LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que César X... et Giovanna B..., son épouse, sont respectivement décédés le [...]      et le [...], laissant pour leur succéder leurs trois enfants, Maria Z..., Joséphine et Daniel ; que des difficultés se sont élevées pour la liquidation et le partage de leurs successions ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
Attendu que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ;
Attendu que, pour déclarer Mme Joséphine X... irrecevable à demander l'application à César X... et Giovanna B... du régime de la communauté légale et la révision en conséquence de l'état liquidatif, l'arrêt retient que cette demande se heurte à l'autorité de la chose jugée s'attachant à l'arrêt du 29 septembre 2009, qui a indiqué dans ses motifs que les défunts avaient adopté, en se mariant en Italie le [...], le régime de la séparation de biens, répondant ainsi à la question du régime applicable, explicitement dans la motivation, et implicitement dans le dispositif par la mention des modalités d'évaluation du rapport des donations conditionnées par le choix dudit régime ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'arrêt du 29 septembre 2009 ne pouvait avoir autorité de la chose jugée, dès lors que la cour d'appel ne s'était pas prononcée, dans le dispositif, sur l'incidence de l'entrée en vigueur de la loi italienne de 1975 modifiant le régime légal sur la détermination du régime matrimonial des défunts, même si, constatant l'absence de contestation sur ce point, elle avait indiqué, dans les motifs, dépourvus d'autorité de chose jugée, que ceux-ci s'étaient mariés sous le régime de la séparation de biens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le dispositif de l'arrêt rendu le 29 septembre 2009 par la cour d'appel de Montpellier statue implicitement sur le régime matrimonial des époux X..., à savoir la séparation de biens et bénéficie de l'autorité de la chose jugée s'y attachant, déclare Mme Joséphine X... irrecevable à demander que soit appliqué le régime de la communauté légale et que l'état liquidatif soit revu en conséquence, dit que le montant du rapport à succession dû par chaque donataire s'élève à la somme de 61 872,50 euros dont la valeur de 1989 doit être actualisée en 2016 à la somme de 93 922,45 euros en vertu de l'application du coefficient d'érosion monétaire de 1,518 applicable à la période concernée et homologue l'état liquidatif établi par M. C... et M. D..., notaires, dont lecture a été donnée le 1er avril 2011, sauf sur le point du calcul du rapport à succession dû par M. X... et par Mme Maria Z... X... qui sera traité comme il a été jugé, l'arrêt rendu le 15 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne Mme Maria Z... X... et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour Mme Joséphine X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le dispositif de l'arrêt rendu le 29 septembre 2009 par la cour d'appel de Montpellier statue implicitement sur le régime matrimonial des époux X..., à savoir la séparation de biens, l'autorité de la chose jugée s'y attachant, et D'AVOIR déclaré Mme Joséphine X... épouse Y... irrecevable à demander que soit appliqué le régime de la communauté légale et que l'état liquidatif soit revu en conséquence,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Joséphine X... conteste le fait que les notaires liquidateurs ont considéré pour l'établissement de leur état liquidatif que M. César X... et Mme Giovanna B... avaient été mariés sous le régime de la séparation de biens ; que l'appelante soutient que, si ce régime était bien le régime légal à la date du mariage de ses parents en Italie, il convient néanmoins d'appliquer le nouveau régime légal de la communauté instauré par loi italienne du 19 mai 1975 qui a expressément prévu son application aux biens acquis par les époux postérieurement à l'écoulement d'un délai de deux ans après la date de son entrée en vigueur à moins que dans ce délai un des deux conjoints n'ait manifestée une volonté contraire ; qu'elle rejette également l'argument de l'autorité de la chose jugée qui serait attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 29 septembre 2009, dans la mesure où la référence au régime de séparation de biens ne figure que dans les motifs de la décision et non dans son dispositif ; que par un raisonnement pertinent que la cour adopte, le premier juge a écarté cette contestation en indiquant, après avoir rappelé que si l'autorité de la chose jugée ne s'attache qu'au dispositif de la décision et non à ses motifs, elle s'étend cependant à ce qui est implicitement compris dans le dispositif, dans son arrêt du 29 septembre 2009, la cour d'appel qui a clairement indiqué dans les motifs de sa décision que les époux X... avaient adopté en se mariant en Italie le [...] le régime de la séparation de biens, qu'elle a ainsi répondu à la question du régime applicable, explicitement