LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 23 février 2017), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 15 janvier 2015, pourvoi n° 13-23.489), que M. X... s'est porté caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit maritime mutuel de Bretagne-Normandie, aux droits de laquelle vient la société DSO-capital (la société), en garantie du remboursement de plusieurs concours financiers consentis à la société Breton les 29 octobre 2004, 12 mai 2005, 5 octobre 2005 et 7 juillet 2006 ; que la société a assigné la caution en paiement ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société une certaine somme au titre des engagements de caution souscrits les 29 octobre 2004 et 12 mai 2005, alors, selon le moyen :
1°/ que, pour apprécier le caractère disproportionné de l'engagement de caution, au moment où celui-ci a été souscrit, le juge doit tenir compte de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant des engagements de caution antérieurs qui ont pu être consentis ; qu'en l'espèce, pour dire non disproportionnés les deux engagements de caution souscrits par M. X... le 29 octobre 2004 et le 12 mai 2005, la cour d'appel s'est bornée à rapprocher le montant de ces deux engagements, pourtant non concomitants, de la situation patrimoniale de M. X... telle qu'elle résultait de ses actifs et revenus en 2005, sans tenir compte de l'endettement cumulé que représentait, lors de la souscription du second cautionnement le 12 mai 2005, celui qui avait été précédemment consenti en octobre 2004 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation ;
2°/ que, pour apprécier le caractère disproportionné de l'engagement de caution, au moment où celui-ci a été souscrit, le juge doit tenir compte de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant des engagements de caution antérieurs qui ont pu être consentis ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que lors de la souscription du second cautionnement du 12 mai 2005, l'endettement global de M. X..., résultant des deux engagements de caution souscrits les 29 octobre 2004 et 12 mai 2005 représentait 186 000 euros tandis que ses avoirs mobiliers et immobiliers ne s'élevaient qu'à la somme de 166 944 euros, ce dont il résultait que les engagements de caution, supérieurs aux avoirs, étaient manifestement disproportionnés aux biens et revenus de M. X... ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a implicitement mais nécessairement pris en considération l'engagement de caution souscrit le 29 octobre 2004 pour apprécier la disproportion éventuelle de celui consenti le 12 mai 2005 ;
Attendu, ensuite, que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine, par la cour d'appel, de la disproportion de l'engagement de caution souscrit le 12 mai 2005 ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Sur les deux dernières branches du moyen, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir condamné Monsieur X... au paiement des sommes de 36.000 € en principal, intérêts et frais arrêtés au 28/12/2009 et de 146.497,19 € au titre de l'ouverture de crédit en compte courant correspondant au montant de la créance exigible à la liquidation judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE l'appelant conteste les dispositions qui ont refusé de le décharger de ses engagements de caution en application des dispositions de l'article L 341-4 désormais L 343-4 du Code de la consommation ; qu'il fait valoir que ceux-ci étaient manifestement disproportionnés par rapport à ses biens et revenus eu égard notamment à son endettement immobilier et aux cautionnements successifs ; qu'il est constant que M. A... X... était le gérant et le seul associé de la SARL Breton dont il a racheté les parts sociales en 1999 ; que sa qualité de caution avertie ou profane est toutefois indifférente au regard des dispositions de l'article L 343-4 du Code de la consommation ; qu'il est justifié par l'attestation établie par la Cedem, organisme tenant la comptabilité de la SARL Breton, que M. A... X... a perçu en qualité de gérant, au titre de l'exercice 2004-2005 clos le 31 mars 2005, une rémunération de 33.906 euros soit en moyenne 2825 euros par mois puis, lors de l'exercice suivant, celle de 39.786 euros soit 3315 par mois ; qu'il est, par ailleurs, constant que M. A... X... et son épouse étaient propriétaires indivis, chacun pour moitié, d'une maison d'habitation édifiée sur un terrain acquis en 2002 ; que la propriété incluant une parcelle acquise ultérieurement a été évaluée, selon une attestation notariée en date du 13 septembre 2004, à la somme de 230.000 euros, estimation voisine du prix effectif de la vente intervenue plusieurs années plus tard ; que les époux X... étaient mariés sous le régime de la séparation des biens et il ne peut être tenu compte que de la part indivise de M. A... X... ; qu'il est établi par les actes versés aux débats que ce bien immobilier avait été partiellement financé au moyen de trois prêts d'un montant global de 104.520 euros donnant lieu à des remboursements mensuels de 639,61 euros, le prêt à taux zéro donnant lieu à un différé de remboursement de quinze années ; qu'il restait dû en capital au titre de ces prêts, en octobre 2004, une somme de 96.112 euros ; que la part indivise nette de M. A... X... était donc de 66.944 euros ; que si la proportionnalité ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés des opérations garanties, c'est à juste titre que la banque soutient qu'il doit être tenu compte, au titre des avoirs mobiliers, de la valeur des parts sociales de la SARL Breton, détenues en totalité par M. A... X... ; que ce dernier qui soutient que cette valeur est insignifiante au regard de l'endettement de la société et de la faiblesse des capitaux propres, conteste toute valeur probante au rapport déposé quelques jours avant la clôture des débats par la Banque dont il stigamatise le comportement procédural ; que la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel de Bretagne Normandie verse, en effet, aux débats un avis technique établi par un expert-comptable qu'elle a personnellement mandaté et qui, au vu des pièces comptables produites pour les exercices clos en mars 2005 et 2006, évalue ces parts sociales, selon la méthode utilisée, entre 100.000 euros et 200.000 euros ; que celui-ci émet toutefois des réserves quant à ses conclusions eu égard au caractère très incomplet des informations mises à sa disposition ; qu'il convient de relever qu'il appartient à M. A... X... de prouver l'existence d'une disproportion manifeste et donc de valoriser les éléments de son patrimoine ; or il se borne à produire le bilan arrêté au 30 juin 2006, soit à une date suivant de plus de dix-huit mois son premier engagement de caution ; que par ailleurs, la cotation Banque de France, fixée à G5 en avril 2004, a été ramenée à G3 au vu des documents comptables arrêtés au 31 mars 2005 ; que si le déséquilibre de la structure financière de la société s'est accru en 2006, la SARL Breton bénéficiait jusqu'alors d'une bonne progression de l'activité, d'un chiffre d'affaires important et d'un résultat bénéficiaire ; que ces éléments induisent une valorisation des parts sociales pour les années 2004 et 2005, limitée toutefois à 100.000 euros eu égard aux réserves de l'expert comptable relatives aux méthodes induisant la meilleure valorisation ; qu'il n'est, en revanche, pas établi que M. A... X... ait été titulaire d'une assurance-vie d'un montant de 100.000 euros ; que la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel de Bretagne Normandie qui le soutient, se fonde exclusivement sur la convention d'ouverture de compte courant conclue le 12 juillet 2006 par la SARL Breton, qui prévoit au titre des garanties outre le cautionnement solidaire de M. A... X..., « une délégation d'assurance vie à hauteur de 100.000 euros sur M. X... A... » ; qu'il convient de relever que cette dernière garantie devait être apportée par le cocontractant de la banque, soit la SARL Breton, et non par M. A... X... ; qu'il n'est, par ailleurs, pas allégué que cette délégation ait été effective, ni que ce contrat d'assurance-vie ait été souscrit par M. A... X... ou même par la société au bénéfice de celui-ci ; qu'en outre, l'ouverture de compte courant invoquée est postérieure à l'ensemble des engagements de cautions et la mention qui y est portée est trop imprécise pour retenir que M. A... X... qui l'a certes signé en qualité de gérant, était effectivement titulaire d'une telle assurance ou a faussement déclaré un élément de patrimoine ; que les avoirs mobiliers et immobiliers nets de M. A... X... s'élevaient donc à 166.944 euros et il bénéficiait de revenus mensuels moyens de l'ordre de 2.825 euros puis 3315 euros qui n'étaient grevés, outre les charges courantes, que par les mensualités des prêts immobiliers ; qu'il résulte de ces éléments que les deux premiers engagements de caution, soit 36.000 euros le 29 octobre 2004 puis 150.000 euros le 12 mai 2005 n'étaient pas manifestement disproportionnés aux biens et revenus de M. A... X..., de sorte que les dispositions ayant rejeté la demande de décharge desdits engagements sont confirmées » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Monsieur X... en tant que gérant de la SARL Breton ne pouvait ignorer la réalité et la portée d'un cautionnement ; que de ce fait, Monsieur X... est une caution avertie ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que la SARL Breton connaissait une très bonne rentabilité et qu'il est indéniable au vu de la cotation Banque de France que l'entreprise était à même d'honorer ses engagements financiers ; que Monsieur X... en était l'actionnaire et devait recevoir des revenus supplémentaires à ses émoluments, limitant ainsi les frais des financements consentis par le Crédit Maritime ; que de plus, il disposait de biens et revenus suffisants au jour où les engagements ont été consentis et pour lesquels il s'est porté caution ;
1°/ ALORS QUE pour apprécier le caractère disproportionné de l'engagement de caution, au moment où celui-ci a été souscrit, le juge doit tenir compte de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant des engagements de caution antérieurs qui ont pu être consentis ; qu'en l'espèce, pour dire non disproportionnés les deux engagements de caution souscrits par Monsieur X... le 29 octobre 2004 et le 12 mai 2005, la Cour s'est bornée à rapprocher le montant de ces deux engagement, pourtant non concomitants, de la situation patrimoniale de Monsieur X... telle qu'elle résultait de ses actifs et revenus en 2005, sans tenir compte de l'endettement cumulé que représentait, lors de la souscription du second cautionnement le 12 mai 2005, celui qui avait été précédemment consenti en octobre 2004 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article L 341-4 du Code de la consommation, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation
2°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE pour apprécier le caractère disproportionné de l'engagement de caution, au moment où celui-ci a été souscrit, le juge doit tenir compte de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant des engagements de caution antérieurs qui ont pu être consentis ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a elle-même constaté que lors de la souscription du second cautionnement du 12 mai 2005, l'endettement global de Monsieur X..., résultant des deux engagements de caution souscrits les 29 octobre 2004 et 12 mai 2005 représentait 186.000 euros tandis que ses avoirs mobiliers et immobiliers ne s'élevaient qu'à la somme de 166.944 euros, ce dont il résultait que les engagements de caution, supérieurs aux avoirs, étaient manifestement disproportionnés aux biens et revenus de l'exposant ; qu'en jugeant du contraire, la Cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L 341-4 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation ;
3°/ ALORS QUE dans ses écritures d'appel, Monsieur X... faisait valoir que son engagement de caution du 12 mai 2005 d'un montant de 150.000 € n'avait été concrétisé qu'à la date du 12 juillet 2006, date à laquelle ce cautionnement avait été mis en oeuvre pour garantir l'ouverture d'un crédit en compte courant de la SARL Breton, en sorte que c'était à cette date du 12 juillet 2006 que la Cour d'appel devait se placer pour apprécier si cet engagement de caution était ou non disproportionné à ses biens et revenus ; qu'en décidant cependant en l'espèce que cet engagement de caution du 12 mai 2005 n'était pas disproportionné, cependant qu'il résultait de ses propres constatations qu'à cette date, Monsieur X... supportait des engagements de caution d'un montant de 318.000 euros, représentant plus de trois fois le montant de son patrimoine, en sorte que la disproportion entre ses revenus et le cautionnement souscrit était manifeste, la Cour d'appel a une nouvelle fois méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L 341-4 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation ;
4°/ ALORS QUE la disproportion de l'engagement de caution s'apprécie exclusivement au regard des ressources et du patrimoine propre de la caution ; qu'en se fondant, par motifs adoptés, sur la situation économique que connaissait l'entreprise au moment où les divers engagements avaient été souscrits, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant de plus fort sa décision de base légale au regard de l'article L 341-4 du Code de la consommation devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation.