La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2018 | FRANCE | N°17-22000

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 septembre 2018, 17-22000


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premiers moyens du pourvoi principal et du pourvoi provoqué, pris en leurs deux premières branches, qui sont similaires, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2017), que M. X... circulait en scooter lorsqu'il est entré en collision avec un bus de la société Véolia, assuré auprès de la société Chartis Europe aux droits de laquelle vient la société AIG Europe Ltd (l'assureur), qui circulait en sens inverse ; que M. et Mme X..., agissant tant en leur nom per

sonnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants, Z... et A... ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premiers moyens du pourvoi principal et du pourvoi provoqué, pris en leurs deux premières branches, qui sont similaires, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2017), que M. X... circulait en scooter lorsqu'il est entré en collision avec un bus de la société Véolia, assuré auprès de la société Chartis Europe aux droits de laquelle vient la société AIG Europe Ltd (l'assureur), qui circulait en sens inverse ; que M. et Mme X..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants, Z... et A... X..., ont fait assigner l'assureur, en présence de la société Axa France IARD, en réparation de leurs préjudices ;

Attendu que M. et Mme X... et la société Axa France IARD font grief à l'arrêt de réduire par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 le droit à indemnisation de M. X... de moitié, de fixer le préjudice corporel global à la somme de 924 724,24 euros et de limiter la condamnation de l'assureur à une indemnisation de 225 033,30 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015 sur la somme de 73 465 euros et à compter de la date de l'arrêt sur la somme de 151 568,30 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que le conducteur victime d'un accident dont le point de choc avec le véhicule arrivant en sens inverse se situe à l'intérieur de son propre couloir de circulation ne commet aucune faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; que la cour d'appel qui a constaté que le car de la société Véolia avait débordé de la ligne médiane et que le véhicule de M. X... arrivant en sens inverse se trouvait à l'intérieur de son couloir de circulation, ne pouvait des lors pas retenir qu'il aurait commis une faute de nature a diminuer son droit à indemnisation pour n'avoir pas serré plus à droite, sans violer l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;

2°/ que pour décider de limiter ou d'exclure l'indemnisation du conducteur victime d'un accident de la circulation, le juge doit relever que la faute retenue à son encontre a eu un rôle causal ; que le fait relevé par la cour d'appel qu'une analyse médicale ait constaté un taux de tétrahydrocannabinol de 2,06 µg/l sur M. X... qui roulait dans son couloir de circulation au moment du choc, ne pouvait pas constituer une faute en relation de causalité avec l'accident ; qu'en décidant néanmoins que l'intoxication de M. X... au cannabis avait eu une influence sur ses réflexes et expliquait qu'il n'ait pas serré sa droite, ce qui n'était pas une faute puisqu'il était resté dans son couloir de circulation, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que compte tenu de la configuration des lieux, s'agissant d'une route de montagne, où on peut s'attendre à croiser des véhicules de grande dimension tels que le bus qu'il a croisé, sinueuse et sans visibilité importante à l'endroit où s'est produit l'accident, M. X... se devait en abordant le virage de serrer sur sa droite, ce que manifestement il n'a pas fait puisque le point de choc a été matérialisé à proximité de la ligne médiane, et retenu, d'autre part, que M. X... avait, selon les analyses pratiquées, pris du cannabis moins de trois heures avant l'accident, ce qui avait eu une influence sur son attention et ses réflexes et expliquait sa manoeuvre inadaptée ayant consisté à aborder ce virage sans précaution suffisante et sans serrer sur la droite, la cour d'appel a pu déduire l'existence d'une faute de M. X..., dont elle a souverainement décidé qu'elle devait réduire de 50 % son droit à indemnisation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième, quatrième et cinquième branches du premier moyen du pourvoi principal, sur la troisième branche du premier moyen du pourvoi provoqué et sur les seconds moyens du pourvoi principal et du pourvoi provoqué, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et provoqué ;

Condamne M. et Mme X..., tant en leur nom personnel qu'ès qualités, et la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X..., tant en leur nom personnel qu'ès qualités.