dans sa motivation et implicitement dans son dispositif en retenant dans celui-ci des modalités d'évaluation du rapport des donations conditionnées par le choix dudit régime ; que par l'effet de l'autorité de la chose jugée, l'appelante est donc irrecevable à solliciter l'application du régime de communauté légale ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Mme Joséphine X... épouse Y... expose : - Que la loi italienne du 19 mai 1975 applicable à ses parents qui s'étaient mariés en Italie, les fait bénéficier du régime de communauté à compter d'un délai de deux ans, à moins qu'ils ne manifestent dans ce délai une volonté contraire par acte notarié ou devant l'officier d'état civil, ce que les époux X... n'ont pas fait, - Que le dispositif de l'arrêt du 29 septembre 2009, qui seul revêt l'autorité de la chose jugée, ne comporte aucune mention quant au régime matrimonial, -Que les décisions rendues par le TGI mentionnent dans les missions d'expertise la notion de « communauté » ; que M. Daniel X... et Mme Maria X... répondent que la cour d'appel déclarant irrecevables les pièces produites tardivement par Mme Joséphine X... épouse Y... s'est prononcée par des motifs décisoires sur le régime matrimonial, l'autorité de la chose jugée venant donc s'opposer à la demande de Mme Maria X... ; que suivant l'article 480 du code de procédure civile, « le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche » ; que l'autorité de la chose jugée ne s'attache qu'au dispositif de la décision et non à ses motifs. Elle s'étend cependant à ce qui est implicitement compris dans le dispositif ; que la cour d'appel s'est expressément prononcée sur le régime matrimonial des époux X... en indiquant, dans les motifs de sa décision, après avoir écarté les pièces produites tardivement par Mme Joséphine X... épouse Y... : « Il doit être considéré, au vu des documents concordants admis aux débats, que M. César X... et Mme Giovanna B... Veuve X... ont adopté en se mariant en mairie de [...] (Italie), le [...], le régime de la séparation de biens » ; que le rejet des pièces tardives, comme l'appréciation du régime matrimonial applicable aux époux X... ne sont pas reportés dans le dispositif ; qu'or, le régime matrimonial applicable constitue la réponse à une demande de Mme Joséphine X... épouse Y..., sur laquelle la cour a développé des motifs, est implicitement contenu dans le dispositif puisque les modalités d'évaluation du rapport des donations sont conditionnées par le régime matrimonial du donateur ; que le dispositif de l'arrêt contient donc implicitement la qualification du régime matrimonial des époux X..., à savoir un régime de séparation de biens ; que par conséquent, Mme Joséphine X... épouse Y... est irrecevable à demander que soit appliqué le régime de communauté légale et que l'état liquidatif soit revu en conséquence ;
ALORS QUE 1°), l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande de Mme Y... tendant à ce que soit appliqué au régime matrimonial des époux X... le nouveau régime légal de la communauté instauré par la loi italienne du 19 mai 1975, à compter de la date d'entrée en vigueur de ce texte, que « dans son arrêt du 29 septembre 2009, la cour d'appel (
) a clairement indiqué dans les motifs de sa décision que les époux X... avaient adopté en se mariant en Italie le [...] le régime de la séparation de biens » et que « par l'effet de l'autorité de la chose jugée, l'appelante est donc irrecevable à solliciter l'application du régime de communauté légale » (arrêt attaqué, p. 8), cependant que par ces motifs, la cour d'appel, dans son arrêt du 29 septembre 2009, n'a aucunement statué sur la question de la détermination du régime matrimonial des époux X... postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi de 1975 invoquée par Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355, du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°), les modalités d'évaluation de l'indemnité de rapport ne dépendent aucunement du régime matrimonial du donateur ; qu'en jugeant au contraire, pour déclarer irrecevable la demande de Mme Y... relative à la détermination du régime matrimonial des époux X..., que l'arrêt du 29 septembre 2009 avait répondu à la question du régime matrimonial applicable en fixant les « modalités d'évaluation du rapport des donations conditionnées par le choix dudit régime » (arrêt, p. 8), la cour d'appel a violé les articles 850, 860, et 1351, devenu 1355, du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 3°), en déclarant irrecevable la demande de Mme Y... tendant à ce que soit appliqué, au régime matrimonial des époux X..., le nouveau régime légal de la communauté instauré par la loi italienne du 19 mai 1975, à compter de l'entrée en vigueur de ce texte, aux motifs que l'arrêt du 29 septembre 2009 avait implicitement répondu dans son dispositif à la question du régime matrimonial des époux X... (arrêt attaqué, p. 8), cependant que la cour d'appel, dans son arrêt du 29 septembre 2009, n'a aucunement statué implicitement dans son dispositif sur la question de la détermination du régime matrimonial des époux X..., la cour d'appel a dénaturé l'arrêt du 29 septembre 2009 et violé l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que l'état liquidatif établi par Me C... et par Me D... est conforme à la décision de la cour d'appel de Montpellier en date du 29 septembre 2009, sauf en ce qui concerne le calcul du rapport à succession dû par M. Daniel X... et par Mme Maria Z... X... au titre du fonds de commerce (et de la licence) de station-essence exploité dans l'immeuble situé à [...] , D'AVOIR dit que le montant du rapport à succession dû par chaque donataire s'élève à la somme de 61 872,50 € dont la valeur de 1989 doit être actualisée en 2016 à la somme de 93 922,45 € en vertu de l'application du coefficient d'érosion monétaire de 1,518 applicable à la période concernée et D'AVOIR homologué l'état liquidatif établi par Me C... et par Me D... dont lecture a été donnée le 1er avril 2011, sauf sur le point du calcul du rapport à succession dû par M. Daniel X... et par Mme Maria Z... X... qui sera traité comme il a été jugé ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Joséphine X... conteste la démarche des notaires qui avant de procéder à la réévaluation, ont retenu au titre du montant des rentes viagères versées à Mme Giovanna B... jusqu'à la date de son décès, une somme de 68 876,48 euros alors que les débit-rentiers n'ont pas été capables, par la production de deux attestations établies par le Crédit Agricole les 17 février 1997 et 23 septembre 1999, de justifier du règlement effectif de la totalité des arrérages invoqués, les archives relatives aux années antérieures à l'année 1990 n'ayant pas été conservées par l'établissement bancaire ; que sur ce point, il convient, à l'instar du premier juge, de considérer que les notaires ont, au vu des justificatifs produits conformément aux préconisations de la cour d'appel, pu utilement déterminer le montant des sommes réglées par Maria Z... et M. Daniel X..., étant remarqué que l'appelante se borne à constater l'absence des documents bancaires les plus anciens mais ne soutient ni a fortiori n'établit, que les rentes correspondantes n'auraient pas été versées ; que le jugement déféré sera également confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les rentes payées par M. Daniel X... et Mme Maria X... ont bien été déduites par les notaires rédacteurs de l'état liquidatif, sur présentation des justificatifs ;
ALORS QUE 1°), le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; que l'état liquidatif établi par les notaires (annexé au procès-verbal de lecture de l'état liquidatif et de difficultés du 1er avril 2011, production) mentionnait (p. 7) que « le paiement des rentes a été justifié pour la période courant de janvier 1990 à [...] (date du décès de Mme Giovanna B... par la production de la copie de deux attestations établies par le Crédit Agricole en date des 17 février 1997 et 23 septembre 1999 (les années antérieures à 1990 n'ayant pu être justifiées, la banque n'ayant pas conservé ses archives) » ; qu'en affirmant que les notaires avaient déterminé le montant des rentes effectivement versées par M. Daniel X... et Mme Maria X... depuis 1984 jusqu'au décès de leurs parents, au regard des justificatifs produits, cependant qu'il ressort de l'état liquidatif précité que les donataires n'ont pas justifié du versement des rentes pour la période antérieure à l'année 1990, la cour d'appel a dénaturé ledit état liquidatif et violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;
ALORS QUE 2°), celui qui se prétend libéré d'une obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en affirmant, pour juger qu'une somme de 68 876,48 € correspondant aux rentes viagères dues par Daniel et Maria X... depuis 1984 jusqu'au décès de leurs parents devait être déduite de l'indemnité de rapport due par ces derniers, que Mme Y... n'établissait pas que les rentes litigieuses n'avaient pas été versées par son frère et sa soeur depuis 1984 jusqu'au décès de ses parents, cependant qu'il appartenait à Daniel et Maria X... de rapporter la preuve du versement effectif des rentes litigieuses et non à Mme Y... de démontrer que lesdites rentes n'avaient pas été versées par ceux-ci, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;
ALORS QUE 3°), en retenant que Mme Y... ne soutenait pas que les rentes antérieures à l'année 1990 n'auraient pas été versées, quand il ressort des termes clairs et précis de ses écritures d'appel qu'elle faisait au contraire valoir que le versement des rentes viagères pour la période antérieure à l'année 1990 n'était pas établi (conclusions de Mme Y..., p. 15-16), la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de Mme Y... et violé l'article 4 du code de procédure civile.