LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 25 février 2016), que M. X..., cadre supérieur de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), a souscrit, le 29 avril 2011, une déclaration d'accident du travail ; que la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ayant refusé la prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, que constitue un accident du travail un événement soudain survenu au temps et lieu de travail ; que lorsque les lésions relèvent d'une affection psychique, l'accident du travail est caractérisé par la soudaineté de l'événement à l'origine de ces lésions ; qu'en déclarant, pour considérer qu'il n'existait pas d'événement soudain qui se serait produit à réception du courriel du 22 avril 2011, que celui-ci ne faisait que confirmer des informations déjà communiquées, se déterminant ainsi au regard de courriers antérieurs à la décision de justice du 4 avril 2011 annulant la décision unilatérale de l'employeur de muter le salarié de Bordeaux à Paris, dont elle n'a tenu aucun compte, tandis que, dans ce contexte, ledit courrier portant injonction de se rendre à Paris, assorti d'une menace de licenciement pour absence irrégulière, et donc constitutif pour l'intéressé d'un choc émotionnel, caractérisait le fait accidentel clairement identifié à l'origine de son état dépressif, la cour d'appel a violé l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que, sous couvert du grief non fondé de violation de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de fait et de preuve débattus devant eux ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un salarié protégé (M. X..., l'exposant) de sa demande dirigée contre son employeur (la SNCF) et un organisme social (la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF) tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident dont il avait été victime le 22 avril 2011 ;
AUX MOTIFS QUE, en l'espèce, M. X..., cadre supérieur à la SNCF et délégué du personnel, soutenait qu'il était en conflit avec sa hiérarchie, ce qui avait entraîné depuis 2006 une altération de sa santé qui aurait été brutalement aggravée par le courriel reçu de son supérieur hiérarchique le 22 avril 2011 l'informant de la mutation à Paris qu'il avait refusée ; que le conflit opposant M. X... à sa hiérarchie sur une éventuelle mutation avec un changement de région (départ de la Région Aquitaine pour Paris) était bien antérieur ; que, par ordonnance de référé du 4 avril 2011, le conseil de prud'hommes de Bordeaux avait annulé le changement d'affectation notifié le 20 octobre 2010 à M. X... pour la raison que, refusé par celui-ci, il avait des conséquences sur l'exercice de son mandat de délégué du personnel ; que, par arrêt du 8 novembre 2011, la cour de Bordeaux avait confirmé l'ordonnance en retenant que les premiers juges avaient exactement énoncé qu'aucun changement des conditions de travail ne pouvait être imposé à un représentant du personnel sans son accord ; que, par courriel du 19 avril 2011, adressé à M. Y..., son N+1, M. X... se référait à la décision d'annulation de sa mutation du 4 avril 2011 qui l'avait conduit à demander l'annulation de l'élection des délégués du personnel du 24 mars 2011 ; que la réponse était adressée le jour même à M. X... ; qu'il lui était demandé de « rejoindre (son) bureau à Paris au plus tard le 26 avril 2011 » ; qu'il fallait noter le caractère comminatoire très marqué de ce courrier ; que s'ensuivait le 22 avril un échange de courriers entre M. X... et M. Y... ; que ce dernier lui adressait à 12 h 03 le courrier suivant : « je ne peux que te confirmer la teneur du courrier du 19 avril (…) je te remercie de bien vouloir te présenter le 27 avril 2011 au ... à la Direction des Achats (…) A défaut, sauf justification, je me verrai contraint de te considérer en absence irrégulière » ; qu'à 16 h 52, M. X... lui répondait : « à l'instar de mon changement d'unité d'affectation notifié le 20 octobre 2010 que le conseil des prud'hommes a annulé le 4 avril 2011, je considère irréguliers les courriers que j'ai reçus depuis le 17 février 2011, m'enjoignant de prendre un poste à la Direction des Achats à partir du 1er mars 2011, alors que j'ai accepté de réaliser la deuxième mission que la Direction des Achats m'a proposée ; cette technique de gestion porte atteinte à ma dignité et relève du harcèlement moral » ; que le courriel de M. Y... n'évoquait à aucun