LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 386 du code de procédure civile ;
Attendu que l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 23 juin 2016), qu'après résiliation du bail à métayage que lui avait consenti le groupement foncier rural Vignoble du domaine du Grand Chaumont (le GFR), M. X... a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en fixation d'indemnité ; qu'un arrêt du 31 juillet 2007 a ordonné une expertise en vue d'évaluer les travaux et améliorations ; qu'une ordonnance du 24 avril 2009 a remplacé l'expert ; que, le rapport de celui-ci ayant été déposé le 12 avril 2012, l'affaire a été radiée le 27 novembre 2012 ; que, par assignation du 24 janvier 2014, M. X... a repris l'instance devant la cour d'appel ;
Attendu que, pour rejeter l'incident de péremption d'instance, l'arrêt retient que les relances épistolaires de M. X..., sinon de son conseil, à l'adresse de l'expert judiciaire, à compter du 30 septembre 2009, avec l'envoi d'un rappel, le 8 février 2012, à l'attention d'un conseiller de la mise en état, à l'origine d'une ordonnance constatant l'interruption momentanée de l'instance, stigmatisent la continuité de ses diligences ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que de telles lettres étaient constitutives de diligences de nature à faire progresser l'instance et étaient intervenues à l'intérieur du délai de péremption, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour le groupement Le Vignoble du domaine du Grand Chaumont
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu de retenir la péremption de l'instance, et débouté le Groupement Foncier Rural Vignoble du domaine du grand Chaumont de cette demande ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur la péremption :
Indépendamment de la motivation de l'arrêt avant dire droit de la cour du 28 janvier 2016, se référant à la conjugaison de la radiation de l'affaire du rôle de la cour par ordonnance du 27 novembre 2012 au titre de l'article 781 du code de procédure civile, de l'assignation en reprise d'instance délivrée le 24 janvier 2014 à la requête de l'intimé, et de la fixation par le greffe à l'audience du 13 janvier 2015, objet d'un renvoi à celle du 8 septembre 2015, précisant aux conseils des parties que les conclusions récapitulatives devaient être déposées au plus tard au greffe de la cour et transmises à l'adversaire un mois avant la date de l'audience sous peine d'encourir la sanction de leur rejet, le tracé chronologique des diligences respectives des parties conduit à écarter l'hypothèse de la péremption vainement soutenue par le Groupement Foncier Rural (GFR) Vignoble du domaine du Grand Chaumont.
En effet la multiplication des relances épistolaires émanant de Monsieur Bruno X... sinon de son conseil à l'adresse, après sa saisine initiale de la juridiction, de l'expert judiciaire à compter du 30 septembre 2009 avec l'envoi d'un rappel le 8 février 2012 à l'attention d'un conseiller de la mise en état de la présente cour à l'origine d'une ordonnance constatant l'interruption momentanée de l'instance, stigmatise parfaitement, jusqu'au 28 avril 2014 date des nouvelles écritures de l'intimé, la continuité de ses diligences interruptives de la prétendue péremption, ès qualités de partie au litige au regard de la dualité objective et subjective de son approche procédurale.
Dans ces conditions, l'argumentation du Groupement Foncier Rural Vignoble du domaine du Grand Chaumont, est écartée dans la mesure où les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile, afférentes précisément à la péremption de l'instance ne sont pas satisfaites en la cause. » ;
1) ALORS QUE l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; qu'en retenant que les « relances épistolaires émanant de M. X... sinon de son conseil à l'adresse, après sa saisine initiale de la juridiction, de l'expert judiciaire à compter du 30 septembre 2009 avec l'envoi d'un rappel le 8 février 2012, à l'attention d'un conseiller de la mise en état de la présente cour à l'origine d'une ordonnance constatant l'interruption momentanée de l'instance, stigmatis[aient] parfaitement la continuité de ses diligences interruptives de la péremption » sans préciser quel était le point de départ du délai de péremption qu'elle retenait pour apprécier si ce délai avait ou non été interrompu par ces prétendues diligences, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 386 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE les diligences interruptives de péremption sont celles de nature à établir la volonté des parties de poursuivre l'instance ; qu'en retenant que la péremption de l'instance avait été interrompue par les « relances épistolaires émanant de M. X... sinon de son conseil à l'adresse, après sa saisine initiale de la juridiction, de l'expert judiciaire à compter du 30 septembre 2009 avec l'envoi d'un rappel le 8 février 2012, à l'attention d'un conseiller de la mise en état de la présente cour à l'origine d'une ordonnance constatant l'interruption momentanée de l'instance » sans caractériser en quoi ces « relances épistolaires » manifestaient la volonté de poursuivre l'instance ou de la faire progresser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 386 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Groupement Foncier Rural Vignoble du Domaine du grand Chaumont à payer à M. Bruno X... les sommes de 37.880,75 euros et de 4.721,41 € en réparation de ses préjudices, avec intérêts de droit à compter du 17 mai 2002 ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur les indemnités sollicitées :
* Avances aux cultures : le total proposé par Madame Geneviève Z... de ce chef, pour la période du 14 décembre 2001 au 17 décembre 2012 s'élève à 37.880,75 € en référence à son rapport d'expertise, lequel s'avère être le seul à servir utilement de fondement à l'appréciation de la somme susceptible de revenir à Monsieur Bruno X..., à l'exclusion des autres rapports énoncés par celui-ci, caractéristiques d'une variabilité aléatoire de ses prétentions.
De surcroît les critiques adressées par le Groupement Foncier Rural Vignoble du domaine du Grand Chaumont à l'endroit du rapport de Madame Geneviève Z... n'apparaissent pas pertinentes, y compris en ce qui concerne le courrier émanant dudit Groupement du 12 novembre 2009, constitutif d'un dire de 8 pages en complément de son dossier initial présenté comme complet et côté, justifiant ainsi le rejet de cette argumentation.
Indépendamment des dispositions de l'article 555 du code civil, non applicables en l'espèce puisque relevant de la seule faculté du Groupement appelant, il convient d'allouer à l'intimé la somme précitée de 37.880,75 €, représentant ses frais exposés, et ce avec intérêts de droit à compter du 17 mai 2002, en lieu et place, s'agissant de la période susmentionnée, de celle de 74.742,53 € soutenue à tort par Monsieur Bruno X... à défaut d'avoir communiqué des éléments complémentaires probants quant à l'ensemble des travaux allégués » ;
1) ALORS QUE la censure qui s'attache à un arrêt de cassation s'étend à tous les chefs de dispositif liés par un lien de dépendance nécessaire ; que si la cour d'appel a été amenée à statuer sur les demandes d'indemnité de M. X..., c'est en raison du rejet de l'incident de péremption d'instance de sorte que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif attaqué par le présent moyen, conformément aux dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE le juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en se bornant, pour condamner le GFR Vignoble Domaine du grand Chaumont au paiement de la somme de 37.880,75 € au profit de M. X..., à relever que les dispositions de l'article 555 du code civil n'étaient pas applicables en l'espèce, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 12 du code de procédure civile.