LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X...et de Mme Y...;
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches et sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur la quatrième branche du premier moyen :
Vu l'article 276 du code civil ;
Attendu que, pour dire que la prestation compensatoire sera versée à Mme Y...sous la forme d'une rente viagère, l'arrêt se borne à retenir que les revenus de M. X...sont relativement modestes, qu'il ne pourra retrouver aisément un emploi, en raison de son âge, qu'il lui est impossible de payer un capital important et que chacun des époux est propriétaire d'immeubles de valeur ;
Qu'en statuant ainsi, sans motiver spécialement sa décision au regard de l'âge ou de l'état de santé de Mme Y...ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 266 du code civil ;
Attendu que, pour condamner Mme Y...à payer à M. X...des dommages-intérêts sur le fondement de ce texte, l'arrêt retient que l'épouse a manifesté à l'égard du mari un comportement humiliant et qu'elle a dévalorisé son rôle de père auprès des enfants ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser les conséquences d'une particulière gravité subies par M. X...du fait de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la prestation compensatoire sous la forme d'un rente viagère d'un montant mensuel indexé de 400 euros et condamne Mme Y...à verser des dommages-intérêts en application de l'article 266 du code civil, l'arrêt rendu le 23 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la SCP Odent et Poulet la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui avait fixé la rente viagère due par M. X...à son ex-épouse à titre de prestation compensatoire à la somme mensuelle de 400 € par mois
AUX MOTIFS PROPRES QUE « pour allouer à titre de prestation compensatoire une rente viagère mensuelle indexée de 400 €, le premier juge a relevé que Mme Quitterie Y...est propriétaire d'une maison dans les Landes, qu'elle perçoit de faibles revenus, à savoir 931 € ainsi qu'une contribution paternelle à l'entretien des enfants de 480 €, et qu'elle justifie de charge de l'ordre de 1 204 € par mois, alors que M. Geoffroy X..., qui perçoit un salaire mensuel de 3 306 € et est propriétaire d'un bien immobilier, supporte des charges mensuelles de l'ordre de 1 500 € ;
Attendu qu''il convient de constater que l'appelante ne fait guère d'efforts pour justifier de ses ressources et de son patrimoine actuels, Mme Y...versant aux débats son avis d'imposition relatif à ses revenus 2011, à savoir des pensions alimentaires à hauteur de 12 738 €, ainsi qu'une attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales de la Gironde d'octobre 2011 à hauteur de 859, 86 euros (allocations familiales : 322, 32 €, complément familial : 163, 71 € et allocation logement : 373, 83 €) ; qu'en revanche M. X..., plus diligent, justifie avoir perçu en 2013 des salaires à hauteur de 52 493 € plus des revenus de valeurs mobilières pour 1 025 € et des plus-values de cession pour et qu'il ne perçoit fin 2014 qu'une allocation mensuelle de retour à l'emploi de 483, 30 € ; que M. X..., ingénieur dans l'industrie, qui a été licencié économique en août 2012, a peu de chances de retrouver un emploi et aura une pension de retraite à l'évidence modeste ;
Attendu que Mme Y...est propriétaire, même si elle a l'interdiction de l'aliéner, de deux maisons d'habitation de caractère situées sur un très grand terrain sur la commune de Losse (Landes) données en juillet 1994 par sa mère et que les photographies versées aux débats établissent qu'elles sont meublées de façon fort cossue ; qu'elle peut donc parfaitement habiter ou louer ces demeures de caractère, qui ne sont pas sans confort comme elle le prétend ; que M. X..., qui a été propriétaire en 2007 d'un portefeuille d'une valeur d'environ 125 000 €, les autres valeurs mobilières, dont l'existence est alléguée par l'appelante, n'étant pas justifiées, possède une maison de maître à ..., dans laquelle il réside ; qu'il n'est pas démontré au vu de l'attestation de maître Jean-Marc Z..., notaire associé à Paris 7°, dont rien ne permet de mettre en cause la validité, que M. Geoffroy X...soit propriétaire ou nu-propriétaire d'appartements à Paris, notamment 8 rue Masseran (7°) et 61 boulevard de l'amiral Bruix (16°) ; qu'il ne saurait être tenu compte de la valeur de véhicules fort anciens, qui ont parcouru largement plus de 200 000 km, l'attribution de l'un d'eux à l'appelante lui occasionnant des frais de remise en état considérables ;
Attendu que Mme Quitterie Y..., qui affirme que son époux serait propriétaire d'un patrimoine mobilier caché, ne saurait solliciter, sans produire le moindre document justifiant de ses allégations, l'instauration avant-dire droit d'une mesure d'expertise pour évaluer contradictoirement les patrimoines et revenus respectifs des parties en application de l'article 276 du code de procédure civile, d'autant plus que celle-ci verse aux débats en ce qui concerne ses ressources des justificatifs particulièrement obsolètes ; que la vie commune a duré moins de douze ans, puisque les parties se sont mariées en mars 1996 et que l'appelante a quitté le domicile familial fin 2007 ;
Attendu que vu de ces éléments c'est à juste titre que le premier juge a estimé qu'il résulte des éléments mentionnés plus haut que la rupture du lien du mariage entraînera disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de Mme Quitterie Y..., qui est titulaire d'un diplôme de l'enseignement supérieur ;
