LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 3 mai 2017), que la société Le Flohic investissement (la société Le Flohic) a acheté, le 16 mai 2011, au prix de 39 000 euros, un navire que son gérant, M. X..., a fait assurer le 21 juin 2011 auprès de la société Allianz IARD (l'assureur), au titre d'une garantie tous risques, avec une valeur déclarée de 115 000 euros, sur la base de l'évaluation faite par un expert maritime ; que ce navire a sombré dans le port d'Ajaccio dans la nuit du 23 au 24 juin 2011 ; que le sinistre a été déclaré, par l'intermédiaire de la société April marine, à l'assureur qui a notifié à M. X... la résiliation du contrat d'assurance à effet au 1er mars 2012 mais n'a pas procédé à l'indemnisation demandée ; que la société Le Flohic et M. X... ont assigné l'assureur et la société April marine en paiement de diverses sommes ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'indemnisation formée par M. X... et la société Le Flohic contre l'assureur et la société April marine, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient à l'assureur, qui invoque l'existence d'une fraude à l'assurance, de la prouver, la bonne foi étant toujours présumée ; qu'en l'espèce, sous couvert d'exiger de l'assuré d'établir que le sinistre était bien garanti par la police souscrite auprès de son assureur, la cour d'appel a, en réalité, exigé de celui-ci de prouver qu'il n'avait pas volontairement endommagé son bien afin de frauder à l'assurance ; qu'en faisant ainsi, concrètement, peser sur l'assuré la charge de prouver l'absence de fraude de sa part, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 ancien, 1353 nouveau, du code civil, ensemble son article 2268 ancien, 2274 nouveau ;
2°/ que, dans son courrier du 11 juillet 2011, régulièrement produit aux débats, la société April marine indiquait de manière claire et précise que l'expert, dans son rapport préliminaire, avait considéré qu'un acte de malveillance pouvait être retenu ; qu'en retenant qu'il n'était pas établi que le rapport d'expertise avait conclu à un acte de malveillance, après avoir pourtant relevé que ce courrier faisait référence au rapport d'expertise concluant à un acte de malveillance, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 113-1 du code des assurances ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le contrat prévoit que la garantie « dommage, perte totale » dont la mise en oeuvre est sollicitée s'applique en cas d' « accident, notamment par suite de naufrage, échouement, abordage, heurt ou collision contre un corps fixe, mobile ou flottant...» et définit l'accident comme « tout événement soudain, imprévu et extérieur à la victime ou la chose endommagée, constituant la cause d'un dommage corporel ou d'un dommage matériel » ; que la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée au regard de la bonne ou de la mauvaise foi de l'assuré a, sans inverser la charge de la preuve, exactement retenu qu'il appartient à celui-ci de justifier que le sinistre relève bien de l'application de ces clauses et souverainement estimé, d'une part, que la cause du naufrage, résidant dans le débranchement de la durite d'aspiration d'eau de mer servant au refroidissement du moteur tribord selon l'avis d'un expert maritime, non contesté par M. X... et la société Le Flohic, ne caractérisait pas un événement extérieur à la victime ou à la chose endommagée au sens de la définition contractuelle de l'accident et, d'autre part, que la preuve d'un acte de vandalisme, hypothèse peu probable au regard de l'acte isolé et relativement délicat à accomplir se trouvant à l'origine du sinistre, n'était pas rapportée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et la société Le Flohic investissement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société April marine la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Allianz IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Le Flohic investissement
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande d'indemnisation formée par M. Frédéric X... et la société LE FLOHIC INVESTISSEMENT contre la compagnie d'assurance ALLIANZ IARD et contre la société APRIL MARINE ;
Aux motifs que : « l'assuré réclame la mise en jeu de la garantie « dommages, perte totale ». Le contrat précise que « l'assureur garantit le bateau assuré ainsi que les biens et effets personnels pour tous dommages matériels et la perte totale résultant :
d'un accident notamment par suite de naufrage, échouement, abordage, heurt ou collision contre un corps fixe, mobile ou flottant
»
la définition contractuelle de l'accident est la suivante :
« tout événement soudain, imprévu et extérieur à la victime ou la chose endommagée, constituant la cause d'un dommage corporel ou d'un dommage matériel. »
Il appartient à l'assuré, demandeur à l'action, de justifier qu'il relève bien de l'application de ces clauses.
M. Z..., expert maritime, entendu par M. A..., agent privé de recherches mandaté par la compagnie Allianz, a constaté que la durite d'aspiration d'eau de mer servant au refroidissement du moteur tribord est débranchée, et ce que cela constitue la cause du naufrage. Cet avis n'est pas contesté par les appelants.
Il ne s'agit pas d'un événement extérieur à la victime ou à la chose endommagée au sens de la définition contractuelle de l'accident.
M. X... suggère qu'il pouvait s'agir d'un acte de vandalisme – ce que n'a pourtant pas dit M. Z... à M. A... – mais outre qu'il ne le démontre pas, cette hypothèse est peu probable : comme le relève April Marine dans son courrier du 11 juillet 2011, un acte de vandalisme ne se concentre pas sur un acte isolé comme celui-là, relativement délicat à accomplir. De plus, ce n'est que le 1er juillet 2013 que M. X... a estimé utile de déposer une plainte pour la dégradation de son bateau.
Enfin et surtout, force est de constater que l'avis de l'expert, selon lequel un acte de malveillance pourrait être retenu, avis auquel April Marine fait référence dans son courrier du 11 juillet 2011, n'est pas versé aux débats ; M. X... est mal fondé à en faire le reproche à l'assureur et au courtier, puisque, dès le 28 juin 2011, le courtier avait communiqué les coordonnées du cabinet BEXMA à M. X..., et ce que ce dernier ne justifie pas avoir vainement sollicité celui-ci.
C'est donc à juste titre que l'assureur, estimant que l'événement n'entre pas dans les prévisions de la garantie, refuse l'indemnisation.
C'est à tort que les premiers juges ont fait droit à la demande de M. X... et l'EURL Le Flohic, retenant que le rapport d'expertise avait conclu à un acte de malveillance, ce qui n'est pas démontré » ;
1/ Alors que, d'une part, il appartient à l'assureur, qui invoque l'existence d'une fraude à l'assurance, de la prouver, la bonne foi étant toujours présumée ; qu'en l'espèce, sous couvert d'exiger de l'assuré d'établir que le sinistre était bien garanti par la police souscrite auprès de son assureur, la cour d'appel a, en réalité, exigé de celui-ci de prouver qu'il n'avait pas volontairement endommagé son bien afin de frauder à l'assurance ; qu'en faisant ainsi, concrètement, peser sur l'assuré la charge de prouver l'absence de fraude de sa part, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 ancien, 1353 nouveau, du Code civil, ensemble son article 2268 ancien, 2274 nouveau ;
2/ Alors que, d'autre part, dans son courrier du 11 juillet 2011, régulièrement produit aux débats, la société APRIL indiquait de manière claire et précise que l'expert, dans son rapport préliminaire, avait considéré qu'un acte de malveillance pouvait être retenu ; qu'en retenant qu'il n'était pas établi que le rapport d'expertise avait conclu à un acte de malveillance, après avoir pourtant relevé que ce courrier faisait référence au rapport d'expertise concluant à un acte de malveillance, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 113-1 du code des assurances.