Premier moyen de cassation

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir réduit par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 le droit à indemnisation de M. X... de moitié, d'avoir fixé le préjudice corporel global à la somme de 924724,24 € et d'avoir limité la condamnation de la compagnie Aig Europe à une indemnisation de 225033,30 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015 sur la somme de 73465 € et à compter de la date de l'arrêt sur la somme de 151568,30 €;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 2005, la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet d'exclure ou de réduire l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; qu'en l'espèce, l'implication du véhicule assuré par la compagnie AIG Europe n'est pas discutée. Selon le procès-verbal de gendarmerie établi ensuite de l'accident, un car assurant la ligne 16 la Turbie-Nice, circulant en direction de la Trinité, alors qu'il sortait d'une courbe à gauche, est entré en collision avec le scooter piloté par M. X..., lequel circulait en sens inverse; que le pilote du scooter qui a évité le choc frontal a tapé le côté gauche du bus, a été déséquilibré et est tombé sur le côté droit de son engin; que selon M. D..., conducteur du bus, lorsqu'il a emprunté la courbe à gauche, il se trouvait le plus à droite sur sa voie et était presque collé à la paroi en raison d'un angle mort sur le bus l'obligeant à serrer à droite; qu'il déclare qu'il était quasiment sorti de la courbe lorsqu'il a vu arriver sur lui de la gauche, le scooter, qui selon lui aurait dû être en phase de virage, c'est à dire penché, traverser la chaussée et venir percuter violemment le bus à hauteur de l'essieu avant gauche; qu'il estime la vitesse du deux roues au moment de l'impact à 70-80 km/h, la sienne à 30 -40 km/h et précise qu'aucun des deux conducteurs n'a freiné; qu'il considère que l'accident est dû à une mauvaise visibilité du pilote qui avait le soleil en face et pense qu'il a mal apprécié la situation sur la chaussée; que selon le chrono tachygraphe du bus, le dernier enregistrement de sa vitesse fait état de 51 km/h au moment de l'accident; que de son côté, M. X... déclare qu'il devait être à une vitesse maximum de 50 km/h, qu'il a commencé à s'engager dans une courbe à droite et qu'il a vu arriver, face à lui, un bus qui avait entamé son virage en même temps que lui et qu'il s'est inquiété, pensant qu'il allait vite pour ce type de route; qu‘il indique qu'il se trouvait au milieu de sa voie de circulation, qu'il s'est penché sur la droite afin de prendre son virage comme il faut, qu'il a vu que le bus se déportait d'au moins 50 cm sur sa voie et qu'il avait alors compris qu'il allait le toucher; qu'il déclare que la roue du bus dépassait largement la ligne blanche sur sa voie de circulation et qu'il a essayé, en vain, d'éviter le choc en serrant sur sa droite mais que le choc était inévitable, ayant toutefois réussi à éviter le choc frontal; que l'audition des passagers du bus n'apporte pas d'éléments déterminants sur les circonstances de la collision si ce n'est la remarque de deux d'entre eux selon laquelle ils pensent que ce genre de bus est trop grand pour cette route et que le chauffeur est obligé dans les virages de mordre sur le côté opposé; que sur le croquis établi par les gendarmes, le point de choc présumé est matérialisé à peu près sur la ligne médiane très légèrement dans le sens de circulation de M. X... ce qui vient pour partie confirmer sa déclaration selon laquelle le bus aurait mordu sur sa propre voie de circulation mais démontre aussi qu'il ne tenait pas complètement sa droite contrevenant ainsi aux dispositions de l'article R 412-9 du code de la route qui prescrivent qu'en marche normale, tout conducteur doit maintenir son véhicule près du bord droit de la chaussée, autant que lui permet l'état ou le profil de celle-ci; qu'en l'espèce, compte tenu de la configuration des lieux, s'agissant d'une route de montagne, où on peut s'attendre à croiser des véhicules de grande dimension tels que le bus qu'il a croisé, sinueuse et sans visibilité importante à l'endroit où s'est produit l'accident, M. X... se devait en abordant le virage de serrer sur sa droite ce que manifestement il n'a pas fait puisque le point de choc a été matérialisé à proximité de la ligne médiane; que si M. X... avait tenu sa droite, l'accident ne se serait pas produit et il est donc établi à son encontre une faute de conduite ayant concouru à la survenance de l'accident; que par ailleurs, il a été retenu par les gendarmes à son encontre l'infraction de conduite d'un véhicule en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants; que le prélèvement opéré sur sa personne lors de l'accident a mis en effet en évidence un taux de tétrahydrocannabinol (THC) de 2,06 ug/l et celui d'acide tétrahydrocannabinol- carboxylique (THC-COOH) de 11,60 ug/l; que ce prélèvement a été effectué en vertu d'une réquisition désignant le médecin de garde au service de réanimation du CHU de 1'hôpital St Roch à Nice ce qui suffit à établir qu'il a été fait par un médecin et par ailleurs, le dosage a été opéré par le docteur E..., médecin biologiste et expert près la cour d'appel, ainsi qu'il ressort du tampon figurant sur les documents en vertu d'une réquisition judiciaire le désignant nommément; que le résultat de ce dosage n'est pas incompatible avec le taux nul de tétrahydrocannabinol (11-OH- THC) et il est constant qu'une concentration de THC supérieur à 1 ug/l dans le sang est considérée comme la preuve d'une prise récente de cannabis remontant à moins de trois heures et d 'une influence sur la conduite du véhicule; qu'il est par ailleurs bien précisé sur le document établi par le docteur E... que les valeurs obtenues pour le 11-OH - THC et le THC-COOH sont compatibles avec cette interprétation; que les observations de M. X... pour contester ce résultat, observations tardives alors qu'il avait la possibilité de solliciter à l'époque une contre-expertise, sont donc inopérantes et viennent contredire ses déclarations selon lesquelles il n'avait pas consommé de cannabis depuis deux jours; qu'il n'est pas douteux que l'intoxication de M. X... au cannabis au moment de l'accident a eu une influence sur son attention et ses réflexes et explique sa manœuvre inadaptée ayant consisté à aborder ce virage sans précaution suffisante et sans serrer sur la droite; que le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu que M. X... avait commis une faute de nature à limiter son droit à indemnisation dans une proportion qu'il ajustement fixée à 50 % eu égard à l'importance de sa faute (arrêt attaqué p. 8 al. 3 à 15, p. 9 al. 1 à 11);

1°) ALORS QUE le conducteur victime d'un accident dont le point de choc avec le véhicule arrivant en sens inverse se situe à l'intérieur de son propre couloir de circulation ne commet aucune faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice; que la Cour d'appel qui a constaté que le car de la société Véolia avait débordé de la ligne médiane et que le véhicule de M. X... arrivant en sens inverse se trouvait à l'intérieur de son couloir de circulation, ne pouvait dès lors pas retenir qu'il aurait commis une faute de nature à diminuer son droit à indemnisation pour n'avoir pas serré plus à droite, sans violer l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985;

2°) ALORS QUE pour décider de limiter ou d'exclure l'indemnisation du conducteur victime d'un accident de la circulation, le juge doit relever que la faute retenue à son encontre a eu un rôle causal; que le fait relevé par la Cour d'appel qu'une analyse médicale ait constaté un taux de tétrahydrocannabinol de 2,06 µg/l sur M. X... qui roulait dans son couloir de circulation au moment du choc, ne pouvait pas constituer une faute en relation de causalité avec l'accident ; qu'en décidant néanmoins que l'intoxication de M. X... au cannabis avait eu une influence sur ses réflexes et expliquait qu'il n'ait pas serré sa droite, ce qui n'était pas une faute puisqu'il était resté dans son couloir de circulation, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985;

3°) ALORS QUE les juges ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en énonçant «il est constant qu'une concentration de THC supérieur à 1 ug/l dans le sang est considérée comme la preuve d'une prise récente de cannabis remontant à moins de trois heures et d'une influence sur la conduite du véhicule» sans exposer concrètement les circonstances de fait ou les éléments de preuve permettant de justifier une telle affirmation en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985;

4°) ALORS QUE M. X... avait démontré que l'épreuve de dépistage de contamination au cannabis était irrégulière car pratiquée avec un prélèvement de 4 ml de sang seulement là où l'arrêté ministériel du 5 septembre 2001 dans sa rédaction issue de l'arrêté du 31 juillet 2008 impose un prélèvement de 10 ml de sang, ce qui avait faussé les analyses en augmentant artificiellement le taux de tétrahydrocannabinol dans le sang au-delà des limites fixées par l'arrêté ministériel; qu'en se bornant à énoncer que le résultat du dosage n'est pas incompatible avec le taux nul de tétrahydrocannabinol et qu'il est constant qu'une concentration de THC supérieur à 1 µg/l dans le sang est considérée comme la preuve d'une prise récente de cannabis remontant à moins de trois heures sans répondre au moyen des conclusions mettant en cause une autre irrégularité du prélèvement litigieux ayant faussé les résultats tirée d'un prélèvement de sang notoirement insuffisant, la cour d'appel violé l'article 455 du code de procédure civile;

5°) ALORS QUE, selon les dispositions de l'article R 235-11 du code de la route dans sa rédaction antérieure au décret du 24 août 2016, le conducteur, qui a fait l'objet d'un dépistagede produits stupéfiants se révélant positif, est en droit de demander à la juridiction de jugement une expertise ou examen technique de contrôle ou une recherche de médicaments psychoactifs, sans qu'un délai ne lui soit légalement imparti à peine de forclusion; qu'en énonçant que la contestation par M. X... des résultats de l'épreuve de dépistage de l'intoxication au cannabis était «tardive alors qu'il avait la possibilité de solliciter à l'époque une contre-expertise», la cour d'appel a violé l'article R 235-11 du code de la route.

Second moyen de cassation

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir réduit par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 le droit à indemnisation de M. X... de moitié, d'avoir fixé le préjudice corporel global à la somme de 924724,24 € et d'avoir limité la condamnation de la compagnie Aig Europe à une indemnisation de 225033,30 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015 sur la somme de 73465 € et à compter de la date de l'arrêt sur la somme de 151568,30 €;

