LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Entreprise Paget Johanny, L'Auxiliaire , ERM construction (ERM), les souscripteurs du Lloyd's ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 28 mars 2017), que M. X... a fait construire deux chalets, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Urbach, aujourd'hui représentée par un administrateur judiciaire, assurée par la société Axa France Iard (Axa), à laquelle a succédé la société ERM, assurée par les souscripteurs des Lloyd's de Londres, puis par la société L'Auxiliaire ; que le lot maçonnerie a été confié à la société Abbé Joseph et le lot terrassement VRD à la société Mabboux Roger et Fils (Mabboux), assurée par la SMABTP, qui avait chargé la SCP Guerpillon Souvignet, géomètre, de l'implantation des bâtiments ; qu'en cours de travaux, la société ERM, a constaté un dépassement des cotes altimétriques figurant au permis de construire initial ; qu'après expertise, M. X... a assigné en indemnisation les constructeurs et leurs assureurs ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes contre les sociétés Mabboux, Guerpillon-Souvignet, SMABTP et Axa ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Mabboux avait été destinataire des seuls plans d'exécution de l'architecte et que son marché stipulait que les niveaux des plans seraient confirmés par l'architecte avant le début des travaux et que la SCP Guerpillon-Souvignet avait reçu la même indication de respecter les niveaux indiqués par l'architecte, qu'elle avait calculé l'implantation des bâtiments à partir des plans de masse du sous-sol et du rez-de-chaussée fournis par celui-ci et qu'elle n'avait pas disposé d'autres plans que ceux de l'entreprise dont elle était le sous-traitant, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire que la responsabilité de la société Mabboux et de la SCP Guerpillon-Souvignet ne pouvait pas être retenue et a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que, la cassation n'étant pas prononcée sur le premier moyen, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué,
D'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré la société Mabboux Roger et la scp Guerpillon-Souvignet responsables de l'erreur d'altimétrie ayant affecté le chalet construit sur la commune de Megève, lieudit « [...]», D'AVOIR en conséquence débouté M. X... de ses demandes à l'encontre des sociétés Mabboux Roger et Guerpillon-Souvignet et à l'encontre de la Smabtp, et D'AVOIR confirmé par substitution de motifs les dispositions du jugement qui ont débouté M. X... de ses demandes contre la compagnie Axa France, la société Mabboux Roger, et la Smabtp et contre la scp Guerpillon-Souvignet ;
AUX MOTIFS QUE l'expert a constaté un écart de près de deux mètres entre l'altitude portée aux plans du permis de construire et celle portée aux plans d'exécution ; que la mission de la société Urbach comprenait « plan DCE (plans d'exécution) à 2 cm par mètre », et encore « plans de détails d'exécution à grande échelle ainsi que les plans d'aménagement décoratif et perspectives correspondantes » ; que selon le décret du novembre 1993 sur la maîtrise d'oeuvre publique, la mission EXE comprend le contrôle des plans d'exécution établis par les entrepreneurs, que le marché de travaux de la société Mabboux Roger et fils fait application de cette règle en son article 7, mais mentionne toutefois en son article 2 que « les niveaux des plans seront confirmés par l'architecte avant le début des travaux » (voir ci-dessous) ; que M. D..., l'un des associés de la société Urbach a fait parvenir le 10 juin 2009 à M. X... les plans d'exécution en précisant qu'il s'agit des copies plans remis aux entrepreneurs, formule qui fait présumer que ceux-ci n'ont pas été destinataires des plans du permis de construire (annexe de la pièce n° 13 de M. X...) ; que selon l'expert, le défaut de conformité ne résulte pas d'une simple erreur d'implantation puisque les plans d'exécution et les travaux réalisés dès le début comprenaient d'autres modifications qui ont été reprises ultérieurement dans le permis de construire modificatif, à savoir :
- hauteur libre sous le balcon de la façade ouest portée de 1,80 m à 2,50 m,
- agrandissement du parking souterrain d'une travée
- suppression du tunnel d'accès au garage ;