moment la mise en oeuvre d'une mesure de licenciement ; qu'il ne faisait que rappeler la situation statutaire qui serait celle de M. X... s'il refusait de rejoindre son poste : l'absence irrégulière ; que la volonté de son employeur de tirer toutes conséquences de cette position résultait clairement de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception qui lui avait été adressée le 19 avril et à laquelle il était d'ailleurs fait référence dans l'échange de mails ; qu'il n'existait donc pas en l'espèce d'événement soudain qui se serait produit le 22 avril par la prise de connaissance de ce courriel par M. X... susceptible d'avoir créé une lésion ; que la soudaineté devait caractériser la cause de la pathologie accidentelle ; que, par ailleurs, la réponse de M. X... était celle d'un salarié en pleine possession de ses capacités et qui, en premier lieu, rappelait à son employeur qu'il venait d'obtenir l'annulation d'une décision similaire antérieure et que les conditions étaient pour lui identiques ; qu'en second lieu, il était fait état pour la première fois de la notion de harcèlement moral qui exprimait clairement sa ligne de défense et de contre-attaque par rapport à la position de l'employeur telle qu'analysée cidessus ; que M. X... avait répondu de manière circonstanciée et posée au courriel le même jour à 16 h 52 ; que le certificat de son médecin traitant du 22 avril 2011 et le certificat médical de déclaration d'accident du travail en date du 22 avril 2011 faisaient état « d'un état dépressif sévère depuis 2006 en relation avec des conflits professionnels » ne permettant pas de caractériser un accident du travail ; que le certificat médical décrivait un processus de dégradation de l'état psychologique du patient sur une période de cinq ans ne correspondant pas à un accident du travail ; que l'événement survenu ce jour-là (le 22 avril) ne pouvait caractériser un accident du travail ; que le certificat du 28 avril 2011 du médecin du travail de la SNCF ne faisait état ni de la mutation à Paris, ni du dernier courriel reçu mais des difficultés auxquelles M. X... était confronté depuis plusieurs années ; que, dans ce certificat, on relevait comme facteur déclenchant la lettre recommandée du 19 avril et non le courrier du 22 ; qu'il faillait enfin relever la durée, depuis 2006, des faits à l'origine de son état en 2011 et les causes multiples à leur origine : relations difficiles avec son supérieur hiérarchique, absence de reconnaissance professionnelle, difficultés nées avec son employeur suite à son élection comme délégué du personnel, la trahison de son syndicat intervenue concomitamment avec le dernier conflit l'opposant à son employeur relatif à sa demande de mutation et qui avait un effet direct sur celle-ci puisque M. X... avait pu faire annuler une précédente décision de mutation professionnelle en raison de la protection statutaire dont il bénéficiait en qualité de délégué du personnel ; que les faits tels qu'analysés ci-dessus impliquaient une action continue, de longue durée, cinq ans, et au surplus multifactorielle dans les causes, incompatible avec la définition de l'accident du travail ; que M. X... ne rapportait pas la preuve de ce que l'arrêt de travail prescrit le 22 avril avait été causé par une brutale altération de ses facultés mentales en relation avec les événements invoqués ;
ALORS QUE constitue un accident du travail un événement soudain survenu au temps et lieu de travail ; que lorsque les lésions relèvent d'une affection psychique, l'accident du travail est caractérisé par la soudaineté de l'événement à l'origine de ces lésions ; qu'en déclarant, pour considérer qu'il n'existait pas d'événement soudain qui se serait produit à réception du courriel du 22 avril 2011, que celui-ci ne faisait que confirmer des informations déjà communiquées, se déterminant ainsi au regard de courriers antérieurs à la décision de justice du 4 avril 2011 annulant la décision unilatérale de l'employeur de muter le salarié de Bordeaux à Paris, dont elle n'a tenu aucun compte, tandis que, dans ce contexte, ledit courrier portant injonction de se rendre à Paris, assorti d'une menace de licenciement pour absence irrégulière, et donc constitutif pour l'intéressé d'un choc émotionnel, caractérisait le fait accidentel clairement identifié à l'origine de son état dépressif, la cour d'appel a violé l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale