LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 455 et 563 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 juin 2014), que, par acte du 10 novembre 2003, M. et Mme X... ont donné à bail aux consorts Y... diverses parcelles à usage agricole dont certaines leur avaient été louées par les parents de la bailleresse ; que, par acte du 8 avril 2011, les bailleurs ont délivré congé au motif que les agissements des preneurs compromettaient la bonne exploitation du fonds ; que les consorts Y... ont saisi le tribunal paritaire en annulation du congé ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que M. et Mme X... ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, les moyens dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte ;
Qu'en statuant ainsi, sans examiner tous les éléments de preuve produits pour la première fois devant elle, la cour d'appel a méconnu les exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts Y... ; les condamne in solidum à payer à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité du congé délivré le 8 avril 2003 par les époux X... aux consorts Y... et au GAEC Y...;
AUX MOTIFS QUE les appelants ne font plus valoir devant la Cour que le premier des deux motifs articulés dans le congé du 8 avril 2011, savoir des agissements des preneurs de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds loué ; qu'à cet égard, les moyens soutenus par les appelants ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ; qu'en particulier, qu'il convient de relever que le dossier et les débats révèlent que les biens loués constituaient une petite exploitation permettant d'assurer les moyens d'existence d'une famille de modestes agriculteurs vivant dans une relative autonomie ainsi que cela se pouvait concevoir dans les années d'après-guerre de 1950-1960 ; que les consorts Y..., depuis 1985, ont loué ces biens pour les intégrer dans une exploitation beaucoup plus vaste destinée à l'élevage bovin et gérée dans des conditions entièrement différentes qui ne visent plus au caractère quasiment autarcique de l'économie familiale ; que si l'on peut comprendre que les appelants déplorent l'effacement du caractère traditionnel de l'usage de biens agricoles dans lesquels ils ont, au moins pour la femme, vécu leur enfance, comme les désagréments qu'ils éprouvent au voisinage des consorts Y... qui utilisent ces mêmes biens conformément à leur destination actuelle, il ne ressort cependant d'aucun des éléments produits aux débats que les agissements des preneurs seraient de nature à compromettre la bonne exploitation des biens loués, essentiellement composés de pâtures et de prés ; qu'il est donc indifférent qu'un parc à lapins, un poulailler ou un abri de jardin qui n'ont plus aucune utilité pour les preneurs ne soient plus utilisés par ceux-ci, qu'une ancienne étable soit affectée à l'entreposage de céréales, qu'un petit verger ne soit plus cultivé en vue de la production de fruits pour la consommation familiale ; que les pièces produites aux débats par les intimés montrent que ces biens ne sont pas laissés à l'abandon, mais seulement que les preneurs ne s'en servent pas pour l'usage auquel ils étaient primitivement destinés, se bornant à assurer la conservation des lieux dont l'état de propreté peut certes laisser à désirer sans que pour autant la bonne exploitation de l'ensemble du domaine soit compromise ; que s'agissant des dégâts causés à la couverture d'un hangar agricole par un orage survenu le 21 mai 2009, que s'il n'est pas contesté que ladite couverture était constituée de plaques de fibrociment, les appelants ne démontrent aucunement que ce matériau contenait de l'amiante comme ils le prétendent ; qu'en effet, le fibrociment ne contient pas nécessairement de l'amiante mais peut être constitué d'autres composants que ce corps toxique dont l'emploi est interdit en France depuis 1997 ; qu'en tout état de cause, les époux X... ne pouvaient subordonner la réfection de la couverture dont ils ne contestaient pas qu'il leur appartenait de supporter le coût, à l'enlèvement du foin stocké dans ce hangar par les preneurs ; qu'en effet, outre que les consorts Y... établissent qu'il était parfaitement possible de procéder à la réfection de la couverture en bâchant les balles de foin, la responsabilité d'une éventuelle contamination par l'amiante de cet aliment destiné au bétail ne pouvait incomber qu'aux preneurs dès lors que ceux-ci acceptaient la réalisation des travaux de réfection de la couverture après bâchage préalable de leurs balles de foin ; que les bailleurs ne sauraient donc se plaindre de l'état de délabrement d'une couverture que les preneurs ont été contraints de faire colmater sommairement compte tenu du refus des époux X... d'entreprendre une reprise générale de cette partie du bâtiment sous un prétexte fallacieux ;
ALORS QU'une cour d'appel ne peut confirmer la décision des premiers juges par voie d'adoption de motifs sans avoir préalablement examiné tous les éléments de preuve produits pour la première fois devant elle par l'appelant au soutien de ses prétentions, dont les premiers juges n'ont pu par hypothèse connaître ; qu'en l'espèce, les époux X... avaient produit devant la Cour et spécialement invoqué dans leurs dernières écritures, à l'effet d'établir mieux qu'ils ne l'avaient fait devant les premiers juges les manquements avérés de leurs preneurs à leur obligation d'entretien, plusieurs pièces nouvelles, et notamment : un procès-verbal de constat d'huissier daté du 16 avril 2013 (pièce n° 27), deux nouvelles attestations, respectivement datées des 3 et 6 mai 2013 (pièces n° 28 et 29), un ensemble de planches photographiques annotées avec la précision que les photographies avaient été prises le 14 septembre 2013 (pièce n° 34) ; qu'il ne résulte pas des motifs de l'arrêt que ces nouveaux éléments de preuve aient été effectivement examinés, la Cour ayant au contraire préféré affirmer que les appelants n'avaient fait que réitérer « sans justification complémentaire utile » les moyens dont les premiers juges avaient déjà connu, ce en quoi elle méconnaît les exigences des articles 455, 458, 563 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violés.