LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 16 octobre 2014), que, par acte sous seing privé du 17 août 1982, la commune de Saint-Clair-d'Arcey (la commune) a donné à bail à M. et Mme X... une maison d'habitation pour un loyer mensuel de 91, 46 euros ; qu'en 2000, les parties ont signé un nouveau bail et sont convenues de travaux à réaliser par la commune, le loyer étant fixé à la somme mensuelle de 283, 28 euros ; que, par acte d'huissier du 28 octobre 2011, la commune a fait délivrer à M. et Mme X... un congé aux fins de vendre le logement pour une offre de 70 000 euros, puis les a assignés en constatation de l'expiration du bail et expulsion ; que M. et Mme X... ont soulevé la nullité du congé et demandé, à titre reconventionnel, la condamnation de la commune à leur payer une certaine somme au titre d'un trop-perçu de loyers ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de dire régulier le congé délivré le 18 octobre 2011 ;
Mais attendu que, M. et Mme X... n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que la commune n'avait pas l'intention de vendre le logement, la cour d'appel, qui a, par une appréciation souveraine, retenu que le prix proposé dans le congé n'était pas excessif, a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en restitution de trop-perçu de loyers ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'un nouveau bail avait été signé le 11 mai 2000 sur la base d'un loyer majoré en contrepartie de l'exécution de travaux et que la commune justifiait avoir effectué des travaux de maçonnerie, carrelage, menuiserie, remplacement de portes-fenêtres, de la porte d'entrée, de plusieurs pièces et de remise à neuf de l'installation électrique, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu retenir que la majoration de loyer convenue en application de l'article 17 e) de la loi du 6 juillet 1989 était justifiée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à la commune de Saint-Clair-d'Arcey ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit régulier le congé délivré le 18 octobre 2011 par la commune de Saint Clair d'Arcey à M. et Mme X... pour le bien loué sis ... à Saint Clair d'Arcey, d'AVOIR constaté l'expiration du bail consenti le 1er octobre 2000 à M. et Mme X..., d'AVOIR dit que, faute de meilleur accord, M. et Mme X... devront quitter les lieux, deux mois après le commandement qui leur aura été notifié et ordonné, à l'issue de ce délai, l'expulsion de M. et Mme X... et de tous occupants de leur chef, d'AVOIR ordonné, en tant que besoin, la séquestration aux frais des expulsés des meubles et objets mobiliers appartenant à M. et Mme X... qui pourraient encore se trouver dans les lieux lors de leur expulsion et d'AVOIR dit que M. et Mme X... sont redevables d'une indemnité d'occupation mensuelle d'une somme égale au montant du loyer et des charges prévus contractuellement à compter du 1er octobre 2012 et jusqu'au jour de la libération effective des lieux et au besoin les condamne à payer cette indemnité à la commune de Saint Clair d'Arcey ;
AUX MOTIFS QUE, par acte d'huissier du 28 octobre 2011, la commune de Saint Clair d'Arcey a délivré congé aux époux X... du logement qu'elle leur loue, à effet du 30 septembre 2012 ; que le congé délivré, régulier dans la forme, en ce qu'il comporte toutes les mentions prescrites par l'article 15 de la loi du 06 juillet 1989, a pour motif la vente du bien immobilier au prix fixé de 70. 000 euros, outre 6. 050 euros au titre des frais d'acte ; que les époux X... demandent confirmation du jugement en ce qu'il a considéré qu'une fraude affectant le congé délivré pour un prix disproportionné, de 40 % de plus par rapport à la valeur réelle du bien immobilier ; qu'ils invoquent une évaluation par notaire de mai 2013, pour une valeur maximale de 50. 000 euros du fait du mauvais état de l'immeuble : absence de chauffage pré-existant, électricité non conforme, toit en fibro-ciment sur lequel manque une ardoise, cheminée sur le toit en mauvais état ; qu'ils affirment que le compromis de vente qui avait été signé en décembre 2009 entre la commune et les époux Y... est caduc d'autant que les prix de l'immobilier ont beaucoup chuté depuis ; que le caractère particulièrement excessif ne se présume pas, il doit être justifié et cette démonstration reste à la charge du locataire ; qu'or, cette preuve n'est nullement apportée par les époux X... qui ne peuvent arguer ni de leur proposition d'acheter ledit bien à 45. 