le bailleur ; qu'il résulte des échanges de courriers intervenus entre les parties au cours des années 2004, 2005, 2008 et 2009 que l'OPAC du Grand Lyon a subordonné son autorisation à l'exécution des travaux à deux conditions tenant à une augmentation du loyer et à l'obtention des autorisations administratives nécessaires au type de travaux envisagés ; qu'après discussion entre les parties, l'OPAC du Grand Lyon a accepté de ramener à 2.200 euros HT par an l'augmentation de loyer fixée initialement à 2.500 euros ; que cette augmentation n'a jamais été acceptée par l'Eurl Marie qui a proposé un montant maximum de 1.150 euros ; que dans une lettre du 26 mars 2009, postérieure à l'exécution des travaux et en réponse à une sommation de remettre les lieux en l'état, elle a maintenu sa position sur le caractère trop élevé de l'augmentation ; que le premier juge a considéré à juste titre que faute d'avoir accepté la dernière proposition de l'OPAC, elle n'avait pas obtenu l'autorisation de procéder à l'agrandissement des locaux loués ; qu'il ne peut être fait grief à l'OPAC du Grand Lyon d'avoir fait délivrer le commandement visant la clause résolutoire de mauvaise foi, et d'avoir commis un abus de droit, alors que l'OPAC a toujours subordonné son autorisation à l'augmentation de loyer refusée par le preneur, qu'il l'a rappelé à différentes reprises à ce dernier, qu'il a fait précéder la délivrance du commandement d'une sommation de remettre les lieux en l'état et de courriers reprenant la même demande, ces diligences étant restées sans effet ; qu'en outre, l'Eurl Marie ne peut sérieusement soutenir que l'OPAC a usé de manoeuvres en sollicitant la résiliation du bail pour un problème mineur afin de récupérer le local sans indemnité d'éviction, alors qu'elle a réalisé des travaux conséquents sans autorisation du bailleur, et en empiétant sur des parties communes de l'immeuble ; qu'en conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a constaté l'acquisition de la clause résolutoire, ordonné l'expulsion de l'Eurl Marie et condamné celle-ci au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer, et à la remise en état des lieux sous astreinte ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur la validité du commandement du 9 Août 2010, l'OPAC du Grand Lyon a fait délivrer le 9 Août 2010 à l'EURL MARIE un commandement de faire visant la clause résolutoire faisant référence aux articles 8 et 22 du bail ainsi libellés : « l'article 8 du bail dispose que le preneur s'interdit d'apporter des modifications dans les lieux loués sans une autorisation écrite du bailleur » ; que l'article 22 du bail dispose que toutes les conditions visées sont toutes de rigueur et doivent être exécutées strictement. En cas d'inexécution des clauses qui précèdent, le bail sera résilié immédiatement et de plein droit... » ; qu'aux termes du commandement, l'OPAC, visant le procès-verbal de constat d'huissier du 27 Octobre 2008 qui a constaté la réalisation de travaux d'extension des locaux et a décrit lesdits travaux, indique que « ces travaux n'ont jamais été autorisés par l'OPAC du Grand Lyon » et fait commandement à l'EURL d'avoir à faire cesser cette infraction en remettant les lieux dans leur état d'origine dans un délai de 1 mois ; que les parties s'opposant sur la validité du commandement, il convient de vérifier l'existence ou non d'une autorisation du bailleur pour la réalisation des travaux d'extension du local commercial ; qu'il apparaît à la lecture des pièces versées aux débats que l'EURL Marie a sollicité en 2004 une autorisation du bailleur aux fins d'effectuer des travaux d'avancement des vitrines du local commercial ; que par lettre du 24 février 2004, (pièce n°3 de l'EURL), l'OPAC répond à la demande qui lui est faite en soumettant son autorisation à deux conditions qui sont libellées comme suit : « accepter une augmentation de 2.500,00 euros HT par an en sus du loyer actuel soit un loyer annuel global de 13.836,75 ¿, (et) obtenir l'ensemble des autorisations administratives nécessaires à ce type de travaux et en fournir les justificatifs à l'Opac » ; que dans un courrier postérieur du 12 Juillet 2004, l'OPAC invoquant la nécessaire coordination des implantations de l'institut Céline et de l'EURL a ajouté une condition à la délivrance de son autorisation, à savoir le règlement du différend entre les deux voisins sur la porte de séparation des deux locaux ; que ce point n'a pas été repris à titre de grief dans le commandement ni dans les conclusions de la présente procédure et il y a donc lieu de considérer que cette condition a été remplie par l'EURL ; que s'agissant de la question des autorisations administratives visée dans le courrier du 24 février 2004, il convient d'observer que ce point n'est pas invoqué à titre de grief par l'OPAC dans le commandement du 9 Août 2010 ni dans les conclusions en défense dans la présente procédure ; que par ailleurs et au surplus, l'OPAC verse aux débats un courrier qu'il a adressé le 5 novembre 2008 à la mairie du 3e, lui demandant « si une autorisation de travaux voire un permis de construire a été accordé et dans l'affirmative, de quelle autorisation l'EURL s'est prévalue pour justifier que l'OPAC du Grand Lyon l'autorisait à exécuter lesdits travaux » ; qu'or, l'OPAC ne produit pas la réponse de la mairie