que la responsabilité du défaut de conformité incombe donc au premier chef à la société Urbach qui avait une responsabilité exclusive concernant la partie architecturale des plans d'exécution ;
Demande contre la société Mabboux Roger etamp; fils (pièce 5 de M. X...) : que selon l'article 2 du marché de cette société, les documents contractuels sont les plans d'exécution de l'architecte, outre différentes pièces selon une liste qui ne comporte pas les plans du permis de construire, avec la mention en caractères gras « les niveaux des plans seront confirmés par l'architecte avant le début des travaux » ;
Sur la responsabilité de la société Guerpillon-Souvignet : que la seule pièce produite est le plan d'implantation (pièce n° 1) avec la mention sous le titre nota « l'implantation a été calculée à partir des plans de masse, de sous-sol, et du rez-de-chaussée fourni par mail le 4 septembre 2008 par l'agence d'architecture Urbach - 74 - Megève » ; que M. X... se prévaut de la facture du 1er octobre 2008 qui fait apparaître la mention suivante, « dépouillement des plans d'architecte et calcul des éléments d'implantation » ; que cependant cette facture est adressée à la société Mabboux Roger et fils dont le géomètre était le sous-traitant, de sorte qu'il faut retenir que celui-ci n'a pas disposé d'autres plans que son donneur d'ordre ; qu'enfin les entrepreneurs et autres intervenants aux opérations de construction ne sont pas tenus de contrôler les plans d'exécution de l'architecte ; que ces explications doivent conduire à confirmer, mais par substitution de motifs, les dispositions du jugement qui ont débouté M. X... de ses demandes contre la société Mabboux Roger etamp; fils et la Smabtp, la société Guerpillon-Souvignet ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE en ce qui concerne le cabinet URBACH, il est constant que ce dernier a commis une erreur lors de l'établissement des plans d'exécution du chalet de Monsieur Marc X..., par rapport aux plans ayant permis l'obtention du permis de construire, puisqu'il existe un écart de 2 mètres pour l'altitude du faîtage du chalet A, entre les plans du permis de construire et les plans d'exécution. Il n'a pas non plus surveillé le chantier ; que ces erreurs mettent enjeu la responsabilité contractuelle ;
1°) ALORS QUE l'entrepreneur de construction est tenu à l'obligation de résultat de livrer un ouvrage conforme aux stipulations contractuelles et exempt de vices ; qu'en l'espèce, aux termes de l'article 6 du marché de travaux conclu avec la société Mabboux Roger, chargée du lot « terrassements - VRD », celle-ci « [devait] l'implantation de ses ouvrages » ; que dès lors en exonérant la société Mabboux Roger de toute responsabilité cependant qu'elle constatait un écart substantiel entre la hauteur du bâtiment prescrite par le permis de construire et la hauteur du bâtiment réalisé, le bâtiment principal dépassant de 1,78 mètres la hauteur autorisée par le permis de construire, sans rechercher si la société Mabboux Roger n'avait pas manqué à son obligation de résultat de livrer un ouvrage correctement implanté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable avant l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°) ALORS en toute hypothèse QUE l'entrepreneur de construction est tenu, au titre de son obligation de conseil, de s'assurer que les travaux qu'il exécute sont conformes à la construction autorisée par le permis de construire ; qu'en l'espèce, pour estimer que la société Mabboux Roger ne pouvait être tenue responsable de l'erreur d'altimétrie affectant le chalet litigieux, la cour d'appel a déclaré, d'une part, qu'elle ne disposait que des plans d'exécution de l'architecte, qu'elle n'était pas tenue de contrôler, à l'exclusion des plans du permis de construire non respectés par les plans d'exécution qui mentionnaient une altitude dépassant de près de deux mètres l'altitude prescrite par le permis de construire, et d'autre part, que le marché de travaux de la société Mabboux Roger mentionnait que les niveaux des plans seraient confirmés par l'architecte avant le début des travaux ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'obligation de conseil incombant à la société Mabboux Roger lui imposait même en présence d'un maître d'oeuvre chargé des plans d'exécution et de la confirmation