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20/04/2017 | FRANCE | N°16-13821

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 20 avril 2017, 16-13821


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 janvier 2016), que, par acte dressé le 28 juillet 2005 par M. [L], notaire, M. [D] a vendu à M. et Mme [C] un appartement situé au dernier étage d'un immeuble ; que, soutenant que ce logement ne correspondait pas aux normes d'habitabilité en vigueur, M. et Mme [C] ont assigné M. [D] et M. [R], successeur de M. [L], en nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles et, sub

sidiairement, en résolution de la vente pour manquement à l'obligation de ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 janvier 2016), que, par acte dressé le 28 juillet 2005 par M. [L], notaire, M. [D] a vendu à M. et Mme [C] un appartement situé au dernier étage d'un immeuble ; que, soutenant que ce logement ne correspondait pas aux normes d'habitabilité en vigueur, M. et Mme [C] ont assigné M. [D] et M. [R], successeur de M. [L], en nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles et, subsidiairement, en résolution de la vente pour manquement à l'obligation de délivrance ;

Attendu que M. et Mme [C] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit que, compte tenu de la hiérarchie des normes, le décret du 30 janvier 2002, postérieur au règlement sanitaire départemental du 23 décembre 1983, prévalait sur celui-ci et l'abrogeait implicitement et relevé que le contrat de vente décrivait le bien comme un appartement composé d'un séjour, d'une kitchenette et d'une salle d'eau avec WC et qu'au regard des dispositions de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation, le logement devait être considéré comme composé d'une seule pièce et remplissait le volume requis par le décret, la cour d'appel a pu en déduire que l'appartement devait être déclaré décent au sens du décret du 30 janvier 2002 et que les demandes devaient être rejetées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [C] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme [C] et les condamne à payer à M. [R] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [C]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame [C], de leur demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat de vente qu'ils ont conclu avec Monsieur [P] [D], le 28 juillet 2005, reçu par Maître [E] [L] et publié à la conservation des hypothèques de Bordeaux le 19 septembre 2005, volume 2005 P n° 8672 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, conformément à la mission qui lui a été confiée, l'expert a examiné la conformité du logement à la réglementation en matière de logement décent au regard de trois normes :
- l'article R. 111-2 du Code de la construction et de l'habitation : l'expert a considéré que les critères en étaient respectés si l'appartement n'accueillait qu'un seul habitant ;

- le décret du 30 janvier 2002 : l'expert a indiqué que ses conclusions. différaient suivant que le logement était considéré comme composé d'une seule pièce ou de deux pièces ; que dans le second cas, il ne satisfaisait pas aux exigences du décret de 2002 puisqu'il ne disposait pas d'une pièce principale ayant une surface de 9 m² avec une hauteur minimum de 2,20 m, ni d'une pièce principale ayant un volume minimum de 20 m3 (les surfaces situées sous moins d'1,80 mètres de hauteur sous plafond n'étant pas comptées) ; que dans le premier cas (si on analysait la structure du local comme étant composé d'une pièce unique (englobant séjour, kitchenette et dégagement), il était conforme aux exigences du décret mais uniquement sur le critère du volume, le critère de la surface de 9 m² avec une hauteur de plafond de plus de 2,20 mètres n'étant pas rempli ;

- l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental : l'expert a conclu que le logement litigieux ne répondait pas aux critères minimum imposés par cet arrêté, qu'il soit considéré comme étant composé d'une seule ou de deux pièces puisqu'il ne disposait pas d'une pièce principale d'une surface de 9 m² sous 2,20 mètres de hauteur sous plafond ;

qu'au vu de ces conclusions, deux questions doivent être tranchées :

- les textes applicables à la vente ;

- la qualification du logement ;

que l'application des dispositions de l'article R.111-2 du Code de la construction et de l'habitation, auquel fait notamment référence l'article 4 du décret du 30 janvier 2002, n'est pas discutée par les parties, les appelants ne formulant aucune observation ni demande au titre de la restriction d'usage découlant des constatations de l'expert ; que le débat porte donc sur le décret du 30 janvier 2002 et sur l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental ; que toutes les parties s'accordent pour admettre que la vente litigieuse est soumise aux dispositions du décret du 30 janvier 2002 ; qu'elles s'opposent en revanche sur la question de savoir si les dispositions du règlement sanitaire départemental du 23 décembre 1983 sont applicables ; que pour le soutenir, les appelants font valoir que le règlement sanitaire départemental, et notamment son article 40, a vocation à réglementer l'occupation de tous les locaux, et d'interdire l'occupation de tout local existant ne respectant pas les règles minimales de surface prévues, et ce en vue d'assurer la protection de la santé publique dans le département et la salubrité de tous les immeubles susceptibles d'accueillir une occupation humaine, de sorte qu'est concerné tout immeuble existant lors de son entrée en vigueur, peu important que celui-ci ait subi postérieurement des aménagements ou modifications ; que l'immeuble litigieux, en tout état de cause, relève des dispositions du règlement sanitaire dès lors qu'il a subi des aménagements postérieurement à son édiction, ses précédents propriétaires ayant réalisé en 1988 des travaux consistant notamment en l'aménagement de quatre studios dont celui objet du litige, ainsi qu'en attestent les pièces qu'ils versent aux débats (procès-verbal d'infraction au Code de l'urbanisme dressé en 1987 par la ville de [Localité 1] avec saisine du Procureur de la République le 18 mars 1988 pour modification des façades de l'immeuble et démolition intérieure, autorisation n° 88 Z 1415 venant régulariser les travaux réalisés sans autorisation et permettre la réalisation d'autres travaux (aménagements de 4 logements locatifs), constatation de la conformité des travaux réalisés par procès-verbal du 2 février 1989) ; que pour qu'un logement soit considéré comme décent, le règlement sanitaire départemental exige, « dans le cas où le logement comporte une seule pièce principale, que la surface de la pièce soit au moins égale à 9 m², et sa hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 m. (articles 40.3 et 40.4) ; que cette réglementation est en contradiction partielle car plus exigeante avec celle de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 pris pour l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre 2000, selon lequel est décent un « logement qui dispose au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 m² et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 m, soit un volume habitable au moins égal à 20 m3 », la surface et le volume habitables étant calculés selon les critères fixés à l'article R.111-2 du Code de la construction et de l'habitation; que compte tenu de la hiérarchie des normes, la réglementation nationale adoptée en 2002, postérieurement à l'édiction du règlement sanitaire départemental du 23 décembre 1983 et sous forme de loi, l'emporte nécessairement sur celle du règlement sanitaire départemental qu'elle abroge implicitement ; qu'il est d'ailleurs intéressant de relever que tous les documents produits aux débats, émanant des organismes officiels (rapport de vérification des critères de décence d'un logement, documents de la CAF) font référence au seul décret du 30 janvier 2002 ; que la position de Semi InCité, qui est la seule à invoquer le règlement sanitaire départemental, ne peut être entérinée, étant rappelé, comme l'a fait le premier juge, qu'elle n'a pas vocation à émettre de recommandation contraignante contraire ; qu'en conséquence, la décence de l'appartement doit s'apprécier uniquement par rapport à l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 ; que sur la qualification du logement, il résulte des conclusions de l'expert que le logement ne satisfait aux exigences de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 que s'il est considéré comme étant composé d'une seule pièce englobant séjour, kitchenette et dégagement ; que dans cette hypothèse, il est conforme aux exigences du décret mais uniquement sur le critère du volume, le critère de la surface de 9 m² avec une hauteur de plafond de plus de 2,20 mètres n'étant en revanche pas remplie ; que les appelants soutiennent qu'au regard des plans établis par l'expert, de la description du lot de copropriété vendu, des modalités de mesurage lors de la vente, l'appartement doit être considéré comme composé de deux pièces, de sorte qu'il ne répond pas aux critères de décence et d'habitabilité imposés par le décret de 2002 puisqu'il ne dispose pas d'une pièce principale ayant une surface de 9 m² avec une hauteur minimum de 2,20 m, ni d'une pièce principale ayant un volume minimum de 20 m3 (les surfaces situées sous moins d'1,80 mètres de hauteur sous plafond n'étant pas prises en compte) ; que le compromis de vente en date du 02 juin 2005 et l'acte d'acquisition du 28 juillet 2005 conclu entre les parties, comme le compromis de vente signé le 24 février 2010 entre les époux [C] et [N] [T], décrivent le bien comme un appartement composé d'un séjour, d'une kitchenette et d'une salle d'eau avec W.C ; qu'au regard des dispositions de l'article R.111-1-1 du code de la construction et de l'habitation, les pièces principales sont celles destinées au séjour ou au sommeil, éventuellement les chambres isolées, tandis que les cuisines, salles d'eau, buanderies, débarras et autres dégagements sont des pièces de service ; que dans l'appartement litigieux, seul le séjour peut donc être qualifié de pièce principale, ni le coin cuisine ni le dégagement ne répondant à la définition de pièce principale dont ils ne présentent aucune des caractéristiques ; que cette interprétation est confirmée par les termes du rapport du cabinet de géomètre experts Parallèle 45 en date du 20 mai 2010, qui décrit le logement comme une pièce principale composée d'un séjour/chambre avec coin cuisine ; que les plans et la description de l'expert n'apportant aucune démonstration contraire, le logement doit être considéré comme étant composé d'une seule pièce ; qu'il y a lieu dès lors de le déclarer décent au regard du décret du 30 janvier 2002 ; que par suite, il est apte à être loué comme vendu ; qu'aucune irrégularité n'entache l'acte de vente ; qu'aucun manquement du vendeur à l'obligation de délivrance conforme ne peut donc être relevé à l'encontre de [P] [D], aucune erreur sur les qualités substantielles du logement ne pouvant non plus être retenue ; qu'en conséquence, les demandes formées par les appelants à l'encontre de [P] [D] comme du notaire instrumentaire, à titre tant principal que subsidiaire, doivent être rejetées ; que le jugement sera confirmé.
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QU'enfin, les époux [C] exposent que l'appartement contrevient aux dispositions impératives de l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental dont les articles 40.3 et 40.4 sont ainsi rédigés :
"Superficie et volume des pièces :

L'une au moins des pièces principales du logement doit avoir une surface au sens du décret du 14 juin 1969 supérieure à 9 m². Les autres pièces d'habitation ne peuvent avoir une surface inférieure à 7 m². Dans le cas d'un logement comportant une seule pièce principale ou constituée par une chambre isolée, la surface de ladite pièce doit être au moins égale à 9 m². Pour l'évaluation de la surface de chaque pièce, les parties formant cul de sac d'une largeur inférieure à 2 m ne sont pas prises en compte.

La hauteur sous plafond ne doit pas être inférieure à 2,20 m.";

que Me [R] soutient quant à lui que par application combinée des articles 22 et 40 dernier alinéa de cet arrêté, l'immeuble n'est pas concerné par cette réglementation qui ne vise que les construction neuves ou bien modifiées ; qu'aux termes de ces textes, les dispositions du règlement s'appliquent à la construction, l'aménagement et l'équipement des bâtiments non visés par les articles R 111-1 à R 111.17 du Code de la construction et de l'habitation et à l'aménagement et l'équipement des habitations existantes même réalisées partiellement, chacune des opérations élémentaires devant être exécutée conformément aux dispositions du présent règlement ; qu'aucune modification de logements ne doit aboutir à la création de pièces dont les dispositions de surface, de hauteur, et de ventilation et d'éclairement seraient inférieures aux dispositions énoncées notamment aux articles 40.3 et 40.4 ; que l'appartement vendu aux époux [C] par M. [D], situé au dernier étage d'une immeuble de construction ancienne, n'a fait l'objet d'aucun aménagement par le vendeur qui le leur a cédé tel que lui-même l'avait acquis deux mois plus tôt ; que cet immeuble, qui appartenait à un unique propriétaire, avait déjà été divisé en appartements distincts à vocation de rapport, sans qu'il soit soutenu que le local des demandeurs aurait été construit, aménagé ou équipé postérieurement à la date d'entrée en vigueur du règlement sanitaire départemental qui, sur ces point particuliers, ne disposait que pour l'avenir ; que la division purement juridique de l'immeuble placé par M. [D] sous le régime de la copropriété afin de revendre séparément les différents lots ainsi constitués ne peut s'analyser, contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, en une modification entrant dans les prévisions du règlement sanitaire départemental qui doit porter sur la surface, la hauteur, la structure ou les volumes, alors surtout que cette opération n'a pas eu d'incidence matérielle sur l'appartement litigieux qui préexistait dans l'état où l'expert judiciaire a pu contradictoirement l'examiner ; qu'il n'est dès lors pas nécessaire de rechercher si ce logement est conforme à l'arrêté du 23 décembre 1983 inapplicable au litige ou bien d'examiner l'offre de travaux de mise en conformité émanant de M. [D], sans objet ; que le logement vendu est bien apte à être loué, la SEMI IN CITE LA CUB n'ayant pas vocation à émettre de recommandation contraignante contraire, et il n'existe ni manquement à l'obligation de délivrance conforme, ni erreur sur ses qualités substantielles ; que plus généralement, et dans la limite des écritures des parties liant le débat, aucun manquement contractuel ne peut être relevé à l'encontre de M. [D] par rapport à l'habitabilité du logement, au regard de son affirmation de décence dans le cadre des critères définis par l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 ; que par voie de conséquence, c'est en vain qu'il est fait grief au notaire de n'avoir pas fait procéder à des investigations complémentaires afin de s'en assurer et aucune faute ayant eu pour effet de paralyser l'efficacité de son acte ne peut lui être reprochée ; que les époux [C] seront donc déboutés de l'ensemble de leurs prétentions, à titre principal comme subsidiaire ;