000 € il y a plusieurs années, ni de l'effondrement du marché immobilier, pour démontrer le caractère excessif du prix porté au congé ; que le prix et sa surestimation s'apprécient à la lumière de la moyenne des prix, au surplus la plus élevée, pratiqués sur le secteur et également au cas par cas, en fonction des caractéristiques de l'immeuble, en considération de sa consistance et de son état, et de la situation du marché immobilier à la date d'effet du congé ; que le bien immobilier litigieux est une maison située sur un terrain de plus de 1. 500 m ² en plein centre du bourg, à côté de l'église et des commodités (parking...) et comportant outre une maison deux bâtiments à usage de garage ; que la commune justifie avoir fait réaliser des travaux dans cette maison : factures, délibérations du conseil municipal autorisant les travaux, attestations de conformité des travaux : remise à neuf des fenêtres et portes, de l'électricité, isolation, réfection de certaines pièces (cuisine, chambres et séjour), réfection des sols et des murs, réhabilitation récente de l'assainissement ; que la commune produit une évaluation notariale du bien à hauteur de 70. 000 euros à juillet 2013 (sous réserve d'éléments nouveaux depuis la visite de juillet/ août 2011) ; qu'en juin 2013, les époux X... se sont opposés à la visite du bien par un notaire ou un agent immobilier mandaté par la commune estimant qu'il ferait une évaluation tendancieuse du bien ; qu'il doit être noté que les époux X... avaient déjà fait évaluer le bien par notaire en juillet 2010, la valeur étant alors de 60. 000 euros, il est indiqué que la maison est dans un état très moyen, bas de plafond, sans double vitrages, avec une petite surface habitable, des pièces en enfilade, il est précisé que le terrain offre une superficie intéressante ; qu'un compromis de vente avait été signé en décembre 2009 entre la commune et les époux Y... pour une valeur de 70. 000 euros pour la propriété comprenant " cuisine, salle de bain, WC, arrière cuisine, deux chambres, salle à manger, chauffage par cuisinière bois, chauffe-eau à gaz, deux dépendances, terrain pour une contenance de 18 a 81 ca " ; que la commune produit des exemples de vente dans le secteur pour servir de références : maison à rénover à Bernay, terrain de 1. 300 m ², prix de 77. 000 €, maison à rénover à Saint Pierre de Cernières, terrain herbagé de 1 ha 38, prix de 125. 000 € ; qu'iI n'est en outre pas démontré une baisse du marché immobilier telle que le bien serait surestimé de 40 % comme l'a dit le tribunal (baisse de 2, 2 % entre mars 2008 et mars 2011 selon l'étude versée aux débats par la commune), d'autant que des travaux y ont été effectués et qu'il était déjà évalué 60. 000 euros en 2010 avant réalisation des travaux d'assainissement ; qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement en considérant que le prix de 70. 000 euros n'était pas excessif, qu'il n'y a donc pas fraude, le congé, régulier, sera validé avec toutes suites et conséquences de droit : expulsion des locataires, au besoin la séquestration de leurs objets mobiliers, sans assortir cette condamnation d'une astreinte, condamnation des locataires à payer une indemnité d'occupation égale au loyer mensuel augmenté des charges, avec indexation ;
ALORS QUE, lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux ; qu'en l'espèce, pour rejeter les prétentions des preneurs qui invoquaient le caractère frauduleux du motif du congé pour vendre délivré par la commune de Saint Clair d'Arcey, la cour d'appel s'est bornée à relever que le prix proposé par le propriétaire ne serait pas excessif au regard de la valeur du bien loué, sans constater l'intention de vendre le bien alléguée par le bailleur qui ne faisait pas état d'autre démarche dans cet objectif que la conclusion d'un compromis vieux de plus cinq ans et dont il ne contestait pas la caducité invoquée par les preneurs ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. et Mme X... de leur demande en paiement de la somme de 11. 