à son courrier du 5 novembre 2008 et ne discute pas la réalité de l'autorisation administrative obtenue par l'EURL ; qu'il convient donc de considérer au vu des éléments du dossier, que la condition de l'Opac portant sur l'autorisation administrative a été remplie ; que s'agissant enfin de la condition relative à l'augmentation du prix souhaitée par l'OPAC du fait de l'augmentation de 22 m² de la surface commerciale à la suite de l'avancement des vitrines, il apparaît à la lecture du courrier du 1er décembre 2004, que l'OPAC a avisé l'EURL d'une dernière proposition, acceptant de fixer l'augmentation du loyer consécutive à l'augmentation de la surface à la somme de 2.200 euros HT par an (au lieu de 2.500 ¿ souhaitée en février 2004), le loyer annuel étant ainsi porté à 13.536,75 euros HT (soit 11.336,76 euros au titre du loyer non révisé + 2.200,00 euros au titre de l'augmentation liée à la surface) ; que par lettre du 14 décembre 2004, l'EURL a fait connaître son désaccord sur l'augmentation proposée par l'OPAC et maintenu sa proposition pour une augmentation de 1.150,00 euros ; qu'enfin, par lettre du 2 mars 2005, l'OPAC, tenant compte de la révision du loyer conformément à la clause de révision figurant au bail, de sorte que le loyer annuel est passé de 11.336,76 euros HT à 12.477,70 euros HT, a également maintenu sa proposition d'augmentation à hauteur de 2.200,00 euros par an, le loyer passant donc de 12.477,60 euros à 14.677,60 euros.(soit 12.477,60 + 2.200,00) ; qu'ainsi, au dernier état de ses propositions en mars 2005, l'OPAC a maintenu qu'il entendait conditionner son autorisation à l'acceptation par l'EURL d'une augmentation de loyer annuelle de 2.200,00 euros HT par an, ce que l'EURL a clairement refusé à cette date ; que par la suite, l'EURL a en 2008 fait commencer les travaux d'agrandissement alors qu'aucun accord n'était en réalité intervenu sur le montant de l'augmentation ; que bien plus, par courrier du 26 Mars 2009, l'EURL a maintenu sa position sur le caractère trop élevé de l'augmentation, a confirmé « ne pas avoir reçu de réponse au sujet d'une demande de nouvelle proposition ou de prise en charge partielle des travaux par l'Opac » et a sollicité un « nouveau rendez-vous pour trouver un accord satisfaisant et raisonnable sur une augmentation de loyer dont nous (l'EURL) ne contestons pas le principe » ; qu'il résulte clairement et sans ambiguïté de ce courrier que l'EURL a elle-même reconnu avoir commencé les travaux en 2008 sans qu'un accord soit intervenu depuis 2005 au sujet de l'augmentation du loyer ; que la condition à laquelle l'OPAC a soumis son autorisation n'a pas été remplie et il doit donc être considéré que faute pour l'EURL d'avoir accepté la dernière proposition de l'OPAC d'augmentation annuelle de 2.200,00 euros HT, elle n'a pas obtenu l'autorisation de procéder à l'agrandissement souhaité et ne pouvait donc débuter les travaux ; que le commandement visant la clause résolutoire doit donc être validé et l'EURL sera donc déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
1°/ ALORS QUE toute condition d'une chose prohibée par la loi est réputée non écrite ; que sont nulles et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit de renouvellement des baux commerciaux et aux dispositions relatives à la fixation du prix du loyer renouvelé ; que, par courriers des 24 février et 1er décembre 2004, l'OPAC du Grand Lyon a donné son accord pour que l'EURL Marie réalise des travaux d'agrandissement du local commercial qu'elle lui avait pris à bail, à la condition qu'elle accepte une augmentation du prix du loyer ; qu'en retenant, pour dire que l'EURL Marie avait réalisé ces travaux sans l'accord de l'OPAC du Grand Lyon et juger valable le commandement de quitter les lieux délivré par ce dernier, que l'EURL Marie n'avait pas accepté l'augmentation proposée par l'OPAC du Grand Lyon à laquelle il conditionnait son accord pour la réalisation desdits travaux, quand cette condition constituait un arrangement ayant pour effet de faire échec au dispositions d'ordre public relatives au renouvellement du bail commercial et à la fixation du prix du loyer renouvelé, la cour d'appel a violé les articles 1172 du code civil et L. 145-15 du code de commerce ;
2°/ ALORS QU'en retenant, pour dire que l'EURL Marie avait réalisé des travaux d'agrandissement du local pris à bail à l'OPAC du Grand Lyon sans l'accord de ce dernier et juger valable le commandement de quitter les lieux qui lui a été délivré, qu'elle n'avait pas accepté l'augmentation proposée par l'OPAC du Grand Lyon à laquelle il avait conditionné son accord pour la réalisation desdits travaux, sans rechercher, comme il lui était demandé, si cette condition ne constituait pas un arrangement ayant pour effet de faire échec au dispositions d'ordre public relatives au renouvellement du bail commercial et à la fixation du prix du loyer renouvelé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1172 du code civil et L. 145-15 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-25087
Date de la décision : 25/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 09 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 fév. 2016, pourvoi n°14-25087


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.25087
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award