1°) ALORS QU'en application des articles 40.3 et 40.4 du règlement sanitaire de la [Localité 2] du 23 décembre 1983, dans le cas d'un logement comprenant une seule pièce principale ou constitué par une chambre isolée, la surface de ladite pièce doit être au moins égale à 9 mètres carrés et sa hauteur sous plafond ne doit pas être inférieure à 2,20 mètres ; qu'aux termes de l'article 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, le logement dispose au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes ;
que les dispositions plus rigoureuses du règlement sanitaire prévalent sur celle du décret, qui n'a pas abrogé ce règlement, dès lors que ces dispositions ne sont pas incompatibles ; qu'en décidant qu'en vertu de la hiérarchie des normes, la réglementation nationale adoptée en 2002, postérieurement à l'édiction du règlement sanitaire départemental de la [Localité 2] et sous forme de loi, l'emportait nécessairement sur ledit règlement sanitaire qu'elle avait implicitement abrogé, pour en déduire que le logement satisfaisait à la réglementation applicable, de sorte que Monsieur et Madame [C] ne pouvaient se prévaloir d'une erreur sur la substance de la chose vendue, la Cour d'appel a violé les articles L 1311-2 du Code de la santé publique dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, 22 et 40 de l'arrêté du préfet de la [Localité 2] du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental et 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, ensemble l'article 1110 du Code civil ;

2°) ALORS QU'en décidant que l'appartement vendu par Monsieur [D] à Monsieur et Madame [C] répondait aux exigences légales et réglementaires, dès lors que cet appartement n'avait fait l'objet d'aucun aménagement par le vendeur qui le leur a cédé tel que lui-même l'avait acquis deux mois plus tôt, pour en déduire que le contrat de vente n'était pas entaché de nullité pour erreur sur la substance de la chose vendue, bien que le fait que Monsieur [D] n'ait procédé à aucun aménagement de la chose vendue n'ait pas été de nature à rendre l'appartement décent au regard de la réglementation applicable, la Cour d'appel a violé les articles L 1311-2 du Code de la santé publique dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, 22 et 40 de l'arrêté du préfet de la [Localité 2] du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental et 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, ensemble l'article 1110 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame [C] de leur demande tendant à voir prononcer la résolution du contrat de vente qu'ils ont conclu avec Monsieur [P] [D] du 28 juillet 2005, reçu par Maître [E] [L] et publié à la conservation des hypothèques de Bordeaux le 19 septembre 2005, volume 2005 P n° 8672 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, conformément à la mission qui lui a été confiée, l'expert a examiné la conformité du logement à la réglementation en matière de logement décent au regard de trois normes :

- l'article R. 111-2 du Code de la construction et de l'habitation : l'expert a considéré que les critères en étaient respectés si l'appartement n'accueillait qu'un seul habitant ;

- le décret du 30 janvier 2002 : l'expert a indiqué que ses conclusions. différaient suivant que le logement était considéré comme composé d'une seule pièce ou de deux pièces ; que dans le second cas, il ne satisfaisait pas aux exigences du décret de 2002 puisqu'il ne disposait pas d'une pièce principale ayant une surface de 9 m² avec une hauteur minimum de 2,20 m, ni d'une pièce principale ayant un volume minimum de 20 m3 (les surfaces situées sous moins d'1,80 mètres de hauteur sous plafond n'étant pas comptées) ; que dans le premier cas (si on analysait la structure du local comme étant composé d'une pièce unique (englobant séjour, kitchenette et dégagement), il était conforme aux exigences du décret mais uniquement sur le critère du volume, le critère de la surface de 9 m² avec une hauteur de plafond de plus de 2,20 mètres n'étant pas rempli ;

