LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 novembre 2015), que la SCI Carnot Défense I (la SCI), aux droits de laquelle se trouve la société Far East Access, a consenti à la société Financière rive gauche une promesse de vente ; qu'un arrêt irrévocable du 28 mars 2013 a condamné la société Financière rive gauche à rembourser à la SCI la somme de deux millions cinq cent mille euros en deniers ou quittances ; que la société Far east access a formé un recours en révision contre cet arrêt ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Far East Access fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son recours en révision, alors, selon le moyen, que le juge ne peut, dans une même décision, révoquer l'ordonnance de clôture, clôturer à nouveau la procédure à l'audience de plaidoirie, et statuer au fond ; qu'il lui incombe d'ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer contradictoirement ; qu'en l'espèce, il résulte des propres énonciations de l'arrêt que l'ordonnance de clôture du 17 septembre 2015 a été révoquée à l'audience de plaidoirie du 30 septembre 2015, une nouvelle ordonnance de clôture étant rendue immédiatement décidant ainsi, dans une même décision, de révoquer l'ordonnance de clôture, de prononcer une nouvelle clôture et de statuer au fond, sans ordonner la réouverture des débats pourtant nécessaire au respect du principe de la contradiction, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, la révocation de l'ordonnance de clôture étant intervenue le 30 septembre 2015, avant la clôture des débats, par une ordonnance distincte, la cour d'appel n'était pas tenue de rouvrir les débats en l'absence de contestation des parties ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Far East Access fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son recours en révision, alors, selon le moyen, qu'il incombe au ministère public, à qui a été communiqué un recours en révision, de se prononcer sur les mérites de ce recours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'alors que la procédure de révision avait été communiquée au ministère public, celui-ci « a fait savoir qu'il n'entendait pas intervenir dans le litige » ; qu'en se prononçant pourtant sur les mérites du recours en révision, quand le ministère public avait l'obligation, conformément à son office, de se prononcer sur les mérites du recours, la cour d'appel a violé l'article 600 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'indication de la communication du dossier au ministère public suffit à satisfaire aux exigences de l'article 600 du code de procédure civile ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société Far East Access fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son recours en révision ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Financière rive gauche reconnaissait implicitement, dans l'assignation du 7 février 2014, avoir reçu de la société Access la somme de deux millions cent mille euros par chèque qu'elle avait encaissé et que cet événement constituait la cause de révision invoquée par la société Far East Access, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que le recours en révision intenté le 18 novembre 2014 n'était pas recevable et a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Far East Access aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Far East Access et la condamne à payer à la société Financière rive gauche la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société Far East Access
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, après avoir révoqué l'ordonnance de clôture à l'audience de plaidoirie et rendu immédiatement une nouvelle ordonnance de clôture, d'avoir déclaré la société Far East Access irrecevable en son recours en révision ;
AUX MOTIFS QUE « l'ordonnance de clôture du 17 septembre 2015 a été révoquée à l'audience de plaidoirie du 30 septembre 2015, une nouvelle ordonnance de clôture étant rendue immédiatement » ;
ALORS QUE le juge ne peut, dans une même décision, révoquer l'ordonnance de clôture, clôturer à nouveau la procédure à l'audience de plaidoirie, et statuer au fond ; qu'il lui incombe d'ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer contradictoirement ; qu'en l'espèce, il résulte des propres énonciations de l'arrêt que « l'ordonnance de clôture du 17 septembre 2015 a été révoquée à l'audience de plaidoirie du 30 septembre 2015, une nouvelle ordonnance de clôture étant rendue immédiatement » (arrêt, p 4, alinéa 5) ; qu'en décidant ainsi, dans une même décision, de révoquer l'ordonnance de clôture, de prononcer une nouvelle clôture et de statuer au fond, sans ordonner la réouverture des débats pourtant nécessaire au respect du principe de la contradiction, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société Far East Access irrecevable en son recours en révision, alors que le ministère public avait fait savoir qu'il n'entendait pas intervenir dans le litige ;
AUX MOTIFS QUE « le Ministère Public à qui la procédure a été communiquée en application de l'article 600 du code de procédure civile a fait savoir qu'il n'entendait pas intervenir dans le litige » ;
ALORS QU'il incombe au Ministère public, à qui a été communiqué un recours en révision, de se prononcer sur les mérites de ce recours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'alors que la procédure de révision avait été communiquée au Ministère public, celui-ci « a fait savoir qu'il n'entendait pas intervenir dans le litige » (arrêt, p. 4, alinéa 4) ; qu'en se prononçant pourtant sur les mérites du recours en révision, quand le Ministère public avait l'obligation, conformément à son office, de se prononcer sur les mérites du recours, la cour d'appel a violé l'article 600 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société Far East Access irrecevable en son recours en révision ;
AUX MOTIFS QUE « la SAS Far East Access, venant aux droits de la SCI Carnot Défense, expose que la cour de céans a confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Financière Rive Gauche la somme de 2 500 000 euros en deniers ou quittances, aux motifs notamment qu'une partie de cette somme (2 100 000 euros) a fait l'objet d'un quittancement dans un protocole d'accord, mais sous la réserve de l'encaissement du chèque, preuve en l'espèce non rapportée alors que selon la SAS Far East Access, contrairement aux dires de la société Financière Rive Gauche pendant toute l'instance, le chèque de 2 100 000 euros versé au moyen d'un chèque de banque avait été bien encaissé sur le compte de la société Financière Rive Gauche ;
Qu'il ressort des dispositions de l'article 596 du code de procédure civile que « le délai du recours en révision est de deux mois à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque »; qu'en l'espèce, il est mentionné dans l'assignation signifiée le 7 février 2014 à la SAS Far East Access à la demande de la société Financière Rive Gauche aux fins de liquidation judiciaire : « A ce jour, la SAS Far East Access reste devoir sur le montant de cette condamnation(2 500 000 euros) la somme en principal de 400 000 euros »; qu'il s'en déduit que dans cette assignation, la société Financière Rive Gauche reconnaissait implicitement, mais de manière non équivoque, avoir reçu de la SAS Far East Access la somme de 2 100 000 euros (sur le montant de la condamnation de 2 500 000 euros) qui ne pouvait que correspondre à l'encaissement du chèque litigieux, faute d'autres explications; que la reconnaissance de l'encaissement de ce chèque par la société Financière Rive Gauche constituant la cause de révision invoquée par la SAS Far East Access et cette reconnaissance ayant été portée à la connaissance de la SAS Far East Access dès le 7 février 2014, soit plus de deux mois avant l'introduction de son recours en révision (18 novembre 2014), il s'en infère, en application des dispositions susvisées, que ce recours est irrecevable; qu'il convient donc de déclarer irrecevable la SAS Far East Access en son recours en révision, étant observé, au surplus, que la condamnation en deniers ou quittances, prononcée par l'arrêt dont il est demandé la révision, était une condamnation de nature à sauvegarder les intérêts du débiteur dans l'hypothèse de l'encaissement effectif du chèque litigieux » ;
1°) ALORS QUE le délai du recours en révision est de deux mois à compter du jour où le requérant a eu une connaissance certaine et effective de la cause de révision qu'il invoque ; qu'un acte ne contenant qu'une reconnaissance « implicite » d'un fait est impropre à donner à son destinataire une connaissance suffisamment certaine et effective du fait « implicitement » reconnu pour faire courir à son encontre le délai du recours en révision fondé sur la révélation de ce fait ; qu'en fixant le point de départ du délai de deux mois au jour de l'assignation du 7 février 2014 dans l'exposé de laquelle la société FINANCIERE RIVE GAUCHE « reconnaissait implicitement » avoir reçu la somme de 2 100 000 euros, la Cour d'appel a violé l'article 596 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le délai du recours en révision est de deux mois à compter du jour où le requérant a eu une connaissance certaine et effective de la cause de révision qu'il invoque ; qu'en l'espèce, la société Far East Access soulignait dans ses conclusions que l'assignation qui lui avait été signifiée par la société Financière Rive Gauche le 7 février 2014 n'avait pu lui donner une connaissance certaine de la cause de révision invoquée (conclusions, p. 11) ; qu'en effet, cette assignation énonçait uniquement « qu'à ce jour la SAS Far East Access reste devoir sur le montant de cette condamnation (2 500 000 euros) la somme en principal de 400 000 euros » ; qu'ainsi, cette assignation, si elle pouvait laisser entendre qu'une partie de la somme que l'exposante avait été condamnée à payer avait été réglée postérieurement au jugement n'impliquait aucunement que ce paiement avait eu lieu avant le prononcé de l'arrêt contre lequel un recours était formé, par encaissement d'un chèque de banque, circonstance qui constituait la cause de révision ; qu'en retenant pourtant que « la somme de 2 100 000 euros (sur le montant de la condamnation de 2 500 000 euros) ne pouvait que correspondre à l'encaissement du chèque litigieux, faute d'autres explications » (arrêt, p. 4, dernier alinéa), sans rechercher si l'assignation litigieuse avait donné à l'exposante une connaissance effective et certaine de la date d'encaissement du chèque, ce qui constituait la cause de révision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 596 du code de procédure civile.