Attendu qu'en l'état d'un revenu actuel relativement modeste, une allocation mensuelle de retour à l'emploi de 483, 30 €, de la difficulté à son âge (51 ans) de retrouver un emploi ainsi que divers revenus de capitaux mobiliers pour 3 335 € par mois selon une déclaration sur l'honneur du 31 janvier 2011, dont rien à nouveau ne permet de mettre en cause la validité, M. Geoffroy X...sera tenu conformément aux dispositions de l'article 276 du code civil en raison de son impossibilité actuelle à verser un capital conséquent, chacun des époux étant propriétaire d'immeubles d'une valeur certaine, de compenser cette disparité par le versement d'une rente viagère mensuelle indexée de 400 €, la proposition de l'intimé d'un droit d'occupation de la maison de Romay paraissant manifestement insuffisante ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, sans qu'il y ait lieu de déduire les paiements effectués sur le fondement du jugement de divorce du 20 mars 2012 » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Madame SIMON A...épouse X...sollicite l'octroi d'une prestation compensatoire un capital de 500. 000 euros ou d'une rente mensuelle de 1. 000 euros ;
[…] que les époux ont fourni une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie ;
Attendu que Madame SIMON A...est propriétaire d'une maison dans les Landes, mais qu'elle perçoit de faibles revenus mensuels soit 931 euros et 480 euros au titre de la contribution paternelle à l'entretien des enfants ;
qu'elle justifie de charges mensuelles de l'ordre de 1. 204 euros ;
Attendu que Monsieur Geoffroy X...perçoit un salaire mensuel de 3. 306 euros et qu'il est propriétaire d'un bien immobilier ; que ses charges mensuelles sont de l'ordre de 1. 500 euros ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments d'appréciation que la rupture du lien du mariage entraînera une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de Mme Y...épouse X...;
Que cette disparité sera compensée par l'allocation d'une rente viagère mensuelle de 400 euros, indexée » ;
1°/ ALORS QUE, dans l'hypothèse d'un appel général, c'est au jour où ils statuent que les juges d'appel doivent se placer pour apprécier l'existence et l'étendue d'un droit à prestation compensatoire ; qu'en énonçant que M. X...percevait divers revenus de capitaux mobiliers pour 3 335 € par mois selon une déclaration sur l'honneur du 31 janvier 2011 tandis que Mme Y...avait interjeté appel général et que la cour devait donc se placer en avril 2015 pour déterminer l'étendue de ses droits, la cour a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
2°/ ALORS QUE, lorsqu'il détermine le montant d'une prestation compensatoire, le juge doit tenir compte des conséquences des choix faits par les époux pendant leur vie commune ; qu'à défaut de rechercher, comme elle y était invitée par Mme Y..., si l'activité professionnelle de M. X...n'avait pas été privilégiée au détriment de la sienne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
3°/ ALORS QUE dans ses écritures d'appel (conclusions, p. 33), Mme Y...soutenait que l'activité professionnelle de son mari avait été privilégiée au détriment de la sienne ; qu'à défaut de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du CPC ;
4°/ ALORS QUE, à titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ; qu'en se bornant à énoncer « qu'en l'état d'un revenu actuel relativement modeste, une allocation mensuelle de retour à l'emploi de 483, 30 €, de la difficulté à son âge (51 ans) de retrouver un emploi ainsi que divers revenus de capitaux mobiliers pour 3 335 € par mois selon une déclaration sur l'honneur du 31 janvier 2011, dont rien à nouveau ne permet de mettre en cause la validité, M. Geoffroy X...sera tenu conformément aux dispositions de l'article 276 du code civil en raison de son impossibilité actuelle à verser un capital conséquent, chacun des époux étant propriétaire d'immeubles d'une valeur certaine, de compenser cette disparité par le versement d'une rente viagère mensuelle indexée de 400 €, la proposition de l'intimé d'un droit d'occupation de la maison de Romay paraissant manifestement insuffisante ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, sans qu'il y ait lieu de déduire les paiements effectués sur le fondement du jugement de divorce du 20 mars 2012 », la cour d'appel a fixé la prestation compensatoire sous forme de rente viagère sans motiver spécialement sa décision, en violation de l'article 276 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui avait condamné Mme Y...à payer à M. X...la somme de 1 500 € de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « M. X...sollicite une somme de 350 000 € sur le fondement de l'article 266 du code civil, qui dispose que des dommages-intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage au motif que Mme Y...a voulu détruire moralement, psychologiquement et financièrement son mari en refusant tout dialogue ; que le premier juge a alloué de ce chef à l'intimé une somme de 1 000 €, montant qui constitue une juste indemnisation du préjudice invoqué par M. X..., lequel est établi au vu des éléments rapports plus haut » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « le comportement fautif de Mme Y...épouse X...a causé à son mari un préjudice distinct de celui résultant de la seule rupture du lien conjugal ; qu'il sera réparé par l'allocation de dommages et intérêts d'un montant de 1. 000 euros sur le fondement de l'article 266 du code civil, que surplus de la demande sera rejetée » ;
1°/ ALORS QUE des dommages-intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage ; qu'en condamnant Mme Y...à verser des dommages-intérêts à M. X...parce qu'elle aurait voulu le détruire moralement, psychologiquement et financièrement, la cour a réparé un préjudice qui n'est pas né de la dissolution du mariage, violant ainsi l'article 266 du code civil ;
2°/ ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une contradiction de motifs ; qu'en confirmant le jugement qui, dans ses motifs, avait condamné Mme Y...à verser une somme de 1 000 € de dommages-intérêts et, dans son dispositif, l'avait condamnée à verser une somme de 1 500 €, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du CPC.