- l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental : l'expert a conclu que le logement litigieux ne répondait pas aux critères minimum imposés par cet arrêté, qu'il soit considéré comme étant composé d'une seule ou de deux pièces puisqu'il ne disposait pas d'une pièce principale d'une surface de 9 m² sous 2,20 mètres de hauteur sous plafond ;

qu'au vu de ces conclusions, deux questions doivent être tranchées :

- les textes applicables à la vente ;

- la qualification du logement ;

que l'application des dispositions de l'article R.111-2 du Code de la construction et de l'habitation, auquel fait notamment référence l'article 4 du décret du 30 janvier 2002, n'est pas discutée par les parties, les appelants ne formulant aucune observation ni demande au titre de la restriction d'usage découlant des constatations de l'expert ; que le débat porte donc sur le décret du 30 janvier 2002 et sur l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental ; que toutes les parties s'accordent pour admettre que la vente litigieuse est soumise aux dispositions du décret du 30 janvier 2002 ; qu'elles s'opposent en revanche sur la question de savoir si les dispositions du règlement sanitaire départemental du 23 décembre 1983 sont applicables ; que pour le soutenir, les appelants font valoir que le règlement sanitaire départemental, et notamment son article 40, a vocation à réglementer l'occupation de tous les locaux, et d'interdire l'occupation de tout local existant ne respectant pas les règles minimales de surface prévues, et ce en vue d'assurer la protection de la santé publique dans le département et la salubrité de tous les immeubles susceptibles d'accueillir une occupation humaine, de sorte qu'est concerné tout immeuble existant lors de son entrée en vigueur, peu important que celui-ci ait subi postérieurement des aménagements ou modifications ; que l'immeuble litigieux, en tout état de cause, relève des dispositions du règlement sanitaire dès lors qu'il a subi des aménagements postérieurement à son édiction, ses précédents propriétaires ayant réalisé en 1988 des travaux consistant notamment en l'aménagement de quatre studios dont celui objet du litige, ainsi qu'en attestent les pièces qu'ils versent aux débats (procès-verbal d'infraction au Code de l'urbanisme dressé en 1987 par la ville de [Localité 1] avec saisine du Procureur de la République le 18 mars 1988 pour modification des façades de l'immeuble et démolition intérieure, autorisation n° 88 Z 1415 venant régulariser les travaux réalisés sans autorisation et permettre la réalisation d'autres travaux (aménagements de 4 logements locatifs), constatation de la conformité des travaux réalisés par procès-verbal du 2 février 1989) ; que pour qu'un logement soit considéré comme décent, le règlement sanitaire départemental exige, « dans le cas où le logement comporte une seule pièce principale, que la surface de la pièce soit au moins égale à 9 m², et sa hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 m. (articles 40.3 et 40.4) ; que cette réglementation est en contradiction partielle car plus exigeante avec celle de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 pris pour l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre 2000, selon lequel est décent un « logement qui dispose au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 m² et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 m, soit un volume habitable au moins égal à 20 m3 », la surface et le volume habitables étant calculés selon les critères fixés à l'article R.111-2 du Code de la construction et de l'habitation; que compte tenu de la hiérarchie des normes, la réglementation nationale adoptée en 2002, postérieurement à l'édiction du règlement sanitaire départemental du 23 décembre 1983 et sous forme de loi, l'emporte nécessairement sur celle du règlement sanitaire départemental qu'elle abroge implicitement ; qu'il est