LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 10 mai 2016), que, le 5 juin 2007, M. X... a été victime d'un accident lors de la phase d'atterrissage de l'aéronef ultra léger motorisé qu'il pilotait, tandis que son instructeur, M. Y..., dirigeait la manoeuvre d'approche par radio ; qu'il a assigné ce dernier et son assureur, le GIE Réunion aérienne, en responsabilité, puis la société Fly in Paris, ayant pour gérant M. Y..., en intervention forcée ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre M. Y... et son assureur, alors, selon le moyen :
1°/ que commet une faute détachable le gérant d'une société dont la faute intentionnelle, d'une particulière gravité, est incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; qu'en jugeant que M. Y... n'avait pas commis une telle faute détachable, sans aucunement rechercher si les faits qui lui étaient reprochés ne pouvaient pas la caractériser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que commet une faute détachable de ses fonctions le gérant d'une entreprise de formation en aviation légère qui expose sciemment un élève pilote à un danger d'accident qui s'est effectivement réalisé ; qu'en omettant de rechercher si, ainsi que M. X... l'avait fait valoir, M. Y... n'avait pas commis une accumulation de fautes ayant eu pour effet d'exposer sciemment son élève à un risque d'accident d'ultra léger motorisé, ce qui caractérisait la faute détachable du gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que, M. X... s'étant borné à soutenir, dans ses conclusions d'appel, que la société Fly in Paris devait répondre des fautes de son moniteur, il n'est pas recevable à présenter, devant la Cour de cassation, un moyen contraire à ses propres écritures ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir réformé le jugement et débouté un élève pilote d'ULM (M. Eric X...) de ses demandes formées contre son instructeur (M. Y...) et l'assureur de celui-ci (le GIE Réunion Aérienne) ;
AUX MOTIFS QUE, sur les responsabilités, estimant que les circonstances de l'accident démontraient un manquement de M. Y... dans l'exécution de son obligation de sécurité dans l'organisation du vol et considérant que l'intéressé ne justifiait pas que ce vol s'inscrivait dans le contrat de formation liant M. X... à la société Fly in Paris dont M. Y... était le gérant, le tribunal avait consacré la responsabilité exclusive de l'intéressé ; que, sur la responsabilité de M. Y..., la cour rappelait que, devant le tribunal, M. X... poursuivait la responsabilité contractuelle de M. Y..., au motif qu'il estimait que celui-ci avait agi dans le cadre d'une activité exercée en « free lance » et donc en-dehors de l'école de pilotage ; que M. X... maintenait son analyse en appel ; qu'il ne disconvenait pas qu'il était lié à la société Fly in Paris (ayant notamment pour objet social l'apprentissage et la formation à l'aviation ultra légère motorisée) par un contrat de formation, mais prétendait, à défaut de preuve contraire dont la charge pèserait sur M. Y..., que le vol du 5 juin 2007 était organisé par ce dernier, en tant qu'instructeur « free lance », en sorte que sa responsabilité personnelle devait être retenue ; que la cour relevait que, bien que ne soit pas produite la convention liant la société Fly in Paris à M. X..., il était admis par toutes les parties que la formation de pilote dont bénéficiait ce dernier était dispensée par la société Fly in Paris, par l'intermédiaire de son instructeur agréé, M. Y..., par ailleurs gérant de la société ; qu'aucune des parties ne précisait les modalités selon lesquelles, selon cette convention, les cours étaient dispensés, programmés et rémunérés, de sorte que le fait que le vol du 5 juin 2007 ait été organisé au « pied levé », à la faveur d'un cours dispensé à un autre élève-pilote, M. A..., auquel M. Y... avait proposé de s'associer en les accompagnant par un vol effectué en solo sous sa direction, ne suffisait pas à démontrer, en l'absence de tout autre élément propre à l'établir (par exemple un accord sur une rémunération personnelle de M. Y... hors la comptabilité de l'école de pilotage) que les parties avaient convenu de l'extraire du champ contractuel de la formation assurée par la société Fly in Paris ; que, de même, le fait que M. Y... se soit présenté lors de l'enquête de gendarmerie comme un instructeur en « free lance » dont il ne donnait aucune définition, sauf à dire qu'il se déplaçait sur des aérodromes divers pour dispenser ses cours, lorsque par ailleurs il avait expliqué aux gendarmes que M. X... était inscrit en formation auprès de sa société Fly in Paris dont il était le gérant, avait produit l'attestation réglementaire de début de formation délivrée par cette dernière et avait affirmé avoir établi l'attestation de vol normalement dispensée par l'école de pilotage, ne pouvait pas plus s'interpréter en une reconnaissance implicite de ce que le vol litigieux était étranger au programme de formation dispensé par la société Fly in Paris et avait procédé d'un contrat passé entre M. X... et son instructeur ; qu'il s'en déduisait qu'à moins d'établir la commission intentionnelle par M. Y... d'une faute d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, seule la responsabilité de la société Fly in Paris pouvait être engagée à raison de l'accident survenu au cours du vol litigieux ; que les circonstances de l'accident, telles qu'elles résultaient de l'enquête de gendarmerie, de la description qu'en faisaient MM. Y... et X..., de l'audition du témoin A..., qui établissaient que M. Y..., à l'occasion d'un cours dispensé à M. A... sur l'aérodrome de Château-Thierry, dans le cadre duquel il était prévu de rejoindre et atterrir sur la piste d'atterrissage créée sur la propriété de celui-ci, avait proposé à M. X... de s'y associer par un vol en solo, dans des conditions de sécurité que M. X... jugeait totalement insuffisantes et sans lui remettre l'attestation de vol dont il devait être muni, ne caractérisaient pas une faute détachable de sa fonction sociale propre à engager sa responsabilité personnelle ; que le jugement devait donc être réformé en ce qu'il avait consacré la responsabilité propre de M. Y... et, par voie de conséquence, en ce qu'il avait ordonné une mesure d'expertise à ses frais avancés et l'avait condamné au versement d'indemnités à la victime et au RSI ;
1° ALORS QUE commet une faute détachable le gérant d'une société dont la faute intentionnelle, d'une particulière gravité, est incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; qu'en jugeant que M. Y... n'avait pas commis une telle faute détachable, sans aucunement rechercher si les faits qui lui étaient reprochés ne pouvaient pas la caractériser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2° ALORS QUE commet une faute détachable de ses fonctions le gérant d'une entreprise de formation en aviation légère qui expose sciemment un élève pilote à un danger d'accident qui s'est effectivement réalisé ; qu'en omettant de rechercher si, ainsi que M. X... l'avait fait valoir, M. Y... n'avait pas commis une accumulation de fautes ayant eu pour effet d'exposer sciemment son élève à un risque d'accident d'ULM, ce qui caractérisait la faute détachable du gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir réformé le jugement entrepris, en ce qu'il avait condamné une entreprise de formation en pilotage d'ULM (la société Fly in Paris), à indemnisation forfaitaire, à raison de l'accident subi par un élève pilote (M. X...) ;
AUX MOTIFS QUE le jugement entrepris consacrait l'entière responsabilité de M. Y... et la garantie totale de l'assureur ; que, sur les responsabilités, estimant que les circonstances de l'accident démontraient un manquement de M. Y... dans l'exécution de son obligation de sécurité dans l'organisation du vol et considérant que l'intéressé ne justifiait pas que ce vol s'inscrivait dans le contrat de formation liant M. X... à la société Fly in Paris dont M. Y... était le gérant, le tribunal avait consacré la responsabilité exclusive de l'intéressé ; que la cour d'appel constatait que, si dans les motifs de leurs conclusions, M. X... et le RSI invoquaient subsidiairement la responsabilité contractuelle de la société Fly in Paris du fait de son instructeur, aucune demande n'était formée en ce sens au dispositif de leurs conclusions qui tendaient exclusivement à la responsabilité contractuelle de M. Y..., de sorte que la cour n'avait pas à l'examiner, en vertu des dispositions de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile ; qu'à défaut de mise en cause de la société Fly in Paris dans l'accident, le jugement devait être réformé en ce qu'il l'avait condamnée au paiement d'une indemnité au profit de l'organisme social ;
1° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes d'un jugement ; qu'en énonçant que le tribunal avait consacré la responsabilité exclusive de M. Y..., quand il avait également retenu celle de la société Fly in Paris, la cour d'appel a dénaturé les termes du jugement de première instance, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2° ALORS QUE la mise à la charge d'une partie de l'indemnité forfaitaire destinée à compenser les frais exposés par un organisme social, afin d'obtenir le remboursement des prestations qu'il a versées suppose la responsabilité de cette partie ; qu'en énonçant que le jugement de première instance avait consacré la responsabilité exclusive de M. Y..., tout en relevant que la société Fly in Paris avait été condamnée in solidum avec lui à régler le montant de l'indemnité forfaitaire, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales qui se déduisaient de ses propres constatations au regard des articles 1147 du code civil et L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
3° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent soulever d'office un moyen, sans inviter les parties à s'en expliquer au préalable ; qu'en ayant rejeté la demande de l'exposant tendant à voir la responsabilité contractuelle de la société Fly in Paris retenue, en se fondant sur les dispositions de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile qui n'avait été invoqué par aucune des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble le principe du contradictoire et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
4° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en ayant énoncé qu'elle n'avait été saisie d'aucune demande de M. X... contre la société Fly in Paris, quand l'exposant avait, dans le dispositif de ses conclusions, demandé la confirmation du jugement qui avait condamné cette société, a dénaturé les conclusions de l'exposant, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
5° ALORS QUE la partie qui demande la confirmation d'un jugement, dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, est réputée s'en être approprié les motifs ; qu'en ayant jugé que M. X... n'avait pas présenté, dans le dispositif de ses dernières conclusions, de demande concernant la société Fly in Paris, quand l'exposant avait demandé confirmation du jugement qui avait condamné cette société, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile.