LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 15 janvier 2015), que, propriétaire d'une maison affectée de fissures, Mme [U] a confié à la société A4 architecture, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), une mission de maîtrise d'oeuvre portant sur des travaux de reprise, ainsi que la réalisation d'une terrasse extérieure ; que le lot maçonnerie a été attribué à M. [M], assuré auprès de la société Sagena, devenue la société SMA ; que, se plaignant de la persistance des désordres, Mme [U] a, après expertise, assigné la société A4 architecture, la MAF, M. [M] et la société SMA en indemnisation ;
Sur le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident éventuel de la société SMA réunis :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour accueillir la demande d'indemnisation de Mme [U] sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs, l'arrêt retient que le maître d'oeuvre n'a pas exigé les études préalables nécessaires à l'établissement de son projet, que la reprise en sous-oeuvre s'est avérée inefficace, que si le sinistre avait pour origine première l'insuffisance structurelle du bâtiment, l'ouvrage n'a pas acquis la solidité qui était l'objet des travaux confiés, que par leur intervention respective le maître d'oeuvre et l'entrepreneur ont concouru à la réalisation de l'entier dommage ;
Qu'en statuant ainsi, tout en constatant que les désordres liés à l'insuffisance structurelle de l'immeuble n'étaient pas dus aux travaux de reprise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé, par refus d'application ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne Mme [U] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour les sociétés A4 architecture et Mutuelle des architectes français, demanderesses au pourvoi principal.
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause de la Sagena, assureur de M. [M],
Aux motifs que le contrat Sagena a été résilié au 31 décembre 2006 donc avant la déclaration d'ouverture de chantier du 13 février 2007 (arrêt p. 6, § 1er des motifs) ;
Et aux motifs, adoptés du jugement, qu'il est constant que M. [M] avait résilié le 23 avril 2007 la police d'assurance qu'il avait souscrite envers la Sagena le 8 juin 2005 aux termes d'un courrier par lequel il faisait état de déclaration de radiation de son entreprise, à effet au 31 décembre 2006 ; que dès lors à la date de la DROC du 13 février 2007 l'assurance était résiliée, la Sagena doit être mise hors de cause (jug. p. 3 in fine) ;
Alors que, d'une part, la société A4 Architecture et la MAF ont soutenu, dans leurs conclusions d'appel (p.5), qu'à la date de l'ouverture du chantier le 13 février 2007, M. [M] était assuré auprès de la Sagena, sans que la résiliation ultérieure du contrat puisse avoir une incidence sur la garantie qui était due ; qu'en se bornant, pour prononcer la mise hors de cause de la Sagena, à affirmer que le contrat avait été résilié au 31 décembre 2006, sans répondre aux conclusions d'appel de la société A4 Architecture et de la MAF sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, la résiliation d'un contrat à exécution successive ne produit effet que pour l'avenir ; que la lettre de résiliation adressée par M. [M] le 23 avril 2007 à la Sagena ne pouvait produire effet que pour le futur ; que la cour d'appel a reenu que M. [M] avait résilié, par lettre du 23 avril 2007, la police d'assurance qu'il avait souscrite auprès de la Sagena le 8 juin 2005 ; qu'en en déduisant que M. [M] faisant état d'une cessation d'activité et d'une radiation de son entreprise au 31 décembre 2006, le contrat devait être considéré comme résilié au 31 décembre 2006, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1184 du code civil ;
Alors qu'enfin, l'assurance de responsabilité décennale couvre les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance ; qu'en l'espèce, au jour de l'ouverture du chantier, le 13 février 2007, M. [M] était assuré auprès de la Sagena ; qu'en décidant cependant que la garantie de l'assureur n'était pas due, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles L 241-1 et A 243-1 du code des assurances.
Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum la société A4 Architecture et la Mutuelle des Architectes Français, avec M. [M], à payer à Mme [U] les sommes de 212 073,46 € TTC, avec indexation, de 3 900 € pour le préjudice de jouissance et de 858,80 €,
Aux motifs que la dénégation de la société A4 Architecture ne résiste pas à la simple lecture tant de la lettre de Mme [C] du 21 juin 2004 faisant parvenir à Mme [U] sa « proposition de note d'honoraires pour la mission de maîtrise d'oeuvre que vous seriez susceptible de nous confier pour la démolition des annexes et la confortation de votre habitation », que du cahier des clauses techniques particulières prévoyant au lot n° 2 sous le titre 2 Fondations : « 2.1 Reprises en sous-oeuvre », « 2.1.1 Puits de confortement ».