d'ailleurs intéressant de relever que tous les documents produits aux débats, émanant des organismes officiels (rapport de vérification des critères de décence d'un logement, documents de la CAF) font référence au seul décret du 30 janvier 2002 ; que la position de Semi InCité, qui est la seule à invoquer le règlement sanitaire départemental, ne peut être entérinée, étant rappelé, comme l'a fait le premier juge, qu'elle n'a pas vocation à émettre de recommandation contraignante contraire ; qu'en conséquence, la décence de l'appartement doit s'apprécier uniquement par rapport à l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 ; que sur la qualification du logement, il résulte des conclusions de l'expert que le logement ne satisfait aux exigences de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 que s'il est considéré comme étant composé d'une seule pièce englobant séjour, kitchenette et dégagement ; que dans cette hypothèse, il est conforme aux exigences du décret mais uniquement sur le critère du volume, le critère de la surface de 9 m² avec une hauteur de plafond de plus de 2,20 mètres n'étant en revanche pas remplie ; que les appelants soutiennent qu'au regard des plans établis par l'expert, de la description du lot de copropriété vendu, des modalités de mesurage lors de la vente, l'appartement doit être considéré comme composé de deux pièces, de sorte qu'il ne répond pas aux critères de décence et d'habitabilité imposés par le décret de 2002 puisqu'il ne dispose pas d'une pièce principale ayant une surface de 9 m² avec une hauteur minimum de 2,20 m, ni d'une pièce principale ayant un volume minimum de 20 m3 (les surfaces situées sous moins d'1,80 mètres de hauteur sous plafond n'étant pas prises en compte) ; que le compromis de vente en date du 02 juin 2005 et l'acte d'acquisition du 28 juillet 2005 conclu entre les parties, comme le compromis de vente signé le 24 février 2010 entre les époux [C] et [N] [T], décrivent le bien comme un appartement composé d'un séjour, d'une kitchenette et d'une salle d'eau avec W.C ; qu'au regard des dispositions de l'article R.111-1-1 du code de la construction et de l'habitation, les pièces principales sont celles destinées au séjour ou au sommeil, éventuellement les chambres isolées, tandis que les cuisines, salles d'eau, buanderies, débarras et autres dégagements sont des pièces de service ; que dans l'appartement litigieux, seul le séjour peut donc être qualifié de pièce principale, ni le coin cuisine ni le dégagement ne répondant à la définition de pièce principale dont ils ne présentent aucune des caractéristiques ; que cette interprétation est confirmée par les termes du rapport du cabinet de géomètre experts Parallèle 45 en date du 20 mai 2010, qui décrit le logement comme une pièce principale composée d'un séjour/chambre avec coin cuisine ; que les plans et la description de l'expert n'apportant aucune démonstration contraire, le logement doit être considéré comme étant composé d'une seule pièce ; qu'il y a lieu dès lors de le déclarer décent au regard du décret du 30 janvier 2002 ; que par suite, il est apte à être loué comme vendu ; qu'aucune irrégularité n'entache l'acte de vente ; qu'aucun manquement du vendeur à l'obligation de délivrance conforme ne peut donc être relevé à l'encontre de [P] [D], aucune erreur sur les qualités substantielles du logement ne pouvant non plus être retenue ; qu'en conséquence, les demandes formées par les appelants à l'encontre de [P] [D] comme du notaire instrumentaire, à titre tant principal que subsidiaire, doivent être rejetées ; que le jugement sera confirmé.
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QU'enfin, les époux [C] exposent que l'appartement contrevient aux dispositions impératives de l'arrêté préfectoral du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental dont les articles 40.3 et 40.4 sont ainsi rédigés :
"Superficie et volume des pièces :

L'une au moins des pièces principales du logement doit avoir une surface au sens du décret du 14 juin 1969 supérieure à 9 m². Les autres pièces d'habitation ne peuvent avoir une surface inférieure à 7 m². Dans le cas d'un logement comportant une seule pièce principale ou constituée par une chambre isolée, la surface de ladite pièce doit être au moins égale à 9 m². Pour l'évaluation de la surface de chaque pièce, les parties formant cul de sac d'une largeur inférieure à 2 m ne sont pas prises en compte.

La hauteur sous plafond ne doit pas être inférieure à 2,20 m." ;

que Me [R] soutient quant à lui que par application combinée des articles 22 et 40 dernier alinéa de cet arrêté, l'immeuble n'est pas concerné par cette réglementation qui ne vise que les construction neuves ou bien modifiées ; qu'aux termes de ces textes, les dispositions du règlement s'appliquent à la construction, l'aménagement et l'équipement des bâtiments non visés par les articles R 111-1 à R 111.17 du Code de la construction et de l'habitation et à l'aménagement et l'équipement des habitations existantes même réalisées partiellement, chacune des opérations élémentaires devant être exécutée conformément aux dispositions du présent règlement ; qu'aucune modification de logements ne doit aboutir à la création de pièces dont les dispositions de surface, de hauteur, et de ventilation et d'éclairement seraient inférieures aux dispositions énoncées notamment aux articles 40.3 et 40.4 ; que l'appartement vendu aux époux [C] par M. [D], situé au dernier étage d'une immeuble de construction ancienne, n'a fait l'objet d'aucun aménagement par le vendeur qui le leur a cédé tel que lui-même l'avait acquis deux mois plus tôt ; que cet immeuble, qui appartenait à un unique propriétaire, avait déjà été divisé en appartements distincts à vocation de rapport, sans qu'il soit soutenu que le local des demandeurs aurait été construit, aménagé ou équipé postérieurement à la date d'entrée en vigueur du règlement sanitaire départemental qui, sur ces point particuliers, ne disposait que pour l'avenir ; que la division purement juridique de l'immeuble placé par M. [D] sous le régime de la copropriété afin de revendre séparément les différents lots ainsi constitués ne peut s'analyser, contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, en une modification entrant dans les prévisions du règlement sanitaire départemental qui doit porter sur la surface, la hauteur, la structure ou les volumes, alors surtout que cette opération n'a pas eu d'incidence matérielle sur l'appartement litigieux qui préexistait dans l'état où l'expert judiciaire a pu contradictoirement l'examiner ; qu'il n'est dès lors pas nécessaire de rechercher si ce logement est conforme à l'arrêté du 23 décembre 1983 inapplicable au litige ou bien d'examiner l'offre de travaux de mise en conformité émanant de M. [D], sans objet ; que le logement vendu est bien apte à être loué, la SEMI IN CITE LA CUB n'ayant pas vocation à émettre de recommandation contraignante contraire, et il n'existe ni manquement à l'obligation de délivrance conforme, ni erreur sur ses qualités substantielles ; que plus généralement, et dans la limite des écritures des parties liant le débat, aucun manquement contractuel ne peut être relevé à l'encontre de M. [D] par rapport à l'habitabilité du logement, au regard de son affirmation de décence dans le cadre des critères définis par l'article 4 du décret du 30 janvier 2002 ; que par voie de conséquence, c'est en vain qu'il est fait grief au notaire de n'avoir pas fait procéder à des investigations complémentaires afin de s'en assurer et aucune faute ayant eu pour effet de paralyser l'efficacité de son acte ne peut lui être reprochée ; que les époux [C] seront donc déboutés de l'ensemble de leurs prétentions, à titre principal comme subsidiaire ;

1°) ALORS QU'en application des articles 40.3 et 40.4 du règlement sanitaire de la [Localité 2] du 23 décembre 1983, dans le cas d'un logement comprenant une seule pièce principale ou constitué par une chambre isolée, la surface de ladite pièce doit être au moins égale à 9 mètres carrés et sa hauteur sous plafond ne doit pas être inférieure à 2,20 mètres ; qu'aux termes de l'article 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, le logement dispose au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes ;
que les dispositions plus rigoureuses du règlement sanitaire prévalent sur celle du décret, qui n'a pas abrogé ce règlement dès lors que ces dispositions ne sont pas incompatibles ; qu'en décidant qu'en vertu de la hiérarchie des normes, la réglementation nationale adoptée en 2002, postérieurement à l'édiction du règlement sanitaire départemental de la [Localité 2] et sous forme de loi, l'emportait nécessairement sur ledit règlement sanitaire qu'elle avait implicitement abrogé, pour en déduire que Monsieur [D] n'avait pas manqué à son obligation de délivrer un bien conforme et débouter Monsieur et Madame [C] de leur demande de résolution du contrat de vente, la Cour d'appel a violé les articles L 1311-2 du Code de la santé publique dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, 22 et 40 de l'arrêté du préfet de la [Localité 2] du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental et 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, ensemble l'article 1604 du Code civil ;

2°) ALORS QU'en décidant que l'appartement vendu par Monsieur [D] à Monsieur et Madame [C] répondait aux exigences légales et réglementaires, dès lors que cet appartement n'avait fait l'objet d'aucun aménagement par le vendeur qui le leur a cédé tel que lui-même l'avait acquis deux mois plus tôt, pour en déduire qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la résolution de la vente en raison d'un manquement du vendeur à son obligation de délivrance, bien que le fait que Monsieur [D] n'ait procédé à aucun aménagement de la chose vendue n'ait pas été de nature à rendre l'appartement décent au regard de la réglementation applicable, la Cour d'appel a violé les articles L 1311-2 du Code de la santé publique dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, 22 et 40 de l'arrêté du préfet de la [Localité 2] du 23 décembre 1983 portant règlement sanitaire départemental et 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, ensemble l'article 1604 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-13821
Date de la décision : 20/04/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 07 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 20 avr. 2017, pourvoi n°16-13821


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.13821
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