509, 20 euros au titre des loyers trop perçus ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... font valoir que la commune perçoit un loyer mensuel d'un montant de 283, 28 € pour la location du bien litigieux, loyer illégal selon eux, car l'offre de renouvellement de bail avec proposition de loyer en l'an 2000 n'a pas été faite dans les conditions prescrites par l'alinéa c) de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 : elle n'a pas été faite dans le délai prescrit de six mois avant son terme, la commune ayant préféré faire signer un nouveau bail ; que l'article 17 prévoit que la hausse convenue doit être étalée sur six ans si elle est supérieure à 10 % du loyer courant ; que le loyer était de 91, 46 € avant le renouvellement, il a été augmenté de plus de 10 % du loyer sur trois ans ; que le loyer initial n'était pas sous-évalué, compte-tenu de la consistance du bien litigieux qui était alors dans un très mauvais état et ne répondait pas aux normes de décence d'un logement, affirment les intimés ; que la commune de Saint Clair d'Arcey soutient que c'est à juste titre que le tribunal a retenu qu'étaient applicables non pas les dispositions de l'article 17 c) de la loi du 6 juillet 1989 mais les dispositions de l'article 17 e) de ladite loi qui disposent que lorsque les parties sont convenues par une clause expresse des travaux d'amélioration du logement que le bailleur fera exécuter, le contrat de location ou un avenant à ce contrat fixe la majoration du loyer consécutif à la réalisation des travaux ; que la commune fait valoir que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les justificatifs de travaux sont produits ; que la prescription de la demande n'est plus soulevée ; qu'aux termes de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989, alinéa e) : lorsque les parties sont convenues, par une clause expresse, de travaux d'amélioration du logement que le bailleur fera exécuter, le contrat de location ou un avenant à ce contrat fixe la majoration du loyer consécutive à la réalisation de ces travaux ; que les époux X... sont locataires du bien depuis un premier contrat de bail signé le 17 août 1982, conclu pour une période de 3, 6 ou 9 années, moyennant un loyer mensuel de 600 francs soit 91, 46 euros ; que, par courrier du 29 mars 2000, le maire de la commune a proposé aux époux X..., à l'occasion de l'issue du bail en octobre 2000, l'établissement d'un nouveau bail sur la base d'un loyer majoré, en contrepartie de l'exécution de travaux ; que le 11 mai 2000, les locataires ont donné leur accord à cette majoration et un nouveau contrat de bail a été signé entre les parties le 1er octobre 2000 ; que le loyer a été porté à 160, 06 € à compter du 1er octobre 2000, puis à la somme de 198, 17 € à compter du 1er octobre 2001 et finalement à 228, 66 € à compter du 1er octobre 2002 ; que la commune justifie avoir effectué des travaux dès 2000 :- maçonnerie, carrelage, menuiserie, remplacement de portes fenêtres, de la porte d'entrée, réfection de plusieurs pièces, pour près de 49. 000 F,- des travaux d'électricité réalisés en 2001 pour remise à neuf de l'installation à hauteur de 21. 172, 21 F,- réfection de porte et sept fenêtres, réfection des volets, pour 1. 007, 49 € ; que la majoration du loyer pratiquée était justifiée, le jugement doit être infirmé et la demande en remboursement des trop-perçus des époux X... rejetée ;
1°) ALORS QUE, selon l'article 17 e) de la loi du 6 juillet 1989, lorsque les parties sont convenues, par une clause expresse, de travaux d'amélioration du logement que le bailleur fera exécuter, le contrat de location ou un avenant à ce contrat fixe la majoration du loyer consécutive à la réalisation de ces travaux ; que ce texte ne s'applique qu'aux travaux d'amélioration du logement et non aux travaux d'entretien qui incombent au bailleur en application de l'article 6 de la même loi ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les travaux effectués par le bailleur pour justifier une augmentation de loyer portaient sur la réfection du système électrique, le changement des huisseries, l'isolation et la réfection des sols et des murs, tous travaux relevant de l'entretien incombant obligatoirement au bailleur et non d'une amélioration du logement ; qu'en retenant pourtant que l'augmentation du loyer était justifiée par l'application des dispositions relatives à la seule hypothèse de la réalisation de travaux d'amélioration par le bailleur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 6 c) et 17 e) de la loi du 6 juillet 1989 ;
2°) ALORS QUE, à tout le moins, en ne recherchant pas si les travaux allégués avaient amélioré le logement des époux X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 17 e) de la loi du 6 juillet 1989.