LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 143-1 et R. 143-2 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a déclaré une maladie professionnelle qui a été prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn (la caisse) au titre du tableau n° 42 des maladies professionnelles ; que la caisse ayant retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 8 %, l'intéressé a saisi d'un recours un tribunal du contentieux de l'incapacité ;
Attendu que pour rejeter ce dernier, l'arrêt retient qu'en application de l'article R. 143-2 du code de la sécurité sociale, les difficultés relatives au caractère professionnel d'une lésion relèvent de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en l'absence de décision émanant de la caisse primaire ou desdites juridictions reconnaissant l'imputabilité à la maladie professionnelle des acouphènes, il ne peut être tenu compte de cette séquelle alléguée dans l'évaluation du taux d'incapacité permanente ;
Qu'en statuant ainsi, alors que saisie de la contestation du taux d'incapacité permanente partielle retenu après consolidation, il lui appartenait de se prononcer sur l'ensemble des éléments concourant à la fixation de celui-ci, la Cour nationale a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2015, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification des accidents du travail ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification des accidents du travail, autrement composée ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les séquelles de la maladie professionnelle dont a été reconnu atteint M. Jean-Pierre X... le 17 août 2011 justifient l'attribution d'une incapacité permanente partielle au taux de 8 % à la date de consolidation du 17 août 2011 ;
Aux motifs qu' « à titre liminaire, (…) aux termes de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, « le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité » ; qu'à la date du 17 août 2011, M. Jean-Pierre X... présentait une surdité de perception bilatérale, entrant dans la catégorie définie par le tableau n° 42 des maladies professionnelles, à savoir « hypoacousie de perception bilatérale par lésion cochléaire irréversible, accompagnée ou non d'acouphènes » ; qu'en application des dispositions visées à l'article R. 143-2 du code de la sécurité sociale, les difficultés relatives au caractère professionnel d'une lésion relèvent de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en l'absence de décision émanant de la caisse primaire ou desdites juridictions reconnaissant l'imputabilité à la maladie professionnelle des acouphènes, il ne peut être tenu compte de cette séquelle alléguée dans l'évaluation du taux d'incapacité permanente ; qu'il ressort du barème d'invalidité, dont les modalités d'application sont explicitées dans la circulaire DSM/DRP n° 16/2004 du 29 janvier 2004, que pour ce qui concerne la surdité de perception, qui est seule reconnue comme maladie professionnelle, le déficit moyen doit être calculé sur la courbe osseuse selon les modalités définies au tableau, et non sur la base de la courbe en conduction aérienne applicable à la surdité de transmission, sauf en cas d'absence de réponse par voie osseuse sur les fréquences aigues, ce qui n'est pas le cas ; que d'après le barème indicatif d'invalidité, le déficit auditif indemnisable est évalué sur l'audiométrie tonale en conduction osseuse en appliquant des coefficients de pondération aux déficits mesurés sur les fréquences 500, 1000, 2000 et 4000 hertz, et non en calculant la moyenne arithmétique simple ; qu'ainsi, le déficit constaté pour l'indemnisation sera différent de celui pris en compte pour la reconnaissance et pourra donc être inférieur à 35 décibels ; que l'estimation de la perte de la capacité se fera sur la base de l'audiométrie ; qu'il apparaît, à la lecture de l'audiogramme du 17 août 2011, que l'assuré présente un déficit de 31,5db pour l'oreille droit et 33db pour l'oreille gauche ; qu'au vu des éléments soumis à l'appréciation de la cour, contradictoirement débattus et avec le médecin consultant dont elle adopte les conclusions, que les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 8 % ; qu'en conséquence il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris » ;
Alors 1°) que l'affection visée au tableau 42 des maladies professionnelles consiste en une « hypoacousie de perception par lésion cochléaire irréversible, accompagnée ou non d'acouphènes » ; qu'en retenant qu'il ne pouvait être tenu compte des acouphènes dont M. X... se plaint, dans l'évaluation de son taux d'incapacité permanente partielle, faute de décision émanant de la caisse ou des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale reconnaissant l'imputabilité des acouphènes à la maladie professionnelle, quand une telle décision n'est pas nécessaire dès lors que le patient a été reconnu atteint de l'affection visée au tableau 42, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé les articles R. 143-2 et R. 461-3 du code de la sécurité sociale ;
Alors 2°), à titre subsidiaire, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant d'office le moyen selon lequel il ne pourrait être tenu compte des acouphènes dont M. X... se plaint, dans l'évaluation de son taux d'incapacité permanente partielle faute de décision émanant de la caisse ou des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale reconnaissant l'imputabilité des acouphènes à la maladie professionnelle, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Alors 3°) que l'incapacité permanente partielle relative à l'affection visée au tableau 42 des maladies professionnelles, est calculée en fonction de la perception de la voix et doit donc être évaluée à partir des résultats de la conduction aérienne qui est celle par laquelle sont reçus les sons ; qu'en retenant, pour fixer à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle de M. X..., qu'en ce qui concerne la surdité de perception, qui est seule reconnue comme maladie professionnelle, le déficit moyen doit être calculé sur la courbe osseuse selon les modalités définies au tableau et non sur la base de la courbe en conduction aérienne applicable à la surdité de transmission, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale ;
Alors 4°), à titre subsidiaire, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour fixer à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle de M. X..., que le déficit moyen doit être calculé sur la courbe osseuse selon les modalités définies au tableau, sauf en cas d'absence de réponse par voie osseuse sur les fréquences aigues (à partir de 2 500 Hz), et que tel ne serait pas le cas en l'espèce, quand l'audiométrie tonale réalisée le 17 août 2011 montre une absence de réponse par voie osseuse sur les fréquences de 3000, 4 000 Hz et 6000 Hz, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a dénaturé l'audiogramme réalisé à cette date en violation du principe susvisé.