qu'à supposer que Madame [U] ait fait un choix d'économie, il appartenait au maître d'oeuvre d'exiger les études préalables nécessaires à l'établissement de son projet ; qu'en l'absence d'un refus formel donné à la suite d'une information précise dument établie, la société A4 Architecture doit assumer la responsabilité d'un parti constructif qui s'est avéré inefficace.
que si le sinistre a pour origine première l'insuffisance structurelle du bâtiment dont Madame [U] assumait la charge en faisant procéder à une reprise en sous-oeuvre, la société A4 Architecture a été reconnue à bon doit responsable de l'inefficacité de cette reprise qui trouve son expression dans le fait que l'ouvrage n'a pas acquis la solidité formant l'objet même de son engagement ; que par leur intervention respective le maître d'oeuvre et l'entrepreneur ont concouru à la réalisation de l'entier dommage et c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu, sur le fondement de l'article 1792 du code civil s'agissant d'un désordre compromettant la solidité de l'ouvrage, leur responsabilité in solidum et l'obligation de garantie de la MAF (arrêt, p. 6) ;
Alors que l'auteur de travaux de reprise inefficaces qui n'ont pas aggravé les désordres initiaux n'est pas responsable de ces derniers et ne peut être condamné à en payer le coût ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir admis que les désordres affectant l'ouvrage de Mme [U] n'étaient pas dus aux travaux de reprise, mais à l'insuffisance structurelle du bâtiment, a néanmoins condamné l'architecte ayant assuré uniquement la maîtrise d'oeuvre de ces travaux de reprise et son assureur au paiement de la somme de 212 073,46 € correspondant au coût des travaux de reprise en sous oeuvre par micropieux préconisés par le Bet Tiercelin ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1147 du code civil.Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société SMA, demanderesse au pourvoi incident éventuel.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur [M], in solidum avec la Société A4 ARCHITECTURE et la MAF, à payer à Madame [U] la somme de 212 073,46 € T.T.C., soit 177 318,95 € H.T., avec indexation sur l'évolution du BR01 à compter du 5 janvier 2012 ;
AUX MOTIFS QUE la dénégation de la société A4 Architecture ne résiste pas à la simple lecture tant de la lettre de Mme [C] du 21 juin 2004 faisant parvenir à Mme [U] sa « proposition de note d'honoraires pour la mission de maîtrise d'oeuvre que vous seriez susceptible de nous confier pour la démolition des annexes et la confortation de votre habitation », que du cahier des clauses techniques particulières prévoyant au lot n° 2 sous le titre 2 Fondations : « 2.1 Reprises en sous-oeuvre », « 2.1.1 Puits de confortement ». qu'à supposer que Madame [U] ait fait un choix d'économie, il appartenaitau maître d'oeuvre d'exiger les études préalables nécessaires à l'établissement de son projet ; qu'en l'absence d'un refus formel donné à la suite d'une information précise dument établie, la société A4 Architecture doit assumer la responsabilité d'un parti constructif qui s'est avéré inefficace. que si le sinistre a pour origine première l'insuffisance structurelle du bâtiment dont Madame [U] assumait la charge en faisant procéder à une reprise en sous-oeuvre, la société A4 Architecture a été reconnue à bon doit responsable de l'inefficacité de cette reprise qui trouve son expression dans le fait que l'ouvrage n'a pas acquis la solidité formant l'objet même de son engagement ; que par leur intervention respective le maître d'oeuvre et l'entrepreneur ont concouru à la réalisation de l'entier dommage et c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu, sur le fondement de l'article 1792 du code civil s'agissant d'un désordre compromettant la solidité de l'ouvrage, leur responsabilité in solidum et l'obligation de garantie de la MAF ;
ALORS QUE l'auteur de travaux de reprise inefficaces qui n'ont pas aggravé les désordres initiaux n'est pas responsable de ces derniers et ne peut être condamné à en payer le coût ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir admis que les désordres affectant l'ouvrage de Mme [U] n'étaient pas dus aux travaux de reprise, mais à l'insuffisance structurelle du bâtiment, a néanmoins condamné Monsieur [M], titulaire du lot maçonnerie, au paiement de la somme de 212 073,46 € correspondant au coût des travaux de reprise en sous oeuvre par micropieux préconisés par le Bet Tiercelin ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1147 du code civil.