LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 461 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351, devenu 1355, du code civil ;
Attendu que les juges, saisis d'une requête en interprétation d'une précédente décision, ne peuvent, sous prétexte d'en déterminer le sens, modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société Logitud SA, un protocole d'accord a été signé entre la société Tegelog et M. X..., aux termes duquel cette société s'est engagée à retirer son offre de reprise, M. X... prenant l'engagement de l'inclure dans l'offre présentée par la société Logitud solutions et de lui attribuer une part du capital de cette dernière, moyennant le prix de 100 000 euros ; que ce protocole d'accord n'ayant pas été exécuté, un tribunal de commerce, à la requête de la société Teamnet, venant aux droits de la société Tegelog, a retenu que cette inexécution était imputable à M. X... et l'a condamné à payer une certaine somme à cette société ; qu'une cour d'appel ayant, dans un arrêt du 13 mars 2014, confirmé ce jugement, l'arrêt a été cassé par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Ch. com. 13 octobre 2015, n° 14-18.426 et 14-18.427) ; que sur renvoi après cassation, la même cour d'appel a infirmé le jugement sur l'étendue et la réparation des préjudices subis par la société Teamnet et ordonné une expertise à fin d'évaluation de ces préjudices ; que la société a formé une requête en interprétation de cet arrêt ;
Attendu que pour accueillir cette requête, l'arrêt interprétatif attaqué décide que, dans son précédent arrêt, la cour d'appel n'a pas entendu, en infirmant le jugement sur l'évaluation du préjudice, permettre à M. X..., qui avait été reconnu débiteur de la société Teamnet, d'obtenir la restitution des sommes qu'il lui avait versées en exécution du jugement du tribunal de commerce d'Evry du 19 décembre 2012 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de mentions spéciales dans son dispositif, l'infirmation par l'arrêt du 21 juillet 2016 du jugement du 19 décembre 2012 sur l'étendue et la réparation des préjudices subis par la société entraînait pour celle-ci l'obligation de plein droit de restituer les sommes versées en application du jugement, la cour d'appel, qui a modifié les droits et obligations reconnus aux parties par celui-ci, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties en l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Teamnet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Teamnet et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'en indiquant dans le dispositif de l'arrêt N° 241 en date du 21 juillet 2016 : « infirme le jugement sur l'étendue et la réparation des préjudices subis par la société Teamnet », la cour n'a pas entendu permettre à M. X..., qui a été reconnu débiteur de ladite société, qu'il puisse obtenir la restitution des sommes qu'il lui a versées en exécution du jugement du tribunal de commerce d'Evry du 19 décembre 2012 ;
AUX MOTIFS QUE : « le jugement du tribunal de commerce d'Evry, revêtu de l'exécution provisoire, a été exécuté. M. X... a, au vu de l'arrêt du 21 juillet 2016, considéré que l'infirmation du jugement emportait obligation de restitution des sommes versées à la société Teamnet et fait délivrer un commandement de payer aux fins de saisie-vente à son encontre. Teamnet soutient que cette procédure civile d'exécution est la conséquence d'une contradiction qui existe dans le dispositif de la décision en ce qu'il permet, par l'effet de l'infirmation, la restitution des sommes perçues en exécution du jugement, tout en laissant entendre, au regard de l'expertise ordonnée et de la mission confiée à l'expert, que l'indemnisation à venir sera supérieure aux condamnations prononcées par le jugement infirmé. M. X... soutient pour sa part, que sous le couvert d'une requête en interprétation, la société Teamnet cherche à faire modifier le dispositif de l'arrêt et à voir rajouter une demande spécifique qu'elle aurait dû formuler dans ses conclusions au fond, que l'infirmation entraînant de plein droit restitution des sommes versées, cette demande spécifique aurait dû faire l'objet d'un débat contradictoire ; qu'aucun droit à réparation n'est à ce jour reconnu judiciairement au bénéfice de Teamnet et que la contradiction de motifs invoquée par la requérante est un moyen de cassation qui ne saurait justifier une requête en interprétation. En application de l'article 461 du code de procédure civile, il appartient à la cour de fixer le sens à donner à la mention « infirme le jugement sur l'étendue et la réparation des préjudices subis par la société Teamnet ». L'arrêt du 21 juillet 2016 rappelle que le principe de la responsabilité de M. X... dans l'inexécution de l'accord du 18 janvier 2015 a été définitivement tranché par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 13 mars 2014. Par ailleurs, la cour énonce dans sa motivation que l'indemnisation de la société Teamnet doit tenir compte, d'une part, du préjudice résultant de la perte de chance de voir son offre retenue par le tribunal de grande instance de Mulhouse et d'avoir pu ainsi acquérir le fonds de commerce de Longitud, et d'autre part de l'inexécution par M. X... de son engagement d'attribuer 46,25 % du capital social de la société dont la réalisation n'était affectée d'aucun aléa, laquelle est fautive et doit être intégralement réparée par l'octroi de dommages et intérêts. Dès lors, la cour n'a pas entendu, en infirmant le jugement sur l'évaluation du préjudice, permettre que M. X..., qui a été reconnu débiteur de Teamnet, puisse obtenir la restitution des sommes auxquelles il a été condamné par le tribunal de commerce d'Evry mais seulement revenir sur le jugement du 19 décembre 2012 qui a procédé à une évaluation inexacte du préjudice subi » ;
ALORS QUE les juges, saisis d'une contestation relative à l'interprétation d'une précédente décision, ne peuvent, sous prétexte d'en déterminer le sens, apporter une modification quelconque aux dispositions précises de celle-ci ; que l'infirmation du jugement ayant prononcé des condamnations à paiement de sommes d'argent sous le bénéfice de l'exécution provisoire emporte de plein droit obligation pour celui qui a reçu ces sommes de les restituer ; que par son arrêt du 21 juillet 2016, la cour d'appel a infirmé le jugement sur l'étendue et la réparation des préjudices subis par la société Teamnet ; qu'en considérant que par cet arrêt la cour d'appel n'aurait pas entendu permettre à M. X..., qui aurait été reconnu débiteur de la société Teamnet, qu'il puisse obtenir la restitution des sommes qu'il lui avait versées en exécution du jugement du tribunal de commerce d'Evry du 19 décembre 2012, la cour d'appel a violé l'article 461 du code de procédure civile.