AUX MOTIFS QUE le rapport d'expertise établi par le docteur F... sur la base duquel les parties s'accordent pour évaluer le préjudice de M. X... mentionne qu'à la suite de l'accident dont il a été victime, il a présenté- une fracture du fémur gauche tiers moyen pluri fragmentaire ouverte de stade 1 traitée par enclouage verrouillé réalisé le 18 janvier 2011, - une amputation traumatique de la jambe gauche, le moignon ayant dû être retouché le 22 février 2012. - une fracture séparation peu déplacée du plateau tibial externe gauche traité orthopédiquement.; que les conséquences médico-légales de l'accident pour M. X... s'établissent comme suit : -déficit fonctionnel temporaire total du 31 août 2010 au 20 janvier 2011, date de sortie de l'hospitalisation aux Massues puis du 21 février 2012 au 9 mars 2012, nouvelle hospitalisation pour retouche du moignon" - déficit fonctionnel temporaire partiel à 75 % du 21 janvier 2011 au 31 mars 2011, soit 2 mois et une semaine, - déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % du 1er avril 20 Il au 20 février 2012, soit un peu moins de 11 mois, - déficit fonctionnel temporaire partiel à 35 % du 21 février 2012 au 9 juillet 2014, - date de consolidation médico-légale 9 juillet 2014, - interruption totale de l'activité de travail du jour de l'accident au 19 juin 2012, date de la première expertise, - 1. X... a besoin d'une assistance par tierce personne (difficultés à faire ses courses, porter des poids, s'occuper des enfants, faire sa toilette,) à raison de trois heures par jour du 1er avril 2011 au 20 février 2012 puis de deux heures par jour jusqu'à la date de la consolidation du 9 juillet 2014, puis une heure 30 ensuite et peut être à réévaluer secondairement ,- déficit fonctionnel permanent de 35 %,; - au plan professionnel, M. X... ne pourra pas reprendre son métier de cuisinier, il ne pourra pas marcher en portant des objets lourds et devra se reconvertir dans un métier sédentaire, - souffrances endurées 4,5/7, - préjudice esthétique temporaire 4/7, - préjudice esthétique définitif du fait de l'amputation 3/7, - préjudice sexuel pas de préjudice morphologique (pas d'atteinte à l'appareil uro-génital) mais M. X... se plaint de la limitation de certains actes, - existence d'un préjudice d'agrément pour les sports de loisirs; que ces conclusions médico-légales méritent de servir de base à l'évaluation du préjudice de M. X... qui s'évalue comme suit : Préjudices Patrimoniaux : - dépenses de santé actuelles: 110479,64 €, selon le décompte de la société AXA France, assureur loi de l'employeur de M. X... ayant versé des prestations au titre de cet accident, le montant des frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation réglés au titre de l'accident s'élève à 110479,64 €; que M. X... ne sollicite rien au titre de ce poste. - frais divers: 1300,00 €; qu'ils sont représentés par les honoraires d'assistance à expertise par le docteur G..., médecin conseil ayant assisté M. X... lors des opérations d'expertise, soit 550 € et 750 € au VII des factures produites, soit au total 1.300€; que ces dépenses supportées par la victime, nées directement et exclusivement de l'accident, sont par la même indemnisables: - assistance par une tierce personne avant consolidation: 42928,00 €; la nécessité de la présence auprès de M. X... d'une tierce personne n'est pas contestée dans son principe ni son étendue pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d'autonomie mais elle reste discutée dans son coût; que l'expert précise que M. X... a eu besoin d'une assistance par tierce personne à raison de trois heures par jour du 1er avril 20 Il au 20 février 2012, puis de deux heures par jour jusqu'à la date de la consolidation; que la compagnie AIG Europe dont l'appel était limité aux seules dispositions relatives aux condamnations profitant à la société AXA France en sa qualité d'assureur loi, n'est pas recevable à discuter les dispositions du jugement en ce qu'il a refusé de réserver ce poste de préjudice au motif que la victime n'aurait pas justifié de l'éventuel versement d'une prestation de compensation du handicap; que M. X... indique d'ailleurs qu'il ne perçoit pas une telle prestation et en tout état de cause, cette prestation ne donne pas lieu à recours subrogatoire et n'a pas à être imputée sur l'indemnité réparant l'intégrité de la victime; que le jugement est donc confirmé en ce qu'il a statué sur ce poste de préjudice; qu'eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, des tarifs d'aide à domicile en vigueur dans la région, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire moyen de 16 €; que l''indemnité de tierce personne s'établit donc comme suit : - 1er avril 2011 au 20 février 2012 (- 10 jours d'hospitalisation): soit 3 heures par jour pendant 315 jours = 315 x 16 x 3 = 15120 € - 21 février 2012 au 9 juillet 2014 : soit 2 heures par jour pendant 869 jours = 869 x 16 x 2 = 27808 € soit un total de : 42928 € ; - perte de gains professionnels actuels 45678,00 €; que ce poste doit être indemnisé au regard de la preuve d'une perte effective de revenus et la période à indemniser s'étend du jour de l'accident à la date de la consolidation, soit 46 mois; que M. X... travaillait avant l'accident en qualité de cuisinier dans le cadre de contrats d'intérim; que le tribunal pour calculer ce poste de préjudice a justement pris en compte les salaires perçus par M. X... au cours des 14 derniers mois avant l'accident, et non pas les deux seuls mois précédents qui ne sont pas représentatifs de ses revenus habituels, ce qui correspond à un revenu mensuel net moyen de 993 € et rapporté à la période considérée à 45678 €. - assistance par une tierce personne après consolidation : 332505,60 €; que l'expert retient un besoin d'assistance par tierce personne postérieurement à la consolidation à raison d'une heure 30 en indiquant, en réponse à un dire présenté par l'assureur, qu'elle sera peut-être à réévaluer secondairement dans une période de cinq ans en raison d'une amélioration de l'autonomie de la victime; qu'outre le fait que l'expert n'est pas catégorique sur ce point, il ne précise pas sur un plan médical en quoi l'état de la victime pourrait s'améliorer et le principe de la réparation intégral du préjudice s'oppose à une limitation dans le temps de cette indemnisation; qu'il convient dès lors, réformant le jugement sur ce point, de capitaliser ce besoin en aide humaine à titre viager; qu'après capitalisation à titre viager sur la base du barème publié par la Gazette du Palais du 26 avril 2016 (taux d'intérêt 1,04 %) dont l'application est sollicitée par M. X... et qui apparait le plus approprié eu égard aux données démographiques et économiques actuelles, il revient à la victime de ce chef, et selon le mode de calcul qu'elle propose, la somme de 332505,60 € calculée comme suit: dépense annuelle 16 € x 1,5 x 400 jours tenant compte des jours fériés soit 9600 € x 34,636 (barème à titre viager pour un homme âgé de 34 ans à la consolidation), soit au total 332505,60 €, - perte de gains professionnels futurs : 60000 €; que compte tenu de son absence de formation universitaire, de la conjoncture économique et de ce que le marché du travail serait fermé aux handicapés et au motif qu'un reclassement sur un poste secondaire serait théorique, M. X... sollicite au titre de la perte de gains professionnels futurs une indemnité calculée sur la base d'un salaire mensuel de 1853 € et capitalisée à titre viager; que la compagnie AIG Europe qui estime que M. X... est en mesure de se réorienter et relève que 6 ans après l'accident, il n'a pas entrepris la moindre démarche pour suivre une formation ou trouver un emploi adapté à son handicap offre de l'indemniser dans la limite de 5 années sur la base d'un salaire moyen de 1000 € soit au total 60000 € ; que l'expert retient une inaptitude définitive au métier de cuisinier et indique qu'il ne pourra pas marcher en portant des objets lourds et devra se reconvertir sur un métier secondaire; que toutefois, son état ne lui interdit pas de retrouver un emploi lui procurant un revenu au moins équivalent à celui qu'il percevait avant l'accident soit une moyenne mensuelle de 993 € puisque l'expert retient qu'il peut se reconvertir sur un métier secondaire ; que d'ailleurs, la commission spéciale d'invalidité dans sa réunion du 10 mars 2015 estime que M. X... est apte à un poste sans station debout, ni marche prolongée de type sédentaire, que M. X... est en outre taisant sur les démarches entreprises pour se reconvertir et ne verse aucun justificatif relatif à ses revenus actuels; que la cour confirme en conséquence le jugement en ce qu'il a entériné l'offre de la compagnie AIG Europe d'indemniser ce préjudice par l'allocation d'une somme de 60 000 € représentant, après revalorisation, cinq années du salaire moyen qu'il percevait avant l'accident. - incidence professionnelle : 150000 €; que ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap qu'il est incontestable que compte tenu de l'importance de son handicap, notamment la perte d'une jambe, M.. X... ne pourra retravailler qu'au prix d'efforts importants; qu'il a été contraint d'abandonner son métier de cuisinier qu'il ne pourra plus exercer et se trouve dans l'obligation de se reconvertir; que son handicap va nécessairement limiter ses perspectives d'orientation professionnelle et induire une dévalorisation sur le marché du travail; qu'il est ainsi justifié d'une incidence professionnelle importante qui n'est d'ailleurs pas discutée en son principe et compte tenu de son âge au jour de la consolidation, soit 34 ans, la cour estime que ce poste de préjudice sera plus justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 150000 € (arrêt attaqué p. 9 dernier alinéa, p. 10, 11, 12, 13 al. 1, 2);

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. Anthony X... expose que l'expert judiciaire a indiqué dans son rapport qu'il n'était plus en mesure de reprendre son métier de cuisinier et demande au tribunal de prendre en compte son inaptitude totale et définitive à ce métier pour fixer ce poste de préjudice par capitalisation d'une perte de revenus calculée sur un salaire antérieur mensuel de 1737 €, ce qui représente, selon ses calculs, une sonne de 697190,11 € dont il convient de déduire le capital constitution de la rente AT réglée par l'assureur-loi à hauteur de la somme de 461159,26 €; que la Compagnie d'assurances Aig Europe conclut que, malgré son handicap, M. Anthony X... est en mesure de réussir sa réorientation professionnelle, compte tenu de son âge au jour de sa consolidation, en suivant une formation qualifiante pouvant lui permettre de retrouver à terme un emploi avec un salaire équivalent à celui qu'il percevait auparavant, notamment dans le cadre de la politique mise en œuvre en application de la loi du Il février 2005 imposant une obligation d'emploi de personnes handicapées à hauteur de 6 % de l'effectif total des établissements publics ou privés d'au moins 20 salariés; que l'assureur fait valoir que, cinq ans après l'accident, M. Anthony X... n'a entrepris aucune démarche pour suivre une formation ou trouver un emploi adapté à son handicap et, si cela peut se comprendre compte tenu des blessures subies, cette situation ne peut pas indéfiniment se prolonger; que pour ces raisons, la Compagnie d'assurances Aig Europe offre tout de même de prendre en charge une perte de revenus professionnels temporaire de 5 ans sur la base d'un salaire mensuel net de 1000 euros; que le tribunal relève que l'expert judiciaire a indiqué dans son rapport que M. Anthony X... ne pourra pas reprendre son métier de cuisinier car il ne pourra pas marcher en portant des objets lourds et qu'il est certain qu'il devra se reconvertir pour un métier sédentaire ; qu'il doit en être déduit que M. Anthony X... ne présente aucune inaptitude générale et totale mais seulement une inaptitude à son métier antérieur de cuisinier et aussi à tous ceux exigeant de pouvoir porter des choses lourdes et qu'en conséquence, il peut bénéficier d'une reconversion professionnelle dans des métiers sédentaires; que M. Anthony X... soutient que sa reconversion professionnelle reste purement théorique mais non réalisable en raison de la nature de son handicap et de la conjoncture économique actuelle et verse aux débats une analyse de l'INSEE qui concerne spécifiquement la situation des handicapés en Guadeloupe qui ne peut raisonnablement être invoquée pour illustrer ses difficultés personnelles à retrouver une activité professionnelle compatible avec son handicap; que toutefois, le tribunal constate que M. Anthony X... ne justifie d'aucune démarche pour bénéficier d'une formation de reconversion professionnelle, alors que le PV de la commission Spéciale réunie le 10 mars 2015 évoque le principe de sa reconversion compatible avec son handicap; que M. Anthony X... n'a pas versé aux débats ses déclarations de revenus des années 2014 et les justificatifs de ses revenus en 2015; qu'en conséquence, M. Anthony X... sera débouté de sa demande d'indemnisation du poste de préjudice perte de revenus professionnels futurs mais, compte tenu de la proposition d'indemnisation formulée par la Compagnie d'assurances Aig Europe sur la base de 1000 € par mois pendant cinq ans, il convient d'en donner acte aux parties et de considérer comme satisfactoire son offre correspondant à une indemnisation globale de 60000 € (jugement entrepris p. 17 al. 2 à 6, p. 18 al. 1 à 5);

1°) ALORS QUE l'auteur d'un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables et en conséquence, pour indemniser le préjudice résultant de la perte de gains professionnel futurs, le juge doit envisager les perspectives d'évolution de carrière et de rémunération que la victime, privée de toute possibilité de reprendre sa profession par suite de l'accident, a définitivement perdues; que M. X... avait soutenu dans ses conclusions d'appel que le salaire moyen d'un chef de parti, profession qu'il exerçait avant l'accident, était de 1800 € par mois et qu'il pouvait alors espérer, compte tenu de ses diplômes et de son expérience obtenir un salaire beaucoup plus conséquent de l'ordre de 2900 € environ par une évolution dans sa carrière vers le poste de chef de cuisine; que pour fixer le montant de l'indemnisation de la perte de gains futurs la cour d'appel s'est expressément référée à la moyenne des revenus qu'il percevait avant l'accident qui n'était, selon la cour, que de 993 €; qu'en s'abstenant de fixer la base de calcul de ce chef de préjudice en tenant compte de la perte de chance d'augmentation de rémunération, la cour d'appel privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 ancien du code civil;

2°) ALORS que le juge doit fixer le poste de préjudice correspondant à la perte de gains futurs en actualisant la base de calcul au jour de sa décision ; qu'en l'espèce la cour d'appel s'est fondée exclusivement sur la moyenne de salaires que percevait M. X... avant l'accident; qu'en statuant de la sorte la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, ensemble l'article 1382 du code civil;

3°) ALORS QUE M. X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il n'avait que 30 ans au jour de l'accident et qu'il lui restait de nombreuses années à devoir tenter de retrouver un emploi et qu'en outre il ne pourrait se constituer des droits à retraite équivalents à ceux qu'il aurait eu s'il avait pu continuer d'exercer sa profession; qu'en se bornant à entériner l'offre de la compagnie Aig Europe de 60000 euros en disant qu'elle représente « après revalorisation, cinq années du salaire moyen qu'il percevait avant l'accident», sans répondre à ce moyen des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile;

4°) ALORS QUE M. X... avait soutenu dans ses conclusions d'appel que son salaire mensuel moyen avant l'accident était de 1737 euros et que c'était ce montant qui avait été retenu pour la fixation des indemnités journalières par l'assureur-loi; qu'il versait aux débats notamment ses bulletins de salaire des mois de juin, juillet et août 2010, soit les trois mois précédant l'accident pour des montants de salaires nets respectivement de 2021 €, 1736,57 € et de 1399,92 €, soit une moyenne de 1719,32 €; qu'en décidant de fixer sur la base d'une moyenne de salaire de 993 € le montant de l'indemnité due au titre de la perte de gains futurs avec la précision qu'il s'agissait du revenu «équivalent à celui qu'il percevait avant l'accident», la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des trois bulletins de salaire versés aux débats en violation de l'article 1134 ancien du code civil.
MOYEN PRODUIT AU POURVOI PROVOQUE par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR réduit, par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, le droit à indemnisation de Monsieur X... de moitié, d'avoir fixé le préjudice corporel global à la somme de 924 724,24 € et d'avoir limité la condamnation de la compagnie AIG Europe à une indemnisation de 225 033,30 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015 sur la somme de 73 465 € et à compter de la date de l'arrêt sur la somme de 151 568,30 € ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet d'exclure ou de réduire l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; qu'en l'espèce, l'implication du véhicule assuré par la compagnie AIG Europe n'est pas discutée. Selon le procès-verbal de gendarmerie établi ensuite de l'accident, un car assurant la ligne 16 la Turbie – Nice, circulant en direction de la Trinité, alors qu'il sortait d'une courbe à gauche, est entré en collision avec le scooter piloté par M. X..., lequel circulait en sens inverse ; que le pilote du scooter qui a évité le choc frontal a tapé le côté gauche du bus, a été déséquilibré et est tombé sur le côté droit de son engin ; que selon M. D..., conducteur du bus, lorsqu'il a emprunté la courbe à gauche, il se trouvait plis à droite sur sa voie et était presque collé à la paroi en raison d'un angle mort sur le bus l'obligeant à serrer à droite ; qu'il déclare qu'il était quasiment sorti de la courbe lorsqu'il a vu arriver sur lui de la gauche, le scooter, qui selon lui aurait dû être en phase de virage, c'est-à-dire penché, traverser la chaussée et venir percuter violemment le bus à hauteur de l'essieu avant gauche ; qu'il estime la vitesse du deux roues au moment de l'impact à 70-80 km/h, la sienne à 30-40 km/h et précise qu'aucun des deux conducteurs n'a freiné ; qu'il considère que l'accident est dû à une mauvaise visibilité du pilote qui avait le soleil en face et pense qu'il a mal apprécié la situation sur la chaussée ; que selon le chrono tachygraphe du bus, le dernier enregistrement de sa vitesse fait état de 51 km/h au moment de l'accident ; que de son côté, M. X... déclare qu'il devait être à une vitesse maximum de 50 km/h, qu'il a commencé à s'engager dans une courbe à droite et qu'il a vu arriver, face à lui, un buis qui avait entamé son virage en même temps que lui et qu'il s'en est inquiété, pensant qu'il allait vite pour ce type de route ; qu'il indique qu'il se trouvait au milieu de sa voie de circulation, qu'il s'est penché sur la droite afin de prendre son virage comme il faut, qu'il a vu que le bus se déportait d'au moins 50 cm sur sa voie et qu'il avait alors compris qu'il allait le toucher ; qu'il déclare que la roue du bus dépassait largement la ligne blanche sur sa voie de circulation et qu'il a essayé, en vain, d'éviter le choc en serrant sur sa droite mais que le choix était inévitable, ayant toutefois réussi à éviter le choc frontal ; que l'audition des passagers du bus n'apporte pas d'éléments déterminants sur les circonstances de la collision si ce n'est la remarque de deux d'entre eux selon laquelle ils pensent que ce genre de bus est trop grand pour cette route et que le chauffeur est obligé dans les virages de mordre sur le côté opposé ; que sur le croquis établi par les gendarmes, le point de choc présumé est matérialisé à peu près sur la ligne médiane très légèrement dans le sens de circulation de M. X... ce qui vient pour partie confirmer sa déclaration selon laquelle le bus aurait mordu sur sa propre voie de circulation amis démontre aussi qu'il ne tenait pas complétement sa droite contrevenant ainsi aux dispositions de l'article R. 412-9 du code de la route qui prescrivent qu'en marche normale, tout conducteur doit maintenir son véhicule près du bord droit de la chaussée, autant que lui permet l'état ou le profil de celle-ci ; qu'en l'espèce, compte tenu de la configuration des lieux, s'agissant d'une route de montagne, où on peut s'attendre à croiser des véhicules de grande dimension tels que le bus qu'il a croisé, sinueuse et sans visibilité importante à l'endroit où s'est produit l'accident, M. X... se devait en abordant le virage de serrer sur sa droite ce que manifestement il n'a pas fait puisque le point de choc a été matérialisé à proximité de la ligne médiane ; que si M. X... avait tenu sa droite, l'accident ne se serait pas produit et il est donc établi à son encontre une faute de conduite ayant concouru à la survenance de l'accident ; que par ailleurs, il a été retenu par les gendarmes à son encontre l'infraction de conduite d'un véhicule en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants ; que le prélèvement opéré sur sa personne lors de l'accident a mis en effet en évidence un taux de tétrahydrocannabino (THC) de 2,06 ug/l et celui d'acide tétrahydrocannabinol-carboxylique (THC-COOH) de 11,60 ug/l ; que ce prélèvement a été effectué en vertu d'une réquisition désignant le médecin de garde au service de réanimation du CHU de l'hôpital St Roch à Nice ce qui suffit à établir qu'il a été fait par un médecin et par ailleurs, le dosage a été opéré par le docteur E..., médecin biologiste et expert près la cour d'appel, ainsi qu'il ressort du tampon figurant sur les documents en vertu d'une réquisition judiciaire le désignant nommément ; que le résultat de ce dosage n'est pas incompatible avec le taux nul de tétrahydrocannabinol (11-OH-THC) et il est constant qu'une concentration de THC supérieur à 1 ug/l dans le sang est considérée comme la preuve d'une prise récente de cannabis remontant à moins de trois heures et d'une influence sur la conduite du véhicule ; qu'il est par ailleurs bien précisé sur le document établi par le docteur E... que les valeurs obtenues pour le OH-THC et le THC-CCCO sont compatibles avec cette interprétation ; que les observations de M. X... pour contester ce résultat, observations tardives alors qu'il avait la possibilité de solliciter à l'époque une contre-expertise, sont donc inopérantes et viennent contredire ses déclarations selon lesquelles il n'avait pas consommé de cannabis depuis deux jours ; qu'il n'est pas douteux que l'intoxication de M. X... au cannabis au moment de l'accident a eu une influence sur son attention et ses réflexes et explique sa manoeuvre inadaptée ayant consisté à aborder de virage sans précaution suffisante et sans serrer sur la droite ; que le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu que M. X... avait commis une faute de nature à limiter son droit à indemnisation dans une proportion qu'il a justement fixée à 50 % eu égard à l'importance de sa faute ;

1) ALORS QUE la cour d'appel qui a constaté que le car de la société VEOLIA avait débordé de la ligne médiane et que le véhicule de Monsieur X... arrivant en sens inverse se trouvait à l'intérieur de son couloir de circulation, ne pouvait dès lors pas retenir qu'il aurait commis une faute de nature à diminuer son droit à indemnisation pour n'avoir pas serré plus à droite, sans violer l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

2) ALORS QUE le fait relevé par la cour d'appel qu'une analyse médicale ait constaté un taux de tétrahydrocannabinol de 2,06 ug/l sur Monsieur X... qui roulait dans son couloir de circulation au moment du choc, ne pouvait pas constituer une faute en relation de causalité avec l'accident ; qu'en décidant néanmoins que l'intoxication de Monsieur X... au cannabis avait eu une influence sur ses réflexes et expliquait qu'il n'ait pas serré sa droite, ce qui n'était pas une faute puisqu'il était resté dans son couloir de circulation, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

3) ALORS QU'en énonçant « il est constant qu'une concentration de THC supérieur à 1ug/l dans le sang est considérée comme la preuve d'une prise récente de cannabis remontant à moins de trois heures et d'une influence sur la conduite du véhicule » sans exposer concrètement les circonstances de fait ou les éléments de preuve permettant de justifier une telle affirmation en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la loi de 1985.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR réduit, par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, le droit à indemnisation de Monsieur X... de moitié, d'avoir fixé le préjudice corporel global à la somme de 924 724,24 € et d'avoir limité la condamnation de la compagnie AIG Europe à une indemnisation de 225 033,30 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015 sur la somme de 73 465 € et à compter de la date de l'arrêt sur la somme de 151 568,30 € ;

AUX MOTIFS QUE le rapport d'expertise établi par le docteur F... sur la base duquel les parties s'accordent pour évaluer le préjudice de M. X... mentionne qu'à la suite de l'accident dont il a été victime, il a présenté - une fracture du fémur gauche tiers moyen pluri fragmentaire ouverte de stade 1 traitée par enclouage verrouillé réalisé le 18 janvier 2011 - une amputation traumatique de la jambe gauche, le moignon ayant dû être retouché le 22 février 2012 - une fracture séparation peu déplacée du plateau tibial externe gauche traité orthopédiquement ; que les conséquences médico-légales de l'accident pour M. X... s'établissent comme suit : déficit fonctionnel temporaire total du 31 août 2010 au 20 janvier 2011, date de sortie de l'hospitalisation aux Massues puis du 21 février 2012 au 9 mars 2012, nouvelle hospitalisation pour retouche du moignon - déficit fonctionnel temporaire partiel à 75 % du 21 janvier 2011 au 31 mars 2011, soit 2 mois et une semaine - déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % du 1er avril 2011 au 20 février 2012, soit un peu moins de 11 mois - déficit fonctionnel temporaire partiel à 35 % du 21 février 2012 au 9 juillet 2014 - date de consolidation médico-légale 9 juillet 2014 - interruption totale de l'activité de travail du jour de l'accident au 19 juin 2012, date de la première expertise - M. X... a besoin d'une assistance par tierce personne (difficultés à faire ses courses, porter des poids, s'occuper des enfants, faire sa toilette) à raison de trois heures par jour du 1er avril 2011 au 20 février 2012 puis de deux heures par jour jusqu'à la date de la consolidation du 9 juillet 2014, puis une heure 30 ensuite et peut être à réévaluer secondairement - déficit fonctionnel permanent de 35 % - au plan professionnel, M. X... ne pourra pas reprendre son métier de cuisinier, il ne pourra pas marcher en portant des objets lourds et devra se reconvertir dans un métier sédentaire - souffrances endurées 4,5/7 – préjudice esthétique temporaire 4/7 - préjudice esthétique définitif du fait de l'amputation 3/7 - préjudice sexuel pas de préjudice morphologique (pas d'atteinte à l'appareil uro-génital) mais M. X... se plaint de la limitation de certains actes - existence d'un préjudice d'agrément pour les sports de loisirs ; que ces conclusions médico-légales méritent de servir de base à l'évaluation du préjudice de M. X... qui s'évalue comme suit : Préjudices patrimoniaux : dépenses de santé actuelles : 110 479,64 €, selon le décompte de la société AXA France, assureur loi de l'employeur de M. X... ayant versé des prestations au titre de cet accident, le montant des frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation réglés au titre de l'accident s'élève à 110 479,64 € ; que M. X... ne sollicite rien au titre de ce poste - frais divers : 1 300 € ; qu'ils sont représentés par les honoraires d'assistance à expertise par le docteur G..., médecin conseil ayant assisté M. X... lors des opérations d'expertise, soit 550 € et 750 € au VII des factures produites, soit au total 1 300 € ; que ces dépenses supportées par la victime, nées directement et exclusivement de l'accident, sont par là même indemnisables ; assistance par une tierce personne avant consolidation : 42 928 € ; la nécessité de la présence auprès de M. X... d'une tierce personne n'est pas contestée dans son principe ni son étendue pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d'autonomie mais elle reste discutée dans son coût ; que l'expert précise que M. X... a eu besoin d'une assistance par tierce personne à raison de trois heures par jour du 1er avril 2011 au 20 février 2012, puis de deux heures par jour jusqu'à la date de la consolidation ; que la compagnie AIG Europe dont l'appel était limité aux seules dispositions relatives aux condamnations profitant à la société AXA France en sa qualité d'assureur loi, n'est pas recevable à discuter les dispositions du jugement en ce qu'il a refusé de réserver ce poste de préjudice au motif que la victime n'aurait pas justifié de l'éventuel versement d'une prestation de compensation du handicap ; que M. X... indique d'ailleurs qu'il ne perçoit pas une telle prestation et en tout état de cause, cette prestation ne donne pas lieu à recours subrogatoire et n'a pas à être imputée sur l'indemnité réparant l'intégrité de la victime ; que le jugement est donc confirmé en ce qu'il a statué sur ce poste de préjudice ; qu'eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, des tarifs d'aide à domicile en vigueur dans la région, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire moyen de 16 € ; que l''indemnité de tierce personne s'établit donc comme suit : - 1er avril 2011 au 20 février 2012 (- 10 jours d'hospitalisation): soit 3 heures par jour pendant 315 jours = 315 x 16 x 3 = 15 120 € - 21 février 2012 au 9 juillet 2014 : soit 2 heures par jour pendant 869 jours = 869 x 16 x 2 = 27 808 € soit un total de : 42 928 € ; - perte de gains professionnels actuels 45 678,00 € ; que ce poste doit être indemnisé au regard de la preuve d'une perte effective de revenus et la période à indemniser s'étend du jour de l'accident à la date de la consolidation, soit 46 mois ; que M. X... travaillait avant l'accident en qualité de cuisinier dans le cadre de contrats d'intérim ; que le tribunal pour calculer ce poste de préjudice a justement pris en compte les salaires perçus par M. X... au cours des 14 derniers mois avant l'accident, et non pas les deux seuls mois précédents qui ne sont pas représentatifs de ses revenus habituels, ce qui correspond à un revenu mensuel net moyen de 993 € et rapporté à la période considérée à 45 678 €. - assistance par une tierce personne après consolidation : 332 505,60 € ; que l'expert retient un besoin d'assistance par tierce personne postérieurement à la consolidation à raison d'une heure 30 en indiquant, en réponse à un dire présenté par l'assureur, qu'elle sera peut-être à réévaluer secondairement dans une période de cinq ans en raison d'une amélioration de l'autonomie de la victime ; qu'outre le fait que l'expert n'est pas catégorique sur ce point, il ne précise pas sur un plan médical en quoi l'état de la victime pourrait s'améliorer et le principe de la réparation intégral du préjudice s'oppose à une limitation dans le temps de cette indemnisation ; qu'il convient dès lors, réformant le jugement sur ce point, de capitaliser ce besoin en aide humaine à titre viager ; qu'après capitalisation à titre viager sur la base du barème publié par la Gazette du Palais du 26 avril 2016 (taux d'intérêt 1,04 %) dont l'application est sollicitée par M. X... et qui apparait le plus approprié eu égard aux données démographiques et économiques actuelles, il revient à la victime de ce chef, et selon le mode de calcul qu'elle propose, la somme de 332 505,60 € calculée comme suit: dépense annuelle 16 € x 1,5 x 400 jours tenant compte des jours fériés soit 9 600 € x 34,636 (barème à titre viager pour un homme âgé de 34 ans à la consolidation), soit au total 332 505,60 €, - perte de gains professionnels futurs : 60 000 € ; que compte tenu de son absence de formation universitaire, de la conjoncture économique et de ce que le marché du travail serait fermé aux handicapés et au motif qu'un reclassement sur un poste secondaire serait théorique, M. X... sollicite au titre de la perte de gains professionnels futurs une indemnité calculée sur la base d'un salaire mensuel de 1 853 € et capitalisée à titre viager ; que la compagnie AIG Europe qui estime que M. X... est en mesure de se réorienter et relève que 6 ans après l'accident, il n'a pas entrepris la moindre démarche pour suivre une formation ou trouver un emploi adapté à son handicap offre de l'indemniser dans la limite de 5 années sur la base d'un salaire moyen de 1 000 € soit au total 60 000 € ; que l'expert retient une inaptitude définitive au métier de cuisinier et indique qu'il ne pourra pas marcher en portant des objets lourds et devra se reconvertir sur un métier secondaire ; que toutefois, son état ne lui interdit pas de retrouver un emploi lui procurant un revenu au moins équivalent à celui qu'il percevait avant l'accident soit une moyenne mensuelle de 993 € puisque l'expert retient qu'il peut se reconvertir sur un métier secondaire ; que d'ailleurs, la commission spéciale d'invalidité dans sa réunion du 10 mars 2015 estime que M. X... est apte à un poste sans station debout, ni marche prolongée de type sédentaire, que M. X... est en outre taisant sur les démarches entreprises pour se reconvertir et ne verse aucun justificatif relatif à ses revenus actuels ; que la cour confirme en conséquence le jugement en ce qu'il a entériné l'offre de la compagnie AIG Europe d'indemniser ce préjudice par l'allocation d'une somme de 60 000 € représentant, après revalorisation, cinq années du salaire moyen qu'il percevait avant l'accident. - incidence professionnelle : 150 000 € ; que ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap qu'il est incontestable que compte tenu de l'importance de son handicap, notamment la perte d'une jambe, M. X... ne pourra retravailler qu'au prix d'efforts importants ; qu'il a été contraint d'abandonner son métier de cuisinier qu'il ne pourra plus exercer et se trouve dans l'obligation de se reconvertir ; que son handicap va nécessairement limiter ses perspectives d'orientation professionnelle et induire une dévalorisation sur le marché du travail ; qu'il est ainsi justifié d'une incidence professionnelle importante qui n'est d'ailleurs pas discutée en son principe et compte tenu de son âge au jour de la consolidation, soit 34 ans, la cour estime que ce poste de préjudice sera plus justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 150 000 € (arrêt attaqué p. 9 dernier alinéa, p. 10, 11, 12, 13 al. 1, 2) ;

1) ALORS QUE pour fixer le montant de l'indemnisation de la perte de gains futurs, la cour d'appel s'est expressément référée à la moyenne des revenus que Monsieur X... percevait avant l'accident qui n'était, selon la cour, que de 993 € ; qu'en s'abstenant de fixer la base de calcul de ce chef de préjudice en tenant compte de la perte de chance d'augmentation de rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 ancien du code civil ;

2) ALORS QU'en se fondant exclusivement sur la moyenne de salaires que percevait Monsieur X... avant l'accident, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, ensemble l'article 1382 du code civil ;

3) ALORS QU' en décidant de fixer sur la base d'une moyenne de salaire de 993 € le montant de l'indemnité due au titre de la perte de gains futurs avec la précision qu'il s'agissait du revenu « équivalent à celui qu'il percevait avant l'accident », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des trois bulletins de salaire versés aux débats en violation de l'article 1134 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-22000
Date de la décision : 13/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 sep. 2018, pourvoi n°17-22000


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Ghestin, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.22000
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award