des niveaux des plans, de s'enquérir de la concordance des travaux de terrassement/VRD lui incombant avec les plans du permis de construire, et ce, a fortiori dans la mesure où, précisément, elle n'était pas en possession de ces plans et que le marché de travaux prévoyait expressément qu'elle « (devait) l'implantation de ses ouvrages », la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable avant l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3°) ALORS par ailleurs QUE M. X... rappelait que suivant les factures de la scp Guerpillon-Souvignet, géomètre-expert, celle-ci avait notamment pour mission le « dépouillement des plans d'architecte et calcul des éléments d'implantation » et l'« établissement d'un plan d'implantation à l'échelle du 1/250ème à l'échelle du 1/250ème avec cotes d'implantation et de bâtiment, altitude des points implantés » ; que sans le contester, la cour d'appel a, pour exonérer la scp Guerpillon-Souvignet de toute responsabilité dans l'erreur d'implantation altimétrique constatée, déclaré que la facture dont se prévalait M. X... était adressée à la société Mabboux Roger etamp; fils dont le géomètre était le sous-traitant, ce dont il se déduisait que celui-ci n'avait pas eu d'autres plans que son donneur d'ordre qui n'avait eu que les plans d'exécution, et que les entrepreneurs et autres intervenants aux opérations de construction n'étaient pas tenus de contrôler les plans d'exécution de l'architecte ; qu'en statuant ainsi cependant que la mission incombant au géomètre-expert lui imposait précisément de s'assurer du respect l'implantation de l'immeuble telle que conçue dans les plans du permis de construire, fut-il dans l'obligation de demander qu'on les lui communique, sans se limiter à la comparaison des travaux réalisés par rapport aux plans d'exécution dont la société Mabboux Roger aurait exclusivement disposé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable avant l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué,
D'AVOIR, ayant infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré la société Mabboux Roger et la scp Guerpillon-Souvignet responsables de l'erreur d'altimétrie ayant affecté le chalet construit sur la commune de Megève, lieudit « [...]», et ayant en conséquence débouté M. X... de ses demandes à l'encontre des sociétés Mabboux Roger et Guerpillon-Souvignet et à l'encontre de la Smabtp, et confirmé par substitution de motifs les dispositions du jugement qui ont débouté M. X... de ses demandes contre la compagnie Axa France, la société Mabboux Roger, et la Smabtp et contre la scp Guerpillon-Souvignet, débouté M. X... du surplus de ses demandes, et donc notamment de sa demande subsidiaire tendant à voir condamner la société Abbe Joseph à restituer à M. X... la somme de 126 273,20 euros, outre intérêts de droit, dans l'hypothèse où la cour d'appel estimerait devoir limiter à 70 000 euros le coût de la déconstruction et reconstruction des ouvrages en maçonnerie par la société Abbe Joseph ;
AUX MOTIFS QUE l'expert a constaté un écart de près de deux mètres entre l'altitude portée aux plans du permis de construire et celle portée aux plans d'exécution ; que la mission de la société Urbach comprenait « plan DCE (plans d'exécution) à 2 cm par mètre », et encore « plans de détails d'exécution à grande échelle ainsi que les plans d'aménagement décoratif et perspectives correspondantes » ; que selon le décret du novembre 1993 sur la maîtrise d'oeuvre publique, la mission EXE comprend le contrôle des plans d'exécution établis par les entrepreneurs, que le marché de travaux de la société Mabboux Roger et fils fait application de cette règle en son article 7, mais mentionne toutefois en son article 2 que « les niveaux des plans seront confirmés par l'architecte avant le début des travaux » (voir ci-dessous) ; que M. D..., l'un des associés de la société Urbach a fait parvenir le 10 juin 2009 à M. X... les plans d'exécution en précisant qu'il s'agit des copies plans remis aux entrepreneurs, formule qui fait présumer que ceux-ci n'ont pas été destinataires des plans du permis de construire (annexe de la pièce n° 13 de M. X...) ; que selon l'expert, le défaut de conformité ne résulte pas d'une simple erreur d'implantation puisque les plans d'exécution et les travaux réalisés dès le début comprenaient d'autres modifications qui ont été reprises ultérieurement dans le permis de construire modificatif, à savoir :
- hauteur libre sous le balcon de la façade ouest portée de 1,80 m à 2,50 m,
- agrandissement du parking souterrain d'une travée
- suppression du tunnel d'accès au garage ;
que la responsabilité du défaut de conformité incombe donc au premier chef à la société Urbach qui avait une responsabilité exclusive concernant la partie architecturale des plans d'exécution ;
Demande contre la société Mabboux Roger etamp; fils (pièce 5 de M. X...) : que selon l'article 2 du marché de cette société, les documents contractuels sont les plans d'exécution de l'architecte, outre différentes pièces selon une liste qui ne comporte pas les plans du permis de construire, avec la mention en caractères gras « les niveaux des plans seront confirmés par l'architecte avant le début des travaux » ;
Sur la responsabilité de la société Guerpillon-Souvignet : que la seule pièce produite est le plan d'implantation (pièce n° 1) avec la mention sous le titre nota « l'implantation a été calculée à partir des plans de masse, de sous sol, et du rez-de-chaussée fourni par mail le 4 septembre 2008 par l'agence d'architecture Urbach - 74 - Megève» ; que M. X... se prévaut de la facture du 1er octobre 2008 qui fait apparaître la mention suivante, « dépouillement des plans d'architecte et calcul des éléments d'implantation » ; que cependant cette facture est adressée à la société Mabboux Roger et fils dont le géomètre était le sous-traitant, de sorte qu'il faut retenir que celui-ci n'a pas disposé d'autres plans que son donneur d'ordre ; qu'enfin les entrepreneurs et autres intervenants aux opérations de construction ne sont pas tenus de contrôler les plans d'exécution de l'architecte ; que ces explications doivent conduire à confirmer, mais par substitution de motifs, les dispositions du jugement qui ont débouté M. X... de ses demandes contre la société Mabboux Roger etamp; fils et la Smabtp, la société Guerpillon-Souvignet ;
[
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que sur la demande subsidiaire de M. X..., celle-ci ne serait susceptible d'aboutir que contre la société Urbach, puisque celle-ci est la seule responsable des préjudices causés par l'erreur d'implantation, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'examiner ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE en ce qui concerne le cabinet URBACH, il est constant que ce dernier a commis une erreur lors de l'établissement des plans d'exécution du chalet de Monsieur Marc X..., par rapport aux plans ayant permis l'obtention du permis de construire, puisqu'il existe un écart de 2 mètres pour l'altitude du faîtage du chalet A, entre les plans du permis de construire et les plans d'exécution. Il n'a pas non plus surveillé le chantier ; que ces erreurs mettent enjeu la responsabilité contractuelle ;
ALORS QUE M. X... demandait à voir condamner la société Abbe Joseph à lui restituer la somme de 126 273,20 euros outre intérêts de droit, dans l'hypothèse où la cour d'appel limiterait à 70 000 euros le coût de la déconstruction et reconstruction des ouvrages en maçonnerie réalisés par cette société ; que pour débouter M. X... de cette demande, la cour d'appel a relevé qu'elle ne pourrait aboutir que contre la société Urbach, seule responsable des préjudices causés par l'erreur d'implantation, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de l'examiner ; qu'il résulte cependant des critiques du premier moyen que c'est à tort que la cour d'appel a retenu la seule responsabilité de la société Urbach dans les dommages et dans le préjudice invoqués par M. X..., à l'exclusion de la responsabilité de la société Mabboux Roger et de la scp Guerpillon-Souvignet ; que dès lors, la cassation à intervenir du chef du premier moyen devra, par voie de conséquence, et par application de l'article 625 du code de procédure civile, entraîner la cassation de l'arrêt en ce qu'il a estimé qu'il n'y avait pas lieu d'examiner la demande subsidiaire de M. X... formulée à l'encontre de la société Abbe Joseph pour le cas où la cour d'appel limiterait la condamnation des constructeurs responsables à des dommages et intérêts inférieurs au coût de démolition reconstruction facturé par cette société.